Paris, un Lieu Commun
eBook - ePub

Paris, un Lieu Commun

  1. French
  2. ePUB (adapté aux mobiles)
  3. Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Détails du livre
Aperçu du livre
Table des matières
Citations

À propos de ce livre

Ce livre revient sur la vaste catégorie de textes que l'on peut regrouper sous la définition de «guides» de la ville de Paris, lesquels, sans toujours se parer de ce titre, contribuèrent au XIXe siècle à la vulgarisation du mythe de la capitale française. Paris en tant que mythe moderne se dessine dans ces textes comme un lieu commun, aux deux sens du mot: comme lieu, espace géographique et social, mais aussi, et surtout, comme stéréotype, comme cliché linguistique et culturel. Le rapport de ce type de publications avec la «grande littérature» est souvent ambigu: plusieurs grands auteurs participent directement à l'entreprise épique de mettre en scène les habitants de Paris (Hugo, Balzac, Nerval), d'autres s'en sont servis pour dénoncer l'inanité du mythe lui-même (Baudelaire, Flaubert, les Goncourt). Les contributions ici recueillies se penchent sur les nombreuses facettes de ce mythe changeant, s'intéressant au cliché et à sa diffusion, au Paris baudelairien (qui dans les «Tableaux parisiens» dépasse le mythe de la «capitale de l'Univers» pour retrouver le coeur de ses habitants), au Paris balzacien et aux applications pédagogiques qu'il peut offrir à des enseignants de littérature française. Les transformations haussmanniennes sont aussi reconsidérées, ainsi que la mode des «Guides des ruines de Paris» après le soi-disant «désastre» de 1871, dans lesquelles l'envers du mythe et sa complexité se révèlent.

Foire aux questions

Il vous suffit de vous rendre dans la section compte dans paramètres et de cliquer sur « Résilier l’abonnement ». C’est aussi simple que cela ! Une fois que vous aurez résilié votre abonnement, il restera actif pour le reste de la période pour laquelle vous avez payé. Découvrez-en plus ici.
Pour le moment, tous nos livres en format ePub adaptés aux mobiles peuvent être téléchargés via l’application. La plupart de nos PDF sont également disponibles en téléchargement et les autres seront téléchargeables très prochainement. Découvrez-en plus ici.
Les deux abonnements vous donnent un accès complet à la bibliothèque et à toutes les fonctionnalités de Perlego. Les seules différences sont les tarifs ainsi que la période d’abonnement : avec l’abonnement annuel, vous économiserez environ 30 % par rapport à 12 mois d’abonnement mensuel.
Nous sommes un service d’abonnement à des ouvrages universitaires en ligne, où vous pouvez accéder à toute une bibliothèque pour un prix inférieur à celui d’un seul livre par mois. Avec plus d’un million de livres sur plus de 1 000 sujets, nous avons ce qu’il vous faut ! Découvrez-en plus ici.
Recherchez le symbole Écouter sur votre prochain livre pour voir si vous pouvez l’écouter. L’outil Écouter lit le texte à haute voix pour vous, en surlignant le passage qui est en cours de lecture. Vous pouvez le mettre sur pause, l’accélérer ou le ralentir. Découvrez-en plus ici.
Oui, vous pouvez accéder à Paris, un Lieu Commun par Mariacristina Pedrazzini, Marisa Verna en format PDF et/ou ePUB ainsi qu’à d’autres livres populaires dans Littérature et Critique littéraire française. Nous disposons de plus d’un million d’ouvrages à découvrir dans notre catalogue.

Informations

Mariacristina Pedrazzini

Sur les traces des ruines de Paris: trois guides touristiques post-obsidionaux

DOI: http://dx.doi.org/10.7359/866-2018-pedr
Les ruines de Paris, après sa splendeur!
Pour faire suite à Paris dans sa magnificence, Paris dans sa désolation! Quel complément inattendu, quelle chute, quelle antithèse, quelle transformation subite et lamentable de l’épopée haussmanienne [sic] en drame de Shakespeare! Paris, dont le raffinement de la civilisation avait voulu faire une ville de marbre et d’or, le raffinement de la barbarie en a failli refaire une ville de cendres et de boue. 1
Dans le cadre de ce projet de recherche sur Paris, sur les stéréotypes, sur les lieux communs et sur les textes qui les ont véhiculés – tableaux, croquis, guides, scènes de la vie parisienne peignant des types humains caractéristiques de la capitale –, nous avons décidé de nous pencher sur une année spécifique, 1871; sur un genre atypique, qu’on nommera provisoirement «guides aux ruines modernes ou contemporaines» et spécialement sur un corpus regroupant trois textes consacrés aux visites des ruines de Paris parus dès 1871: un Itinéraire des ruines de Paris, anonyme, un Guide à travers les ruines, fruit de la collaboration entre Ludovic Hans et J.-J. Blanc, et un Guide-recueil de Paris-brûlé par un auteur qui signe Ed. Moreau 2, sans plus.
Notre contribution portera premièrement sur un phénomène socio-culturel inédit ou sans doute peu connu en France avant 1871, c’est-à-dire avant la guerre franco-prussienne et avant la Commune: le tourisme des ruines modernes ou contemporaines. Deuxièmement nous apprécierons l’impact qu’il a eu sur des observateurs tels que les journalistes de la presse de l’époque et les députés de l’Assemblée nationale. Troisièmement et quatrièmement nous analyserons les textes retenus dans notre corpus d’un point de vue structurel et stylistique.
1. LE TOURISME POST-OBSIDIONAL
Pour expliciter notre titre nous souhaitons rappeler, pour la reprendre, l’heureuse formule de Martine Lavaud qui, à propos des Tableaux de siège de Théophile Gautier, parle de «tourisme obsidional» 3. À l’entrée «obsidional», le Trésor de la Langue Française informatisé nous donne les explications suivantes relativement aux sens historique et psychologique de l’adjectif:
A. Qui concerne le siège d’une ville. […] – ANTIQ. ROMAINE. Couronne obsidionale. Couronne décernée à celui qui avait délivré une ville assiégée. […] ♦ Monnaie obsidionale. Monnaie frappée durant un siège pour suppléer à la rareté des espèces […]
B. PSYCH., SOCIOL. Qui frappe les habitants d’une ville assiégée. […] ♦ Fièvre, folie obsidionale. Désordre mental qui frappe la population d’une ville assiégée. – P. anal., PATHOL. Délire obsidional. Délire, folie d’une personne qui se croit assiégée, persécutée. 4
C’est bien évidemment le sens historique qui nous intéresse ici, celui du rapport à la ville, en l’occurrence Paris, subissant ou ayant subi un siège. Dans notre cas, donc, pour mieux cerner le phénomène socio-culturel du tourisme aux ruines modernes ou contemporaines de Paris en 1871, nous risquerons le syntagme semi-néologique «tourisme post-obsidional» ou tourisme d’après le Siège et les guides atypiques y conviant les voyageurs français – parisiens et provinciaux – ou étrangers, guides touristiques post-obsidionaux.
Guides atypiques, disions-nous, car le Grand Tour du XVIIIe siècle et le voyage romantique sont des antécédents culturels et littéraires indéniables, ils ont fourni un modèle et ils permettaient respectivement aux jeunes gens des familles aisées, et aux poètes bien sûr, de visiter des pays étrangers pour parachever leur formation et pour nourrir leur inspiration. Ces pays cependant, comme la Grèce et l’Italie, étaient très riches en vestiges historiques, mais non pas contemporains; si les ruines étaient favorables aux études humanistes comme à la rêverie exotique et à la poétique des ruines, ainsi qu’aux méditations philosophiques ou élégiaques sur la fugacité du temps et du bonheur, elles ne l’étaient pas autant, ou pas du tout, aux curiosités, tantôt bien intentionnées des artistes, tantôt malsaines d’un public quelque peu voyeur, en quête d’émotions fortes et immédiates. D’où la nécessité de nouveaux guides frais imprimés, liés à l’actualité.
Or, après le siège de l’armée prussienne, Paris a subi le bombardement croisé du gouvernement officiel de Versailles et celui des communards ainsi que le vandalisme incendiaire des fédérés et des pétroleuses 5. L’expérience révolutionnaire des soixante-treize jours de la Commune, qui se clôt tragiquement par la «semaine sanglante» des 21-28 mai 1871, laisse Paris en ruines: l’Hôtel de Ville, les Halles, le Louvre, la colonne Vendôme et maints monuments encore qui ont été durement frappés, sont méconnaissables ou réduits en débris.
Inopinément donc, tout cela s’avère une aubaine pour les agences touristiques, notamment celle de l’anglais Cook, qui se précipitent sur l’occasion pour lancer sur le marché de nouveaux tours: on promet aux curieux de les emmener sur les traces des ruines encore fumantes de la Commune, et ceci à l’aide de trains, de voitures, de cicérones et même de guides touristiques conçus exprès.
2. QUELQUES RÉACTIONS DANS LA PRESSE 6
La presse de l’époque nous informe abondamment sur ce phénomène naissant et apparemment prospère dès le mois de juin 1871, si l’on considère, anticipant un peu sur la suite, que la «Préface» du Guide-recueil de Paris-brûlé d’Ed. Moreau est datée le 31 mai 1871. Dans sa rubrique «Courrier de Paris», Charles Monselet prévoit, en la déplorant à l’avance, l’arrivée massive de visiteurs étrangers dans la capitale. Tels des hordes d’envahisseurs, ceux-ci vont «s’abattre en abondance» sur la ville et en «forc[er] les portes»; munis de l’attirail classique du touriste – lorgnettes et guides – ce nouveau spécimen de pèlerins déambulent déjà à la recherche d’images et d’objets à emporter, non pas des objets de dévotion, mais de collection:
Les voyageurs et les touristes vont s’abattre en abondance cette année sur notre malheureuse capitale. Toute l’Europe voudra accomplir ce pèlerinage. Dès à présent même, un assez grand nombre d’étrangers ont forcé les portes; ce sont les plus impatients; on les voit circuler au milieu des décombres, un guide à la main. Quelques-uns portent une lorgnette en bandoulière. Ils ramassent des pierres, des morceaux de fer, destinés à enrichir leur collection cosmopolite. 7
Monselet prévoit également, non sans cacher son inquiétude empathique, que Paris va ressembler à des villes mortes du passé, comme Pompéi, ou à celles qui ont subi les outrages du temps, des guerres et des invasions barbares, telles Rome et Heidelberg. La capitale sera l’énième objet d’une mode européenne inattendue, une étape obligée parmi tant d’autres, triste destin pour la ville qui a atteint son apogée avec l’Exposition Universelle de 1867:
À partir de ce jour, notre lamentable Hôtel-de-Ville, nos Tuileries déchiquetées, notre ministère des Finances, semblable à une grande eau-forte de Piranesi, vont s’ajouter sur le programme de la fashion aux ruines du Colisée et aux restes de Heidelberg. On visitera la rue du Bac comme on visite telle ruine de Pompeï [sic].
Paris n’avait pas prévu cela.
Donc, attendons-nous à ce qu’en style de journaux on appelle «une grande affluence d’étrangers». Il y a eu l’année de l’Exposition universelle; il y aura l’année de la Commune pour lui faire pendant. 8
Dans le Petit Journal du 20 juin de la même année, paraît un article non signé sur le même sujet intitulé «Un train de plaisir». Comme on pourra le voir, l’ironie ne manque ni dans le titre, ni dans la description des procédés: le touriste est d’ores et déjà perdu dans un troupeau moutonnier, informe et anonyme; se fait loger, nourrir et voiturer au gré du programme de M. Cook qui, tel un maître de cérémonie d’antan, règle tous ses mouvements et ses activités, nommées pour l’occasion «exercices», et ceci à un rythme endiablé et à un prix abordable:
Un train de plaisir
Nous avons déjà parlé des trains de plaisirs organisés en Angleterre pour venir visiter Paris.
Hier soir est arrivé, à la gare du Nord, un nouveau convoi, conduit par un «organisateur de voyages» nommé Cook, bien connu de l’autre côté de la Manche.
Moyennant quatorze livres sterling par tête, M. Cook s’est chargé de promener à travers les ruines de Paris tous les voyageurs de son train de plaisir. M. Cook les loge ensemble, les nourrit, les voiture en omnibus, et leur fait un cours d’histoire complet sur chacun des monuments incendiés.
A peine débarqués, M. Cook leur a narré les événements dont a été le théâtre la gare du Nord. Le public regardait avec ahurissement ce groupe d’une vingtaine d’Anglais, entourant un petit homme maigre et alerte, qui parlait avec une rapidité fantastique.
On a parcouru la gare en procession, puis on a passé à d’autres exercices. 9
Quatre jours plus tard, dans Le Monde illustré du 24 juin, un non mieux identifié Maxime Vauvert 10 titre son article «Les étrangers à Paris» pour unir sa voix au chœur. La conjoncture lamentable où se trouve Paris après le siège, après les bombardements et les incendies monstre, a fourni, malgré tout, une occasion prometteuse à un personnage entreprenant comme l’anglais Cook, prototype pour l’époque, à n’en pas douter, de tout Anglais:
Ce n’est pas chose ordinaire que de visiter une grande capitale qui a supporté un siége [sic] de huit mois, deux bombardements et l’incendie de ses plus beaux quartiers.
Un Anglais, […] M. Cook a compris cela et, comme tout bon anglais, il a voulu tirer bénéfice de son idée. 11
Vauvert y exprime toute sa désapprobation pour ces «trains de plaisir qui, partant de Londres, emportent des fournées de curieux» en fuite du «spleen national» 12. Il ne fait pas de concessions, fustigeant les responsables et utilisant des termes dépréciatifs comme «verbiage de Cicerone» pour l’abrég...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Frontispice
  3. Copyright
  4. Sommaire
  5. Présentation
  6. Des Tableaux, des Diables et des mythes. Petite digression sur la «métropole de l’univers»
  7. Paris-Babel: lieu(x) commun(s), lieux sacrés
  8. Les «Tableaux parisiens» de Baudelaire: une entreprise de charité?
  9. Balzac et Baudelaire: de l’archéologue à l’arpenteur de Paris
  10. Le trasformazioni urbanistiche di Parigi nella seconda metà dell’Ottocento
  11. Sur les traces des ruines de Paris: trois guides touristiques post-obsidionaux