Les transformations de la légitimité démocratique
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Les transformations de la légitimité démocratique

Idéaux, revendications et perceptions

  1. 390 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Les transformations de la légitimité démocratique

Idéaux, revendications et perceptions

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À propos de ce livre

Qui est le plus à même de prendre des décisions politiques? Quel doit être le rôle des élus, des experts et du peuple en démocratie? À quels acteurs, processus et niveaux de pouvoir les citoyens font-ils davantage confiance? Au coeur de ces interrogations se niche le concept de légitimité qui mérite d'autant plus d'être questionné que nos démocraties sont sous tensions. Cet ouvrage collectif de sciences politiques et sociales ambitionne d'aider à comprendre l'actualité de nos démocraties.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2021
ISBN
9782806123916

PARTIE II

LA LÉGITIMITÉ REVENDIQUÉE : VOULOIR REPRÉSENTER

CHAPITRE 4

COMMENT LES GOUVERNANTS JUSTIFIENT LEUR LÉGITIMITE

Vincent Jacquet
(UNamur)
Nathalie Schiffino
(UCLouvain)

1. INTRODUCTION

Les gouvernants des démocraties représentatives sont aujourd’hui sous tension. Ils font face à une défiance croissante de la part des citoyens qu’ils sont censés représenter (Rosanvallon 2006 ; Papadopoulos 2013). Les enquêtes d’opinion montrent que si les citoyens restent attachés aux principes démocratiques, ils sont de plus en plus critiques à l’égard de la façon dont ce régime fonctionne (Norris 2011 ; Dalton, Welzel 2014 ; Grossman, Sauger 2017). Notamment, ils ont tendanciellement moins confiance dans la capacité des élections à traduire les aspirations de la population en décisions publiques (Hay 2007 ; Papadopoulos 2013). Ce constat a donné naissance à une littérature importante sur l’origine et les dimensions de ces attitudes négatives des citoyens envers les gouvernants, y compris leurs implications institutionnelles (Carrel 2017). Mais ceci soulève également une autre question (Le Bart 2010). Comment, dans ce contexte de défiance, les gouvernants justifient-ils leur légitimité ?
Notre chapitre propose de répondre à cette question de recherche en mobilisant des entretiens compréhensifs menés avec des gouvernants belges. Au travers de ces rencontres, ceux-ci sont invités à expliquer la façon dont ils conçoivent leur rôle. Nous proposons d’analyser ce matériau d’enquête en deux temps. Premièrement, nous nous intéressons au mot légitimité, à son occurrence et au sens que les gouvernants lui associent. Les résultats indiquent une faible mobilisation de la notion elle-même. Dans un second temps, nous proposons de dépasser l’analyse du mot pour analyser les registres de légitimation mobilisés par les gouvernants. Techniquement, nous investiguons les passages des entretiens dans lesquels les gouvernants justifient le bien-fondé de leur action. Plusieurs registres sont ainsi mis en évidence : le respect des processus institutionnels, la personnalité, la compétence, la méthode de travail inclusive et l’intérêt général. Ces éléments démontrent que l’argumentaire des gouvernants reste classique, alors même que le régime démocratique est sujet à de multiples mutations, confronté qu’il est à toute une génération de citoyens critiques.
Le chapitre est structuré de la façon suivante. Dans un premier temps, nous précisons le cadre théorique de la réflexion, donc la façon dont la notion de légitimité est mobilisée, en insistant sur le processus de légitimation. Ensuite, nous décrivons le contexte sociopolitique de notre enquête et la méthode mobilisée pour interroger les gouvernants. Les deux parties suivantes présentent les résultats de notre recherche, notamment les registres de légitimation. Dans une dernière section, la conclusion revient sur les leçons tirées de l’exercice. Elle réfléchit au fait de savoir jusqu’où il reste possible de tendre l’élastique de la légitimité avant qu’il se rompe.

2. LÉGITIMITÉ, LÉGITIMATION ET GOUVERNANTS

Selon Weber, la légitimité est une chance donnée à la domination d’être motivée. Les trois motivations idéal-typiques que sont le charisme, la tradition et la rationalité légale ont alimenté la littérature en sociologie puis en science politique depuis un siècle (Weber 1921). De nombreux auteurs ont poursuivi en considérant qu’il était important d’avoir une croyance pour fonder le pouvoir politique, peu importe sur quoi repose cette croyance. Easton (1953) a d’emblée associé la légitimité à la conviction que les autorités publiques doivent être obéies. Lipset (1968) a de même défini la légitimité d’un régime politique à partir de la croyance que les institutions politiques génèrent. Le rapport entre gouvernants et gouvernés reste majoritairement pensé en ces termes (Kauffmann 2014).
Ces travaux classiques sur la légitimité continuent d’inspirer différents programmes de recherches. D’une part, l’approche compréhensive, inspirée de Weber, amène les chercheurs à considérer le sens que les acteurs, qu’ils soient dominants ou dominés, confèrent à la légitimité. D’autre part, l’approche plus positiviste ou réaliste de la légitimité conduit à mobiliser des critères de tous ordres pour jauger la légitimité, que ce soit celle d’une institution gouvernementale ou d’un groupe d’acteurs. En témoignent les nombreuses cartes ou figures dessinées à intervalles réguliers par des organisations internationales1. Parmi les critères qui participent d’une délégitimation figurent entre autres la corruption, les scandales (par exemple l’affaire Dreyfus ou le Watergate), l’instabilité ministérielle, la défaite militaire (Dogan 2010). En réalité, la légitimité ne se réduit ni au respect de caractéristiques formelles dans cette optique d’objectivation, ni même à des présupposés moraux comme pourrait les présenter une approche subjectiviste (Garthoff 2010).
Comme Linz l’a montré, la légitimité de principe (selon laquelle des citoyens acceptent assez spontanément le pouvoir des gouvernants) s’articule à une démocratie d’exercice (selon laquelle des décisions efficaces et efficientes répondent à des problèmes publics) (Hermet 2006). Au quotidien, « il y a des gens en partie seulement convaincus par les prétentions de leurs dirigeants à la légitimité » (Dogan 2010 : 22). C’est précisément à ces « prétentions » que le chapitre consacre son attention. Si la légitimité est acquise dès lors que le pouvoir des gouvernants semble bien-fondé aux yeux des citoyens, même dans des régimes autoritaires ou tyranniques (comme l’a analysé Linz ; Hermet 2006), la légitimité n’est pas automatiquement acquise : elle se gagne. Elle passe principalement par les arguments que les gouvernants exposent aux gouvernés en adoptant différents registres de justification (de l’ordre à la fois de la légitimité de principe et de la légitimité d’exercice). Cela explique que, dès le XVIe siècle, les philosophes politiques comme Étienne de La Boétie aient considéré que la légitimité est doublement nécessaire, non seulement pour les gouvernés, mais aussi pour les gouvernants2. Le philosophe sarladais a très tôt montré que les gouvernants contraignent « légitimement » la liberté des gouvernés sous couvert d’arguments : les gouvernants protègent, les gouvernants sont nés pour gouverner, etc.
Dans cette perspective, notre objectif est de cerner les registres de justification que les gouvernants présentent aux citoyens en vue de sous-tendre le caractère bien-fondé de leur exercice du pouvoir démocratique. Dès lors, nous ne considérons pas tant la légitimité, conçue comme un état, que la légitimation, entendue comme un processus de construction (Lagroye 1985). Comment les gouvernants prétendent-ils être légitimes aujourd’hui ? Notre étude analyse ces prétentions à l’heure où le déficit de la représentation démocratique est patent, la démocratisation de la démocratie envisageable (Sintomer 2016) et la dissémination d’innovations démocratiques avérée, influençant la légitimité par inputs, par les outputs et même par throughput c’est-à-dire par des dispositifs participatifs qui incluent les citoyens (Scharpf 1970/2006 ; Schmidt 2013 ; Pogrebinschi, Ryan 2018).
En termes de cadre d’analyse découlant des quelques éléments théoriques susmentionnés, nous parlerons de registres de légitimation pour désigner l’étendue des ressources dont les gouvernants disposent (registres) afin d’asseoir leur pouvoir politique, en nous concentrant sur les arguments qu’ils construisent et mobilisent dans leurs discours (légitimation). Comme l’indique Le Bart (2010), les gouvernants peuvent en effet puiser dans divers registres de grandeur pour fonder leur prétention à gouverner au nom et à la place des citoyens, qu’ils sont censés représenter dans le cadre de la démocratie représentative. Notre recherche s’inscrit donc dans la lignée des travaux qui analysent les énoncés de justification produits par les gouvernants (Damay, Schaut 2007). Ces études montrent que l’usage de ces justifications dépend largement de la position du locuteur, des personnes auxquelles ce dernier s’adresse ainsi que du contexte d’énonciation (Thévenot, Boltanski 1991 ; Damay, Schaut 2007). Une particularité de notre enquête est que le discours des gouvernants est produit dans un cadre d’interactions particulier : celui d’un entretien, dans le cadre d’une recherche en sciences politiques et sociales. Nous élucidons la méthodologie dans la section suivante et discutons les potentielles limites de cette approche en conclusion du chapitre.

3. DES ENTRETIENS AVEC DES GOUVERNANTS BELGES : MÉTHODOLOGIE ET CADRE D’ANALYSE

Notre enquête est menée en Belgique. Depuis les travaux de Lijphart (1999), il est établi que ce pays offre un laboratoire significatif des dynamiques politiques à l’œuvre dans les démocraties contemporaines. Le poids de la représentation et le rôle des partis politiques pour coconstruire des solutions de compromis à des problèmes de haute complexité institutionnelle ont été montrés (Schiffino 2003 ; Peters 2006). Le fossé constaté entre gouvernants et gouvernés (que la littérature n’oppose pas toujours3) résulte en partie, en Belgique, de la particratie. Cette dernière place le centre gravitationnel des décisions publiques au niveau des partis politiques. Elle interfère à tous les maillons de la chaîne décisionnelle : depuis les électeurs vers les parlementaires, de ces derniers vers le gouvernement, des ministres en tant que collectif gouvernemental v...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Titre
  4. Copyright
  5. AVANT-PROPOS – Ludivine Damay, Vincent Jacquet
  6. INTRODUCTION – FONDEMENTS, DIFFICULTÉS ET ACTUALITÉ DU CONCEPT DE LÉGITIMITE – Ludivine Damay, Vincent Jacquet
  7. PARTIE I – LA LÉGIMITÉ COMME IDÉAL
  8. PARTIE II – LA LÉGITIMITÉ REVENDIQUÉE : VOULOIR REPRÉSENTER
  9. PARTIE III – LA LÉGITIMITÉ DE L’ACTION PUBLIQUE
  10. PARTIE IV LA LÉGIMITÉ PERÇUE ET VÉCUE : LES CITOYENS
  11. CONCLUSION – DÉMOCRATIE ET LÉGITIMITÉ – Jérôme Jamin, Nathalie Schiffino
  12. BIOGRAPHIES DES AUTEURS
  13. TABLE DES MATIÈRES