Le monde rural
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Le monde rural

Entre permanences et mutations

  1. 318 pages
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Le monde rural

Entre permanences et mutations

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En novembre 2014, un colloque pluridisciplinaire portant sur le monde rural, ses mutations et ses enjeux était organisé à Besançon par le laboratoire C3S. Les communications retenues dans le cadre de cette publication ont été regroupées en trois grandes parties. La première propose des éléments de cadrage et de problématisation susceptibles d'éclairer les phénomènes de pauvreté et d'exclusion, les fractures ou les inégalités territoriales mais aussi les dynamiques locales de développement...

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PREMIÈRE PARTIE :

ÉLÉMENTS DE CADRAGE
ET DE PROBLÉMATISATION

CHAPITRE 1

RÉINTERROGER LE MILIEU RURAL.
PAUVRETÉ, VULNÉRABILITÉ
ET CAPABILITÉ

Alexandre PAGÈS*
Kenjiro MURAMATSU**
Les phénomènes de pauvreté et d’exclusion qui caractérisent le monde rural demeurent des sujets encore assez peu couverts par les chercheurs en sciences humaines et sociales. Nous assistons cependant, et au-delà du dossier agricole, à une meilleure prise en compte institutionnelle, et différents documents ont été rendus aux administrations en vue de lever un voile sur des situations méconnues ou cachées. Il s’agira ici d’en proposer une revue critique puis de déplacer notre regard sur les capacités d’adaptation des individus et les supports de l’intervention sociale. Caractérisés par une histoire, une mémoire et une culture, les mondes ruraux doivent faire face à la crise mais ils disposent d’un potentiel de développement. Ces territoires présentent aujourd’hui une certaine vitalité démographique. Ils accueillent cependant de nouvelles populations qui, pour certaines d’entre elles, sont vulnérables, expriment des besoins et font preuve de mobilité. C’est dans le cadre de ces évolutions majeures que nous prolongerons cette réflexion en proposant d’identifier les traits saillants qui caractérisent la pauvreté et les exclusions et en montrant, par la suite, dans quelle mesure les plus pauvres peuvent faire appel aux ressources de leur environnement immédiat et être accompagnés par des professionnels qui inscrivent leur activité dans des projets collectifs et territorialisés.
*
* *

I. UNE PRISE EN COMPTE RÉCENTE DES PROBLÈMES DE PAUVRETÉ ET D’EXCLUSION

La pauvreté en milieu rural est une source d’interrogations pour un certain nombre d’administrations et d’associations caritatives. Cela étant dit, et on l’oublie trop souvent, des efforts ont été entrepris depuis fort longtemps pour connaître les conditions de vie de ces familles dans le but d’introduire des réformes sociales. Tel est le cas du travail réalisé par Frédéric Le Play et ses collaborateurs. Dès le milieu du XIXe siècle, ils avaient étudié le budget des ménages et montré les ressources dont ils disposaient pour s’adapter aux aléas de l’existence (Le Play, Cheysson et Butel, 1994). Malgré le caractère idéologique que présentaient ces monographies, celles-ci avaient bien montré que les petits paysans étaient parvenus à satisfaire leurs besoins en organisant de subtiles règles de transmission du patrimoine. Ces sociétés paysannes se caractérisaient, il est vrai, par des formes de reproduction dans lesquelles on était “marqué” dès sa naissance ou en raison de son statut matrimonial. Or, à l’heure du progrès technique et du changement social, l’agriculture familiale s’effacera peu à peu au profit d’une agriculture intégrée aux mécanismes du marché. Dans la continuité des travaux portant sur le célibat paysan (Bourdieu, 1962), la pauvreté sera révélatrice d’un habitus avec la présence de mécanismes ayant contribué au vieillissement de cette population. Démographie, sociologie, sciences politiques et économie rurale fournissaient des cadres d’analyse féconds pour dégager des facteurs d’inertie et de résistance au changement.
Depuis la réalisation de ce programme de recherche, le niveau de vie des ménages ruraux a quasiment rejoint celui des autres composantes de la population. Dans la plupart des pays développés, vivre en situation de pauvreté n’est plus synonyme d’inadaptation. On attribue des équivalents monétaires en vue de mesurer son caractère relatif et d’identifier les moyens dont disposent les ménages pour mener une vie décente et socialement acceptable (Townsend, 1979). En France, des disparités de revenu persistent néanmoins au sein du monde agricole (Brangeon, Jégouzo et Roze, 1998). Des études se sont penchées sur les effets de la déstructuration des sociétés paysannes sur les destins individuels (Maclouf, 1986 ; Pagès, 2001 et 2004), et quelques travaux avaient été effectués dans le cadre d’une évaluation plus globale des politiques sociales et des dispositifs d’insertion (Balley, Lenormand et Mathieu, 1992). Dans le sillage des analyses portant sur ce qu’on appellera la nouvelle pauvreté et, plus tard, la précarité, c’est en recueillant le point de vue des travailleurs sociaux qu’on étudiera les processus d’exclusion. En ayant recours à des expertises, on identifiera des populations cibles et des leviers d’action. Ce mouvement s’est amplifié tout au long de ces dernières années. Des journées d’études ont été consacrées à ces questions en faisant appel à des intervenants provenant de divers horizons, et des documents de travail ont été rendus à des administrations centrales, y compris au niveau européen. Ce souci partagé témoigne probablement d’une volonté d’établir un diagnostic et d’inscrire ce dossier dans l’agenda des pouvoirs publics. Nous proposerons d’effectuer ici une rapide synthèse de ces travaux récents. Plutôt que d’en présenter un examen exhaustif, nous avons retenu cinq textes, publiés en ligne entre 2008 et 2011. Si le contexte institutionnel de leur publication diffère, ils apportent des éléments d’information au sujet des populations concernées par la pauvreté économique. Les textes référencés et sélectionnés sont les suivants. Trois d’entre eux portent sur le cas français, un autre sur le cas de la région de la Wallonie (Belgique) et un rapport de synthèse propose une lecture sur le plan européen :
– Document A : Commission européenne (2008), Pauvreté et exclusion dans les zones rurales, Résumé exécutif (34 p.) ;
– Document B : CNIAE (2008), IAE et monde rural des acteurs pour l’insertion et le développement du Territoire (70 p.) ;
– Document C : Marianne Berthod-Wurmser, Roland Ollivier, Michel Raymond (IGAS), Sophie Villers et Dominique Fabre (CGAAER) (2009), Pauvreté, précarité, solidarité en milieu rural, Paris, La Documentation française, 2 tomes (90 p. et 128 p.) ;
– Document D : Gérard Lambert, Philippe Lyet et Michel Valle (2009), De la fragilité à la réclusion et de l’assistance au développement territorial. Étude sur les processus d’exclusion et d’insertion en milieu rural, Dijon, IRTESS de Bourgogne et FNARS (279 p.) ;
– Document E : Marie-Thérèse Casman et Stéphanie Linchet (2011), La Pauvreté en milieu rural en Région wallonne, Université de Liège/CERA (60 p.).
Des éléments communs ont certainement eu un impact sur les conditions d’élaboration de ces documents rédigés à la fin des années 2000. Il s’agit notamment des évolutions qui concernent les politiques sociales conduites à un niveau national ou européen. Mais il s’agit surtout d’une prise de conscience collective, celle d’une connaissance parcellaire de la pauvreté et des exclusions. On remarquera les caractères multiniveaux (national, supranational, régional) et multisectoriels (ministériel, professionnel, associatif et universitaire) des lectures proposées.
Le rapport émanant des services de la Commission européenne (doc. A) évoque les principes de cohésion sociale définis suite à la réunion du Conseil de Lisbonne, l’enjeu étant de se doter d’un diagnostic partagé, de favoriser l’élaboration de politiques de développement rural et de corriger les écarts de revenus induits par l’élargissement de l’Union. À la différence des pays d’Europe de l’Ouest dans lesquels les espaces ruraux connaissent un renouveau démographique, les campagnes situées en Europe centrale et orientale connaissent encore un vieillissement assez marqué de leur population (en raison d’une forte mobilité des jeunes), et les taux de pauvreté y sont les plus élevés (Boulineau et Guy, 2015).
Le document B est le fruit d’observations réalisées en France par les professionnels de l’insertion par l’activité économique. Il fait référence, dans un cadre plus national qui est celui du Grenelle de l’insertion, à la nécessité d’alimenter une réflexion au sujet des espaces ruraux. On relèvera toutefois une lacune : alors que l’évaluation de ces mesures était une préoccupation forte au milieu des années 1990 (période au cours de laquelle des réflexions très abouties avaient été publiées au sujet des dispositifs d’insertion), l’Observatoire national de la Pauvreté et de l’Exclusion sociale reconnaissait récemment l’existence de populations mal couvertes par la statistique publique comme les agriculteurs en difficulté et les jeunes ruraux. Il orientera d’ailleurs prochainement ses travaux dans cette direction (Baronnet et al., 2014).
Nous retrouvons cette pluralité de situations dans le rapport C. Issu d’une mission conjointe de l’Inspection générale des Affaires sociales et du Conseil général de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Espaces ruraux, ce document de travail a été rendu fin 2009. Document de référence sur lequel s’appuient les pouvoirs publics et les administrations, il comprend une base de données très précise au sujet des revenus et des conditions de vie, comporte des analyses portant sur des situations locales et identifie des populations particulièrement exposées. Une cartographie a été réalisée à partir d’une extraction de données INSEE en vue de repérer des poches de pauvreté. Un recueil de données plus qualitatives a été effectué à l’issue de rencontres organisées avec des organismes en charge de l’action sociale et des services de l’État. Dans les territoires où se sont rendus ces experts, les taux de pauvreté peuvent localement atteindre près de 20 % de la population, c’est-à-dire une fréquence comparable à celle que l’on enregistre dans certains quartiers relevant de la politique de la ville. À l’exception des retraités qui perçoivent de faibles pensions, force est de reconnaître qu’en milieu rural, un certain nombre de « précaires » sont aussi des « employables immédiats ». Certains d’entre eux sont couverts par des mesures d’insertion professionnelle tandis que d’autres, à l’image des saisonniers de l’agriculture ou des intérimaires de l’industrie, alternent des périodes travaillées et chômées.
Tout comme le document B, le document D a été conçu dans le cadre d’une réflexion portée par des professionnels d’une région à dominante rurale, la Bourgogne. Sous la forme d’une monographie associant des chercheurs en sciences humaines, des stagiaires qui se destinent aux métiers du travail social et des partenaires institutionnels, cette étude a mis particulièrement l’accent sur le point de vue des travailleurs sociaux et les formes d’isolement caractérisant les plus fragiles. Plusieurs territoires ont été retenus par cette équipe de recherche en proposant une comparaison de terrains.
Lever un voile sur des situations parfois méconnues suppose d’établir un dialogue entre chercheurs et praticiens de l’action sociale. Telle est l’idée défendue par les auteurs d’un récent numéro de la revue Pour, une revue qui émane des mouvements d’éducation populaire. Publié en mai 2015 sur le thème de la précarité et de la marginalité en milieu rural, il présente toute une gamme de situations en faisant appel à des universitaires et à des témoignages provenant de professionnels et d’associations qui interviennent sur le terrain (Hochedez et Mialocq, 2015). Tel est aussi le cas du document E, fruit d’une collaboration entre une banque coopérative (CERA) et des sociologues de l’Université de Liège, afin d’« éveiller la conscience aux problèmes complexes liés à la pauvreté et à l’exclusion » (E, p. 3). Regardons de plus près les méthodes utilisées et les principaux constats énoncés.

A. Méthodologie

S’agissant des espaces ruraux, les définitions adoptées dans les cinq documents retenus confirment leur caractère fluctuant et aléatoire. Le document A indique qu’il n’existait (à la date de la remise des rapports) aucune définition communautaire de l’espace rural, et les auteurs se fondent sur celle des experts de l’OCDE. Quand on se réfère à cette définition très extensive, les espaces urbains regrouperaient 26 % de la population de l’UE, les régions qualifiées de « moyennes » 34 %, contre 40 % pour les espaces ruraux proprement dits. La France ferait partie des pays à dominante plutôt rurale avec les Pays de l’Est, les Pays du Sud (à l’exception de l’Italie), la Scandinavie et l’Irlande (doc. A, chap. 1).
Contrairement aux documents émanant de l’UE, les rapports français se basent essentiellement sur la notion d’« espace à dominante rurale » qui avait été utilisée par les services de l’INSEE de 1997 à 2010 et prenait en compte la présence (ou non) d’un bassin d’emploi et une moindre attractivité des villes. Or, quand on reprend cette définition, les ruraux représenteraient à peine 18 % de la population de l’Hexagone. Rien de comparable en Belgique. Dans le rapport belge(e), on retrouve la définition de l’OCDE ; elle est complétée par plusieurs notions telles que le taux d’espace non bâti et la « périphéralité » comprenant la distance avec les communes environnantes et l’accessibilité aux services. En Wallonie, 157 communes sur 257 sont qualifiées de rurales et regroupent 33,9 % de la population de cette région (E, p. 59). Nous comprendrons mieux pourquoi l’étude réalisée en Bourgogne (D) se démarque nettement de ces définitions officielles. Elle préfère souligner les dynamiques spécifiques à chaque terrain d’investigation.
Concernant...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Copyright
  4. Titre
  5. SOMMAIRE
  6. INTRODUCTION
  7. PREMIÈRE PARTIE : ÉLÉMENTS DE CADRAGE ET DE PROBLÉMATISATION
  8. DEUXIÈME PARTIE : PREMIÈRES ILLUSTRATIONS : FRANCHE-COMTÉ ET ARC JURASSIEN
  9. TROISIÈME PARTIE : AUTRES TERRAINS D’INVESTIGATION : AMÉRIQUE DU SUD, ANDALOUSIE ET OCÉAN INDIEN
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