Profession historien
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À propos de ce livre

Pour Pierre Bonnechere, l'histoire est le compte rendu raisonnĂ© d'une enquĂȘte scientifique dans un passĂ© humain Ă  jamais refermĂ© sur lui-mĂȘme, sous le regard amusĂ© de trois fĂ©es retorses, nommĂ©es VĂ©ritĂ©, Chance et ObjectivitĂ©. Sensible aux questions de mĂ©thode, l'auteur prend ses exemples en des pĂ©riodes et en des lieux divers, de l'AntiquitĂ© au XXIe siĂšcle, de la GrĂšce et de Rome au QuĂ©bec. Il rĂ©flĂ©chit autant aux problĂšmes concrets rencontrĂ©s par les historiens qu'Ă  leur statut dans l'histoire. Le paradoxe n'est qu'apparent: l'histoire est elle-mĂȘme un objet d'histoire.Enseignant l'histoire grecque Ă  l'UniversitĂ© de MontrĂ©al depuis 1993, Pierre Bonnechere y dirige le Centre d'Ă©tudes classiques, consacrĂ© Ă  l'histoire, Ă  l'archĂ©ologie et Ă  la littĂ©rature du monde grĂ©co-romain. Il est titulaire d'un doctorat en Philosophie et lettres (Histoire ancienne) de l'UniversitĂ© de Louvain (Belgique). Ses principaux intĂ©rĂȘts vont Ă  la religion et aux mentalitĂ©s de la GrĂšce antique. Il est plus particuliĂšrement spĂ©cialiste des modalitĂ©s de communication entre hommes et dieux, que ce soit par l'intermĂ©diaire du sacrifice animal et de son corollaire mythique, le sacrifice humain, ou par la divination, Ă  savoir les moyens de prendre connaissance des volontĂ©s divines.

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Informations

Année
2011
ISBN
9782760625778
1
L’histoire : dĂ©finition et finalitĂ©
L’histoire est « connaissance et rĂ©cit des Ă©vĂ©nements du passĂ©, des faits relatifs Ă  l’évolution de l’humanitĂ© (d’un groupe social, d’une activitĂ© humaine), qui sont dignes ou jugĂ©s dignes de mĂ©moire ; les Ă©vĂ©nements, les faits ainsi relatĂ©s ». Cette dĂ©ïŹnition du Petit Robert (2007) semble parfaite. À ce compte-lĂ  cependant, le premier venu dotĂ© d’une bonne mĂ©moire pourrait se proclamer historien. Ouvrons le dictionnaire Robert des noms propres et nous y lirons que Louis XIII est mort en 1643. Pas besoin d’avoir passĂ© des annĂ©es sur les bancs de l’universitĂ© pour cela. Mais, si le premier venu est capable de retenir les dates par cƓur, il sera bien en peine, par contre, de ressusciter le passĂ©. C’est lĂ  qu’on piĂšge les apprentis et les dilettantes, qui s’arrogent le droit de faire de l’histoire en croyant que c’est facile. Épinglant les faits, ils mettent sur le mĂȘme plan tous les types de documents et tous les dĂ©tails qu’ils y trouvent, avec une minutie qui parfois tire au comique : ainsi nombre de contributions locales sur l’histoire des villages, pour attachantes qu’elles soient, sombrent dans une litanie gĂ©nĂ©alogique des fondateurs et signalent avec un scrupule quasi religieux le nom de ceux qui ont contribuĂ©, le 12 aoĂ»t 1922, Ă  rĂ©parer la clĂŽture de la chapelle Saint-Antoine-de-Padoue Ă  Sainte-Ermenontrude-des-Petits-PrĂ©s.
Les faits, et les dates chĂšres aux historiens, sont bien entendu une condition nĂ©cessaire. Mais, en derniĂšre analyse, ils ne sont que les Ă©lĂ©ments de base avec lesquels l’historien doit faire la lumiĂšre sur le passĂ©, comme la connaissance des organes est la base fondamentale de la mĂ©decine, mais non son but ultime. L’histoire, en tant que savoir, n’est que le fruit d’un travail de reconstitution menĂ© selon une mĂ©thode rigoureuse, pĂ©trie Ă  la fois de science et d’intuition. Une mĂ©thode qui permet d’abord de trouver les tĂ©moignages pertinents Ă  sa recherche, puis de les interprĂ©ter avec justesse, en les forçant Ă  rĂ©vĂ©ler tout ce qu’ils ont Ă  rĂ©vĂ©ler, mais pas une once de plus. Une mĂ©thode qui mĂšne ensuite Ă  replacer tous les faits les uns par rapport aux autres, en dĂ©ïŹnissant leurs causes et leurs consĂ©quences potentielles. Chaque nouvelle Ă©tude dresse ainsi le tableau d’un pan du passĂ© qui s’imbrique dans le rĂ©seau de faits dĂ©jĂ  connus et le prĂ©cise, ou qui parfois le contredit en amenant les spĂ©cialistes Ă  revoir ce qu’ils croyaient acquis. GrĂące Ă  toutes ces dĂ©couvertes, petites et grandes, les historiens recomposent patiemment un passĂ© qu’ils ne peuvent faire revivre que dans ses grandes lignes, et non dans son incommensurable complexitĂ©.
L’histoire, c’est le compte rendu raisonnĂ© d’une enquĂȘte scientiïŹque dans le passĂ© humain Ă  jamais refermĂ© sur lui-mĂȘme, sous le regard amusĂ© d’une fĂ©e retorse, nommĂ©e VĂ©ritĂ©.
In historia veritas ?
La vĂ©ritĂ© existe-t-elle ? Non : il s’agit d’une abstraction philosophique inaccessible telle une brillante Ă©toile. S’il existe une vĂ©ritĂ©, ce serait le point de vue de Dieu, conscient du pourquoi et du comment de toute chose. Peu importe cependant qu’un chimiste ou un anthropologue ait la foi, car la vĂ©ritĂ© divine lui demeure inaccessible. L’historien, avec les moyens limitĂ©s dont il dispose – son intelligence rationnelle –, n’a donc d’autre avenue qu’une vĂ©ritĂ© partielle, relativisĂ©e par autant de ïŹltres irrĂ©mĂ©diablement dĂ©formants : son Ă©ducation, ses convictions et ses peurs, en bref sa propre personnalitĂ© prisonniĂšre des idĂ©es de son Ă©poque. MĂȘme les dictionnaires, ces temples sacrĂ©s de la vĂ©ritĂ©, ne sont pas innocents. L’excellent Robert des noms propres consacre ainsi toute une colonne Ă  Ravel, pour moins de la moitiĂ© Ă  Brahms, longtemps Ă©tiquetĂ© « injouable » en France et dont les mĂ©rites artistiques ne semblent Ă©voquĂ©s qu’à regret.
PoussĂ©e Ă  l’extrĂȘme, la relativisation de la vĂ©ritĂ© mĂšne Ă  la nĂ©gation de toute connaissance objective. Les thĂ©oriciens se disputent encore pour savoir si les lois mathĂ©matiques traduisent une rĂ©alitĂ© cachĂ©e qu’ils dĂ©couvrent ou si elles sont pures constructions logiques de l’intellect. Cette perception au dĂ©but insĂ©curisante concourt cependant Ă  rendre toute science attractive, puisque chaque spĂ©cialiste Ă  la recherche de la vĂ©ritĂ© toute nue ne peut jamais la prĂ©senter au monde que sous une robe diffĂ©rente. FĂ©e espiĂšgle, la vĂ©ritĂ© nue, que tout le monde connaĂźt mais que personne n’a jamais vue, possĂšde une gigantesque garde-robe. L’historien prend le parti de croire qu’on peut reconstruire le passĂ© avec un minimum de sĂ©curitĂ©, mĂȘme si la vĂ©ritĂ© historique est rĂ©solument plurielle, plusieurs explications pouvant adĂ©quatement rendre compte d’un mĂȘme Ă©vĂ©nement. Il a pour devoir, Ă©thique en quelque sorte, de tenter d’approcher la vĂ©ritĂ© au mieux de ses possibilitĂ©s : le temps, implacable juge, l’évaluera Ă  l’honnĂȘtetĂ© qu’il aura dĂ©ployĂ©e pour y tendre.
L’histoire et l’imperfection des sciences
Les historiens ont cru que la GrĂšce avait Ă©tĂ© envahie par des Indo-EuropĂ©ens qui y auraient apportĂ© leur langue, le grec, aux alentours de 1200 avant J.-C., jusqu’à ce que le dĂ©chiffrement de tablettes gravĂ©es prouve que le grec y Ă©tait parlĂ© 400 ans auparavant. AussitĂŽt la thĂ©orie se rĂ©Ă©labore et, sans l’ombre d’une autre preuve, voilĂ  les envahisseurs indo-europĂ©ens remontĂ©s Ă  1600. DĂ©cidĂ©ment l’histoire, science humaine, s’avĂšre incapable d’accĂ©der aux vĂ©ritĂ©s universelles issues de la raison parfaite, celles des sciences exactes. C’est drĂŽle pourtant
 Selon le manuel de physique fourni par mon collĂšge secondaire et donc un peu vieillot, le secret de la matiĂšre aurait alors Ă©tĂ© connu : les atomes, longtemps considĂ©rĂ©s comme les briques de base de l’univers, s’avĂ©raient dĂ©sormais composĂ©s de protons et de neutrons, qui eux Ă©taient les vĂ©ritables Ă©lĂ©ments irrĂ©ductibles de la matiĂšre. Cette certitude m’enchantait. Depuis, les protons se sont rĂ©vĂ©lĂ©s eux-mĂȘmes des assemblages complexes de quarks, en lesquels certains ont vu, comme de juste, la base de la matiĂšre. Histoire et physique, science humaine et science exacte. Cherchez l’erreur mĂ©thodologique commune.
Toutes les sciences s’inscrivent dans cette fantastique chevauchĂ©e du savoir, Ă  laquelle l’homme s’adonna dĂšs qu’il en eut les moyens intellectuels : comprendre le monde, se comprendre lui-mĂȘme – les deux faces insĂ©parables d’une mĂȘme mĂ©daille. Au reste, l’histoire est solidaire de bien d’autres disciplines Ă  premiĂšre vue peu apparentĂ©es, mais qui toutes procĂšdent du mĂȘme Ă©lan. Fouillant toujours plus loin dans le passĂ©, elle parvient au moment critique oĂč, privĂ©e des traces Ă©crites, elle doit composer avec les seuls objets matĂ©riels. Le relais est pris par l’anthropologie physique qui remonte jusqu’aux premiĂšres formes humaines. Le rameau des hominidĂ©s est lui-mĂȘme arrimĂ© au long processus d’évolution des espĂšces depuis l’apparition de la vie, dont s’occupe la palĂ©ontologie. Et dans quelles conditions la vie apparut-elle ? Le ïŹ‚ambeau est alors repris par les gĂ©ologues, qui expliquent la genĂšse des paysages de la Terre. Quant Ă  la planĂšte elle-mĂȘme, inïŹme partie de l’univers, elle tombe sous la loupe des astrophysiciens, qui tentent de remonter au big bang. Et au-delĂ  ? Rien : l’explication rationnelle s’évanouit dans le noir de l’inconnu. Les sciences exactes y rejoignent la mĂ©taphysique – cette branche de la philosophie qui s’intĂ©resse au problĂšme de l’ĂȘtre – et les diverses religions actuelles ou rĂ©volues, qui toutes proposent une explication de type mythologique au problĂšme des origines. Mais, en ïŹn de compte, quelle diffĂ©rence y a-t-il entre le big bang et un mythe expliquant la genĂšse de l’univers depuis un Ɠuf primordial ?
À quoi sert l’histoire ?
Grande question, rĂ©ponse dĂ©licate. Une science doit-elle avoir un but, sinon de dĂ©couvrir ? Pour le grand public, le savant est nĂ©cessairement Ă  la recherche d’inventions utiles et tangibles. En fait, il n’en est rien, mĂȘme dans les sciences dures : le physicien, l’informaticien, le biologiste essaient de comprendre la rĂ©alitĂ©, d’expliquer comment elle s’articule, en gros de percevoir « comment ça marche ». C’est le propre de la recherche dite fondamentale. Bien entendu, d’autres chercheurs dĂ©veloppent les potentialitĂ©s pratiques de ces dĂ©couvertes fondamentales, c’est lĂ  le propre de la recherche appliquĂ©e : la dĂ©couverte d’une nouvelle molĂ©cule donne lieu, par exemple, Ă  la crĂ©ation de mĂ©dicaments. Dans les sciences humaines, les choses ne sont pas diffĂ©rentes, mais leur ïŹnalitĂ© pratique est moins Ă©vidente au premier regard. Si l’historien professionnel cherche d’abord pour dĂ©couvrir, pour faire avancer les connaissances dans son domaine, l’utilitĂ© de l’histoire est plus dĂ©licate Ă  mettre en relief. Cette ïŹnalitĂ© a d’ailleurs Ă©voluĂ© au cours des siĂšcles, parce que l’histoire fut elle-mĂȘme un concept en constante Ă©volution.
Les « leçons » Ă  tirer de l’histoire
Si depuis le XIXe siĂšcle l’histoire est fascinĂ©e par les atours de la vĂ©ritĂ©, elle fut longtemps une branche des belles-lettres qui mettait l’accent sur la qualitĂ© du style, en mĂȘme temps qu’un puissant outil moralisateur qui entendait fournir exemples et contre-exemples aux bonnes gens dont la ïŹbre Ă©thique Ă©tait Ă  stimuler plus que leur sens critique. Cette sensibilisation a imperceptiblement Ă©voluĂ© dans le sens d’une ïŹnalitĂ© pratique : puisque l’histoire se rĂ©pĂšte, dit-on, si l’on dĂ©montre l’atrocitĂ© de certaines conduites, comme l’extermination des improductifs et des Juifs par le rĂ©gime nazi, ne pourrait-on pas espĂ©rer que de tels comportements soient dĂ©sormais Ă©vitĂ©s ?
Tous les historiens rĂȘvent d’utiliser les erreurs d’un sombre passĂ© comme le grand miroir qui rĂ©ïŹ‚Ă©chirait le chemin vers un meilleur futur. Ces prĂ©tentions louables, idĂ©ales sur le papier, relĂšvent d’un problĂšme complexe, auquel on n’accordera ici que quelques pistes de rĂ©ïŹ‚exion. Primo, l’histoire ne se rĂ©pĂšte jamais. Elle est faite d’évĂ©nements qui sont accomplis par les hommes, une espĂšce Ă  l’environnement et aux besoins relativement stables, qui obĂ©it toujours aux mĂȘmes impĂ©ratifs et qui donc rĂ©agit toujours de façon un peu stĂ©rĂ©otypĂ©e. Toutefois, si bien des faits sont analogues, tous sont uniques en fonction de leur contexte toujours diffĂ©rent. Secundo, la vĂ©ritĂ© n’étant pas une notion mĂ©taphysique, chaque individu dĂ©veloppe sa propre conscience de ce qui est bon ou mauvais. Les partisans d’un pouvoir fort prendront exemple sur Cat...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Page titre
  3. La collection
  4. Copyright
  5. DĂ©dicace
  6. Chapitre 1 - L’histoire : dĂ©finition et finalitĂ©
  7. Chapitre 2 - Les sources de l’histoire
  8. Chapitre 3 - L’histoire en prĂ©paration
  9. Chapitre 4 - Au-delà des témoignages : la synthÚse
  10. Conclusion
  11. Remerciements
  12. Lectures complémentaires