Profession
  1. 68 pages
  2. French
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À propos de ce livre

Un vieil adage, souvent repris, veut que « le droit mène à tout ». Si l'on peut déceler dans cette affirmation une certaine part d'exagération — après tout, le droit et la biologie moléculaire demeurent des disciplines bien distinctes —, une formation en droit ouvre en effet de nombreux horizons de carrière, en plus de contribuer à l'épanouissement intellectuel des personnes qui y ont accès. En outre, cette formation a parfois des effets secondaires, en façonnant la personnalité de celles et de ceux qui la suivent. Beaucoup de familles ou d'amis ont ainsi été surpris de constater les transformations, souvent pour le meilleur mais parfois pour le pire, que subissent les personnes qui étudient en droit: le scepticisme s'accroît, les exigences quant à la qualité des raisons données pour justifier telle ou telle action deviennent plus strictes, l'art de l'argumentation s'affine; dans le pire scénario, l'égo enfle. Mais le propos de ce petit ouvrage n'est pas, tant s'en faut, de faire la psychanalyse de l'apprenti juriste; il s'agit plutôt de se pencher sur ce que signifie, aujourd'hui, être juriste. Cela oblige à aborder la question de la formation de celles et de ceux qui aspirent à le devenir.Quel est le rôle, dans la Cité, des chercheurs, des intellectuels, des professeurs, des universitaires en général? Qui sont-ils et que font-ils exactement? Quel a été leur parcours intellectuel? La collection « Profession » répond à ces questions.Jean-François Gaudreault-DesBiens et Marie-Claude Rigaud sont professeurs à la Faculté de droit de l'Université de Montréal.

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Acte II
Une profession kaléidoscopique

Pascal Paradis, avocat et membre fondateur
d’Avocats sans frontières-Québec

Ouverture d’esprit. Engagement. Rigueur intellectuelle. Éthique de travail. Habiletés en analyse critique et raisonnée ainsi qu’en communication orale et écrite. Capacité d’interagir efficacement avec les autres. Compréhension des fondements normatifs de la vie en société. Solide réseau d’amitiés et de contacts. Voilà quelques-unes des richesses que j’ai acquises ou développées lors de mes années à la Faculté de droit de l’Université Laval à Québec et à la London School of Economics à Londres. J’aurais pu en ajouter bien d’autres. La réalité est que je considère ces années parmi les plus formatrices — et les plus amusantes — de ma vie. Elles ont largement contribué à façonner l’avocat et la personne que je suis. J’ai été amené à œuvrer dans plus de vingt pays et cette expérience m’a confirmé au moins deux choses. La première est que ma formation a constitué un atout inestimable dans des contextes très variés. La deuxième est que la qualité de la formation des juristes d’ici est reconnue et appréciée mondialement. C’est un privilège extraordinaire d’avoir été formé à une telle école.

Vus de loin, les juristes — avocats, juges, notaires, même les professeurs de droit — se ressemblent à s’y méprendre. Ils utilisent un même langage, souvent hermétique, et qui, de l’extérieur, peut parfois sembler verbeux et artificiel. Ils se comprennent en disant peu. Bénéficiant d’une formation et d’une culture communes, il leur est permis de naviguer sur la mer du droit, de faire face aux intempéries qui se présentent et de surmonter les obstacles que leur posent parfois leurs différences. Chacun à leur façon, ils permettent un rapprochement entre le concret de la vie et l’abstrait de la science du droit, rationalisent le conflit et favorisent — c’est à espérer — une certaine paix sociale. Ils doivent tous jouir de la confiance de ceux qu’ils sont appelés à servir. Au quotidien, ils font de la recherche, ils lisent (beaucoup!), ils analysent, ils répondent à des interrogations et formulent des opinions qu’ils proposent ou imposent. Ils agissent, chacun au diapason de leurs pouvoirs et compétences, comme garde-fous contre l’arbitraire. Ils ont en commun une conviction des vertus associées à l’exhaustivité, à la précision, à la justesse. L’honorable Yves-Marie Morissette, ancien professeur de droit et juge à la Cour d’appel du Québec, disait que le rôle du juriste était d’être le sceptique de service, «sceptique à l’endroit de sa propre discipline», mais aussi sceptique à l’endroit d’autres savoirs avec lesquels le droit entretient des liens étroits2. Méfiant des effets de mode et du dogmatisme, le juriste ne doit pas avoir peur de scruter ce qui aurait pu être occulté et d’interroger ce qui aura été posé comme une vérité.
Les rapports qu’entretiennent entre eux les juristes sont généralement teintés de respect mutuel, conscients qu’ils sont de la complémentarité de plusieurs de leurs rôles. Dans les faits, la profession de «juriste» constitue un ensemble très hétérogène de fonctions et de visées. La formation que reçoit le juriste pourra le mener vers l’avocature, le notariat ou, pour certains, la magistrature ou le professorat. Quand il choisit d’exercer le droit, le juriste pourra assumer, selon les circonstances, le rôle de défenseur, de vulgarisateur, de facilitateur ou de confident.
La profession d’avocat ne cesse d’étonner par sa diversité. Alors que plusieurs plaident, d’autres négocient, rédigent des contrats ou participent de loin ou de plus proche à l’organisation ou à la gestion d’entreprises, voire à l’élaboration des politiques publiques comme législateurs. Plusieurs pratiquent seuls ou en petits groupes, d’autres dans des structures globales regroupant des milliers de collègues. Certains se spécialisent en matières civiles et commerciales, d’autres agissent comme représentants/défenseurs des compagnies d’assurances, des constructeurs ou des syndicats. D’autres préfèrent encore se distinguer non pas par la nature de leur clientèle, mais bien par leur spécialité dans un domaine particulier du droit. Certains autres diplômés décideront d’emprunter des chemins plus éloignés du droit, pour se destiner vers une carrière en politique ou en journalisme, par exemple. C’est de cette mosaïque qu’il sera question dans ce deuxième acte. Nous proposons d’examiner d’un peu plus près toute la richesse de la profession juridique en la déclinant en quatre scènes. La première est réservée aux architectes de la formation juridique, les professeurs de droit. La deuxième scène présentera l’avocat, peut-être le représentant le plus visible de la profession juridique. Cela sera suivi d’une troisième scène dédiée au notaire, personnage plus discret mais non moins important. La dernière scène sera réservée au juge.

Le professeur de droit

Le professeur de droit évolue au sein d’une faculté dont le rôle premier est de veiller au développement du bagage intellectuel de ses étudiants. Le doute constitue en principe pour lui une source d’épanouissement; «L’enseignement du droit, c’est douter de soi. Si tu ne risques rien, si tu n’examines pas tes valeurs fondamentales, tu t’éloignes du rôle premier d’un professeur de droit», rappelait le professeur Roderick Macdonald3.
Le plus grand luxe du professeur de droit, c’est celui du temps qui lui est donné pour la réflexion de fond, celle qui permet que soit examinée dans toutes ses dimensions une question, celle qui demande des milliers de pages de lecture, des centaines d’heures de synthèse, des dizaines d’écriture et une étincelle pour consolider le tout. Outre ses obligations institutionnelles, le professeur de droit agit principalement sur deux plans, ceux de l’enseignement et de la recherche.
L’enseignement est inhérent à la vocation professorale, que l’on choisit tant pour des raisons individuelles que sociales. À l’échelle individuelle, toutes les personnes qui deviennent professeurs visent à donner un bon cours, à éveiller des passions et à susciter la réflexion chez leurs étudiants et collègues. Sur le plan social, le professeur de droit se nourrit en outre des rapports qu’il entretient avec les uns et les autres.
Ce sont principalement des professeurs de carrière qui se chargent de l’enseignement du droit; ces derniers auront fait des études supérieures en droit, le plus souvent jusqu’à l’obtention d’un doctorat. Les facultés de droit comptent aussi parmi leurs effectifs un nombre important de chargés de cours, qu’elles recrutent pour leur expertise pratique spécifique. En raison de la diversité des professeurs et chargés de cours qui interviennent dans le cadre du cursus en droit, mais aussi et surtout de la liberté d’expression dont ils jouissent, l’objet exact de chaque cours ainsi que la méthode pédagogique retenue dépendent en grande partie de chacun. Que ce soit par une approche classique, par la méthode des cas ou par la méthode socratique, les professeurs voudront développer chez leurs étudiants la maîtrise du langage juridique, des techniques qui le structurent et des stratégies pour en appréhender toutes les facettes, explicites comme implicites. Les cours de première année portent tout naturellement sur les notions fondamentales du droit, sur l’analyse des règles qui le composent, sur l’organisation du système de justice, ainsi que sur l’histoire des institutions et de leurs fonctions. Plusieurs des cours qui suivront porteront sur des matières plus pointues ou pourront aussi avoir des objectifs pédagogiques distincts, tels la rédaction ou l’art de la plaidoirie. Le professeur de droit intervient dans ce parcours d’abord et avant tout pour aider l’étudiant à s’orienter dans le dédale normatif des sociétés contemporaines. Bien qu’il doive transmettre des connaissances, son rôle est également de développer des compétences, un savoir-être et un savoir-vivre. Il aura à l’esprit d’inculquer à ses étudiants une éthique du travail, de bonnes aptitudes rédactionnelles ainsi que de développer certaines habiletés, entre autres celle à la réflexion, à la critique, mais aussi à l’action. Plusieurs tentent en effet de rappeler à leurs étudiants que le droit peut être un important outil d’éveil des consciences sociales. Pensons encore au professeur Macdonald qui, dans les premières années de sa carrière, mit sur pied un programme d’information juridique «mobile» en se servant d’une roulotte Winnebago transformée en bibliothèque roulante4. Pendant les mois d’été à la fin des années 1970, le véhicule déambula dans des villes du nord de l’Ontario pour y distribuer de l’information sur le droit de la famille, du logement, de la consommation, des petites créances, et bien sûr l’aide juridique.
Est-ce le rôle des facultés de droit de veiller au développement des compétences professionnelles de leurs étudiants? Voilà une question ancienne qui hante plusieurs professeurs de droit et qui met en lumière la tension historique entre les missions scientifique et professionnelle de la formation juridique. La formulation même du débat en fonction des pôles que constituent la théorie et la pratique pose en soi un obstacle épistémologique de taille. L’objectif du professeur de droit devrait selon nous être de former des diplômés cultivés, dotés d’un esprit critique et d’une pensée réflexive. Plusieurs ne rejoindront jamais le monde juridique, mais se destineront plutôt à des parcours connexes ou parfois éloignés du droit. Le professeur de droit doit ainsi trouver un équilibre entre le besoin de ne pas effectuer une scissure entre l’enseignement du droit et la formation des futurs juristes, ce que nous appellerons le pôle professionnalisant, et celui de ne pas abandonner la valorisation du caractère scientifique et théorique de la discipline comme objet de connaissance, si ce n’est que pour permettre au juriste, quelle que soit sa destinée, de prendre une saine distance par rapport au droit comme discipline et comme pratique.
En plus d’enseigner le dro...

Table des matières

  1. Table des matières
  2. Introduction
  3. Acte I La formation du juriste
  4. Acte II Une profession kaléidoscopique
  5. Acte III Le juriste entre droit et justice
  6. Conclusion
  7. Lectures complémentaires