La logique de l'action publique globale
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La logique de l'action publique globale

Une critique de la gouvernance euro-africaine des questions migratoires

  1. 240 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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La logique de l'action publique globale

Une critique de la gouvernance euro-africaine des questions migratoires

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Les controverses transnationales sur les migrations internationales sont dénuées de morale. C'est du moins une pratique en scène qu'une tendance moraliste de la régulation internationale de ce phénomène méconnait. Celle-ci biaise alors la découverte des subtilités empiriques que permettrait un rapport sociologique aux questions migratoires. L'idée du global en action tient compte de cette précaution épistémologique en prenant au sérieux les intérêts étatiques dans les enjeux migratoires.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2019
ISBN
9782806123060

DEUXIÈME PARTIE

L’EXACERBATION DES CONTROVERSES
TRANSNATIONALES PAR L’IMPLÉMENTATION
DE L’AGENDA PLURIEL DES MIGRATIONS
CLANDESTINES

L’imposition des agendas des migrations clandestines signifie l’institutionnalisation des représentations problématiques du phénomène en fonction des intérêts poursuivis par les décideurs étatiques. Cela étant fait, la discussion entre pays européens de destination et pays africains de départ se situe maintenant sur la question de la légitimité ou pas des programmes d’action. La légitimation passe par un travail discursif qui accentue la capacité d’adhésion ou de réfutation des dispositifs de gestion applicables. La participation aux rencontres internationales est une opportunité de légitimation des solutions de régulation. Les échanges qui s’établissent à ces occasions participent à valoriser des solutions au détriment d’autres. La valorisation relève de l’ordre du symbolique parce que reposant essentiellement sur des « procédés mentaux » (Gosselin, 1995 : 154) permettant de capitaliser la présence à une tribune internationale. Dans cette perspective, si les relations symboliques entre ces protagonistes sont dominantes, l’intégration par eux des propriétés inhérentes à la scène de prise de parole, en l’occurrence, proposer des modalités d’action en concordance avec leurs intérêts étatiques, se révèle cependant déterminante. La construction de programmes d’action sur les migrations clandestines africaines vers l’Europe mobilise par conséquent des valeurs ou des politiques révélatrices de ces intérêts. Ceux-ci sont à l’origine de nouvelles controverses. Cela se perçoit à travers l’application et la justification des politiques migratoires en Europe ainsi que la revendication et la ruse pour des politiques de développement en Afrique.

AGIR ET JUSTIFIER EN EUROPE
DES POLITIQUES MIGRATOIRES

À l’épreuve des migrations clandestines africaines par la mer Méditerranée, l’Union européenne apparaît comme un acteur doté d’une rationalité internationale (Smith, 1996 ; Cremona, 1998 ; Petiteville, 2002). C’est suivant cette rationalité qui se veut communautaire qu’elle développe un ensemble de mesures visant à contenir l’afflux de migrants sur ces côtes méditerranéennes d’Italie et d’Espagne. L’institutionnalisation au niveau européen de programmes sécuritaires liés aux migrations participe de cette logique de communautarisation (Dolowitz et Marsh, 2000 ; Hassenteufel et Surel, 2000 ; Radaelli, 2001 ; Bulmer et Padgett, 2004 ; Saurugger et Surel, 2006) de l’agenda migratoire. La « politique commune » (Balié et Fouilleux, 2005) sécuritaire contre les migrations clandestines constitue alors pour les décideurs des pays membres qui la défendent, une ressource pour la légitimation de leur proposition. Les négociations qui se développent au sein des instances européennes de débat entre les États membres (Smith, 2013) dévoilent des luttes pour la recherche d’un cadre d’action institué capable de garantir une stabilité aux différents programmes sécuritaires visant la régulation des migrations en provenance d’Afrique.
Les négociations configurent ainsi des situations d’action et de réaction, d’émission et de réception de messages liés à l’enjeu de la régulation. La volonté est de parvenir par représentations de la réalité (Lascoumes, 2014), à un consensus (Habermas, 2001). L’engagement pour une régulation communautaire des migrations clandestines d’origine africaine vers l’Europe, ce niveau étant considéré comme source et ressource de sens (Zittoun, 2009), ne se réduit pas pour autant aux programmes de sécurisation des frontières extérieures de l’UE. Des projets économiques et culturels sont aussi insérés au sein des politiques communes pour assurer une cohérence en faisant de ces politiques une dynamique du changement (Zittoun, 2007) concernant la gestion des flux démographiques massifs arrivant sur les côtes italiennes et espagnoles. L’équilibre entre régulation sécuritaire et régulation économique, se révèle ainsi être un dilemme pour l’Europe (Martiniello et Rea, 2004). C’est ce qui donne sens à l’idée d’entrepreneuriat communautaire de pays continentaux et côtiers et celle d’entrepreneuriat unilatéral.

I. L’ENTREPRENEURIAT UNILATÉRAL DES GOUVERNEMENTS EUROPÉENS

Le partage par certains pays membres de l’UE d’un passé commun avec les pays africains francophones modélise leur système migratoire (Petit, 2000). La proximité territoriale avec l’Afrique détermine aussi leur perception comme terre d’immigration (Green, 1991). Ceux-ci font inversement émerger une perception des migrations qui place les autorités publiques en situation de décodage des opinions, des attitudes, des pressions internes et externes déterminantes à la définition de la politique migratoire (Marmora, 2002). La mise en œuvre de cette politique correspond à des conjonctures politiques et à des représentations programmatiques routinières (Marmora, 2002) pour agir convenablement sur le problème migratoire africain.

A. Des conjonctures politiques de détermination différenciée des politiques migratoires

Il s’agit ici de prendre au sérieux l’investissement de quelques chefs d’État et de Gouvernements européens à agir sur l’immigration clandestine suivant leurs intérêts étatiques. C’est dans ce sens que si la politique migratoire est une réalité ancienne en France196, le passage de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur et l’exercice de sa présidence à la tête de l’État ont contribué à imprimer une rhétorique dans la gestion de l’immigration sur le territoire français (Carvalho et Geddes, 2012). En tant que ministre de l’Intérieur, la loi197 pour la maîtrise de l’immigration adoptée par l’Assemblée nationale française en deuxième lecture, le 23 octobre 2007, est pour lui une traduction en acte de ses représentations de la politique migratoire française qu’il va d’ailleurs traduire en projet politique198.
Il s’agit d’une loi qui porte une vision restrictive. Elle s’inscrit dans une logique de réduction du nombre de migrants clandestins entrant sur le territoire français. Le texte de loi procède à l’introduction des tests d’acide désoxyribonucléique – tests ADN – pour les demandes de visas liées au regroupement familial. Cet aspect de la migration est ciblé dans la mesure où pour les autorités étatiques, les immigrés d’origine africaine en France usent de cette voie régulière pour l’entrée irrégulière de leurs proches sur le territoire français. Les immigrés tirent profit ici de la déficience de l’état civil dans leurs pays d’origine. Toutefois, des oppositions partisanes concernant cette réglementation entraîneront son aménagement sans toutefois épuiser la portée restrictive des conditions d’entrée sur le territoire français. En effet, l’article 13 sur les tests génétiques proposés aux candidats au regroupement familial a fait l’objet de tensions entre acteurs de la vie politique française. Il s’est ensuivi une saisine du Conseil constitutionnel par l’opposition. La conséquence a été une modification de la loi sur la maîtrise de l’immigration. Le lien de filiation du candidat au regroupement familial est désormais vérifié par la génétique uniquement par rapport à la mère. Cependant, l’État français prend en charge les frais occasionnés par cette procédure.
En tant que président de la République, la création du ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du co-développement est la mesure institutionnelle déterminante s’agissant de l’orientation de la politique migratoire française par Nicolas Sarkozy. Le département ministériel est confié à Brice Hortefeux. Si en sa qualité de ministre en charge des questions migratoires, il procède à la signature d’accords de gestion concertée des flux migratoires avec les pays africains de départ, sa lettre de mission du 9 juillet 2007 qui décline les priorités en matière de politique d’immigration est explicite. Elle demande la mise en place de mesures pour refuser la résidence légale à des immigrants ne respectant pas les valeurs républicaines et ne montrant pas de volonté de s’intégrer dans la société française. La nomination d’Éric Besson en remplacement de Brice Hortefeux qui s’était félicité en audition d’être parvenu à une réduction du regroupement familial de 10,6 % en 2008199, est une occasion de réaffirmer la limitation de l’accès des migrants sur le territoire français. La lettre de mission de mars 2009 du nouveau ministre lui exige la formulation d’une nouvelle politique d’intégration, ainsi que la promotion de l’identité nationale.
La réception de ces initiatives françaises par les pays africains de départ s’inscrit dans une logique de désaccord. Cette image du désaccord se dégage de la prise de position du Président sénégalais lors du symposium sur les États-Unis d’Afrique, le 27 juillet 2009200. Cela est dû au durcissement des conditions d’obtention des visas dans les ambassades, des contrôles dans les aéroports et de la politique « d’immigration choisie » s’agissant de l’ère Sarkozy, à la fois comme ministre et président de la République. C’est la loi de mai 2007 sur l’intégration et l’immigration qui marque un véritable tournant dans la politique migratoire. À l’introduction de l’information biométrique dans les visas qui participe déjà à cette logique de réduction des entrées illégales sur le territoire français, il adjoint comme condition supplémentaire pour l’admission sur le territoire, la connaissance de la langue française et des valeurs républicaines, l’application d’un contrat d’accueil et d’intégration et l’augmentation des critères financiers et de logement. Le regroupement familial est prioritairement ciblé. Cette stratégie de régulation opérationnalisée à partir des représentations diplomatiques dans les pays de départ par les diplomates, laissant par ailleurs voir leur pouvoir discrétionnaire (Spire, 2017), en raison de la capacité de délibération dont ils disposent dans l’acte de délivrer ou pas le visa à un individu, est complétée par une stratégie interne mise en œuvre par le ministre de l’Intérieur en partenariat avec les autorités administratives et policières.
En plus de ces mesures, le Gouvernement français est engagé au sein de négociations au niveau de l’UE pour le durcissement des contrôles aux frontières et dans l’espace Schengen. Ceci est fait pour l’harmonisation des procédures d’asile, pour l’adoption d’un « contrat d’asile » incluant l’apprentissage des identités et des valeurs européennes pour les immigrés, et les rapatriements collectifs vers les pays d’origine. La dernière mesure ci-dessus évoquée a suscité une réaction d’indignation de la part des organisations associatives françaises de défense des droits fondamentaux de l’Homme. Il s’agit précisément du Réseau Éducation sans Frontières201. Cette association a manifesté son désaccord pour les conditions inhumaines dans lesquelles les expulsions des immigrés clandestins d’origine africaine sont effectuées. Il s’agissait surtout d’une manifestation contre l’expulsion des enfants scolarisés de niveau primaire et secondaire. Cette dénonciation n’empêche pas l’instauration de quotas et d’expulsions par le Gouvernement.
La constitution des migrations internationales en enjeu de politique interne (Petit, 2000) entraîne étroitement une imbrication entre politique migratoire et intérêt national (Briggs, 1996). D’ailleurs, Nicolas Sarkozy défendant en tant que ministre de l’Intérieur sa circulaire du 13 juillet 2006 relative aux régularisations pour des raisons exceptionnelles, s’exprimait en ces propos pour répondre à la question202 à lui posée lors d’un entretien accordé au journal « le Figaro » et paru dans le numéro du 26 juillet 2006203. La voie de la raison consiste ici en une fixation des quotas de migrants clandestins devant voir leurs situations être régularisées. Pour l’année 2006, le nombre est fixé entre 6000 et 7000 régularisations sur 20000 dossiers de demandes recensées par le guichet des régularisations. La vague de régularisation a comme corollaire l’expulsion de ceux des migrants n’ayant pas trouvé satisfaction. Le nombre d’expulsions pour 2006 est fixé à 25 000 par le ministre de l’Intérieur. Mais le nombre atteint sera de 23 000 contre 20 000 réalisées en 2005 et 10 000 en 2002204. Les renvois d’immigrés clandestins vont de manière croissante. Entre juin 2007 et mai 2008, c’est 29 729 expulsions qui ont été réalisées, soit une hausse de 31 % en un an205. L’objectif fixé en 2008 est de 26 000 expulsions et pour les cinq premiers mois de cette même année, le nombre est déjà de 14 660, soit une augmentation de 40 % par rapport à la même période de 2007. L’enjeu de la mesure est de « faire baisser l’immigration illégale estimée entre 200 000 et 400 000 personnes en France » (Lendja Ngnemzue, 2008 : 185).
Le rejet par les pays africains de départ de la régulation restrictive des migrations africaines est manifeste. C’est d’abord le fait du Président camerounais le 27 septembre 2007, à la tribune des Nations Unies lors de la 62e Assemblée générale. La posture argumentative de celui-ci consiste ici d’une part, à dévoiler les limites des mesures européennes et leurs inefficacités sur le long terme. D’autre part, elle consiste surtout à traduire son opposition vis-à-vis de celles-ci vu leurs caractères inappropriés206. Face à son auditoire, l’image construite est celle de quel...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Collection – Carrefours
  4. Titre
  5. Copyright
  6. Table des matières
  7. Introduction. Des migrations clandestines à l’action publique globale
  8. Première partie. L’imposition d’un agenda pluriel des migrations clandestines par les controverses transnationales
  9. Deuxième partie. L’exacerbation des controverses transnationales par l’implémentation de l’agenda pluriel des migrations clandestines