Anthropologie de la médecine créole haïtienne
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Anthropologie de la médecine créole haïtienne

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Anthropologie de la médecine créole haïtienne

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À propos de ce livre

En Haïti, le paysage médical traditionnel est complexe. Des hommes et des femmes ont développé des savoirs et des savoir-faire pour prévenir les problèmes de santé de leurs semblables et pour apporter des réponses pratiques à leurs maladies. Ces figures thérapeutiques proposent des réponses explicatives du mal et contribuent à l'amélioration de la qualité de vie des personnes les plus pauvres. Ils jouent donc un rôle essentiel dans un pays où l'accès aux pratiques biomédicales est difficile et inégal.

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Informations

Médecine créole haïtienne, santé mentale, médecine classique occidentale : un rapport de choc culturel et de complémentarité

Frantz RAPHAËL
« Un lopin de terre, une maison, peut vous dresser les uns contre les autres. L’unique héritage que nous vous lèguerons sera dans votre tête et dans votre cœur. Avec ça vous pouvez aller partout dans le monde et garder votre dignité. »19 Kadima Nzuji Nicolas.
« Nous ne sommes pas des Français noirs. »
« Se kreyòl nou ye. »
« Nous sommes tous des Haïtiens dans la diversité culturelle. »
De Grand Papa Méroné
Je salue l’initiative des coordinateurs de ce livre avant-gardiste pour l’évolution de la médecine créole haïtienne.
Un grand merci de me donner l’opportunité d’apporter mon humble contribution au système de santé mentale en Haïti.
L’état déplorable de la santé mentale en Haïti n’est plus à décrire. Les multiples écrits sur ce sujet ne cessent de le mettre en évidence. Le temps, aujourd’hui, est à la recherche de solutions. Comment, en effet, face au contexte économique si précaire et au manque de ressources professionnelles, rendre le système de santé mentale plus efficient pour toute la population ? Serait-ce par l’augmentation de l’accessibilité aux services et par l’amélioration de la qualité des soins ?
Lorsqu’on remonte à l’histoire et aux développements anthropologiques de cette nation, on ne peut qu’être émerveillé devant la grandeur des réalisations des anciens esclaves. Ils ont créé une nouvelle culture avec sa langue, sa religion, son mode de vie et même un système de soins que nous appelons dans ce livre : La médecine créole haïtienne. Durant la période précédant la déclaration de l’indépendance, elle était la seule à répondre aux besoins de la population tant sur le plan physique que dans le champ de la santé mentale.
À l’arrivée des premiers médecins venant de l’étranger, les cliniciens en pratique psychiatrique font appel, à maintes occasions, à la médecine créole haïtienne, aux « Oungan »20, « manbo »21, « doktè fèy »22... (Bordes 1997). Un mode d’échange quasi « impératif » qui se vit dans un rapport de choc culturel, dominant/dominé, mais aussi de complémentarité pour l’efficacité des soins.
Tenant compte de cette situation, les Drs Louis Mars et Legrand Bijoux ont innové. Le premier a créé le mot Ethnopsychiatrie23 et le second a écrit une brochure intitulée « Abrégé de l’ethnopsychiatrie haïtienne » (1999). Ils ont compris qu’un fort pourcentage de la population n’aura pas accès à des soins appropriés si les spécificités culturelles ne sont pas prises en considération.
Nos expériences dans les cliniques transculturelles à Montréal nous ont permis de saisir cette réalité par les chocs culturels vécus dans la pratique thérapeutique tant par les usagers haïtiens de culture créole haïtienne que par les intervenants ou professionnels de quelque origine qu’ils soient, incluant des Haïtiens, formés dans des universités à l’occidentale. Retournons aux racines, aux Ancêtres pour replacer cette problématique de la prise en charge de la santé mentale dans un contexte historique et anthropologique.

Éléments historiques et anthropologiques

Cette double vision historico-anthropologique nous permettra de saisir plus rapidement, à la fois, l’enjeu de la santé mentale en Haïti et ce qui a contribué à la force de la médecine créole haïtienne.

Un trajet migratoire traumatique

De la découverte de l’île jusqu’à 1804, la création du pays est enracinée dans une histoire dominée par la violence d’un envahissement espagnol vis-à-vis des Indiens qui s’y trouvaient. Puis les Français sont venus chasser les représentants de la reine d’Espagne et ont procédé à la déportation inhumaine des Africains de la côte ouest du vieux continent jusqu’à leur arrivée sur la terre nouvelle. Ce trajet migratoire est marqué par des séparations familiales douloureuses depuis l’Afrique, des suicides et homicides en pleine mer, de la maltraitance à un niveau bestial sur la partie ouest de l’île qui allait devenir la première république noire indépendante au monde. Cette période a été une barbarie esclavagiste relatée par Alex Harley (1977) dans son livre intitulé : Racines.

Un système esclavagiste plutôt que colonialiste

De tous les pays du continent américain, Haïti est le seul qui n’a pas été colonisé à l’époque. En effet, ni l’Espagne, ni la France n’ont pu imposer leur culture colonisatrice aux habitants qui y vivaient (Abou, 1981 : 50). L’occupation espagnole a abouti à un génocide des premiers citoyens haïtiens qui étaient des Amérindiens24 Celle des Français a été en réalité, une période esclavagiste plutôt que colonialiste. Aussi, les Esclaves des champs25, constituant la grande majorité de la population, sont devenus créateurs d’une nouvelle culture : la culture créole haïtienne avec pour : a) langue : le créole, b) religion : le vodou haïtien, c) médecine : la médecine créole haïtienne, d) genre de vie : les us et coutumes créoles.
Par conséquent, il était déjà possible de différencier les « Créoles » des nouveaux arrivants, nouveaux esclaves, les « Bossales » qui par la suite vont s’acculturer pour devenir des Créoles (Fouchard, 1988)
Dans son récent livre « une lecture décoloniale de l’histoire des Haïtiens, du traité de Ryswick à l’Occupation américaine (1697-1915) », Jean Casimir (2018) est ainsi à contre-courant de l’ancienne vision de « l’Haïti colonisé ». Il parle d’un peuple qui a développé des formes d’organisations complexes lui ayant permis de lutter contre le système esclavagiste et qui détient sa propre perception du monde.

La médecine créole haïtienne avant 1804 et la santé mentale

Durant la période esclavagiste, la médecine classique occidentale était absente sur l’île. Des systèmes de soins et de médecines traditionnelles ont été élaborés par les populations indiennes dans un premier temps, puis africaines qui habitaient la partie occidentale de l’île à partir de 1680.
En ce temps-là, l’atrocité du système esclavagiste avec ses conséquences psychologiques et mentales sur la population ont amené les « Oungan », « Bòkò », « Manbo », les « medsen-fèy » spécialistes dans la connaissance des plantes, les « matròn » ou accoucheuses traditionnelles, les « pè-savann26 à prendre en charge tout un champ de pratique que nous appelons aujourd’hui la santé mentale. Jusqu’à preuve du contraire, ils n’ont pas laissé de traces écrites.

La cohabitation entre les deux médecines : un rapport de choc culturel et de complémentarité

Après la déclaration de l’Indépendance, les Affranchis, noirs libres et mulâtres sont devenus les classes moyennes, la petite bourgeoisie commerciale, les intellectuels ou « save » en créole. Les natifs du groupe culturel créole se font appeler des « Moun sa yo », des « Gwo zòtèy »27 … Ces deux groupes se sont retrouvés dans des rapports culturels : Occidentalisés/ Créoles, dominants/dominés.

Un rapport culturel dominant/dominé

Une fois les esclavagistes blancs partis après la guerre de l’Indépendance, les cultures occidentale et créole haïtienne sont demeurées dans une relation de dominant/dominé. La culture occidentale, ayant ses assises dans les écoles et les églises chrétiennes catholiques ou protestantes, est devenue celle de la minorité de la population, de la bourgeoisie étrangère et nationale, d’une partie des classes moyennes urbaines et rurales28. Elle est hégémonique par sa langue, sa religion, sa médecine enseignée à l’occidental en regard de la culture créole haïtienne, la dominée, celle de la grande majorité de la population, des classes rurales : paysans, cultivateurs, des bidonvilles… Ce rapport de domination entre ces deux cultures contribue aussi à son image négative comme pratique dévalorisée venant d’anciens esclaves.
Un an après le tremblement de terre en Haïti du 12 janvier 2010, lors d’une rencontre du président d’Haïti au palais national (14 octobre 2011) avec le président de la francophonie Abdou Diouf29, ce dernier, parlant de la reconstruction du pays eut à dire : « ... La francophonie a un grand souci, c’est que cette reconstruction doit se faire selon la volonté et la vision du président, du gouvernement et du peuple haïtiens, le rôle de la communauté internationale est d’aider, d’accompagner dans la voie qu’Haïti aura choisie en respectant l’identité haïtienne. Quand nous parlons de l’identité haïtienne, c’est l’identité créolophone et francophone… »
Nul doute que monsieur Diouf, tacitement, faisait valoir le biculturalisme haïtien : deux pôles culturels entre lesquels évolue la population.

Évolution des deux médecines dans un rapport dominant/dominé

La médecine classique occidentale fit son installation après 1804, dans un pays où déjà le caractère hégémonique de la culture occidentale était valorisé. Ainsi, ces deux pratiques médicales se retrouvaient dans un rapport de choc culturel, dominant/dominé, mais aussi vraisemblablement de complémentarité. Tout se passe comme s’il y avait deux pays dans un même espace géographique. Aujourd’hui, oserons-nous dire qu’il y a une médecine officieusement reconnue, la médecine créole haïtienne et une, officielle, la Médecine classique occidentale ?
Pour en comprendre les raisons, il est utile de bien se rappeler les relations de conflits qui opposaient, avant l’indépendance, les Hommes blancs esclavagistes occidentaux, les Affranchis mulâtres, les Affranchis noirs métis culturels, et les Créoles. De fait, la suprématie des Blancs ne concevait pas l’égalité avec les Affranchis mulâtres. Il en a été de même entre ces derniers et les Affranchis (Noirs libres), et que dire des esclaves ?
Ces facteurs antagonistes ont persisté après le départ des Français qui sont revenus par la suite, comme missionnaires dans les églises et dans les écoles, pour évangéliser (Wainwhite, 2016), pour apprendre à parler leur langue : le français, pour savoir comment bien manger à table, comment s’habiller comme des civilisés... En d’autres termes, il s’agissait de rejeter les façons de faire et les valeurs de la culture créole haïtienne en émergence.
Aujourd’hui encore en Haïti, il y a des dichotomies : « Nèg mòn » / « Nèg lavil », créole/français, « Une élite pensante et un peuple à éduquer »… tout ce qui vient de la culture créole haïtienne, et en particulier, la médecine créole haïtienne, est assimilé à la sauvagerie. Le vodou est en effet souvent présenté comme une pratique diabol...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Copyright
  4. Titre
  5. Introduction La médecine créole haïtienne : un système de soins complexe
  6. Préface de Jean Benoist
  7. Médecine traditionnelle, médecine conventionnelle : tensions, liens, hybridation
  8. Vers une rencontre féconde entre la médecine créole et la médecine moderne en Haïti
  9. En Haïti, l’allaitement à travers le prisme de la médecine créole
  10. Un pluralisme médico-religieux en Haïti
  11. Le rôle des matrones dans la gestion et l’utilisation durable de la biodiversité en Haïti.
  12. Médecine créole haïtienne, santé mentale, médecine classique occidentale : un rapport de choc culturel et de complémentarité
  13. Le vodou haïtien : religion, système de soin ou les deux à la fois ?
  14. Présentation des auteurs
  15. Table des matières