Le modèle culturel chrétien de la France médiévale
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Le modèle culturel chrétien de la France médiévale

XIe, XIIe et XIIIe siècles

  1. 409 pages
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Le modèle culturel chrétien de la France médiévale

XIe, XIIe et XIIIe siècles

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À propos de ce livre

L'objet de ce livre est de comprendre comment, à la faveur de la construction de l'État français par les onze premiers rois capétiens, l'Église de Rome s'y est prise pour imposer son projet de civilisation à l'ensemble des acteurs laïques qui composaient la société française d'alors. Il est aussi d'analyser en quoi consistait le modèle cultuel chrétien et comment l'Église en a fait une idéologie catholique.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2020
ISBN
9782806123275

Seconde partie
Comment les dirigeants de l’Église catholique ont-ils réussi à imposer leur emprise sur l’ensemble de la société française ?

Rappel historique : mille ans d’histoire

La religion chrétienne et l’Église catholique existaient déjà depuis un millénaire au moment où commencèrent les trois siècles qui nous intéressent ici. L’histoire du christianisme primitif est particulièrement complexe et donc difficile à établir. Il reste beaucoup d’incertitudes et de débats entre les historiens, dont je ne saurais rendre compte : ce n’est pas mon objet de recherche. Cette histoire a commencé avec les apôtres : onze personnes, auxquelles s’est ajouté d’abord Mathias, qui remplaça Judas, et plus tard, Paul de Tarse. Ils formaient un groupe dissident dans le judaïsme : « un petit noyau de Juifs qui ont reconnu, dans la personne de Jésus, le Messie annoncé par les prophètes ».875 Ils ont pris en charge la triple mission que Jésus leur avait confiée : « témoigner de sa résurrection ; agréger à leur groupe par le baptême ceux qui croient en leur parole ; et gouverner la communauté ».876
Dès le départ, cette « communauté chrétienne » dut faire face, non seulement à un conflit avec les grands prêtres du judaïsme, mais déjà, à une division interne. Celle-ci concernait l’attitude à adopter dans ce conflit : le « parti des hébreux » (des Juifs de Jérusalem, liés à la famille de Jésus), préférait rester « attaché aux observances juives » et se montrer solidaire dans la lutte contre l’occupation romaine ; tandis que le « parti des hellénistes » (des Juifs de Palestine ou de la Diaspora, mais qui étaient de culture grecque), préférait se détacher de la religion judaïque et de la communauté juive. Il est vrai que ce parti helléniste « n’a rien d’une force politique : à la suite des Apôtres, ses responsables enseignent la soumission à toute autorité ».877 Ils estimaient avoir à remplir une mission plus importante que de combattre les Romains : leur rôle était d’accomplir les missions que le Christ leur avait confiées. Suite à de multiples conflits, ils « furent expulsés [de Jérusalem] en 37, après le martyre d’Étienne [leur chef]. Mais c’est bien par eux que le christianisme commença à se répandre en dehors de la Judée et de la Galilée ».878 Ils s’installèrent d’abord à Antioche, et se mirent à prêcher autour d’eux la parole de Jésus-Christ (les évangiles n’étaient pas encore écrits). Parmi eux se détachait la figure charismatique de Paul de Tarse, un Juif de la Diaspora qui persécutait les chrétiens, mais avait été converti par une apparition du Christ. Il est alors devenu un de leurs missionnaires les plus actifs : il a fondé des communautés chrétiennes en Asie Mineure et, à partir de 50, en Grèce (Athènes, Corinthe, Éphèse). « L’attitude de Paul, visant à désolidariser les chrétiens de leur appartenance à la communauté juive, devait apparaître comme une trahison » aux yeux du parti des Hébreux.879 Comme Paul, d’autres prédicateurs chrétiens diffusèrent la parole du Christ en Méditerranée, alors entièrement contrôlée par les Romains. C’était le cas de cette autre figure charismatique que fut l’apôtre Pierre. On ne sait pas exactement quand il est arrivé à Rome : sans doute déjà sous le règne de l’empereur Claude (entre 41 et 54) ou sous celui de Néron qui lui a succédé. C’est sous le règne de ce dernier qu’eut lieu une persécution des chrétiens et que Pierre et Paul moururent martyrisés, sans doute vers 65 ou 67. À partir de Rome, mais très lentement, l’évangélisation se poursuivit dans tout l’Empire et même au-delà, avec des succès et des échecs, entre des périodes de persécution, plus ou moins violente. C’est aussi à cette époque « que se constitue l’écriture du Nouveau Testament, ce qu’on appelle les Évangiles ».880 Et c’est alors également (entre 30 et 70) que l’Église commença à s’organiser : des communautés locales furent créées et des évêques furent désignés pour les diriger (mais celui de Rome ne jouissait encore d’aucune prééminence) ; des « pasteurs » assurèrent l’encadrement des fidèles et des rites furent institués (baptême, eucharistie) ; l’Église catholique s’installa et s’étendit. « Là où est le Christ, là est l’Église catholique, écrit Ignace d’Antioche [35-108], qui le premier veut expliquer par ce mot l’universalité du salut. »881 Avec lui, « une vénération spéciale entoure l’Église romaine “présidente de l’alliance divine”. L’évêque de Rome, successeur de Pierre, croit pouvoir, en plusieurs circonstances, imposer son point de vue dans des conflits de quelque importance. »882
Et les conflits ne manquèrent pas ! Il est vrai que les gens de cette époque, qu’ils soient grecs, latins ou autres, avaient besoin de croire en des dieux plus compatissants, plus proches de leurs misères quotidiennes, qui leur promettaient une vie heureuse après leur pénible séjour sur la terre. Et ce que les chrétiens leur apportaient était justement très attractif : un Dieu qui les aime au point de s’incarner et de mourir pour les sauver, et qui leur assure qu’ils ont une âme, destinée à vivre éternellement après leur passage par cette « vallée de larmes » : quoi de plus soulageant, de plus crédible ? Bien sûr, le message était assorti d’un ensemble de mystères qui, aujourd’hui, nous paraissent incroyables, mais qui, alors (quand les gens n’avaient pas encore besoin de preuves pour croire !) ne faisaient qu’ajouter de la magie au message et le rendre ainsi plus crédible. Bref, la « graine » était tombée au bon moment, au bon endroit, dans le bon sol ! Et le christianisme s’est répandu comme une traînée de poudre. Cependant, son récit était sujet à un grand nombre d’interprétations différentes. Il y eut donc de multiples « hérésies », accompagnées de conflits, de divisions, voire de schismes (que nous verrons en introduction du chapitre VII).
Pendant les IIe et IIIe siècles, l’Église et la communauté chrétienne survécurent tant bien que mal, en partie publiquement, en partie clandestinement, dans le monde romain. Il y eut encore des épisodes de persécution, mais « les empereurs Dèce (249-251) et Dioclétien (284-305) sont les seuls à avoir pratiqué systématiquement cette politique répressive. [...] cette persécution a cependant été assez intense pour que la perspective du martyre demeurât à l’horizon de toute vie chrétienne. »883 Les conditions changèrent ensuite radicalement avec la conversion de l’empereur Constantin (312) et avec l’édit de Milan (313). Après cela, « les chrétiens cessent d’être suspects. Les possessions de leurs communautés s’accroissent sous la garantie commune de la loi, leurs ministres participent aux privilèges des prêtres païens, l’évêque de Rome s’installe au palais du Latran, des édifices de culte se construisent, spécialement à Jérusalem (Saint-Sépulcre) et à Rome (Saint-Pierre) ».884 Plus tard, en 380, Théodose (379-395), le dernier empereur qui régna sur l’Empire romain unifié, fit du christianisme la religion officielle de l’État et interdit (et persécuta) le paganisme. Le prix à payer fut le « césaropapisme » : les empereurs romains, considérés comme désignés par Dieu, devinrent à la fois chefs de l’État et de l’Église, et il fallut plusieurs siècles à celle-ci pour regagner (plus ou moins) son autonomie.
À la mort de l’empereur Théodose (en 395), l’Empire romain fut officiellement divisé entre celui d’Occident et celui d’Orient et les deux communautés chrétiennes commencèrent à se distancier de plus en plus, jusqu’au schisme de 1054 entre les « orthodoxes » et les « catholiques ». Si l’empire d’Orient survécut jusqu’à la conquête ottomane de Constantinople (en 1453), celui d’Occident fut assailli par les invasions « barbares » et mourut en 476. L’Église catholique redevint alors autonome des dirigeants politiques, mais elle perdit aussi la protection de ses biens et de ses membres, dans un monde livré à la violence des rapports de force. Dure, très dure fut cette sombre époque : des fidèles martyrisés, des monastères pillés, des églises incendiées, leurs biens confisqués.
Elle survécut pourtant à cette épreuve et, avec un courage parfois héroïque, elle poursuivit, au Nord comme à l’Est, sa mission d’évangélisation, tout en cherchant de nouveaux protecteurs. Le premier ne tarda d’ailleurs pas à se manifester : dès la fin du Ve siècle le roi des Francs saliens, le Mérovingien Clovis, se convertit au christianisme. Mais après lui, les rois mérovingiens, trop divisés par des guerres intestines, n’eurent pas assez de pouvoir pour apporter à l’Église la protection efficace dont elle avait besoin. Il lui fallut donc attendre l’unification opérée par Charlemagne pour qu’elle puisse à nouveau en bénéficier. Cependant, déjà avant celui-ci, son père, Pépin le Bref, avait protégé l’Église contre les Lombards et offert au pape le territoire qui allait devenir le premier État pontifical. Charlemagne confirma cette donation et adopta la même politique. Mais le prix à payer était plus ou moins le même qu’avec les Romains : la perte d’autonomie de l’Église. « La politique réformatrice de Charlemagne s’étend à l’instruction religieuse du peuple, à la formation et à la discipline du clergé, à l’administration épiscopale, voire aux formulations de la foi. S’estimant responsable du progrès et de la défense de l’Église du Christ, le souverain franc confinerait volontiers le pape dans ses fonctions de culte et de prière. »885
Après le traité de Verdun qui, en 843, divisa l’empire de Charlemagne en trois morceaux, l’insécurité recommença, non seulement à cause des guerres entre ses héritiers (ses petits-fils), mais aussi à cause des invasions venues du dehors. « La restauration allemande de l’empire par Otton le Grand en 962 n’enraye pas l’évolution d’une bonne partie de l’Europe vers cette hiérarchie complexe d’autonomie et d’interdépendance que l’on appelle la féodalité. L’Église est prise dans ce processus de morcellement. »886 Les dirigeants ecclésiastiques s’efforcèrent alors de reconstruire le climat de sécurité qui était indispensable à l’exercice de leur mission, en cherchant des alliances, soit avec les empereurs du Saint Empire, soit avec les rois de France (surtout à partir Hughes Capet, après 987), soit avec ceux d’Angleterre ou d’autres « pays » où les royautés étaient en voie de reconstitution. Part...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Copyright
  4. Titre
  5. Dédicace
  6. Introduction générale
  7. Première partie — Comment les premiers rois capétiens ont-ils construit la France ?
  8. Seconde partie — Comment les dirigeants de l’Église catholique ont-ils réussi à imposer leur emprise sur l’ensemble de la société française ?
  9. Épilogue — Suite de l’histoire de l’Église catholique jusqu’à la Révolution française
  10. Conclusion générale
  11. Bibliographie — Ouvrages lus et cités
  12. Table des matières