De l'islam d'hier et d'aujourd'hui
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De l'islam d'hier et d'aujourd'hui

  1. 344 pages
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De l'islam d'hier et d'aujourd'hui

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Ce livre regroupe les réflexions sur l'islam menées par l'auteur dans différents contextes. Elles ont toutes comme ambition de donner une perspective historique à ce qui est souvent présenté comme des catégories indissociables ou des traits essentiels d'une religion sur laquelle l'histoire n'a pas de prise et qui est extérieure aux réalités des sociétés qui s'en réclament. Certains textes parlent de la période classique, des débuts de l'islam à la fin du fameux « âge d'or » de la civilisation arabo-musulmane; d'autres portent sur la période contemporaine marquée par des rapports contradictoires avec les temps modernes. Sans être une étude exhaustive des faits islamiques, les questionnements particuliers de l'auteur sur des réalités passées et présentes de l'islam en dressent néanmoins un portait achevé. On suivra l'évolution et la maturation du penseur à la frontière de la recherche scientifique et d'un engagement intellectuel en faveur de l'universalité des droits de la personne.

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Informations

CHAPITRE 1

Du paléo islam aux clôtures théologiques1

Les religions, toutes les religions, ne peuvent être appréhendées scientifiquement que comme des phénomènes culturels qui apparaissent et évoluent dans l’histoire en rapport avec le renouvellement du besoin de sens qui pousse les humains à chercher, par divers moyens, dont les religions, à supporter l’idée de la finitude de l’être dont ils prennent conscience en réalisant que «la vie n’est que le temps qui nous est donné pour mourir». À l’angoisse et au sentiment d’absurde que cette prise de conscience génère, toutes les religions apportent la même réponse implacable: ce n’est pas la vie qui est finie, mais la mort présentée comme un passage de cette vie à une autre qui sera meilleure ou pire en fonction de ce qu’on aura fait avant la mort: le paradis ou l’enfer, le règne éternel des kami (des dieux) ou les ténèbres du néant, une caste supérieure ou une caste inférieure, une meilleure forme de vie ou une déchéance selon les représentations propres à chaque religion concernant la hiérarchie qui structure le monde et les rapports entre les êtres, etc. Tant qu’elles ont la capacité de contribuer à répondre au besoin de sens dans le tumulte des évolutions souvent imprévisibles, et par moments chaotiques, du monde et des sociétés qui s’y identifient, elles se maintiennent en se renouvelant et en se prêtant à des réinterprétations, des refondations et des «bricolages» aussi imprévisibles que les changements qui affectent le monde. Le jour où elles perdent cette capacité, elles laissent la place à d’autres religions, à d’autres spiritualités, à d’autres vecteurs de quête de sens plus à même de remplir cette fonction. Dans ce processus commun à l’histoire et au destin de toutes les religions, apparaissent des courants contradictoires se disputant la légitimité de représenter la religion et de parler en son nom et revendiquer le monopole d’en délivrer le sens. Certains plus enclins à épouser le siècle, à accepter le changement ou la «réforme», d’autres dominés par la peur de voir le changement emporter «l’intégrité de la foi» (d’où leur qualification d’intégristes), prêts à la défendre bec et ongles, quitte à tourner le dos à l’histoire et à sacrifier le monde pour sauver la pureté des dogmes, ou ce qu’ils perçoivent comme tel, car tout est question de perception et de représentations érigées en vérités absolues et intangibles… jusqu’à ce que le nouveau, rejeté comme «innovation» inconcevable, emporte la doxa et devienne l’évidence qui commande la nouvelle façon «orthodoxe» de déterminer le sens et le chemin à suivre (premier sens, souvent occulté, du mot charia). Les «aggiornamento» que subissent ainsi toutes les religions, partout et à toutes les étapes des grandes évolutions qui les imposent, à des rythmes différents et avec des décalages liés à «l’évolution inégale» des ordres socioéconomiques, politiques et culturels, ne se font pas pacifiquement, sans déchirement, douleur ou violence. Ils peuvent passer par des guerres meurtrières et différentes formes de violence et de «folies» collectives que toutes les sociétés, de toutes les cultures et de toutes les religions, ont connues et sont toujours susceptibles de reproduire.
L’islam n’a pas échappé à ce sort de toutes les religions, car, on ne saurait assez le rappeler par les temps qui courent, il n’est qu’une religion parmi les autres et ne peut être approché scientifiquement, loin de toutes les idéologies essentialistes des musulmans et de ceux qui cultivent la peur et la haine de l’islam, que dans cette perspective et sous cet angle considérant les musulmans comme des humains au même titre que les autres, ni meilleurs ni pires que les autres. Il est passé dans son histoire par les grandes étapes connues par d’autres religions qui ont traversé les frontières du temps, de l’espace et des cultures, avec toutes les «conversions» nécessaires pour survivre aux aléas de la transhumance: l’apparition dans un contexte particulier, les hésitations et les conflits inhérents à la naissance et à l’expansion, le destin forgé dans la rencontre d’autres traditions religieuses et culturelles, la peur des effets de ce processus sur son message et la volonté d’ériger des orthodoxies pour en garantir la pérennité et la «pureté» originelle, la confrontation entre les orthodoxies, et leurs gardiens, d’une part, et, d’autre part, les bouleversements affectant tous les niveaux de tous les domaines du savoir, de la culture et des ordres politiques et socioéconomiques, etc.
Les processus qui ont présidé à la genèse des faits islamiques et à l’apparition de l’islam en Arabie au début du VIIe siècle, font l’objet de nouvelles interrogations et d’hypothèses grâce, notamment, aux découvertes archéologiques, et aux recherches relatives au Coran et à la formation des premières traditions islamiques, dans le contexte de ce que les historiens appellent «l’antiquité tardive»: Quels rapports avec les croyances de l’Arabie et les traditions monothéistes présentes dans la région à cette époque (christianisme et judaïsme, mais aussi zoroastrisme, dont les influences sur le passage du judaïsme de la monolatrie au monothéisme, et sur la formation de la cosmogonie et de l’eschatologie biblo-coranique, sont affirmées par de nombreuses recherches)? Quel rôle ont joué les bouleversements de l’ordre tribal de l’Arabie sous l’effet des conflits entre les Sassanides perses et les Byzantins et des impacts de ces bouleversements sur l’évolution du commerce caravanier du Yémen, avant qu’il ne devienne le théâtre des guerres entre ces deux puissances? Quel rapport entre l’avènement de la nouvelle religion et l’affirmation du rôle de Quraych, et de son sanctuaire à La Mecque, et la formation de la nouvelle religion? Quelle est la part du religieux et du politique dans l’expérience de Médine du vivant du Prophète puis sous le règne de ses Compagnons entre 622 et 657? Quel rapport entre les conflits politiques au sujet du Califat-Imamat et la genèse des obédiences et de leurs «orthodoxies» sous le règne des Omeyyades et des Abbassides? Quel rôle jouera l’institutionnalisation de ces orthodoxies, et de la «clôture dogmatique» qui en est le corollaire, sur le devenir de la pensée, de la culture, des systèmes politiques et des sociétés musulmanes?
Concernant la genèse des faits islamiques, les découvertes archéologiques, en Arabie, en Jordanie et dans d’autres pays de la région, ont permis le développement de nouvelles recherches éclairant les conditions de cette genèse et la constitution des corpus antérieurs à la formation des orthodoxies devenues, au fil des siècles, le prisme à travers lequel les musulmans, mais aussi beaucoup de non-musulmans, perçoivent et analysent les débuts de l’islam et interprètent ses textes et ses faits fondateurs. Aux travaux de grands orientalistes, islamologues et historiens des XIXe et XXe siècles, de récentes recherches sont venues apporter de nouveaux éclairages sur ce que Aziz Azhmeh2 et d’autres spécialistes appellent le Paleo islam, ainsi que sur l’histoire du texte coranique3, et la formation des sources de la tradition musulmane (les livres de hadith, de sîra, des maghâzî, des tabaqât, des corpus d’historiographie constitués tardivement dans des visées hagiographiques et polémistes, etc.). Ces contributions donnent des outils supplémentaires pour aller plus loin dans la critique historique des sources sacralisées depuis l’institutionnalisation des orthodoxies aux environs des IVe et Xe et Xe et VIe siècles, avant l’instauration de la «clôture dogmatique»4 qui s’est imposée, selon Mohamed Arkoun, depuis Ibn Taymiyya, comme cadre en dehors duquel les musulmans n’ont plus le droit de penser. Arkoun précise que «la clôture dogmatique n’est pas le résultat des seuls enseignements de la religion; ceux-ci ne font que sacraliser des traditions, des rituels, des croyances, des “vérités” très anciens, convergent dans la question du pouvoir, de l’ordre qu’il assure et de l’obéissance de ceux qui “bénéficient” de cet ordre. Vue sous cet angle, la clôture dogmatique nous renvoie à des instances de portée anthropologique: la dette de sens à l’égard de Dieu qui le “révèle”, la dette de sécurité à l’égard du pouvoir qui assure l’“ordre”, l’obéissance inconditionnelle qu’entraîne ce sentiment de dette5
Une telle sortie passe par la poursuite des recherches favorisées par la critique historique et par les découvertes archéologiques. Dans ce sens, il est désormais indispensable de rompre avec la vision d’une Arabie dont les croyances et la culture étaient complètement étrangères, voire opposées, aux conceptions d’un islam qui ne seraient qu’un «rappel» et une continuation des messages du christianisme et du judaïsme dont on sait ce qu’ils doivent, de leur côté, au zoroastrisme et aux croyances du Proche et du Moyen-Orient antique. L’islam, comme toutes les autres religions, doit être approché comme un phénomène historique, qui s’est constitué dans un processus de mutations sociopolitiques et culturelles de la vie en Arabie, sous l’effet des relations diverses avec son environnement. Les conflits entre les Byzantins et les Perses, impliquant des tribus arabes au nord et au sud de la Presqu’île arabique, le commerce caravanier entre les trois continents de l’Ancien Monde, le déplacement des routes de ce commerce favorisant les nouveaux relais du Hijaz et de Najd, au détriment du Yémen, notamment à partir du VIe siècle, les alliances tribales nouées sous l’égide de Quraych et de son sanctuaire, La Mecque, pour sécuriser ce commerce et en tirer profit, les échanges culturels et spirituels entre les différentes communautés mises en relation autant par le commerce que par la guerre et les alliances, etc., n’étaient pas sans rapport ou sans effets sur la genèse de la nouvelle religion. Le contenu du Coran et des traditions fondatrices de l’islam, y compris dans les versions épurées qui nous sont parvenues, témoigne, de différentes manières, de ce rapport et de ces effets. Il en est de même pour l’expérience politique qui a accompagné l’avènement de l’islam, notamment après l’hégire, en l’an 1/622; elle est dans le prolongement du processus de centralisation, autour de Quraych et de La Mecque, à partir du Ve siècle. Muhammad n’a pas créé une théocratie ou un «État islamique». La «Charte» de Médine, dont nous sont parvenues différentes versions, montre qu’il ne s’agit que d’un élargissement de l’antique organisation tribale, maintenant aux différentes composantes tribales et confessionnelles leurs prérogatives et leurs coutumes antérieures, dans le cadre d’une alliance dirigée d’abord contre La Mecque, puis en vue d’élargir la conquête à l’ensemble de l’Arabie et de ces environs. Sa sacralisation ultérieure, avec toutes les occultations et les récits hagiographiques nécessaires à une telle entreprise, n’arrive pas à lui enlever son caractère humain inscrit dans l’histoire d’une communauté humaine sujette à toutes les tentations du pouvoir, avec les calculs politiques, les alliances, les révisions et les revirements qu’impose l’adaptation aux rapports de forces6. Les péripéties du Califat de Médine, puis des Califats Omeyyade et Abbasside, et des différents conflits qui en ont jalonné l’histoire, avec les dissidences et les divisions politico-religieuses débouchant sur la constitution d’obédiences rivales (muhakkima dont il ne reste que l’ibadhisme, chiites avec diverses ramifications, mu‘taziles, sunnites avec différentes écoles, confréries soufies plus ou moins rattachées à ces obédiences, etc.), ont lourdement pesé sur le passage de la transmission orale des «discours coraniques», à une vulgate officielle imposée par le pouvoir qui n’a pas hésité à brûler les codex qui ont continué à circuler clandestinement jusqu’au XIe siècle7. De même, les conflits entre les dynasties rivales et les obédiences ont influencé la compilation des différentes traditions et les récits relatifs aux événements qui ont marqué la naissance de l’islam et les premiers siècles de son expansion. C’est ce qui explique, entre autres, les divergences entre les corpus «authentiques» revendiqués par les différents courants de l’islam. L’institutionnalisation des orthodoxies par les pouvoirs politiques, appuyés par les théologiens gardiens de ces orthodoxies, a fini par imposer une «histoire sainte» et par sacraliser ce qui relevait auparavant de thèses divergentes entre «musulmans» (maqâlat al-islâmiyîn, selon l’expression d’Abû Al-Hasan Al-Ach‘arî avant qu’il n’élabore la doctrine grâce à laquelle il sera reconnu comme l’Imam référence du sunnisme (imâm ahl-al-jamâ‘a wa’l-sunna), pour rivaliser avec les orthodoxies chiites et celles d’autres obédiences s’enfermant chacune dans sa «clô...

Table des matières

  1. PRÉFACE
  2. INTRODUCTION
  3. CHAPITRE 1
  4. CHAPITRE 2
  5. CHAPITRE 3
  6. CHAPITRE 4
  7. CHAPITRE 5
  8. CHAPITRE 6
  9. CHAPITRE 7
  10. CHAPITRE 8
  11. CHAPITRE 9
  12. CHAPITRE 10
  13. CHAPITRE 11
  14. CHAPITRE 12
  15. CHAPITRE 13
  16. CHAPITRE 14
  17. CHAPITRE 15
  18. CHAPITRE 16
  19. CHAPITRE 17
  20. CHAPITRE 18
  21. EN GUISE DE CONCLUSION
  22. Islam et laïcité: «exception islamique» ou «normale normalité de l’islam»