Petit éloge de l'anarchisme
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Petit éloge de l'anarchisme

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À propos de ce livre

Loin d'être un manifeste dogmatique, ce Petit éloge de l'anarchisme célèbre la faculté d'exercer son jugement moral et sa créativité en toute liberté.À partir d'exemples tirés de la vie quotidienne et de l'histoire, James C. Scott analyse les notions d'autonomie, de dignité, de justice et de résistance. S'en dégage un plaidoyer pour l'insubordination sous toutes ses formes et dans toutes les circonstances – au travail, dans la rue, à l'université et dans les maisons de retraite. Manuel d'exercices de l'esprit pour voir et agir dans le monde comme un anarchiste, ce livre s'adresse avant tout à ceux qui ne se considèrent pas comme tel. À sa lecture, ils apprendront sans doute qu'ils partagent plusieurs des valeurs défendues par ces «dangereux extrémistes de gauche». Les libertaires, quant à eux, y redécouvriront l'origine de certaines de leurs convictions.

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Informations

Éditeur
Lux Éditeur
Année
2019
ISBN
9782895967668

Chapitre 1

Les usages du désordre et du « charisme »

Fragment 1
Loi de la callisthénie anarchiste de Scott

JAI CONÇU CETTE LOI à Neubrandenbourg, en Allemagne, à la fin de l’été 1990.
Dans le but d’améliorer ma connaissance rudimentaire de l’allemand, avant de passer un an à Berlin en tant qu’invité du Wissenschaftskolleg, j’ai eu l’idée de chercher un emploi dans une ferme au lieu de suivre des cours de langue quotidiens avec une bande d’adolescents boutonneux sur les bancs du Goethe-Institut. Comme le Mur n’était tombé qu’un an plus tôt, je me demandais s’il serait possible de trouver un emploi d’été de six semaines sur une des fermes collectives (landwirtschaftliche Produktionsgenossenschaft, ou LPG), fraîchement renommées « coopératives », en Allemagne de l’Est. Il s’avéra qu’un camarade du Wissenschaftskolleg avait un proche parent dont le beau-frère dirigeait une de ces fermes dans le minuscule village de Pletz. Méfiant, le beau-frère accepta tout de même de m’offrir le gîte et le couvert en échange de mon labeur et d’un loyer hebdomadaire non négligeable.
Pour améliorer mon allemand par la méthode « marche ou crève », c’était parfait ; pour une agréable et édifiante visite à la ferme, c’était un cauchemar. Les villageois, à commencer par mon hôte, se méfiaient de mes intentions. Avais-je pour mission d’étudier de près les cahiers de comptes de la ferme collective pour en exposer les « irrégularités » ? Étais-je envoyé en éclaireur par des fermiers néerlandais à la recherche de terres à louer dans les décombres du bloc socialiste après son effondrement ?
La ferme collective de Pletz, spécialisée dans la culture de « pommes de terre à fécule », offrait un spectaculaire exemple de cet effondrement. Même si aucun cochon ne se ferait prier pour en manger, cette variété de pommes de terre ne peut servir à faire des frites ; à l’époque on l’utilisait, une fois raffinée, comme base d’amidon dans la composition des produits cosmétiques en Europe de l’Est. Au lendemain de la chute du Mur, aucun marché ne s’est écroulé plus subitement que celui des produits de beauté du bloc socialiste. Des montagnes et des montagnes de pommes de terre à fécule abandonnées le long des voies ferrées pourrissaient sous le soleil d’été.
En plus de se demander si la pénurie totale les attendait au tournant et de s’interroger sur le rôle que je pourrais jouer dans cette débandade, dans l’immédiat, mes hôtes étaient fort préoccupés par ma piètre compréhension de l’allemand et s’inquiétaient du danger que celle-ci représentait pour leur petite opération. Allais-je me tromper de portail et laisser les porcs sortir dans le champ du voisin ? Allais-je nourrir les oies avec le fourrage destiné au bétail ? Me souviendrais-je de toujours bien fermer la porte lorsque je travaillerais dans la grange, au cas où les gitans viendraient à passer par là ? Il est vrai que, dès la première semaine, je leur avais donné plus qu’assez de raisons de s’inquiéter, et ils avaient pris l’habitude de me hurler dessus dans le vain espoir, que nous semblons tous partager, de surmonter les barrières linguistiques en criant à tue-tête. Ils réussissaient à maintenir un vernis de politesse, mais les regards qu’ils s’échangeaient le soir à table m’indiquaient que leur patience atteignait ses limites. En contrepartie, la suspicion qui pesait sur moi, sans parler de mon incompétence et de mon incompréhension évidentes, commençait sérieusement à me taper sur les nerfs.
J’ai alors décidé, pour ma santé mentale et la leur, de passer une journée par semaine dans la ville voisine de Neubrandenbourg. S’y rendre n’était pas simple. Le train ne s’arrêtait à Pletz que si l’on hissait un fanion en bordure de la voie ferrée pour signaler qu’un passager était en attente et, au retour, il fallait indiquer au conducteur que l’on souhaitait descendre à Pletz, auquel cas le train s’arrêtait exceptionnellement au beau milieu du champ pour vous laisser en descendre. En ville, je déambulais dans les rues, fréquentais les cafés et les bars, feignais de lire les journaux en allemand (en consultant discrètement mon dictionnaire de poche) et faisais de mon mieux pour passer inaperçu.
Le seul train qui faisait le trajet de retour quotidien depuis Neubrandenbourg et qu’on pouvait faire arrêter à Pletz partait vers 22 heures. Pour éviter de le manquer et de devoir passer la nuit à vagabonder dans cette ville inconnue, je m’assurais de revenir à la gare au moins une demi-heure à l’avance. Chaque semaine, pendant six ou sept semaines, la même scène captivante se répétait devant la gare et me donnait l’occasion d’y méditer en tant qu’observateur et participant. Le concept de « callisthénie anarchiste » a donc été élaboré dans le cadre de ce qu’un anthropologue appellerait mon « observation participante ».
Un important carrefour, du moins pour une ville de la taille de Neubrandenbourg, jouxtait la gare. De jour, les piétons et les véhicules y affluaient en assez grand nombre et un feu de circulation assurait la fluidité de leurs mouvements. En soirée, par contre, la circulation automobile cessait pratiquement alors que la foule des piétons, elle, gonflait à la faveur de la brise fraîche du soir. Régulièrement, entre 21 heures et 22 heures, entre 50 et 60 piétons, dont plusieurs étaient visiblement éméchés, traversaient à l’intersection. Je présume que le feu était synchronisé pour la circulation automobile de midi, et non pour la circulation piétonne du soir. Encore et encore, des groupes de 50 ou 60 personnes s’agglutinaient au coin de la rue et attendaient patiemment que le feu passe au vert : quatre ou cinq minutes, peut-être plus longtemps encore. À mes yeux, cela représentait une éternité. Le paysage de Neubrandenbourg, sur la plaine de Mecklenbourg, est plat comme une crêpe. En scrutant au loin dans chaque direction depuis l’intersection, on voyait à plus d’un mile de distance et généralement, on n’apercevait pas le moindre véhicule. De temps à autre, on pouvait voir une petite Trabant s’approcher lentement de l’intersection, dans un nuage de fumée.
Au cours de cette observation qui a duré à peu près cinq heures, j’ai dû apercevoir deux piétons traverser au feu rouge, déclenchant chaque fois un concert de réprimandes et une chorégraphie de doigts tendus en signe de réprobation. Je jouais moi aussi un rôle dans cette scène. Si j’avais massacré mon dernier échange en allemand et que ma confiance en était sapée, je restais là avec tous les autres jusqu’à ce que le feu tourne au vert, de peur d’être la cible de regards furieux si j’osais traverser. Si, plus rarement, mon dernier échange en allemand s’était bien déroulé et que ma confiance s’en était trouvée renforcée, je traversais au feu rouge en me disant, pour me donner du courage, qu’il était stupide d’obéir à un règlement mineur qui, dans ce cas-ci, allait à l’encontre du bon sens.
Je fus surpris de constater à quel point il me fallait rassembler tout mon courage simplement pour traverser la rue en dépit de la désapprobation générale. Mes convictions rationnelles ne semblaient pas faire le poids face à la pression de leurs réprimandes. Je faisais peut-être une forte impression en m’engageant ainsi dans l’intersection, avec conviction et sans vergogne, mais cela me demandait un courage exceptionnel.
Afin de justifier, à mes yeux, mon propre comportement, je me mis à répéter un petit discours que je m’imaginais prononcer dans un allemand impeccable. Ça donnait à peu près ceci : « Vous savez, vous, et en particulier vos grands-parents, auriez eu avantage à faire preuve d’un peu plus d’esprit de transgression de la loi. Un jour, vous serez appelés à enfreindre une grosse loi au nom de la justice et de la rationalité. Tout en dépendra. Vous devrez être prêts. Comment vous préparerez-vous à ce jour où votre choix sera vraiment important ? Il faut “garder la forme” pour être prêts quand le grand jour arrivera. Ce dont vous avez besoin, c’est d’une “callisthénie anarchiste”. Chaque jour, si possible, enfreignez une loi ou un règlement mineur qui n’a aucun sens, ne serait-ce qu’en traversant la rue hors du passage piéton. Servez-vous de votre tête pour juger si une loi est juste ou raisonnable. De cette façon, vous resterez en forme ; et quand le grand jour viendra, vous serez prêts. »
Il faut bien réfléchir pour déterminer quand il devient sensé d’enfreindre une loi, même s’il ne s’agit que de traverser la rue. J’ai eu l’occasion d’y repenser quand je suis allé rendre visite à un professeur néerlandais à la retraite dont j’admirais le travail depuis longtemps. À l’époque, il était maoïste, un partisan déclaré de la révolution culturelle et un notoire incendiaire du milieu universitaire des Pays-Bas. Il m’avait invité à manger dans un restaurant chinois tout près de chez lui dans la petite ville de Wageningue. En y allant, nous atteignîmes une intersection au feu rouge. Le paysage de Wageningue, comme celui de Neubrandenbourg, est parfaitement plat et l’on voit à des kilomètres à la ronde. Pas un seul véhicule n’approchait. Sans même y penser, je m’engageai alors dans la rue et le Dr Wertheim me dit : « James, tu dois attendre. » En revenant sur le trottoir, je protestai sans grande conviction : « Mais docteur, il n’y a rien à l’horizon. » « James », répondit-il du tac au tac, « ce serait un mauvais exemple pour les enfants ». Il me corrigeait tout en m’instruisant. Nous avions là un agitateur maoïste doté malgré tout d’un sens aigu, je dirais même néerlandais, de la responsabilité civique, devant un cow-boy yankee complètement insouciant des effets de ses propres agissements sur ses concitoyens. Désormais, lorsque je traverse au feu rouge, je regarde autour de moi pour m’assurer qu’aucun enfant ne pourrait être exposé à mon mauvais exemple.
Vers la fin de mon séjour à la ferme de Neubrandenbourg se produisit un événement qui remit de façon spectaculaire au goût du jour la question de la désobéissance à la loi. J’appris, dans un petit article publié par un journal local, que des anarchistes d’Allemagne de l’Ouest (le pays était encore à un mois de la réunification formelle, l’Einheit) avaient transporté en camion, de place publique en place publique dans plusieurs villes d’Allemagne de l’Est, une gigantesque statue en papier mâché. Celle-ci représentait la silhouette d’un homme au pas de course sculptée dans un bloc de granit. Elle était intitulée Monument aux déserteurs inconnus des deux guerres mondiales et portait la légende « À l’homme qui refusa de tuer son prochain ».
J’y vis un magnifique geste anarchiste, une variation anticonformiste sur le thème quasi universel du soldat inconnu : l’obscur « fantassin-comme-les-autres » qui tombe honorablement au combat en défendant les intérêts de sa nation. Même en Allemagne, même dans la très récente ex-Allemagne de l’Est (glorifiée comme « premier État socialiste sur le sol allemand »), ce geste fut toutefois nettement mal reçu. Parce qu’en dépit de la façon profondément progressiste dont les Allemands ont répudié les visées du nazisme, ils continuent de porter une profonde admiration à la loyauté et au sacrifice de leurs dévoués soldats. Selon Bertolt Brecht, le brave soldat Chvéïk, cet antihéros tchèque qui préférait siroter sa bière et manger de la saucisse au coin du feu plutôt que de se battre pour son pays, représentait certes un modèle de résistance populaire contre la guerre, mais pour les édiles est-allemands du crépuscule, cette parodie en papier mâché n’avait rien de comique. La statue ne restait sur la place publique de chaque ville que le temps qu’il fallait aux autorités pour se réunir et en décréter le bannissement. C’est ainsi que commença une joyeuse poursuite, de Magdebourg à Potsdam à Berlin Est à Bitterfeld à Halle à Leipzig à Weimar à Karl-Marx-Stadt (Chemnitz) à Neubrandenbourg à Rostock, pour finir dans la capitale fédérale d’alors, Bonn. Cette galopade de ville en ville et l’inévitable publicité qu’elle attira étaient d’ailleurs peut-être précisément la combine que ses initiateurs avaient en tête dès le départ.
À la faveur de la période grisante qui suivit l’ouverture d’une brèche dans le mur de Berlin, cette manœuvre s’avéra contagieuse. Très vite, des progressistes et des anarchistes de partout en Allemagne fabriquèrent des douzaines de monuments municipaux à la gloire de la désertion. Qu’un acte traditionnellement associé à la couardise et à la trahison soit soudainement présenté comme honorable, voire digne d’émulation, était loin d’être anodin. Il n’est pas étonnant que l’Allemagne, qui a certainement payé le prix fort pour avoir placé son patriotisme au service d’objectifs inhumains, ait été un des premiers États à contester publiquement la valeur de l’obéissance et à ériger des monuments à la désertion sur les places publiques autrement dédiées à Martin Luther, Frédéric le Grand, Bismarck, Goethe et Schiller.
Un monument aux déserteurs représente en quelque sorte un défi conceptuel et esthétique. Un peu partout en Allemagne, quelques exemples de ce style monumental ont conservé une valeur artistique durable, et un en particulier, celui de Hannah Stuetz Menzel, à Ulm, aura au moins réussi à donner une idée du phénomène de contagion que de tels actes de désobéissance civile hautement significatifs ont le pouvoir de déclencher.

Fragment 2
De l’importance de l’insubordination

Les actes de désobéissance civile sont particulièrement intéressants lorsqu’ils revêtent un caractère exemplaire, et en particulier lorsque, en tant qu’exemples, ils incitent à l’émulation et déclenchent une réaction en chaîne. Nous ne sommes alors plus tant en présence d’un acte individuel de couardise ou de conscience (peut-être les deux, en fait) que face à un phénomène social qui peut avoir des répercussions politiques à très grande échelle. Multipliés plusieurs milliers de fois, de tels actes de refus peuvent, au bout du compte, mettre sens dessus dessous les stratégies élaborées par les généraux et les chefs d’État. Les actes d’insoumission mineurs ne font habituellement pas les manchettes. Mais, de la même manière que des millions de polypes anthozoaires en viennent à former, bon gré mal gré, un récif de corail, des milliers et des milliers d’actes d’insubordination et d’évasion peuvent tôt ou tard former une barrière économique ou politique incontournable. Un double complot du silence enveloppe ces actes dans l’anonymat. Leurs auteurs cherchent rarement à attirer l’attention sur eux ; leur sécurité dépend directement de leur invisibilité. Les autorités, pour leur part, sont réticentes à attirer l’attention sur la multiplication des actes de désobéissance ; cela risquerait d’en encourager d’autres et, du même coup, de mettre en lumière la précarité de leur emprise morale. Le silence étrangement complice qui en résulte a pour effet d’effacer la plupart des traces historiques de ces actes d’insubordination.
Et pourtant, des exemples de ce j’appelle des « formes de résistance quotidienne » ont déjà eu des conséquences importantes, parfois déterminantes, pour les régimes, les États et les armées vers lesquels ils étaient implicitement dirigés. La défaite des États confédérés d’Amérique lors de la guerre de Sécession est presque certainement attribuable à une importante accumulation d’actes de désertion et d’insubordination. À l’automne 1862, un peu plus d’un an après le début de la guerre, les récoltes étaient généralement déficitaires dans le Sud. Les soldats, particulièrement ceux qui provenaient des campagnes éloignées où personne ne possédait d’esclaves, recevaient des lettres des membres de leur famille, affamés, les pressant de rentrer au bercail. Des milliers d’entre eux, souvent des unités entières, ont donc déserté en emportant leurs armes avec eux et, de retour dans leurs régions, la plupart ont activement résisté à la conscription, et ce, jusqu’à la fin de la guerre.
Plus tard, à l’hiver 1863, après la victoire décisive de l’Union à Missionary Ridge, les forces confédérées, vouées à l’échec, ont subi une véritable hémorragie de désertions. Là encore, les déserteurs étaient principalement des recrues issues des milieux ruraux qui n’avaient aucun intérêt direct à ce que l’esclavage soit maintenu, d’autant que cet objectif semblait devoir leur coûter la vie. Leur attitude est fort bien résumée par un dicton populaire à l’époque dans les rangs des Confédérés, qui disait que cette guerre était une « guerre de riches faite par les pauvres ». La justesse de ce slogan était d’ailleurs renforcée par le fait que les riches propriétaires de plantations comptant plus de 20 esclaves avaient le droit de garder un de leurs fils à la maison, prétendument pour assurer le maintien de la discipline au travail. En tout et pour tout, près d’un quart de million d’hommes en âge d’être enrôlés ont déserté ou ont tout simplement échappé à la conscription. À cet affront, porté contre une Confédération déjà largement surpassée en nombre, s’est ajoutée la quantité considérable d’esclaves, surtout en provenance des États de la frontière, qui s’étaient réfugiés derrière les lignes de l’Union pour ensuite en grossir les rangs....

Table des matières

  1. Petit éloge de l’anarchisme
  2. Page de titre
  3. Préface
  4. Chapitre 1
  5. Chapitre 2
  6. L’ordre vernaculaire, l’ordre officiel
  7. Chapitre 3
  8. Chapitre 4
  9. Chapitre 5
  10. Chapitre 6
  11. Remerciements
  12. Table
  13. Quatrième de couverture