Le Roman d'un spahi
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Le Roman d'un spahi

Pierre Loti

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Le Roman d'un spahi

Pierre Loti

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Über dieses Buch

Le Roman d'un spahi was written in the year 1881 by Pierre Loti. This book is one of the most popular novels of Pierre Loti, and has been translated into several other languages around the world.

This book is published by Booklassic which brings young readers closer to classic literature globally.

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Information

ISBN
9789635258307

DEUXIÈME PARTIE

I

Trois ans avaient passé 
Trois fois Ă©taient revenus le printemps terrible et l’hivernage, trois fois, la saison de la soif avec les nuits froides et le vent du dĂ©sert


Jean dormait, Ă©tendu sur son tara, dans son logis blanc de la maison de Sambat-Hamet ; – son laobĂ© jaune Ă©tait couchĂ© prĂšs de lui, – les pattes de devant allongĂ©es, le museau tendu sur les pattes, la langue pendante et altĂ©rĂ©e, – immobile, avec les yeux ouverts, – ayant l’attitude et l’expression des chacals hiĂ©ratiques dans les temples Ă©gyptiens

Et Fatou-gaye Ă©tait aux pieds de Jean, par terre.
Midi, l’heure silencieuse de la sieste
 Il faisait chaud, chaud, Ă©trangement chaud
 Rappelez-vous les midis Ă©crasants de juillet, et imaginez beaucoup plus de chaleur encore et plus de lumiĂšre
 – C’était une journĂ©e de dĂ©cembre. Le vent du dĂ©sert soufflait tout doucement, avec sa rĂ©gularitĂ© inĂ©vitable de chaque jour. – Et tout Ă©tait dessĂ©chĂ© et mort. – Et sur ce sable, ce vent traçait Ă  l’infini des milliers et des milliers de petites stries ondulĂ©es, mouvantes, qui Ă©taient comme les vagues minuscules de la grande mer-sans-eau











Fatou-gaye Ă©tait couchĂ©e sur le ventre, appuyĂ©e sur ses coudes ; elle avait le torse nu, – costume d’intĂ©rieur, – et son dos poli se relevait en courbe gracieuse, depuis ses reins cambrĂ©s jusqu’à l’extraordinaire Ă©difice d’ambre et de corail qui composait sa coiffure.
Autour de la case de Samba-Hamet, du silence, d’imperceptibles bruissements de lĂ©zards ou de moucherons, – des Ă©blouissements de sable

Et, le menton reposant dans ses deux mains, Fatou Ă  moitiĂ© endormie chantait tout bas. Elle chantait des airs que jamais nulle part elle n’avait entendus, mais que pourtant elle ne composait pas. C’étaient sa rĂȘverie Ă©nervĂ©e, son assoupissement voluptueux qui se traduisaient d’eux-mĂȘmes en sons de musique, somnolents et bizarres – action rĂ©flexe ; – effet produit sur son cerveau de petite fille noire par tout cet accablement des choses, – qui dĂ©bordait sous forme de chant

Oh ! dans cette sonoritĂ© de midi, dans ce demi-sommeil fĂ©brile de la sieste, – comme vibre et pleure un chant vague, inconscient, rĂ©sultat des choses, – paraphrase du silence et de la chaleur, – de la solitude et de l’exil !











Entre Jean et Fatou la paix est faite. – Jean a pardonnĂ©, comme toujours, – l’histoire des khĂąliss et des boucles d’oreilles en or de Galam est absolument finie.
L’argent est trouvĂ© d’ailleurs, et parti pour la France. – C’est Nyaor qui l’a prĂȘtĂ© – en grosses piĂšces blanches Ă  effigies fort anciennes qu’il tenait, avec beaucoup d’autres, enfermĂ©es dans un coffre de cuivre. – On les lui rendra quand on pourra ; – c’est une prĂ©occupation pour Jean, il est vrai, – mais, au moins, ses chers vieux parents qui avaient comptĂ© sur lui n’en manqueront pas et seront tranquilles.
Le reste est secondaire.
Endormi sur son tara, avec son esclave couchĂ©e Ă  ses pieds, Jean a je ne sais quelle nonchalance superbe, quel faux air de prince arabe. – Plus rien du petit montagnard des CĂ©vennes. – Il a pris quelque chose de la majestĂ© pauvre des fils de la tente.
Ces trois annĂ©es de SĂ©nĂ©gal, qui ont fauchĂ© deçà et delĂ  dans les rangs des spahis, l’ont Ă©pargnĂ© lui. – Il a beaucoup bruni seulement, mais sa force s’est dĂ©veloppĂ©e, ses traits se sont Ă©purĂ©s, accentuĂ©s encore dans tout ce qu’ils avaient de fin et de beau

Une sorte d’atonie morale, des pĂ©riodes d’indiffĂ©rence et d’oubli, une sorte de sommeil du cƓur avec, tout Ă  coup, des rĂ©veils de souffrance, c’est lĂ  tout ce que ces trois annĂ©es ont pu faire. Le climat du SĂ©nĂ©gal n’a pas eu autrement prise sur sa nature puissante.
Il est devenu peu Ă  peu un soldat modĂšle, ponctuel, vigilant et brave. Et pourtant il n’a encore sur sa manche que de modestes galons de laine. Les galons dorĂ©s de marĂ©chal des logis qu’on a souvent fait briller Ă  ses yeux lui ont toujours Ă©tĂ© refusĂ©s. Pas de protecteurs, d’abord, et puis surtout, oh ! scandale, vivre avec une femme noire !

S’enivrer, faire tapage, se faire rapporter la tĂȘte fendue, donner la nuit dans les rues, Ă©tant gris, des coups de sabre aux passants, traĂźner dans tous les bouges, user de toutes les prostitutions, tout cela est fort bien. – Mais avoir, pour soi tout seul, dĂ©tournĂ© du sentier de la vertu une petite captive de bonne maison, munie du sacrement du baptĂȘme, – voilĂ  qui ne saurait ĂȘtre admis

Sur ce sujet-lĂ , Jean avait autrefois reçu de ses chefs des admonestations trĂšs violentes, avec des menaces terribles et des injures. – Devant l’orage, il avait dĂ©couvert sa tĂȘte fiĂšre, et puis il avait Ă©coutĂ© avec le stoĂŻcisme commandĂ© par la discipline, dissimulant, sous un certain air de contrition, l’envie folle qui le prenait de se servir de sa cravache. – Mais, aprĂšs, il n’en avait fait ni plus ni moins

Un peu plus de dissimulation peut-ĂȘtre pendant quelques jours, – mais il avait gardĂ© Fatou.
Ce qui se passait dans son cƓur au sujet de cette petite crĂ©ature Ă©tait si compliquĂ©, que de plus habiles que lui eussent perdu leur peine en cherchant Ă  s’y reconnaĂźtre. – Lui s’abandonnait sans comprendre, comme Ă  un charme perfide d’amulette. Il Ă©tait sans force pour se sĂ©parer d’elle. Les voiles s’épaississaient peu Ă  peu sur son passĂ© et ses souvenirs ; il se laissait maintenant conduire sans rĂ©sistance oĂč le menait son cƓur troublĂ©, indĂ©cis, dĂ©voyĂ© par la sĂ©paration et l’exil


Et, tous les jours, tous les jours, ce soleil !

Tous les matins, le voir se lever avec une rĂ©gularitĂ© inexorable, Ă  la mĂȘme heure, sans nuages et sans fraĂźcheur, ce large soleil jaune ou rouge, que les horizons plats permettaient de voir surgir tout d’en bas comme sur la mer, et qui, Ă  peine levĂ©, commençait Ă  envoyer Ă  la tĂȘte, aux tempes, l’impression pĂ©nible et lourde de son flamboiement.










Il y avait deux ans que Jean et Fatou habitaient ensemble la maison de Samba-Hamet Au quartier des spahis, on avait fini, de guerre lasse, par admettre ce qu’on n’avait pu empĂȘcher. – Jean Peyral, en somme, Ă©tait un spahi exemplaire ; seulement il Ă©tait bien entendu qu’à perpĂ©tuitĂ© il resterait vouĂ© Ă  ses modestes galon, de laine, qu’il n’irait jamais plus loin.
Fatou, dans la maison de Cora, Ă©tait captive et non esclave, distinction essentielle Ă©tablie par les rĂšglements de la colonie, et que de trĂšs bonne heure elle avait saisie. – Captive, elle avait le droit de s’en aller, bien qu’on n’eĂ»t pas celui de la chasser. – Mais, une fois dehors de sa propre volontĂ©, elle Ă©tait libre, – et elle avait usĂ© de ce droit-lĂ .
En outre, elle Ă©tait baptisĂ©e, et c’était une libertĂ© de plus. Dans sa petite tĂȘte, rusĂ©e comme celle d’un jeune singe, tout cela Ă©tait bien entrĂ© et bien compris. Pour une femme qui n’a pas abjurĂ© la religion du Maghreb, se donner Ă  un homme blanc est une action ignominieuse, punie par toutes les huĂ©es publiques. – Mais pour Fatou, ce prĂ©jugĂ© terrible n’existait plus.
Il est vrai que ses pareilles quelquefois l’appelaient : Keffir ! – et cela lui Ă©tait sensible, Ă  la singuliĂšre petite. – Quand elle voyait arriver de l’intĂ©rieur ces bandes de KhassonkĂ©s qu’elle reconnaissait de loin Ă  leur haute coiffure, elle accourait, intimidĂ©e et Ă©mue, tournant autour de ces grands hommes Ă  criniĂšre, cherchant Ă  engager la conversation dans la langue aimĂ©e du pays
 (Les nĂšgres ont l’amour du village, de la tribu, du coin du sol oĂč ils sont nĂ©s.) – Et quelquefois, sur un mot d’une mĂ©chante petite compagne, les hommes noirs du pays khassonkĂ© dĂ©tournaient la tĂȘte avec mĂ©pris, en lui jetant avec un sourire et un plissement de lĂšvres intraduisibles, ce mot de keffir (infidĂšle), qui est le roumi des AlgĂ©riens, ou le giaour des Orientaux.
– Alors elle s’en allait, honteuse et le cƓur gros, la petite Fatou

Mais, tout de mĂȘme, elle aimait encore mieux ĂȘtre keffir, et possĂ©der Jean












Pauvre Jean, dors bien longtemps sur ton tara lĂ©ger, que ce repos du jour, ce sommeil lourd et sans rĂȘve se prolonge encore, car l’instant du rĂ©veil est sombre !

Oh ! ce rĂ©veil, aprĂšs l’engourdissement du sommeil de midi, – d’oĂč provenait-elle cette luciditĂ© Ă©trange, qui faisait de cet instant une Ă©pouvante ?

Les idĂ©es s’éveillaient, tristes, confuses d’abord, dĂ©pareillĂ©es, dĂ©sassorties ; c’étaient, au dĂ©but des conceptions tĂ©nĂ©breuses, pleines de mystĂšre, comme des traces d’une existence antĂ©rieure Ă  celle de ce monde
 Puis, tout Ă  coup, des conceptions plus nettes, d’une nettetĂ© navrante ; des souvenirs radieux d’autrefois, impressions d’enfance reparaissant, s’éclairant comme du fond d’un passĂ© irrĂ©vocable ; souvenirs des chaumiĂšres ; des CĂ©vennes les soirs d’étĂ©, se mĂȘlant Ă  des bruissements de sauterelles d’Afrique ; angoisse des sĂ©parations, du bonheur perdu ; synthĂšse rapide, navrante, de toute l’existence ; les choses de la vie vues par en dessous avec leurs aspects d’outre-tombe ; – l’autre cĂŽtĂ© de ce qui est, l’envers du monde


Surtout dans ces moments-lĂ , il semblait qu il eĂ»t conscience de la marche rapide et inexorable du temps, que l’atonie de son esprit ne lui permettait pas habituellement de saisir
 Il s’éveillait, entendant contre le tara sonore le faible bruit du battement des artĂšres de son front, et il lui semblait entendre les pulsations du temps, les battements d’une grande horloge mystĂ©rieuse de l’éternitĂ©, et il sentait le temps s’envoler, filer, filer avec une vitesse de chose qui tombe dans le vide, et sa vie s’écouler avec lui sans qu’il pĂ»t la retenir


Et il se relevait brusquement, s’éveillant tout Ă  fait, avec une envie folle de partir, une rage de dĂ©sespoir en prĂ©sence de ces annĂ©es qui le sĂ©paraient encore du retour.










Fatou-gaye comprenait vaguement que ce rĂ©veil Ă©tait un instant dangereux, un instant critique oĂč l’homme blanc lui Ă©chappait. Aussi elle guettait ce rĂ©veil, et quand elle voyait Jean ouvrir ses yeux mĂ©lancoliques, et puis se redresser tout Ă  coup le regard effarĂ©, vite elle s’approchait, Ă  genoux pour le servir, ou bien elle lui passait autour du cou ses bras souples :
– Qu’as-tu, mon blanc ?
 disait-elle, d’une voix qu’elle faisait douce et languissante comme le son de la guitare d’un griot.

Mais ces impressions de Jean n’étaient pas de longue durĂ©e. Quand il Ă©tait bien Ă©veillĂ©, son atonie habituelle reprenait son cours, – et il recommençait Ă  voir les choses sous leurs aspects accoutumĂ©s.

II

C’était une opĂ©ration trĂšs importante et trĂšs compliquĂ©e que de coiffer Fatou ; – cela avait lieu chaque semaine une fois, et, cette fois-lĂ , toute la journĂ©e y passait.
DĂšs le matin, elle se mettait en route pour Guet-n’dar, la ville nĂšgre, – oĂč habitait, dans une case pointue faite de chaume et de roseaux secs, la coiffeuse en renom des dames nubiennes.
Elle restait là plusieurs heures durant, accroupie sur le sable, s’abandonnant aux mains de cette artiste patiente et minutieuse.
La coiffeuse dĂ©faisait d’abord, – dĂ©senfilait une Ă  une les perles, – dĂ©tressait, dĂ©mĂȘlait les mĂšches Ă©paisses ; – puis reconstruisait ensuite cet Ă©difice trĂšs surprenant, dans lequel entraient du corail, des piĂšces d’or, des paillettes de cuivre, des boules de jade vert et des boules d’ambre.
– Des boules d’ambre grosses comme des pommes, – hĂ©ritage maternel, prĂ©cieux joyaux de famille rapportĂ©s en cachette dans la terre d’esclavage.
Et le plus compliquĂ© Ă  peigner, c’était encore le derriĂšre de la tĂȘte, la nuque de Fatou. – LĂ , il fallait diviser les masses crĂ©pues en des centaines de petits tire-bouchons empesĂ©s et rigides, soigneusement alignĂ©s, qui ressemblaient Ă  des rangs de franges noires.
On roulait chacun de ces tire-bouchons sĂ©parĂ©ment autour d’un long brin de paille, on les couvrait d’une Ă©paisse couche de gomme, – et, pour laisser Ă  cet enduit le temps de sĂ©cher, les pailles devaient, jusqu’au lendemain, rester en place. – Fatou rentrait chez elle avec toutes ces brindilles tenant Ă  sa chevelure ; elle avait l’air, ce soir-lĂ , de s’ĂȘtre coiffĂ©e dans la peau d’un porc-Ă©pic.
Mais, le lendemain, quand les pailles étaient enlevées, quel bel effet !

On jetait par lĂ -dessus, Ă  la mode khassonkĂ©e, une sorte de gaze du pays, trĂšs transparente, qui enveloppait le tout comme une toile d’araignĂ©e bleue ; et cette coiffure, solidement Ă©tablie, durait nuit et jour pendant toute une semaine.
Fatou-gaye se chaussait d’élĂ©gantes petites sandales de cuir, maintenues par des laniĂšres qui passaient entre l’orteil et le premier doigt, – comme des cothurnes antiques.
Elle portait le pagne Ă©triquĂ© et collant que les Egyptiennes du temps des Pharaons lĂ©guĂšrent Ă  la Nubie. – Par-dessus, elle mettait un boubou : grand carrĂ© de mousseline ayant un trou pour passer la tĂȘte, et retombant en pĂ©plum jusqu’au-dessous du genou.
Sa parure se composait de lourds anneaux d’argent, rivĂ©s aux poignets et aux chevilles ; et puis d’odorants colliers de soumarĂ©, – la fortune de Jean ne lui permettant pas l’usage des colliers d’ambre ou d’or.
Les soumarés sont des tresses faites de plusieurs rangs enfilés de petites graines brunes ; ces graines qui mûrissent sur les bords de la Gambie ont une senteur pénétrante et poivrée, un parfum sui generis, une des odeurs les plus caractéristiques du Sénégal.
Elle Ă©tait bien jolie, Fatou-gaye, avec cette, haute coiffure sauvage, qui lui donnait un air de divinitĂ© hindoue, parĂ©e pour une fĂȘte religieuse. Rien de ces faces Ă©patĂ©es et lippues de certaines peuplades africaines qu’on a l’habitude en France de considĂ©rer comme le modĂšle gĂ©nĂ©rique de la race noire. Elle avait le type khassonkĂ© trĂšs pur : un petit nez droit et fin, avec des narines minces, peu pincĂ©es et trĂšs mobiles, une bouche correcte et gracieuse, avec des dents admirables ; et puis, surtout, de grands yeux d’émail bleuĂątre, remplis, suivant les moments, d’étrangetĂ© grave, ou de mystĂ©rieuse malice.

III

Fatou ne travaillait jamais, – c’était une vraie odalisque que Jean s’était offerte lĂ .
Elle savait comment s’y prendre pour blanchir et rĂ©parer ses boubous et ses pagnes. – Elle Ă©tait toujours propre comme une chatte noire habillĂ©e de blanc, – par instinct de propretĂ© d’abord, et puis parce qu’elle avait compris que Jean ne la supporterait pas autrement. Mais, en dehors de ces soins de sa personne, elle Ă©tait incapable d’aucun travail.
Depuis que les pauvres vieux Peyral ne pouvaient plus envoyer Ă  leur fils les petites Ă©conomies que, piĂšce par piĂšce, ils mettaient ...

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  1. Titre
  2. INTRODUCTION
  3. PREMIÈRE PARTIE
  4. DEUXIÈME PARTIE
  5. TROISIÈME PARTIE
  6. À propos de cette Ă©dition Ă©lectronique
Zitierstile fĂŒr Le Roman d'un spahi

APA 6 Citation

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Loti, P. Le Roman d’un spahi. [edition unavailable]. Booklassic. Available at: https://www.perlego.com/book/545783/le-roman-dun-spahi-pdf (Accessed: 14 October 2022).

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Loti, Pierre. Le Roman d’un Spahi. [edition unavailable]. Booklassic. Web. 14 Oct. 2022.