L'Inde et ses avatars
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L'Inde et ses avatars

Pluralité d'une puissance

  1. 493 pages
  2. French
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L'Inde et ses avatars

Pluralité d'une puissance

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À propos de ce livre

Terre paradoxale, multiple, à l'opposé de notre univers familier, l'Inde est largement perçue à travers les stéréotypes. On trouvera dans ce livre - le premier du genre en français - les repÚres essentiels pour comprendre un pays à la mesure d'un continent, dont les défis seront inévitablement les nÎtres. Les auteurs exposent tour à tour les dimensions socioéconomiques, politiques et culturelles d'une Inde « globalisante » qui a marqué et marquera l'histoire tant par sa philosophie que par son économie vouée à la croissance. Globalisante aussi, car l'Inde ne se limite pas à ses frontiÚres: sa diaspora et ses relations extérieures forgeront un monde bien différent dans les années à venir.

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Informations

CHAPITRE 1

Les grandes tendances sociales

Christophe Jaffrelot

D’aprĂšs un clichĂ© tenace, l’Inde serait une «terre-de-contrastes». Ce stĂ©rĂ©otype doit beaucoup Ă  la mĂ©connaissance du pays, mais il recĂšle une bonne part de vĂ©ritĂ© que l’on retrouve d’ailleurs dans la devise officielle de l’Inde: L’unitĂ© dans la diversitĂ©.
L’Inde est plurielle. Sa masse continentale (3,9 millions de kmÂČ) et sa dĂ©mographie (1,2 milliard d’habitants) y contribuent, bien sĂ»r, mais son voisin chinois, qui soutient la comparaison en ce qui concerne la superficie et la population, est bien plus homogĂšne. L’Inde est d’une diversitĂ© atypique.
Ce pays est d’abord la terre de toutes les religions. Certes, l’hindouisme reprĂ©sente 80 % de la population totale, mais, outre que le milieu hindou est divisĂ© en de nombreux courants sectaires, il laisse plus de 250 millions d’ñmes Ă  d’autres cultes. L’islam, d’abord, est une grande religion de l’Inde, non seulement parce que les musulmans, avec prĂšs de 170 millions de croyants, font quasiment de l’Union indienne le deuxiĂšme pays musulman du monde, derriĂšre l’IndonĂ©sie, Ă  Ă©galitĂ© avec le Pakistan et le Bangladesh, mais en outre parce que le sĂ©diment islamique a marquĂ© l’histoire indienne, comme en tĂ©moignent les monuments hĂ©ritĂ©s de l’Empire moghol et les miniatures persanes – sans parler du syncrĂ©tisme observable en matiĂšre de musique et de cuisine.
Les chrĂ©tiens, s’ils ne forment que 2 % de la population, constituent une minoritĂ© trĂšs apprĂ©ciable aussi. D’une part, ils se disent «fils du sol» du seul fait que saint Thomas a Ă©vangĂ©lisĂ© le pays avant d’y mourir et d’y ĂȘtre enterrĂ© en 52. D’autre part, mĂȘme s’ils ne sont que 25 millions, ils jouent un rĂŽle important dans le domaine de l’éducation et des soins (comme en tĂ©moigne l’Ɠuvre de MĂšre Teresa), et en matiĂšre thĂ©ologique (tant en Inde qu’à l’étranger, comme le montrent les rĂ©percussions de ses thĂ©oriciens de l’inculturation, notamment en milieu jĂ©suite). Les sikhs reprĂ©sentent 2 % de la population indienne, mais leur poids social, politique, Ă©conomique et culturel est Ă©galement sans commune mesure avec ce faible pourcentage: ils sont toujours surreprĂ©sentĂ©s au sein de l’armĂ©e du fait, notamment, du statut de martiale race que les Britanniques leur avaient reconnu et aussi Ă  cause de leur ardeur au travail Ă  l’origine du formidable essor Ă©conomique (agricole et industriel) du Punjab, le seul État oĂč les sikhs sont majoritaires. Viennent ensuite des communautĂ©s qui ne reprĂ©sentent pas plus d’un point de pourcentage, mais qu’on aurait tort de prendre pour quantitĂ© nĂ©gligeable. Le bouddhisme est nĂ© en Inde et s’il a Ă©tĂ© Ă©vincĂ© du pays dĂšs l’époque mĂ©diĂ©vale, il appartient au patrimoine national au point d’apparaĂźtre sur le drapeau indien dans la roue du Dharma qui en orne le centre (les bandes ocre, blanche et verte renvoyant, elles, chacune Ă  l’une des religions Ă©voquĂ©es plus haut).
Le zoroastrisme compte moins d’adeptes encore que le bouddhisme – surtout depuis l’installation du DalaĂŻ Lama en Inde en 1959 et la conversion de milliers d’intouchables depuis 1956 – puisque ses disciples, les Parsis, ne sont plus qu’une soixantaine de milliers. Mais cette poignĂ©e d’hommes pĂšse lourd dans l’économie indienne Ă©tant donnĂ© la prĂ©sence de firmes familiales trĂšs anciennes comme les Godrej, les Wadia et surtout les Tata. Les juifs sont moins nombreux encore depuis le dĂ©part en IsraĂ«l de milliers d’Indiens aprĂšs la crĂ©ation de l’État hĂ©breu. Mais New Delhi peut se targuer du fait que le pays n’a jamais connu l’antisĂ©mitisme – le pays met d’ailleurs volontiers en avant la synagogue de Cochin datant du XIVe siĂšcle pour l’attester.
De fait, l’incroyable efflorescence religieuse que nous venons d’exposer (et qui ne serait complĂšte que si on y ajoutait le jaĂŻnisme, les formes d’animisme que cultivent les aborigĂšnes et les sous-ensembles musulmans formĂ©s par les chi’ites, les ismaĂ©liens, etc.) a donnĂ© lieu Ă  une coexistence relativement pacifique. Il ne faut, bien sĂ»r, pas sous-estimer les conflits qui ont opposĂ© les hindous et les musulmans (dĂ©bouchant mĂȘme sur la Partition en 1947 et un vĂ©ritable pogrome au Gujarat en 2002). Mais sans oublier les violences rĂ©currentes dont les musulmans sont encore aujourd’hui victimes, il faut reconnaĂźtre Ă  l’Inde un succĂšs mĂ©ritoire dans ses efforts pour transcender le pluralisme religieux au nom d’un principe d’unitĂ© qui s’incarne dans l’idĂ©e de sĂ©cularisme, un «isme» qui n’est pas la laĂŻcitĂ© Ă  la française, car il n’est pas ici question de sĂ©paration de l’État et d’une ou plusieurs Églises, mais bien plutĂŽt d’une Ă©gale bienveillance manifestĂ©e par le pouvoir Ă  l’égard des diffĂ©rentes communautĂ©s religieuses.
Le raisonnement qu’on applique au fait religieux vaut pour la question linguistique. LĂ  aussi, l’Inde se singularise par une extrĂȘme diversitĂ©. Certes, les grammairiens ont distinguĂ©, depuis le XVIIIe siĂšcle, deux familles de langue seulement, l’indo-europĂ©enne au Nord et la dravidienne au Sud. Mais cette simplification est trompeuse. Au sein de la famille dravidienne, on distingue en effet au moins quatre grandes langues rĂ©gionales: le tamoul au Tamil Nadu, le malayalam au Kerala, le tĂ©lougou en Andhra Pradesh et le kannada au Karnataka. La famille indo-europĂ©enne, elle, compte encore davantage de membres: certes le hindi domine l’ensemble, puisque cette langue du Nord reprĂ©sente jusqu’à 40 % du total, mais certaines autres langues de cette famille comptent autant de locuteurs que certains idiomes parlĂ©s en Europe: le gujarati, le marathi, le bengali, le punjabi, etc., sont autant d’exemples pertinents.
Au total, l’Inde compte 23 langues officielles reconnues par la Constitution. Toute la production de la bureaucratie nationale doit emprunter l’ensemble de ces idiomes de façon simultanĂ©e. L’article 30 de la Constitution permet d’ailleurs aux Ă©coles des minoritĂ©s linguistiques de solliciter des subventions publiques. Cette diversitĂ© linguistique s’est trouvĂ©e rĂ©duite par suite de la reconnaissance fort pragmatique d’un idiome commun dans l’anglais qui a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© langue officielle associĂ©e aprĂšs l’indĂ©pendance. Il faut lĂ  aussi se garder de tout irĂ©nisme, car cette dĂ©cision n’a pas Ă©tĂ© prise sans mal. Le Nord hindiphone n’en voulait pas, mais le Sud a opposĂ© une telle rĂ©sistance au hindi que Nehru a pu imposer l’anglais comme langue officielle associĂ©e aux cĂŽtĂ©s du hindi, langue nationale, en guise de compromis. Aujourd’hui, mĂȘme les nationalistes hindous partisans du «tout hindi» recourent Ă  l’anglais, la langue qui permet Ă  l’élite indienne de communiquer sans problĂšme aux quatre coins du pays. Grosso modo, l’Inde compte aujourd’hui 80 millions d’anglophones, un chiffre qui en fait le deuxiĂšme pays anglophone du monde (derriĂšre les États-Unis) et qui correspond Ă  peu prĂšs Ă  celui des abonnĂ©s Ă  Internet. Au-delĂ  de l’élite, la classe moyenne – mĂȘme dans ses couches infĂ©rieures – se met Ă  la langue de Shakespeare, comme en tĂ©moigne le succĂšs des Ă©coles English medium. Mais, dans le mĂȘme temps, le hindi progresse du fait de la lente expansion de l’enseignement secondaire oĂč il est obligatoire, et de l’essor des mĂ©dias – et d’abord du cinĂ©ma dont le hindi est l’idiome de prĂ©dilection. Du coup, il n’est pas rare qu’un Indien instruit maĂźtrise trois langues: celle de sa rĂ©gion – sa langue maternelle –, le hindi et l’anglais. Ce pluralisme linguistique se retrouve dans le florilĂšge des littĂ©ratures de l’Inde, puisque, Ă  cĂŽtĂ© de la littĂ©rature indo-anglaise qui conquiert chaque annĂ©e de nouveaux lecteurs en Occident, il y en existe d’autres, en langues vernaculaires, qui sont tout aussi vivantes.

Le contraste Nord/Sud

De toutes les lignes de clivage gĂ©ographique qui parcourent l’Inde, celle qui oppose le Nord au Sud est sans doute la plus significative, parce qu’elle est liĂ©e Ă  plusieurs critĂšres culturels, sociaux et Ă©conomiques.

Le monde dravidien, un monde Ă  part

Sur le plan culturel, le Sud se dĂ©finit d’abord comme l’espace linguistique oĂč rayonnent quatre langues de la famille dravidienne, le tamoul, le kannada, le malayalam et le tĂ©lougou. Idiomes de communication, ces langues ont aussi donnĂ© naissance Ă  une riche littĂ©rature dont la plus ancienne et la plus sophistiquĂ©e est sans aucun doute celles des Tamouls, qui tĂ©moigent d’un patriotisme littĂ©raire presque aussi ardent que celui des Bengalis! Sur le plan architectural et mĂȘme urbanistique, le Sud contraste naturellement avec le Nord par la magnificence de ses temples – vĂ©ritables villes dans les villes – car ils ont survĂ©cu aux invasions musulmanes. Le Sud apparaĂźt d’ailleurs comme un conservatoire de l’hindouisme, ce qu’illustre aussi la vitalitĂ© de ses Ă©coles de danse classique, de chant et de musique.
En mĂȘme temps, c’est sans doute la partie du pays oĂč la prĂ©sence de la civilisation hindoue a Ă©tĂ© contestĂ©e le plus tĂŽt. En effet, s’inspirant des dĂ©couvertes de linguistes europĂ©ens, des leaders de basse caste du Sud dravidien ont dĂ©noncĂ© la domination des brahmanes, en prĂ©tendant que ces derniers Ă©taient les descendants des Indo-EuropĂ©ens qui avaient envahi l’Inde Ă  l’époque antique, alors qu’eux-mĂȘmes Ă©taient les fils du sol. Ce nationalisme pĂ©tri de rĂ©sistance sociale, de fiertĂ© culturelle et linguistique a donnĂ© lieu Ă  des mouvements politiques qui ont pris le pouvoir dans la province de Madras (Chennai), dĂšs les annĂ©es 1920. Les partis politiques qui s’en rĂ©clament sont, aujourd’hui encore, au pouvoir au Tamil Nadu, l’État oĂč ce culte du dravidianisme est le plus solide. Il s’y est notamment manifestĂ© dans un cinĂ©ma plus vivant dans le Sud et qui, du fait de sa popularitĂ©, a conduit bien des acteurs Ă  passer Ă  la politique.

L’essor socioĂ©conomique du Sud

Il est aujourd’hui possible de tracer une ligne passant du Punjab Ă  l’Andhra Pradesh pour couper l’Inde en deux: au sud-ouest se trouve «l’Inde qui brille», tandis qu’au nord-est correspond «l’autre Inde». Le revenu par tĂȘte mensuel dĂ©passe 22 000 roupies dans la premiĂšre, alors qu’il se situe au-dessous dans la seconde – les seuls États Ă©chappant Ă  cette rĂšgle sont le Rajasthan, qui, bien qu’à l’ouest, appartient Ă  «l’autre Inde» ainsi que deux États du Nord-Est – le Bengale occidental et le Tripura –, qui sont Ă  rattacher Ă  la premiĂšre Inde, malgrĂ© leur position gĂ©ographique. Une autre façon d’analyser le fossĂ© sĂ©parant l’Inde du Nord et de l’Est de l’Inde du Sud et de l’Ouest consiste Ă  mesurer la part de la population vivant sous le seuil de la pauvretĂ©. On retrouve la mĂȘme gĂ©ographie Ă  quelques dĂ©tails prĂšs. Les seules exceptions sont l’Assam qui, bien qu’à l’est, jouit d’un niveau supĂ©rieur Ă  la moyenne, et le Maharashtra, qui fait partie de «l’autre Inde» tout en se situant Ă  l’ouest. Le Bengale occidental se situe quant Ă  lui Ă  peine au-dessus de la moyenne nationale.
En 2001 – date du dernier recensement dont les chiffres sont disponibles –, 71,65 % des pauvres de l’Inde se concentraient dans seulement six États: l’Uttar Pradesh (qui comptait 17 % des pauvres de l’Inde), le Bihar (10,69 %), le Maharashtra (9,42 %), le Madhya Pradesh (7,91 %), le Bengale occidental (7,81 %) et l’Orissa (3,57 %) – aucun d’entre eux n’appartient au Sud oĂč l’on observe au contraire des indicateurs sociodĂ©mographiques supĂ©rieurs Ă  la moyenne, par exemple.
L’Inde du Sud a rĂ©alisĂ© sa transition dĂ©mographique, avec des taux de croissance de la population allant de 0,9 Ă  1,7 % par an selon les États, pour une moyenne nationale de 2,15 % pour la dĂ©cennie 1991-2001. Les filles y sont moins victimes qu’ailleurs de la prĂ©fĂ©rence masculine, comme en tĂ©moigne le sex-ratio d’aprĂšs le recensement de 2001: les États du Sud comptent entre 965 et 1 058 filles et femmes pour 1 000 garçons et hommes, alors que la moyenne indienne est de 933 pour 1 000. Si l’on excepte l’Andhra Pradesh – un peu Ă  la traĂźne –, les taux d’alphabĂ©tisation du Sud varient entre 66,6 % et 90,9 %, pour une moyenne nationale atteignant 64,8 % en 2...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Faux-titre
  3. Page de titre
  4. Crédits
  5. Remerciements
  6. Introduction
  7. I - L’Inde actuelle
  8. II - L’Inde culturelle
  9. III - L’Inde internationale
  10. Conclusion
  11. Bibliographie sélective
  12. Les auteurs
  13. Table des matiĂšres
  14. QuatriĂšme de couverture