Comment tuer Shakespeare
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Comment tuer Shakespeare

  1. 228 pages
  2. French
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Comment tuer Shakespeare

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À propos de ce livre

Depuis plus de vingt-cinq ans, Normand Chaurette écrit avec et contre Shakespeare. Dans Les Reines, la première pièce québécoise produite à la Comédie-Française, il a revu et corrigé Richard III du point de vue des personnages féminins. Entre un Othello inédit et sa récente traduction du Roi Lear, il a dû inventer une langue capable de rendre celle du dramaturge de Roméo et Juliette et du poète des Sonnets. Comment tuer Shakespeare est le récit de cet étonnant combat. Entre narration et essai, portraits et journal de création, ce livre est le regard singulier d'un homme de théâtre qui a l'audace de défi er la présence à la fois concrète et fantomatique d'un increvable Shakespeare. Dramaturge et traducteur reconnu, Normand Chaurette a écrit plus d'une douzaine de pièces de théâtre, notamment Le Petit Köchel, Stabat Mater II, Le Passage de l'Indiana, Les Reines, Fragments d'une lettre d'adieu lus par les géologues et Provincetown Playhouse, juillet 1919, j'avais 19 ans. Il a traduit pas moins de douze pièces de Shakespeare, qui ont connu un immense succès, et a signé des textes français d'oeuvres d'Ibsen et de Schiller. Il est également l'auteur d'un roman, Scènes d'enfants, et de quelques nouvelles. Ses pièces, créées à Montréal et traduites en plusieurs langues, ont été jouées dans les grandes villes canadiennes comme à New York, Paris, Bruxelles, Hambourg, Florence, Barcelone ou Édimbourg. Normand Chaurette est lauréat de nombreux prix et distinctions au Québec, au Canada et en Europe; il a reçu l'Ordre du Canada en 2005.

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Informations

Deux traductions de
Comme il vous plaira

Même si je sais par cœur de longs passages de Richard III, je n’ai jamais lu la pièce en entier.
Même au moment où j’ai commencé d’en traduire le prologue, je n’avais pas lu Roméo et Juliette en entier.
Je n’ai pas lu La Comédie des erreurs, Beaucoup de bruit pour rien, Peines d’amour perdues…
Je n’ai jamais lu Hamlet en entier. Je n’ai pas traduit la pièce. Mes amis me demandent souvent si j’aimerais le faire. Cette pièce-là en particulier. Il paraît que c’est la plus longue. Ça ne correspond pas à une envie, ni à un désir, ni à quoi que ce soit. Si on me le demandait, je le ferais, pas tant pour mourir de peur que pour goûter à la peur. Parce que ce serait, encore une fois, une chose pour laquelle je serais choisi. Une fois que j’aurais fini de traduire Hamlet, l’expérience se déposerait dans mon souvenir comme à la suite d’un long voyage qu’il faut faire quand le travail l’oblige: on n’en retient souvent que la beauté des piscines, la douceur du climat et la volupté d’un être qu’on y a rencontré.
J’ai vu un bon nombre de productions de Hamlet depuis les trente dernières années. Ici et ailleurs, la plupart en traduction française. Sans égard à la qualité de ces traductions, ni à celles des productions, je n’ai toujours retenu de cette pièce qu’un désordre croissant de paroles allant vers une confusion totale. Avec le sentiment que, jouée ou organisée autrement, cette œuvre pourrait m’être révélée de façon plus limpide. Ce qui ne veut pas dire moins compliquée.
Je le dis à propos de Hamlet, mais cela vaut dans mon cas pour toutes les pièces de Shakespeare que je rencontre pour la première fois. Il me faudrait plusieurs cerveaux pour m’y retrouver. Ou il faudrait que tous mes cerveaux soient sollicités en même temps, ce qui revient au même. Certains aspects du drame s’éclairent mutuellement, mais plusieurs autres s’annulent.
Mercutio est-il du côté des bons Montaigu ou des méchants Capulet?
Lord Hastings est-il un ami ou un ennemi de Richard III?
Le Hamlet assassiné au commencement de la pièce est-il le père du héros ou son double apparu dans un miroir?
Certaines de ces questions sont objectives, d’autres sont liées à la façon dont chacun se projette dans l’esprit de la pièce.
Au tout début du Roi Lear, le dialogue entre Kent et Gloucester, censé nous renseigner sur Edmond, puis sur Edgar, les deux fils de Gloucester, manque beaucoup de clarté. Dès la huitième réplique, c’est l’imbroglio total:
«J’ai, mon seigneur, de l’aveu de la loi, un fils, d’un an son aîné, qui ne m’est pas plus cher. Bien que ce chevalier soit impudemment venu au monde avant d’y être appelé, sa mère était fort belle et nous avons eu plaisir à le faire; ce fils de putain, il faut bien que je le reconnaisse.»
Le possessif, la négation du superlatif et surtout les démonstratifs, qui peuvent aussi bien désigner l’un ou l’autre des deux fils, tout cela est déjà un incitatif à faire exactement comme le mauvais traducteur: aller voir comment les autres s’en sont tirés. Ici, ça ne fera qu’embrouiller le problème. L’ambiguïté est dans le texte d’origine. Rien ne peut garantir que la maladresse, ou la confusion, de Shakespeare soit voulue. À la représentation, les gestes que fera Gloucester (car Edmond assiste au dialogue) dissiperont peut-être le malentendu; à la fin de la pièce, on aura fini par savoir que le bâtard, c’est Edmond, pas Edgar.
Edmond, Edgar. Même préfixe. Si la maladresse de Shakespeare n’est pas voulue, il y a quand même quelque chose qui peut rendre ces prénoms interchangeables. En anglais comme en français, Edgar rime avec bâtard. Mais j’avais plutôt fait le pari que le mauvais sujet était Edmond, en y entendant la rime de démon. Pile ou face…
Nous, quatre cent cinquante ans après Shakespeare, avons un arsenal quasi inépuisable d’outils pour nous sortir d’embarras. À commencer par les traductions déjà existantes. Aux yeux de certains, cela peut paraître contraire à l’orthodoxie. Mais dans les faits, il est impossible de ne pas recourir aux comparaisons. Ne serait-ce que parce qu’elles existent. En cours de travail, elles infirment ou confirment un choix. Devant un écueil réel, et Dieu sait qu’ils sont nombreux, elles ont en commun le labeur, souvent la maladresse. En tout cas, elles ont le mérite d’offrir une certaine compassion face à notre impuissance. En revanche, il existe des traductions qui offrent de si belles solutions, si inspirées et si brillantes, qu’elles peuvent décourager l’effort d’un traducteur en cours de travail.
On est rarement seul quand on traduit Shakespeare. Avant nous, plusieurs l’ont fait; plusieurs le feront encore après nous.
Parmi les autres outils qui s’offrent aux traducteurs contemporains, il y a évidemment l’exégèse. À travers les âges, des dizaines de milliers de spécialistes, de chercheurs, d’universitaires, de passionnés d’histoire, de psychologie, de mythologie, d’astrologie, de psychanalyse, nous ont laissé un lot considérable de connaissances sur le canon shakespearien. En nous épargnant le souci de réinventer la roue chaque fois qu’on s’y met, et en nous montrant à vol d’oiseau le chemin parcouru depuis le début, ces compétences réunies forcent notre admiration à l’égard de ceux qui furent les premiers à restituer Shakespeare dans une langue autre que l’anglais.
Ce travail n’en exige pas moins à chaque minute qu’on soit à la fois rusé et chanceux. Dans mon cas, la tentation de la virtuosité s’en mêle. Plus le texte me paraît dense, plus je rêve de le rendre fugace comme la «flèche du Tartare» qui fait voler Puck du Songe d’une nuit d’été au-dessus du bois d’Athènes. Plus il me paraît lyrique, plus j’ai envie de le hachurer, et vice versa.
Une opposition, pour me créer une aire inédite d’interprétation. Pour me déjouer. Pour me surprendre. Pour me mettre en danger, comme on dit. Pour me faufiler entre les colonnes d’une culture vieille de cinq siècles qui impose dans des moments clés de la pièce une esthétique incontournable. La scène du balcon dans Roméo et Juliette est un exemple. On ne peut l’imaginer qu’à la verticale, textuellement parlant, que dans un décor bucolique, qu’il soit réaliste ou pas. Le scénographe qui pense les images de Shakespeare est lui aussi un traducteur.
Et la musique? Chez les jeunes amants, la tonalité des voix exige beaucoup de l’oreille pour qu’on y perçoive des variations significatives comme celles qu’on entend chez les héros de la maturité. Les amoureux ont trente ans au XIXe siècle, seize ou quinze ans de nos jours – le cinéma ne finit plus de les rajeunir. Dans une récente production de l’opéra de Gounod, on les voit sautiller comme des écoliers. Bref ce sont des enfants, plus ou moins conformément à l’âge qu’ils ont chez Shakespeare. Sous l’effet d’un coup de foudre, les enfants s’émerveillent, et le plus souvent ils se brisent devant la contrariété. Impossible d’entendre Juliette se désespérer comme Électre, impossible de prêter à Roméo des paroles de héros ou de prédateur révolté devant les obstacles qui menacent son amour. Même si les mots sont là. Même si ces deux sentiments, la joie et le désespoir, surviennent en même temps lorsqu’ils se voient pour la première fois. Roméo et Juliette sont cantonnés dans une psychologie où le bonheur et la peur alternent de façon marquée dans le dialogue. Cela n’empêche pas la poésie, mais ne permet pas pour autant, à l’intérieur des répliques, l’infiltration subtile de l’angoisse, du désir érotique, de l’étrange. Pourtant, ces états ambivalents sont omniprésents dans l’esprit des personnages. Juliette a peur d’être surprise avec Roméo dans la nuit. Elle l’incite à partir. Ce dernier lui demande:
O, will thou leave me so unsatisfied?
On ne peut honnêtement remplacer ce mot par un autre – la traduction la plus évidente est «insatisfait», et tout le monde opte pour celle-ci. Dans son contexte, ce mot peut aussi bien vouloir dire «me laisser aussi abruptement» que «aussi frustré dans mon plaisir», sens qui retient l’attention, à cause même de la signification moderne du mot. En 1600, cela pouvait aussi être le premier sens de ce mot, qui aurait été placé dans la bouche de Roméo pour des raisons diverses: une audace à la faveur de la nuit magique qui abolit la censure, une manifestation du sentiment amoureux total, démesuré, qu’éprouve Roméo, à moins que ce ne soit une expression convenue, voire un trait d’humour, à une époque où on faisait si souvent allusion à l’acte sexuel dans ce grand divertissement populaire qu’est le théâtre.
La culture d’une pièce de Shakespeare fait partie, depuis toujours, et encore aujourd’hui, de ce qui la rend attrayante auprès du public, spécialistes inclus. Si quelque chose est devenu un cliché avec le temps, c’est que la chose en question était d’abord une vérité. Dire que le balcon fait cliché dans Roméo et Juliette me semble aussi grossier que le supprimer. Dire que la tempête est un truc usé dans Le Roi Lear, c’est vouloir la remplacer, soit, mais par une autre tempête, une panne d’électri...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Deuxième de couverture
  3. Le prix de la revue Études françaises
  4. Faux-titre
  5. Page de titre
  6. Crédits
  7. Dédicace
  8. I: LES AMANTS
  9. Une traduction de Macbeth
  10. Une traduction d’Othello
  11. Une traduction de Richard III
  12. II: LES MAÎTRESSES
  13. Deux traductions de Comme il vous plaira
  14. III: L'AMOUR
  15. Une traduction du Songe d’une nuit d’été
  16. Une traduction de Roméo et Juliette
  17. Une traduction des douze premiers Sonnets
  18. Une traduction de La Nuit des Rois
  19. IV: LA MÈRE
  20. Une traduction du Conte d’hiver
  21. Table
  22. Troisième de couverture
  23. Quatrième de couverture