Napoléon historien
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Napoléon historien

  1. 248 pages
  2. French
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Napoléon historien

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À propos de ce livre

Ce livre présente un aspect méconnu et peu étudié de Napoléon: son activité d'historien. Apparaît alors une personnalité complexe, plus intuitive que cérébrale, et cherchant toujours, à tout prix, à se mettre en avant. Le fruit de cette aventure historienne inachevée est constituée des brouillons de jeunesse, mais surtout des Mémoires, plus authentiques et révélateurs de la personnalité du grand homme, car issus de sa plume, ou plutôt de sa bouche même. La méthode historique qu'il élabore, appliquée aux généraux qui l'ont précédé ou à lui-même, se révèle d'une étonnante modernité.

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Informations

Éditeur
SPM
Année
2016
ISBN
9782336765181

CHAPITRE 5

Une volonté de se placer dans l’Histoire

À la lecture des écrits et dictées dans lesquels Napoléon voulut faire œuvre d’historien, l’événementiel a finalement une importance bien moindre que les pensées sous-jacentes qui les parsèment. Resté dans une conception compilatoire de l’Histoire par sa formation mais aussi par la force des choses, l’Empereur laissa des travaux d’une valeur historiographique inégale. L’identité de l’auteur de ces travaux biaisa particulièrement le jugement porté sur ceux-ci. Ils étaient utilisés au même titre qu’une source historique de première main. Ainsi voit-on, dans un recueil lillois de 1887 intitulé Le Maréchal de Turenne d’après les écrivains de son temps, le Précis des guerres du maréchal de Turenne, largement inspiré de l’Histoire du vicomte de Turenne d’Andrew Ramsay, côtoyer à un rang égal les Mémoires de Turenne, par ailleurs publiés pour la première fois en 1735 en annexe de la somme du même Ramsay. L’introduction dudit recueil précise que les « Mémoires [de Turenne] ont été éclaircis d’une manière tout à fait lumineuse par Napoléon premier qui a donné un Précis des guerres du maréchal de Turenne1 ».
D’une certaine manière, il est bien vrai que Napoléon avait voulu éclairer des faits historiques, à la lumière de ses réflexions, de ses observations, ce dernier terme étant le titre habituel de ses nombreuses remarques dans ses Mémoires et ses trois Précis (sur César, Turenne et Frédéric II).
La méthode historique de Napoléon était la même que celle des écrits de jeunesse, à savoir une écriture compilatoire, même si les années, le mûrissement de l’esprit et l’expérience personnelle enrichirent le processus d’écriture à Sainte-Hélène.
Toutefois, il convient de rappeler que la narration événementielle n’est pas ce qui compte le plus dans les écrits historiques de Napoléon réunis sous le titre pompeux de Commentaires en 18672. L’essentiel à considérer est le désir de Napoléon de se situer lui-même dans l’Histoire, parmi des personnages qu’il admirait ou avec qui il avait pu être comparé. Comment cette manière d’écrire l’Histoire lui avait-elle permis de définir à lui-même et au reste du monde sa place dans l’histoire européenne voire mondiale sur la longue durée ?
Les œuvres historiques : un projet identitaire ?
Les écrits historiques de Napoléon mettent en évidence un désir de se définir soi-même. Une identité balbutiante s’exprimait dans les écrits de jeunesse. Le jeune Bonaparte était en quête d’identité. Corse, naturellement. Admirateur de Paoli, le héros de ses jeunes années, il aspiraitàenêtreundelamêmetrempe3, par la plume à défaut de l’épée. Il n’est donc pas surprenant que sa première tentative d’écriture historique (presque étouffée dans l’œuf) ait été une Histoire de la Corse, dont il ébaucha une vague introduction de quelques lignes le 27 novembre 1787. Seul un fragment nous est parvenu. Il met en évidence le projet éminemment identitaire de cette tentative historienne.
Le jeune Bonaparte s’adresse à ses « compatriotes » qui, comme lui, avaient toujours été « malheureux4 ». Il avait pour dessein d’écrire un éloge du peuple corse, à l’exemple de Rousseau qui avait consacré un chapitre de son Contrat social à la Corse, ce qui fut souvent prétexte à y voir une prophétie, que l’on a trop prise au sérieux. Cette dimension élogieuse est perceptible à travers d’autres tentatives d’introduction, plus lyriques, pour ne pas dire plus pompeuses, comme ce Parallèle entre l’amour de la patrie et l’amour de la gloire qui compare la Corse à la Grèce antique5. Pour Jean Tulard, le jeune Bonaparte avait à l’esprit l’idée que « la Corse a atteint sous Paoli, dans cette constitution de 17556 qu’ont admirée les philosophes, un idéal de gouvernement comparable à ce que furent dans l’Antiquité les lois de Lycurgue pour Sparte7 ». La prédilection pour l’Antiquité, notamment pour Plutarque, est évidente dans ses Lettres sur la Corse, mais le but de Bonaparte était de rédiger l’histoire de la Corse pour rappeler qu’elle avait ses grands hommes, le plus récent étant Paoli8. Les Lettres sur la Corse, texte historique le plus abouti parmi les écrits de jeunesse de Napoléon, auraient dû être adressées à l’abbé Raynal :
« Mais, vous qui aviez prédit à la Hollande sa chute, à la France sa régénération, vous aviez promis aux Corses le rétablissement de leur gouvernement, le terme de l’injuste domination française9. »
Plus loin, Bonaparte ajoute que « l’histoire de Corse n’est qu’une lutte perpétuelle entre un petit peuple qui veut vivre libre et ses voisins qui veulent l’opprimer10 ». C’est pour cette raison que nous y percevons l’ambition d’écrire une histoire philosophique revendicative et non une histoire à vocation (uniquement) compilatoire11. À la lecture de ce texte de piètre qualité, il est bien impossible d’affirmer que sous cet écrit juvénile de Bonaparte perçait déjà Napoléon. Cette ébauche offre une histoire de la Corse ampoulée, surannée, édifiante, surtout admirative des chefs corses du passé. Bonaparte se pose ici comme admirateur, et non comme le centre de gravité en fin de compte. On cite fréquemment les mots de Frédéric Masson qui, à propos des écrits historiques sur la Corse, dit qu’ils rappellent qu’à l’époque, le futur général et empereur était « Corse, entièrement Corse, rien que Corse12 ». L’esprit de Napoléon évolua de telle façon que ses écrits ne laissèrent qu’un lointain souvenir, ainsi avec une brève mention de l’Histoire de la Corse en 1819, qui nous porte à croire que l’Empereur lui-même ignorait jusqu’où elle avait été ébauchée13.
Ce fut la dernière tentative écrite d’œuvre historique de Napoléon n’ayant pas pour sujet son propre destin, jusqu’aux dictées de Sainte-Hélène.
Ces dictées ne peuvent en aucun cas être comparées aux écrits de jeunesse, bien au contraire. Une réplique de Las Cases à l’Empereur, insérée dans Le Mémorial aux journées des 2 et 3 août 1815, résume d’une certaine manière le dessein des œuvres historiques :
« Sire, nous vivrons du passé ; il a de quoi nous satisfaire. Ne jouissons-nous pas de la vie de César, de celle d’Alexandre ? Nous posséderons mieux, vous vous relirez, Sire !14 »
« Nous posséderons mieux » est une expression remarquable. En effet, Las Cases, qui voulait rédiger une œuvre auprès de l’Empereur, désirait entraîner celui-ci dans ses souvenirs. En même temps, il rappelait à un souverain déchu et déprimé qu’il pouvait revendiquer une grandeur supérieure à Alexandre et César, comme au temps de sa splendeur.
À la date du 13 novembre 1816, en évoquant une pendule hélénienne ayant appartenu à Frédéric II, Las Cases nous rapporte que Napoléon lui avait dit avoir « possédé l’épée du Grand Frédéric15 ». Une remarque quelque peu maladroite du compagnon d’exil suscita une réflexion typiquement napoléonienne :
« Et comme à la suite de tout cela je terminais par mon grand étonnement qu’il n’eût pas fait des efforts pour conserver l’épée du Grand Frédéric. « Mais j’avais la mienne », a-t-il repris avec une douceur de voix et un souris tout particuliers, et me serrant légèrement l’oreille. Et au fait il avait raison, je lui disais là une grosse bêtise16. »
Napoléon se mesurait aux grands hommes du passé, et plus particulièrement à ceux qui furent considérés en leur temps ou après comme de grands capitaines. Après sa chute, il semblait nécessaire de s’identifier à ces derniers, comme il avait tâché de le faire durant son règne.
L’exil hélénien rendait Napoléon vulnérable aux infamies inhérentes à la condition d’un souverain et conquérant déchu, qui avait perdu toute légitimité. Il s’en plaignait et reprochait à se...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Du même auteur
  4. Titre
  5. Remerciements
  6. Dédicace
  7. Copyright
  8. Préface
  9. Introduction
  10. Chapitre premier – Napoléon, lecteur d’Histoire
  11. Chapitre 2 – Napoléon et le travail de l’historien
  12. Chapitre 3 – Une reconstruction historique
  13. Chapitre 4 – Une volonté de maîtriser son histoire
  14. Chapitre 5 – Une volonté de se placer dans l’Histoire
  15. Conclusion
  16. Sources et bibliographie
  17. Index
  18. Table des matières