Les membres professionnels des juridictions de l’ordre judiciaire, bénéficiant d’un statut constitutionnel, regroupés en un corps unique comptant en son sein les magistrats du siège (juges et présidents, conseillers et premiers présidents) et les magistrats du ministère public (procureurs et leurs substituts, procureurs généraux et leurs substituts généraux et avocats généraux).
I. Le statut
A Les dispositions communes
Le statut des magistrats de l’ordre judiciaire résulte tout d’abord des dispositions constitutionnelles relatives à l’autorité judiciaire et à son indépendance, ainsi que des exigences de droit européen visant à garantir la compétence, l’indépendance, l’impartialité, la neutralité des membres du corps judiciaire. Ce statut des magistrats est ensuite fixé par l’ordonnance no 58-1270 du 22 décembre 1958. Les magistrats sont des agents publics rémunérés par l’État, mais ils disposent d’un statut distinct de celui des autres fonctionnaires qui permet la protection des missions spécifiques qui leur sont confiées.
Le corps judiciaire est composé des magistrats du siège et du parquet ainsi que des auditeurs de justice de l’École nationale de la magistrature. En vertu du principe d’unité du corps, tout magistrat a vocation à être nommé, au cours de sa carrière, à des fonctions du siège et du parquet.
L’exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l’exercice de toutes fonctions publiques et de toute autre activité professionnelle ou salariée, sauf les activités d’enseignement. Toute délibération politique est interdite au corps judiciaire. Toute manifestation d’hostilité au principe ou à la forme du gouvernement de la République est interdite aux magistrats, de même que toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions. Est également interdite toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions (V. Fiche no 33).
B Le recrutement
Il existe plusieurs voies de recrutement et une loi organique a prévu la répartition du nombre de postes par type de recrutement. L’accès à la magistrature peut se faire par la voie du concours. Il y a trois types de concours : le premier concours dit externe réservé aux étudiants, le deuxième concours est réservé aux agents des trois fonctions publiques justifiant de quatre années d’exercice professionnel, le troisième concours ou concours complémentaire est destiné aux personnes travaillant dans le secteur privé ayant une formation juridique et une pratique effective du droit. L’accès à la magistrature peut encore se faire sur titres. La France compte environ 8 300 magistrats. Ce nombre est sensiblement équivalent à l’effectif judiciaire du pays au milieu du XIXe siècle, et son insuffisance est régulièrement dénoncée.
C Les magistrats du siège
Les magistrats du siège sont inamovibles. En conséquence, le magistrat du siège ne peut recevoir, sans son consentement, une affectation nouvelle, même en avancement.
Placé sous l’autorité fonctionnelle, mais non décisionnelle, d’un président ou premier président, les magistrats du siège tranchent les conflits entre les personnes et sanctionnent les auteurs d’infractions pénales. Qu’ils soient juges d’instance, juges aux affaires familiales, juges des enfants, juges d’instruction ou juges d’application des peines, conseiller à la cour d’appel ou conseiller référendaire à la Cour de cassation, ils prennent leurs décisions après étude des dossiers et confrontation des parties. Le travail de juge est divisé entre l’instruction des dossiers, la prise de décision, l’écoute et l’arbitrage. Les décisions sont rendues « au nom du peuple français ».
D Les magistrat du parquet
(V. Fiche no 77)
Les magistrats du parquet
ne bénéficient pas de la garantie d’inamovibilité. Leur indépendance est limitée par le fait qu’ils sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du garde des Sceaux, ministre de la justice. Mais, ils disposent d’une liberté absolue de parole à l’audience. Depuis la loi n
o 2013-669 du 25 juillet 2013, relative aux attributions du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et de mise en œuvre de l’action publique, est inscrite dans le Code de procédure pénale l’interdiction pour le ministre de la Justice d’adresser aux procureurs de la République des instructions individuelles.
Les magistrats du parquet représentent le ministère public devant toutes les juridictions, à titre obligatoire ou facultatif. À ce titre, ils défendent les intérêts de la société et veillent au respect de l’ordre public. Ils interviennent surtout en matière pénale, mais aussi devant les juridictions civiles (adoption, nationalité, régimes matrimoniaux, tutelles…), en matière commerciale (notamment les procédures collectives) et le cas échéant prud’homale. En matière pénale, ils assurent la direction de l’activité de police judiciaire des services d’enquête, contrôlent leur activité judiciaire, et lorsqu’une infraction est commise, ils apprécient les suites à donner aux plaintes et aux procès-verbaux. Ils représentent le ministère public aux audiences des juridictions pénales et veillent à l’exécution des peines. Comme tout magistrat, ils participent à la protection des libertés individuelles, mais ils assurent en outre la défense de l’intérêt général et veillent à l’application de la loi. C’est en ce sens qu’ils prennent leurs réquisitions orales aux audiences, en proposant une décision aux juges.
Le terme « parquet » désigne l’organisation, au niveau du tribunal de grande instance, de l’ensemble des magistrats du ministère public qui sont chargés de requérir l’application de la loi et de conduire l’action pénale au nom des intérêts de la société. Au niveau de la cour d’appel, le ministère public est représenté par le procureur général et son parquet « général ». L’ensemble des magistrats d’un même parquet ou d’un parquet général est indivisible et substituable, ce qui signifie que chacun d’entre eux peut représenter indifféremment le ministère public au cours de la procédure.
Le parquet, dont la dénomination doit son origine au « petit parc » clos dans lequel se tenaient à l’audience les procureurs du roi sous l’Ancien Régime, possède la mission générale de veiller à l’application de la loi au nom du respect des intérêts fondamentaux de la société. Cela prend la forme d’activités diverses : l’exercice de l’action pénale selon le principe de l’opportunité des poursuites, en application de la politique pénale du gouvernement ; l’exécution des décisions pénales définitives ; le signalement et la prévention de l’enfance en danger ; l’intervention dans certaines procédures civiles, quand la loi le prévoit et pour la défense de l’ordre public ; la participation aux politiques publiques locales en matière de sécurité et de prévention de la délinquance…
E La responsabilité des magistrats
La responsabilité pénale des magistrats est engagée selon les mêmes modalités que les autres citoyens ; il n’existe pas de règles procédurales spécifiques au jugement d’un magistrat, si l’on excepte le « dépaysement » de l’affaire, les textes permettant que les procédures pénales visant un magistrat soient instruites, poursuivies et jugées ...