Conséquences cliniques du principe de jouissance
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Conséquences cliniques du principe de jouissance

  1. 240 pages
  2. French
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Conséquences cliniques du principe de jouissance

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Table des matières
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À propos de ce livre

Cent ans après la publication d' Au-delà du principe de plaisir (1920), un colloque organisé par le Questionnement Psychanalytique s'est tenu par «Zoom» (novembre 2020) comme un moment de réflexion, d'invention et de renouvellement de notre pratique psychanalytique à partir du livre Le principe de jouissance (2020) de Christian FIERENS.

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Informations

Éditeur
EME Editions
Année
2021
ISBN
9782806662323

CHAPITRE 1

UNE CLINIQUE EN PRINCIPES ?

JEAN-LOUIS CHASSAING
La première idée qui m’est venue après cette invitation de participation est celle-ci. Je me souviens d’un propos de Charles Melman qui (se) demandait pourquoi nous ne réalisions pas nos projets, nos envies, même lorsque cela semblait possible. Et souvenir alors d’une définition de la névrose par Lacan, je ne sais plus où, rappelée à moi : celle du type qui ne rêve que de voyages, et qui reste avec ses bagages sur le palier de son domicile.
Je ne suis pas sûr aujourd’hui que cela soit toujours pertinent, même à prendre comme métaphore ! Désir et jouissance auraient-ils changé dans leurs réalisations ?

I.

La lecture de ce volume de « Lire en psychanalyse », Le Principe de jouissance ‒ Lectures de Kant, Sade, lecture de Lacan, et lecture des lectures de Lacan, est déjà suffisamment ardue pour ma part. Voilà qu’il faudrait en donner les conséquences cliniques ! Il faut. Fallait-il le faire et fallait-il que je me livre à cela ? S’agit-il d’un devoir, le mien en l’occurrence ? Et pourquoi ?
Bien sûr, Christian Fierens écrit, parce qu’il s’agit en plus de lire Fierens lisant, il écrit donc, déjà à la fin de la première section, Lecture de Kant, qu’il s’agit à partir de la loi morale telle que posée par Kant de « mieux comprendre l’inconscient et le principe de jouissance qui lui est essentiel, mais surtout y engager un renouveau de la pratique psychanalytique ». Et le chapitre 4 (deuxième partie) qui conclut la deuxième section, Lecture de Lacan, se rapporte à « La pratique de la psychanalyse », la troisième section à « La pratique de l’inconscient ». Ce pourrait donc être un livre de pratique ! Pratique pas sûre, de pratique sans doute ! L’auteur part de la Critique de la raison pratique de Kant, de la loi morale, pure forme, forme sèche, « impossible à définir à proprement parler » (p. 250), pour aborder son corollaire freudo-lacanien, la jouissance propre à l’inconscient.
En tirer les conséquences cliniques supposerait une compréhension, voire une acceptation de la démarche de l’auteur. Et bien sûr, il y aurait à éviter de prendre ces développements pour en faire une application calquée, sur des pseudos ‒ « trouvailles » cliniques parfaitement ou pas correspondantes. Une correspondance qui peut toutefois arriver. Autrement, ce serait faire injure à l’auteur qui s’é-vertue de distinguer concept et principe. De telles distinctions sémantiques se trouvaient également dans son livre précédent sur le narcissisme.
Je lisais les remarques fort critiques de Guy Le Gaufey au sujet de la pléthore de « vignettes cliniques », ce qui selon lui affadit le tranchant des analyses, au pire donne à lire, je cite, une « obéissance de la vignette clinique aux exigences de la narrativité, une obéissance au doigt et à l’œil1 ».
Ce n’est sûrement pas ce qui est demandé ici. D’ailleurs un malicieux collègue m’indiquait, devant mes difficultés, cette phrase de Christian Fierens : de même que la présentation de la loi morale, « la jouissance elle aussi ne pourra jamais être présentée ni par des exemples (comme les concepts empiriques), ni par le schématisme temporel (comme les concepts purs de l’entendement), ni par des symboles (comme les idées pures de la raison) ; elle ne pourra être présentée que comme le questionnement de l’invention d’une loi, d’une forme nouvelle » (p. 89).
Mais aussi, en fin de parcours du livre, je lis que la jouissance ne peut être comprise que comme principe, et que le principe de jouissance, principe fondamental de l’inconscient s’oppose à un schématisme comme algorithme ou comme mode d’emploi (p. 249). Et, s’il y a nouvelle forme à laisser venir de l’inconscient (ce qui nous intéresse ici), elle ne peut être guidée, définie, programmée ni par l’utile ni par un gain de plaisir (p. 248). Une façon de rappeler que la psychanalyse n’est pas une psychothérapie. Pas de projet défini de cette façon. Pas de but, ce que Christian Fierens écrit dès le début, pas de conceptualisation théorique pour guider la cure vers une fin déterminée. Le principe est un mouvement et, comme principe pratique, partant ici de la loi morale (pratique et non théorique), il est à définir « comme propositions renfermant une détermination générale de la volonté » (p. 249).
« La jouissance et l’inconscient ne correspondent à aucun mode d’emploi. » (ibid.)
Alors, comment aborder l’affaire ?

II.

Déjà il y a cette précaution, cette précision des mots, concepts (théorie) et principes, il y a le vocabulaire dont on sait l’importance en clinique afin de « serrer » au plus près, mais aussi d’ouvrir sur l’équivoque. Les distinctions arrivent au début du livre. Le principe de plaisir n’est pas le plaisir, le sinthome n’est pas symptôme, mécanisme n’est pas processus qui n’est pas structure2. Et à propos de celle-ci, son usage, son histoire en clinique n’est pas tout à fait concomitant avec par exemple les précisions et définitions savantes que donne Jean Piaget dans son important petit « Que sais-je »3 ? Ici l’Histoire compte, celle des disciplines et celle des concepts, telles que Jean Garrabé et Georges Lanteri-Laura les ont précieusement écrites.
La notion de phénomène aussi a une importance. Le phénoménal a une place dans la philosophie, le livre le reprend. Dans la clinique, le phénomène se distingue de la structure, du système (c’est le mot plutôt employé par Claude Lévi-Strauss), et du processus. Au début de son séminaire « L’Angoisse », Lacan commence par une description phénoménologique, il le dit explicitement. Puis il passe aux coordonnées et à la fonction. À propos de « la psychosomatique », il est souvent parlé ˗ et on l’attribue à Lacan ˗ de « phénomène psychosomatique », ce qui le distingue de symptôme et de structure. Je n’ai pas retrouvé cela dans la Conférence à Genève en octobre 1975. Lacan ne parle pas de phénomène ici, ni de symptôme ni de structure, il est prudent. Il dit (c’est la retranscription) « le malade psychosomatique », « le psychosomatique ». Lacan « est » déjà dans le corps et dans l’écriture, voire la signature.
Retrouve-t-on là ce « principe de jouissance » dans son rapport au corps et au langage ? Ceci m’évoque, je livre là une association, même si elle me semble en aparté, à savoir ce néologisme, lalangue, tel que Lacan en parle notamment dans « La Troisième ». Il y a dans cette conférence de 1974 à Rome les rapports lacaniens complexes de la vie et de la mort. « Lalangue où la jouissance fait dépôt, non sans la mortifier, non sans qu’elle ne se présente comme du bois mort, témoigne quand même que la vie, dont un langage fait rejet, nous donne bien l’idée que c’est quelque chose de l’ordre du végétal4 ». Lalangue, « avant » le signifiant. La vie, ce que Lacan note dans la touche finale du nœud borroméen, serait ici du côté du Réel. Et la jouissance ?
Il évoque auparavant ce développement. Lalangue est ce qui permet l’équivoque, « vœu (souhait) veut (vouloir) », et « … il faut y concevoir le dépôt, l’alluvion, la pétrification qui s’en marque du maniement par un groupe de son expérience inconsciente ». Et ce point : « Lalangue n’est pas à dire vivante parce qu’elle est en usage. C’est bien plutôt la mort du signe qu’elle véhicule ». « Ce n’est pas parce que l’inconscient est structuré comme un langage que lalangue n’ait pas à jouer contre son jouir, puisqu’elle s’est faite de ce jouir même ». Et « la position de l’analyste dans le transfert, son savoir se fonde de savoir en quoi consiste l’inconscient (est) d’être un savoir qui s’articule de lalangue, le corps qui là parle n’y étant noué que par le réel dont il se jouit » (cf. jeu de mots : dont il se joue… le corps se jouit de ce Réel, lequel noue le corps à lalangue ?). « Le corps dénoué de ce réel qui, pour y exister au titre de faire sa jouissance, n’en reste pas moins opaque. » « Lalangue, cette jouissance, la civilise… » Je ne poursuis pas, indiquant ici simplement ce trop bref passage, nous essaierons de développer cela avec Thierry Florentin, Marc Morali et quelques autres lors de journées de l’ALI en juin 2021.
Pour « le psychosomatique » qui plus est, la signature se rapporte au sceau, au seing, à la marque distinctive, au fait de marquer d’un signe, un signe distinctif. Signe et non signifiant en ses équivoques. Qui, à le lire, donnerait une distinction, quasi certaine et immédiate. Est-ce à la fois proche et distinct du nom propre ? Ce qui viendrait à recouvrir autrement le manque…5
Je me suis laissé emporter par cette jonction du corps et de la langue…
Il m’a toujours semblé que certaines toxicomanies se rapprochaient de cela.

III.

La jouissance ! Combien de fois ai-je entendu cette question, posée depuis longtemps, ici et surtout dans d’autres pays, notamment d’Amérique du Sud : « quelle est la jouissance du toxicomane ? », parfois seule question qui apparaissait alors essentielle. (Là-bas, parce qu’ici la question des toxicomanies était à l’époque rejetée par les psychiatres et les psychologues, encore plus par les psychanalystes !) Il me semble maintenant que le mot était pris en son sens populaire et que, en étudiant Lacan, il y avait une interrogation, légitime, à en donner le sens d’une clinique lacanienne. Plus tard ici également, ce sens d’un orgasme chimique a fait et fait encore long feu. Le toxicomane jouirait des effets de prise de son produit, jouissance extatique ‒ ne plus se tenir debout (« ex-stase ») ‒ et jouissance autre indescriptible, hors langage, mais non hors corps. Ce qui semble plus complexe en fait.
Pour Charles Melman, la jouissance du toxicomane n’est pas celle des effets immédiats de la prise de drogue, mais la « jouissance du manque de drogue ». Il est en cela freudien, dans le ton de l’Au-delà du principe de plaisir, au sens du forçage, de la tension. C’est en effet bien ainsi que parle Lacan dans sa conférence de 1966 à La Salpêtrière : « elle (la jouissance) est toujours de l’ordre de la tension, du forçage, de la dépense voire de l’exploit ». Dans cette même conférence, il parle des regards et des voix, auxquels il ajoute les hallucinogènes, qui se baladent partout dans les espaces, « curieux prolongements du corps », et il indique que « la jouissance est à situer au pôle opposé ». Ce en quoi, précise-t-il, « la dimension éthique est celle qui s’étend dans la direction de la jouissance », celle-ci entendue comme jouissance du corps. Les effets, eux immédiats, de la prise de drogue seraient liés au principe de plaisir, à l’abaissement, au principe de la moindre tension (Melman). La question ici se complexifie, ou se simplifie, de situer la répétition de l’acte dans la saisie d’un objet tangible, ce qui donne au manque une réalité reconnaissable, assurant une mainmise sur l’objet ‒ et surtout ses effets ˗ dans une geste dramatique dont l’arrêt serait la mort. La répétition de l’acte n’est pas répétition au sens freudien. Au contraire, elle est reproduction, évitant le passage par le langage par rapport auquel se situe la répétition freudienne. Là aussi il ne faut pas se tromper sur ce « manque » de drogue et des effets, il ne fait que recouvrir, voire se substituer avec une redoutable efficacité au manque premier structural. Il est artifice. Il reproduit artificiellement les allées et venues du principe de plaisir et de son au-delà. Mais surtout, il attise et maîtrise, plus ou moins, cette alternance avec son différentiel. Jusqu’à satiété ou jusqu’à la mort. Si le toxicomane à partir d’un moment, moment non repérable en son temps, qui est toujours trop tard, dit que la prise de drogue c’est pour vivre, et il faut le croire, n’y a-t-il pas là en sourdine cette pulsion de mort qui veille et agit au fait que la vie est détour vers la mort ? Pulsion qui annihilerait l’objet toxicomane ainsi consumé. Je m’appuie sur un texte de Paul-Laurent Assoun : « … le but de la pulsion de mort est paradoxalement la suppression de tout objet6 ». Encore une autre distinction, la pulsion de mort n’est pas la mort. Elle est pulsion de déliaison, désintrication. Et là se pose le possible de renouveau.
D’une autre façon, pour Gérard Pommier, dans une discussion à propos de mon livre Drogue et langage, le toxicomane s’assure, s’octroie une jouissance, un excès de plaisir ici, dans une reviviscence de l’hallucination première, ceci afin de se libérer du carcan de son existence avec sa charge et ses interdits. On l’entend, la question de la jouissance cliniquement lorsqu’elle n’est pas balancée à tout bout de champ, mais prise en lecture sérieusement comme dans ces deux acceptions cliniques ici, n’est pas arrêtée.
Sur cette question toxicomaniaque, la vraie, la maladie, celle de la substitution et pas de la suppléance, ne pourrait-on penser qu’il y a tentative de renaissance ? Comme le joueur7 avec sa mise à récupérer, le toxicomane tiendrait son objet, mais artifice, redoutablement efficace, pulsion de mort destructrice et renaissance comme héros, « je suis toxicomane ». Sujet né d’un objet, objet non plus imaginaire, mais réel (celui des effets reproductibles à satiété [presque]), la drogue étant, elle, RSI.
(Reproduction de l’acte, tyrannie obsédante du corps et de la pensée, figées. Gabriel Balbo a bien décrit cet aspect figé, fixé dans le langage même des toxicomanes. Le mot, par exemple, « se shooter » est le mot d’un réel en acte et non le mot d’un acte dont le réel pourrait prendre sens. Le mot est dénué de métaphore, pur signifiant dont le signifié est le toxique.)

IV.

Mais la jouissance n’est pas le principe de jouissance mis en avant par Christian Fierens avec les lectures de Kant, de Sade et de Lacan. Il y a la loi morale, l’...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. La collection
  4. Titre
  5. Exergue
  6. Présentation
  7. Introduction
  8. Chapitre 1 – Une clinique en principes ? – Jean-Louis CHASSAING
  9. Chapitre 2 – Du principe de jouissance à la jouissance autre – Pascal NOTTET
  10. Chapitre 3 – Apeiron, le principe – Pierre BOISMENU
  11. Chapitre 4 – Le principe de jouissance à la lumière de l’imprédicativité et de la généricité – Nathanaël LAURENT
  12. Chapitre 5 – Phénix culpa – Regnier PIRARD
  13. Chapitre 6 – Que devient l’antinomie de la raison pratique dans le Principe de jouissance – Frank PIEROBON
  14. Chapitre 7 – Lire en psychanalyse Christian Fierens – Marie JEJCIC
  15. Chapitre 8 – « Le désir jamais n’abolira la jouissance » – Guy MERTENS
  16. Chapitre 9 – Éthique de l’inconscient Éthique de la psychanalyse – Dimitris SAKELLARIOU
  17. Chapitre 10 – Kleist lecteur de Kant et inventeur du Surmoi – Jacques NASSIF
  18. Chapitre 11 – (a)Border le vide – Micha VANDERMEULEN
  19. Chapitre 12 – L’inconscient créateur – Isabelle MORIN
  20. Conclusion
  21. Présentation des auteurs
  22. Table des matières