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Comment la construire?

  1. 322 pages
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À propos de ce livre

Lieux majeurs de toutes les accumulations matérielles, sociales et économiques, les villes sont au coeur de la question des chan­gements climatiques. Leur avenir dépendra de notre capacité à inventer des espaces urbains habitables, justes et résilients. Les auteurs font ici le pari d'une action collective capable de transformer les menaces en force constructrice, de maîtriser la vulnérabilité des espaces urbanisés tout en renforçant leur résilience. Pour ce faire, il faut comprendre les formes et les structures de la ville contemporaine, afin d'orienter les poli­tiques et la planification territoriale.Ce livre offre un recueil des connaissances les plus récentes sur l'adaptation des villes aux changements climatiques et rassemble les réflexions de professeurs-chercheurs et de pro­fessionnels non seulement du Québec mais aussi de France, de Suisse, des États-Unis et du Brésil. Les auteurs y analysent avec acuité certaines des controverses les plus pressantes sur le climat, sujet épineux et source de grandes préoccupations dans la population.

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Informations

CHAPITRE 1

Une analyse critique
des cadres théoriques

Gonzalo Lizarralde, Lisa Bornstein, Danielle Labbé,
Isabelle Thomas, Colin Davidson, Kevin Gould
et Christopher Bryant
«Une punition divine pour les grands péchés que nous avons commis et commettons toujours envers ceux que nous appelons les intouchables»: c’est en ces termes que Mohandas Karamchand Gandhi (1869-1948) a expliqué le tremblement de terre survenu à Bihar, en Inde, en 1934. Malgré – ou peut-être à cause de – la notoriété de Gandhi, cette phrase a, bien entendu, suscité une grande controverse en Inde et ailleurs. Or, cette conception du désastre – en tant que châtiment divin ou résultat de forces supranaturelles – a été pendant des siècles au cœur de l’imaginaire collectif et a traditionnellement servi à donner un sens aux catastrophes naturelles.
Il faudra attendre le XXe siècle pour voir émerger des conceptions scientifiques qui verront les désastres comme des phénomènes physiques causés par des forces naturelles à la fois mesurables et explicables. Les perturbations et les désastres sont dès lors conceptualisés comme des interruptions «naturelles» de l’ordre normal des sociétés30. Ce n’est que dans les années 1970 que ce caractère «naturel» des catastrophes déclenchées par des phénomènes géologiques et météorologiques sera, à son tour, remis en question. La théorie de la vulnérabilité reconnaîtra alors que les systèmes naturels et sociaux ne sont pas également sensibles face aux pressions dynamiques et qu’ils présentent des capacités différenciées à recouvrer un état de fonctionnement stable31. En d’autres termes, les systèmes sont plus ou moins vulnérables face aux perturbations qui les affectent. Il s’agit là d’une évolution importante en ce qu’on ne conçoit plus les désastres comme des phénomènes strictement «naturels». Au contraire, les effets des désastres sur les milieux de vie sont intimement liés aux conditions structurelles de la vulnérabilité sociale, économique, culturelle et politique qui caractérisent ces milieux32. Ces conditions seront construites dans le temps de façon graduelle à partir des causes historiques (root causes), qui entraîneront des pressions dynamiques (dynamic pressures) qui, elles, conduiront à leur tour à des conditions de fragilité (unsafe conditions).
Dès lors, les désastres ne sont plus perçus comme des interruptions de l’ordre social normal, mais plutôt comme le produit de ce dernier33. En ce sens, les désastres sont conceptualisés comme des constructions sociales influencées par la pauvreté, la ségrégation et les inégalités, et par la fragilité sociale et économique des populations. Ce qui émerge de cette évolution du raisonnement sur les désastres est donc une vision «ségrégationniste» bien illustrée par le début d’un article du journal Le Monde paru en 2010: «Face aux colères de la nature, les peuples ne sont pas égaux34
Dans un premier temps, la popularité de cette approche a alimenté des contributions importantes sur la définition de la vulnérabilité elle-même ainsi que sur les modèles théoriques et méthodologiques qui permettent d’expliquer l’évolution dans le temps de la vulnérabilité35. Dans un deuxième temps, les chercheurs ont tenté de développer des méthodologies d’évaluation de la vulnérabilité, telles que les méthodes que proposent Birkmann (2006) et le World Risk Report (2011).
Il est indéniable que la théorie de la vulnérabilité constitue une contribution majeure dans le domaine de la réduction des risques. Cette approche a cependant suscité d’importantes interrogations d’ordres théorique et pratique.

Des critiques d’ordre théorique
de la vulnérabilité

L’approche par la vulnérabilité omet d’abord que les désastres sont aussi une représentation sociale et subjective fortement liée à une décision politique provenant des acteurs gouvernementaux. Un événement est considéré comme un «désastre» quand les élites politiques (et médiatiques) lui apposent ce qualificatif. Ce caractère subjectif devient évident quand nous constatons que des milliers de personnes meurent ou sont affectées quotidiennement par les effets de la pollution, du crime ou d’événements météorologiques plus «mineurs» ou discrets, pour lesquels les autorités ne sentent pas le besoin de mettre en place des mesures politiques, organisationnelles, budgétaires ou logistiques extraordinaires ou d’urgence. Ainsi, le caractère «catastrophique» de certains événements est modulé par sa représentation sociotemporelle dans un contexte donné, et cette représentation est elle-même, largement influencée par le degré de tolérance de la société, des médias et des élites politiques face aux perturbations.
Deuxièmement, la conception des catastrophes proposée par les tenants de la théorie de la vulnérabilité ne permet pas d’expliquer facilement les effets des perturbations environnementales sur les quartiers, villes et établissements où résident des populations aisées, ayant un statut social privilégié ou ayant un fort niveau de développement technologique. En effet, le caractère ségrégationniste de la théorie de la vulnérabilité masque le fait qu’une communauté humaine ou un territoire puisse être fragilisé du fait même de son développement technologique. Il suffit de penser au risque de désastre nucléaire déclenché par le tsunami au Japon en 2011 pour se rendre compte que ce type de désastre ne peut pas être facilement expliqué par les arguments d’exclusion, de ségrégation et de marginalité historique qui permettent d’expliquer les désastres survenus dans certains pays «du Sud». Bref, si les outils analytiques issus des recherches sur la vulnérabilité permettent d’expliquer les désastres déclenchés par les inondations saisonnières au Bangladesh, par exemple, ces mêmes outils permettent difficilement d’expliquer le risque d’un désastre nucléaire dans un pays riche.
Afin de répondre à cette critique, plusieurs spécialistes ont récemment soutenu l’idée que la vulnérabilité (V) est le résultat combiné de deux facteurs: l’exposition aux risques (E) et la fragilité face à ces risques (F). Cette approche est souvent résumée par l’équation suivante: V = E x F. Parfois, l’exposition aux risques peut être la conséquence de décisions humaines (par exemple, le choix de localisation de certaines activités sur le territoire). Or, dans d’autres cas, les causes de cette exposition ne sont pas facilement liées à un choix délibéré de contrôle politique ou économique, et alors il est difficile de ne pas voir dans cette définition plus nuancée de la vulnérabilité un affaiblissement de ce qui est – précisément – sa plus importante contribution: l’accent mis sur la responsabilité sociale et historique des conditions de fragilité et sur la vision du désastre comme le résultat des conditions d’injustice sociale. La fragilité comprend également la capacité d’adaptation à des catastrophes, particulièrement quand il y a une récurrence de catastrophes dans le même territoire ou dans des territoires semblables.
Troisièmement, en se focalisant sur les effets historiques des actions de la société dans la construction de la vulnérabilité, cette théorie peine à reconnaître le rôle joué par des facteurs externes à la société touchée par un désastre, celle-ci étant dès lors hâtivement considérée comme imputable bien qu’elle ne soit pas nécessairement la source du problème auquel elle fait face. Si la théorie de la vulnérabilité reconnaît que la société joue un rôle important dans la modulation des effets causés par les aléas naturels, elle permet difficilement d’expliquer les situations où une communauté est affectée par un aléa naturel résultant de conditions provoquées dans une autre société ou par le cumul global des effets de plusieurs communautés (par exemple, une inondation déclenchée par la déforestation dans un pays voisin, ou la pollution créée par une autre nation ou par les changements climatiques globaux).
Finalement, la théorie de la vulnérabilité pose un problème d’ordre analytique. Le pressure and release model (PRM), qui a largement influencé la théorie de la vulnérabilité, reconnaît que l’accumulation de conditions de fragilité résulte en un moment de rupture: le désastre. Or, cette conception des événements, fragmentée en deux temps (les phases pré- et post-catastrophe), est vue de plus en plus comme fictive. En effet, le moment de post-exposition aux aléas est aussi un moment de pré-exposition future, car les perturbations d’ordre «naturel» interagissent constamment avec des perturbations causées par l’ordre sociopolitique et économique. Regardons quelques exemples.
Tout d’abord, on sait que l’urbanisation accélérée de la planète accentue les conséquences négatives des aléas naturels. Cette urbanisation est aussi un facteur important dans la variabilité du climat, qui est à son tour un facteur important de l’augmentation de la fréquence des perturbations climatiques extrêmes (incluant la montée du niveau de la mer, l’augmentation de l’intensité des cyclones, la perte accélérée de la couverture végétale et l’incidence accrue des périodes de canicule et de sécheresse). En parallèle, les conflits armés exacerbent notamment la fragilité des populations rurales, tandis que d’autres pressions sociopolitiques moins tangibles affectent de façon importante les populations urbaines. La stigmatisation des quartiers précaires comme lieux d’insécurité et de criminalité sert à justifier l’éviction et le déplacement forcé des populations. Certaines politiques urbaines et de développement contribuent à marginaliser les habitants les plus pauvres, nuisent aux projets de reconstruction et de création des solutions de logement. De grands projets et initiatives de développement économique (barrages hydroélectriques, jeux olympiques, etc.) contribuent aussi au déplacement des personnes vulnérables. De plus, les populations périurbaines de plusieurs villes du Sud global sont quotidiennement victimes des processus d’accaparement foncier (land grab) qui les «poussent» hors des terres qu’elles habitent et exploitent souvent depuis longtemps.
On n’assiste pas nécessairement ici à une accumulation de facteurs dont les effets réunis se traduisent par un seul moment de rupture (un désastre). En revanche, on constate l’existence de plusieurs moments de perturbation, de sorte que les notions de «pré-» et de «post-» désastre deviennent difficiles à différencier et que les causes et les conséquences de la vulnérabilité se confondent.

Des critiques d’ordre pratique
de la théorie de la vulnérabilité

La conceptualisation des risques et des effets des catastrophes par la notion de vulnérabilité recèle aussi au moins deux difficultés d’ordre pratique. Premièrement, cette approche offre peu de pistes quant aux manières de s’y prendre pour réduire les risques et leurs impacts. En mettant l’accent sur la construction graduelle et historique des causes de vulnérabilité, cette approche peut donner aux acteurs et aux décideurs l’impression d’avoir bien peu de prise ou de moyens d’agir, à tout le moins à court et à moyen terme, sur les facteurs qui permettraient de réduire le degré de vulnérabilité des populations et des territoires. Comment, en effet, diminuer les vulnérabilités quand elles sont le résultat des facteurs sociaux structurants et historiquement ancrés? Il est difficile de croire que cette difficulté théorique n’ait pas joué un rôle dans l’émergence d’une attitude cynique observée dans plusieurs contextes du Sud quant au potentiel d’agir face, par exemple, aux aléas naturels de plus en plus fréquents. De la même façon, on peut imaginer que la focalisation sur les structures profondes (et donc moins malléables) des sociétés, promue par la théorie de la vulnérabilité, a contribué à soutenir les approches d’intervention post-désastre qui visent la production rapide d’abris au détriment des services, des meilleurs systèmes d’éducation ou des infrastructures.
Face à ces défis, Lizarralde et al.36 ont redéfini la notion de vulnérabilité comme correspondant à l’accès limité autant à des ressources tangibles (matérielles), telles que le logement, les infrastructures, les services publics, les assurances et les ressources financières, entre autres, qu’à des ressources intangibles (immatérielles) telles que l’éducation, le pouvoir de décision, l’information, les droits fondamentaux. Il découle de cette redéfinition que le processus de réduction de la vulnérabilité devrait se concentrer sur des actions permettant de donner aux populations un accès plus large et plus juste à ces multiples ressources. Les auteurs continuent toutefois de reconnaître qu’afin d’expliquer l’accès limité des populations aux ressources tangibles et intangibles listées ci-dessus, il demeure nécessaire de prendre en compte les conditions historiques et contextuelles relevés par la théorie de la vulnérabilité.
En deuxième lieu, l’explication linéaire de la construction des conditions de sensibilité qui sous-tend la théorie de la vulnérabilité peut parfois mener à l’attribution de fausses relations de cause à effet. Par exemple, dans certains contextes du Sud global, cette approche a contribué à consolider l’idée selon laquelle le secteur informel contribuerait à la vulnérabilité des populations pauvres. Cet argument a servi de point ...

Table des matières

  1. Avant-propos
  2. Introduction
  3. PREMIÈRE PARTIE
  4. De la vulnérabilité à la résilience
  5. CHAPITRE 1
  6. CHAPITRE 2
  7. CHAPITRE 3
  8. CHAPITRE 4
  9. DEUXIÈME PARTIE
  10. De l’incertitude à l’innovation
  11. CHAPITRE 5
  12. CHAPITRE 6
  13. CHAPITRE 7
  14. CHAPITRE 8
  15. CHAPITRE 9
  16. CHAPITRE 10
  17. TROISIÈME PARTIE
  18. vivre avec le risque
  19. CHAPITRE 11
  20. CHAPITRE 12
  21. CHAPITRE 13
  22. CHAPITRE 14
  23. CHAPITRE 15
  24. Conclusion
  25. Bibliographie par chapitre
  26. Remerciements
  27. Les collaborateurs