Walter ou Naïm, héros ou assassin ?
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Walter ou Naïm, héros ou assassin ?

  1. 190 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Walter ou Naïm, héros ou assassin ?

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Table des matières
Citations

À propos de ce livre

Intrigué par la décision de son grand-père de se rapprocher de la communauté juive, à la veille de sa mort, Kurt, un jeune américain mène une enquête en Allemagne. Découvrant la Shoah, les persécutions, il s'interroge sur son identité, vit la rupture familiale - le grand-père est-il un héros ou un assassin - et perce le mystère qui entoure la fascination de son grand-père pour le Hindenburg.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2016
ISBN
9782806120724
Sujet
History
Sous-sujet
World War II

1ère PARTIE

Une conversation banale

Tintin ou Rouletabille ? Quel lien me relie à ces deux héros de la littérature ? Ni la coiffure, encore moins le sexe, plus simplement le souci, comme journaliste, de chercher la vérité et de la dire. Comme eux, je me suis laissée entraîner dans une enquête. La mienne mêlant secret de famille et catastrophe aéronautique. Par rapport à ces glorieux prédécesseurs, je disposais d’un énorme avantage, les NTIC, ces nouvelles technologies de l’information et de la communication – internet, GSM, skype – mettent toute l’info brute et brutale, en provenance des quatre coins du monde, instantanément, à la disposition de n’importe quel individu lambda. Le journaliste, lui, fait le tri, recoupe les sources, trouve les liens entre les évènements, les met en situation et privilégie l’analyse plutôt que la tentation d’être le premier sur le coup. Je garde en mémoire le billet du correspondant d’une radio francophone qui, en juin 1967, avait annoncé, le premier, la prise de Jérusalem par l’armée israélienne provoquant un séisme dans toutes les rédactions. Coups de gueule des rédac-chefs, furibards, appelant leurs envoyés spéciaux. Où avait-il eu l’info ? Par des contacts privilégiés ? L’écoute des liaisons militaires ? Non, simplement, plus « efficacement », sans état d’âme, il avait anticipé, de quelques heures, une situation que tous les observateurs politiques et militaires pressentaient. Un scoop qui lance une carrière et une conception particulière de l’information !
Le 6 mai 2014, sans but précis pour meubler la journée, j’ai consulté les éphémérides. Une façon de redécouvrir l’Histoire. Entre la naissance de Gaston Leroux – le père de Rouletabille –, le dépôt du brevet de l’accordéon, ce piano à bretelles dont la simple évocation suscite l’envie de valser, l’anniversaire de l’élection de Sarkozy, mon attention fut attirée par la commémoration annuelle de la tragédie du Hindenburg survenue en 1937. Trente-cinq morts en trente-quatre secondes, le temps nécessaire pour visionner les images d’époque sur le net. Ce tragique fait divers eut un retentissement mondial. Il mit fin à l’épopée des dirigeables. Périodiquement, il revenait au premier plan de l’actualité lorsqu’une équipe scientifique « après de longues et coûteuses expériences en laboratoire, démontrait que les théories précédentes sur les causes de l’accident n’avaient pas pris en considération tous les éléments et qu’à la faveur de nouvelles méthodes d’investigation, on pouvait aujourd’hui prouver que… ». À quelques jours du 77e anniversaire, une nouvelle hypothèse, valorisant la thèse de l’accident, venait d’être rendue publique, balayant les théories du complot ou du sabotage.
Une récente conversation me revint en mémoire. Rentrant d’un séjour aux USA, j’avais eu pour voisin de cabine un jeune Américain, âgé d’une vingtaine d’années. Peu loquace, il avait cependant évoqué la disparition de son grand-père et, de façon décousue, le crash du dirigeable. Il venait en Allemagne pour effectuer une sorte d’Erasmus. Avec discrétion, et dans un anglais facile, comme le disent les Burkinabés à propos de la connaissance limitée d’une langue, j’avais tenté de l’interroger sur le lien entre les deux événements mais l’atterrissage était annoncé. Mon voisin, excité à la perspective de découvrir l’Europe, changea tout à fait le cours de la conversation et me confia ses projets, avant de rejoindre l’Allemagne.
Me promener, à Paris, au bord de la Seine, monter sur la Tour Eiffel, descendre les Champs Élysées. À Bruxelles, voir votre Grand-Place, l’Atomium et ce petit garçon qui fait toujours pipi, boire une bière belge, manger du chocolat.
Un programme que n’aurait pas renié Visit Brussels ! À l’aéroport de Bruxelles National, au comptoir de récupération des bagages, était-ce par politesse ou courtoisie, nous avions échangé nos cartes de visite. Au cas où ? « Lorsque vous serez à Bruxelles, n’hésitez pas à m’appeler ». Et la vie avait repris son cours habituel, moi, entourée par les miens après avoir franchi la porte de sortie, et lui se dirigeant vers un taxi. Négligemment, après l’avoir consultée d’un regard distrait, j’avais rangé sa carte dans une poche. Mon interlocuteur s’appelait Kurt. Son nom de famille n’était pas mentionné. Étudiant en droit, il habitait à New York ; pas d’adresse postale ni même d’e-mail mais un téléphone aux USA. Il avait pris soin de préciser qu’il prendrait vite un numéro européen.
Pourquoi la lecture des éphémérides me rappelait ce jeune homme ? Pourquoi, en plein vol, avait-il évoqué une catastrophe, alors que la vision, par le hublot, d’une interminable couche de nuages blancs, illuminée par le soleil levant, incitait à la rêverie ? La référence, brève et énigmatique, à une histoire familiale m’avait laissé l’impression que le programme touristique en dissimulait un autre. Impression renforcée par ses interrogations, marmonnées à voix basse, comme s’il avait honte d’en parler devant une étrangère.
Je veux percer un mystère. Que s’est-il passé à bord du Hindenburg ? Qui est mon grand-père ?
J’éprouvai l’envie de retrouver Kurt. En défaisant mes bagages, sa carte de visite avait pris le chemin de la poubelle. Heureusement, la femme de ménage étant en vacances, la corbeille débordait. Je la renversai sur la table du salon et, à genoux, me mis à la recherche du précieux sésame. Ensuite, je laissai un message, sur son téléphone américain, lui souhaitant la bienvenue en Belgique, en anticipant sa présence, et me mettant à sa disposition s’il souhaitait découvrir Bruxelles autrement. Un message courtois terminé par le rappel de mes coordonnées. Ma carte de visite avait peut-être subi le même sort que la sienne, jetée dans la corbeille d’une quelconque chambre d’hôtel !
Ce premier pas franchi, j’ouvris un grand carton marqué « Papa » qui m’avait suivie au cours de mes différents déménagements. Avec précaution, vu son état de délabrement, je l’avais extirpé de la cave pour en explorer le contenu, la lecture des éphémérides ayant excité ma curiosité sur les dirigeables, construits pendant la période de l’entre-deux-guerres. Ce carton recelait autant de poussière que de trésors, accumulés par mon paternel, un vrai fou volant. Des papiers, des carnets de bord, des photos jaunies dépareillées et des ouvrages anciens comme « Autour du monde en Zeppelin » qui retrace le vol épique, réalisé en 1929, par le Graf Zeppelin, le rêve de Jules Verne et de son héros Phileas Fogg.
Je plongeai dans mes souvenirs familiaux. Mon père, Habib, né à Bey Oglou, quartier d’Istanbul, avait, enfant, joué au cerf-volant sur les rives du Bosphore. Il en avait gardé une fascination pour la conquête du ciel. Immigré en Belgique, au début des années trente, il s’était passionné pour les planeurs et avait battu des « records » en volant quelques minutes dans des planeurs remorqués par des treuils, à l’aérodrome de Gosselies. Dans les années cinquante, il avait appris à piloter des ballons à gaz, fascinants et imprévisibles engins qui peuplent mes souvenirs d’enfance. Il avait la manie, explicable par les privations de la guerre, d’accumuler toutes sortes d’objets, de souvenirs, de bouts de ficelle, dans des cartons auxquels il était le seul à s’intéresser. Sa syllogomanie se révéla utile pour me permettre l’immersion dans l’époque glorieuse de l’aérostation alors que la presse du jour s’intéressait, longuement, à la future conquête de Mars.
Les jours passaient sans nouvelle de Kurt. Je m’impatientais. J’avais hâte de le questionner sur son intérêt, pas clairement exprimé mais perceptible, pour le Hindenburg. Que savait-il sur ce crash ? Pour tempérer mon impatience, je pris deux décisions. La première de ne pas le rappeler avant un mois. Un délai fixé en tenant compte du peu d’informations dont je disposais sur sa présence en Europe. Pour éviter la tentation, je collai, sur un des pilastres qui coupaient mon bureau en deux, une page du calendrier sur laquelle je barrai la journée écoulée d’une croix. Selon mon degré d’impatience, j’accomplirais ce geste tôt le matin, anticipant le silence de ce jeune Américain ou, au contraire, le soir tard, après avoir espéré en vain un appel. Je lui avais laissé un message le 6 mai : j’attendrais donc le 6 juin pour m’autoriser une nouvelle tentative de contact. Cette attente tournait à l’obsession. Je devins même agressive avec la femme de ménage qui avait malencontreusement déplacé le calendrier.
Ma seconde résolution fut de mettre à profit ce laps de temps aux contours incertains pour approfondir mes connaissances sur le dirigeable LZ 1291. Il portait le nom du maréchal Hindenburg, président du Reich de 1925 à sa mort en 1934. C’est lui qui avait nommé Hitler chancelier contribuant ainsi à son ascension.
Rendant compte de l’accident, un quotidien américain avait titré : « Le symbole de la puissance – voire de l’arrogance – allemande détruit en quelques secondes ». Que signifiait ce titre ? Qui était à bord ? Des dignitaires nazis ? Des passagers fortunés ? Des résistants antifascistes ? Des passagers clandestins ?

1 En réalité, c’était le 118e produit en Allemagne, certains numéros étant attribués à des prototypes sur plan. Le « L » de l’identification LZ correspond à Luftshiff et le « Z » rend hommage au comte Ferdinand von Zeppelin concepteur des premiers dirigeables.

Accident ou attentat ?

Nous sommes en 1937, à Lakehurst, New Jersey, une ville sans histoire située à l’est de Philadelphie, à une centaine de kilomètres de New York. Le 6 mai, par un hasard du calendrier, c’est le jour de l’Ascension en Europe. À Lakehurst, l’ascension relève d’une prouesse aéronautique qui soulève l’enthousiasme populaire. Le Hindenburg, le plus grand dirigeable jamais construit, doit y atterrir dans la matinée. La presse nationale a largement annoncé son arrivée, en termes dithyrambiques. Les édiles locaux ont compris l’intérêt pour leur ville de réserver un accueil triomphal à cette première traversée transatlantique faisant fi, pour la circonstance, du refroidissement des relations diplomatiques entre les USA et le régime nazi. Une tribune a été spécialement aménagée à l’endroit où doivent descendre passagers et équipage. Fanfare, discours et fleurs : tout est prévu. Dès l’aube, la presse écrite, la radio et le cinéma – on ne parle pas encore de TV – s’installent.
Un terrain, appartenant à la Royal Navy, d’une surface équivalente à vingt terrains de football, a été transformé en piste d’atterrissage. Les herbes fauchées, le sol aplani, un mât d’amarrage tripode à chenilles se dresse fièrement sur la terre battue.
Tôt le matin, le public est accouru en masse. À côté des badauds, on distingue, à leur combinaison blanche, les rampants2, deux cents personnes indispensables pour amarrer le LZ 129, les services de sécurité et de contrôle, les officiels endimanchés, les futurs passagers, les amis et la famille des arrivants, impatients d’accueillir leurs proches. Les dirigeables captivent l’intérêt du public même si passagers et équipages commencent à perdre leur statut de héros. Depuis huit ans, les vols commerciaux se développent aux quatre coins du monde, avec des dirigeables à armature rigide, sans mention d’accidents corporels significatifs, ce qui crée, dans la population, un sentiment de confiance et de sécurité. Le planning du LZ 129 prévoit une trentaine de traversées océaniques pour 1937, à raison de trois par mois. Selon les prévisions, trois jours et trois nuits sont nécessaires pour franchir les quatre mille kilomètres de Francfort à Lakehurst. Dix ans plus tôt, le 20 mai 1927, Charles Lindbergh a traversé l’Atlantique, en sens inverse, de New York à Paris, à bord du Spirit of St Louis, en 33 h 30. Seul à bord, il ne transportait ni courrier postal ni fret, contrairement à ce que permettent les dirigeables. Le Hindenburg convoie des milliers de lettres dont 176 seront retrouvées intactes, dans un container et distribuées par la poste dans les jours qui suivirent l’accident, acquérant ainsi une valeur philatélique inestimable !
Ce 6 mai 1937, il pleut sur le continent américain. L’attente dure : en fin d’après-midi, l’impatience grandit. Prévue initialement à l’aube, l’arrivée du Hindenburg est annoncée pour la fin de la journée. Au micro, placé sur l’estrade où le commandant de bord sera reçu officiellement par les autorités locales, un speaker donne régulièrement des nouvelles du LZ 129. Pour la première fois, l’atterrissage sera commenté en direct, en radio. Fait exceptionnel, quatre studios cinématographiques sont présents pour filmer le plus grand dirigeable jamais mis en service qui entreprend son 63e voyage mais sa première traversée de l’Atlantique.
Durant la journée, des éclairs ont traversé le ciel. La pluie tombe, une pluie fine serrée, tiède et collante. Lakehurst, ville située au bord de l’Atlantique, y est habituée au printemps. Au sol, les plus chanceux des visiteurs se sont réfugiés dans les berlines noires, garées le long du terrain d’aviation improvisé. Les autres, mouillés, impatients ne manifestent aucun signe particulier d’inquiétude.
À bord, le radiotélégraphiste ne chôme pas : il reçoit en permanence des nouvelles de la météo sur la côte est et il transmet, en morse, à Lakehurst.
« Retardé par vent violent de face, avons 11 h de retard sur planning initial. Survolons actuellement New York. Météo annonce orages sur zone atterrissage. Prenons dispositions. Excellente atmosphère à bord. »
L’atmosphère à bord est effectivement excellente. Le bar est ouvert. Il propose des alcools réputés, des vins fins et des rafraîchissements. Les passagers ont été impressionnés par le survol de la statue de la Liberté et de l’Empire State Building. Selon certains comptes rendus de l’époque, anticipant sur le développement de l’aviation commerciale, la flèche de cette statue aurait été conçue comme point de repère pour les dirigeables. Le zeppelin l’a contourné deux fois, pour la plus grande joie des passagers, agglutinés aux hublots. Avec enthousiasme, ils partagent leurs impressions sur le vol qui se termine. Aidés par le personnel de cabine, les épouses préparent activement les bagages. Les enfants ne quittent pas les baies, obliques à 30°, pour admirer le paysage. Le dirigeable vole à une altitude de 250 mètres ce qui permet de discerner les maisons, les véhicules mais très peu d’habitants étant donné le mauvais temps qui sévit depuis plusieurs heures. Les nurses s’occupent des plus petits enfants, les mamans mettent la dernière main à leur toilette. Pas question d’apparaître négligées !
Le commandant a averti l’équipage. Pour compenser le retard, l’escale de ravitaillement sera de courte durée : quatre heures au lieu des seize initialement prévues. L’aéronef doit, en effet, poursuivre sa route jusqu’à Rio de Janeiro où il embarquera les notables invités à participer, à Londres, aux cérémonies de couronnement du roi d’Angleterre, Georges VI. À aucun prix, ils ne veulent manquer cet exceptionnel événement mondain.
Au sol, les rampants se sont affairés toute la journée sous la conduite énergique...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Titre
  4. Avertissement au lecteur
  5. Dédicace
  6. Prologue
  7. 1ère PARTIE
  8. 2ème PARTIE
  9. 3ème PARTIE