De Derrida à Lévinas, la dette et l'envoi
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De Derrida à Lévinas, la dette et l'envoi

Le temps de l'autre - La déconstruction et l'invention du futur

  1. 290 pages
  2. French
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De Derrida à Lévinas, la dette et l'envoi

Le temps de l'autre - La déconstruction et l'invention du futur

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La Déconstruction est le nom de la pensée de l'évènement. Mais elle est aussi l'événement, le nom de ce qui arrive, la justice ou l'impossible. Comment s'opère la coordination entre ces deux définitions? Qu'est-ce qu'un questionnement déconstructif? Quelle est la place du sujet postdéconstructif dans cette opération? Cet ouvrage essaie de répondre à ces questions à travers le dialogue qui a eu lieu entre Jacques Derrida et Emmanuel Lévinas.

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Informations

DEUXIEME PARTIE

LA DÉCONSTRUCTION ET L’ÉTHIQUE
FACE À LA QUESTION DU LANGAGE

1. L’élément stratégique de « Violence et métaphysique »

Les objections de Derrida dans « Violence et métaphysique » sont d’ordre stratégique. Dans cet article, Derrida se présente comme le défenseur de la tradition philosophique et de sa nécessité pour toute pensée de l’altérité. Il défend Heidegger et Husserl contre la lecture qu’en propose Lévinas. Il montre l’impossibilité d’échapper également à Hegel (qui est dans ce contexte le nom du langage philosophique, du logos et de son essence qui s’est déterminée par des oppositions conceptuelles). Si l’on ignore cet élément stratégique dans notre lecture de cet article, ces objections ne pourraient paraître que des malentendus dues à une lecture hâtive de la philosophie de Lévinas. Or, dans la première partie de cet article, Derrida offre une explication parfaite de la philosophie de Lévinas. Ainsi, par exemple, Derrida explique que l’éthique lévinassienne n’est pas une morale qui voudrait nous donner des lois ou des règles morales. Après avoir affirmé cette essence de l’éthique lévinassienne comme l’essence du rapport éthique en général, Derrida critique cette éthique à travers la catégorie du respect. Or, Derrida le sait, le respect n’est envisageable qu’entre des êtres égaux, entre des egos. L’autre chez Lévinas, par sa dimension de hauteur n’est pas égal au moi, il est mon enseignant, mon maître, et la relation qui me réunit avec lui est une relation de déférence et non de respect. S’agit-il ici vraiment d’un malentendu ?
En effet, cet article ne peut pas être considéré comme un dialogue de sourds chargé de malentendus1. L’étonnement qu’il pourrait susciter doit trouver une explication, et non pas être rangé parmi les lectures du « jeune Derrida » qu’il aurait ignorées ensuite ou rejetées par d’autres textes. Je dirais même que cet article est un exemple pour toute pensée de l’altérité qui voudrait apprendre des leçons de l’histoire, et de l’histoire philosophique. Derrida s’y montre prudent sur l’usage moralisant de la catégorie de l’autre. Il ne conteste nécessairement pas l’éthique lévinassienne et l’importance de cette éthique et même sa nécessité. Rien d’étonnant, nous ne voulons pas dans notre ouvrage offrir une telle lecture. Ce que Derrida voulait inviter à penser, c’est la possibilité d’une telle éthique, et de toute éthique en général. En particulier, pour une éthique qui ne se veut pas une morale, qui ne veut surtout pas tomber dans le piège de l’humanisme traditionnel, livrant ainsi l’autre, autrui, à des pratiques de violence. Car, ce que nous pouvons lire de cet article et ce dont Derrida a peur, c’est le fait que plus on affirme l’altérité de l’autre, plus cet autre serait livré à la violence. Plus l’autre est autre que moi, plus il serait exposé à l’aliénation et à la répression. Et cela au nom même de l’autre, au nom de l’humanisme et de l’humanité et de la morale. Ceci n’est pas une accusation contre l’éthique lévinassienne, mais une invitation à penser le risque de moraliser la catégorie de l’autre, risque que l’humanisme de Lévinas partagerait peut-être avec les humanismes classiques2.
On pourrait s’étonner du fait que Derrida défende la tradition philosophique, et, on le sait, la déconstruction s’est définie dès son départ en opposition à cette tradition et à son système d’oppositions conceptuelles. Derrida n’a cessé, avant et après cet article, de réclamer la nécessité, non pas de sortir (Derrida refuse en effet ce mot) mais d’en finir avec l’engrenage de ce système, de montrer la défaillance du discours métaphysique qui ne se présente comme plénitude et idéalité qu’en excluant et en chassant son dehors. On pourrait également s’étonner devant l’éloge que fait Derrida de cette tradition comme étant le seul et unique chemin pour toute éthique et toute philosophie qui voudrait se fonder et fonder par la suite une pensée capable de parler au nom de l’autre. Etonnement plausible également devant l’éloge que fait Derrida de la phénoménologie, dont il va, quatre ans plus tard, montrer la vulnérabilité structurelle et la fragilité conceptuelle. Ainsi que devant la défense par Derrida de l’entreprise philosophique de Heidegger et de l’éthique qu’elle dissimulerait, que Derrida place, à travers toute son œuvre, au cœur du logocentrisme. L’élan vital de la déconstruction de la tradition philosophique est l’autre, l’événement. Or, voilà que Derrida nous enseigne que l’autre et le respect de l’autre sont au centre de cette tradition et qu’une pensée qui prenne un autre chemin est une pensée vouée déjà à la violence. On trouve même dans cet article une défense de la notion de présent vivant et de ce qu’elle pourrait représenter pour toute pensée qui voudrait garder l’altérité absolue d’autrui. Derrida écrit : « Seul l’unité actuel de mon présent vivant permet à d’autres présents vivants (à d’autres origines absolues) d’apparaître comme telles dans ce qu’on appelle la mémoire ou l’anticipation.3 » L’étonnement pourrait être suscité ici si l’on savait que la déconstruction du présent vivant est la visée principale de son ouvrage La voix et le phénomène. Qu’il ne puisse y avoir d’expérience qui ne peut être vécue autrement qu’au présent, personne, et même Lévinas ne peut le contredire. Mais en venir à affirmer que cette notion est le garant de l’altérité, les écrits de Derrida même vont à l’encontre de cette affirmation.
Rien d’étonnant. Il faut regarder cet article dans l’ensemble de la stratégie de la déconstruction. Le dialogue de Derrida avec Lévinas n’est pas dû au hasard. Ce dialogue a même constitué un trait principal de la pensée de Derrida. Or, ce qu’il faut retenir surtout de ce dialogue, c’est que Derrida ne procède pas à la manière de Lévinas. Il ne s’agit plus pour Derrida de découvrir la vérité, de faire un discours philosophique sur la vérité, ce que Lévinas a reproché à Derrida4
. La vérité n’est valable que dans un discours où le signifié transcendantal donne encore lieu à des oppositions conceptuelles. Il ne s’agit pas non plus pour lui de retracer l’existence humaine pour atteindre à son origine, au commencement ; ces deux derniers noms n’ont de sens que dans un discours qui appartient encore à l’époque de la métaphysique de la présence. Il s’agit pour Derrida, ce qui constitue le trait décisif de cet article, de ce qu’il reste après la vérité de l’illusion de la vérité, après l’absence de l’origine, à savoir la négociation. Nous avons déjà introduit cette idée dans notre [Partie I]. Nous pouvons résumer l’essentiel de cet article par la question suivante : étant donné que l’on ne peut pas échapper à la violence, puisque, comme nous venons de le dire, elle est l’absence de l’origine et de la vérité, comment procéder de sorte que l’on parvienne à la moindre violence possible ? La moindre violence est la seule eschatologie possible, dont Derrida dit plus tard dans Spectres de Marx qu’elle est « messianique sans messianisme5 ». L’eschatologie messianique, celle de Lévinas, qui est le nom de la paix pure comme non-violence pure, ne prend pas en compte cette impureté de la paix. Elle ne prend pas en compte notamment que le langage est source de paix et de violence à la fois. La déconstruction est ainsi d’entrée de jeu politique, privilégie le politique sur l’éthique. Ce privilège a une raison, c’est que le politique dans son idée de stratégie peut procéder sans loi universelle, ce que l’éthique ne peut pas faire, même l’éthique lévinassienne, dont Derrida dira qu’« elle affirme la loi dans ce qu’elle a d’universel.6 » Ce qui est en jeu ici c’est la singularité de l’autre, son événementialité. C’est pour cette raison que la question pour Derrida est de savoir ce « qui mérite le nom d’événement7 », et non pas de l’événement, de la vérité, d’une telle ou telle chose qui serait dans son idée de chose un événement ou non. L’autre est à inventer, et non pas à découvrir ou à révéler. C’est cette notion de l’événement comme mérite qui sera capitale pour la pensée de l’altérité.
Attardons-nous encore sur ces notions de « l’autre à inventer », et du « tout-autre comme impossible » et non pas comme infini ou comme infiniment autre – car il y a bien chez Derrida un concept de l’autre comme tout-autre, mais ce tout-autre est l’impossible et non pas l’infini. L’impossible est, dans un sens heideggérien, la marque de la finitude même –. Ce qu’il nous faut comprendre à présent, c’est le sens de la défense que donne Derrida de la tradition philosophique dans « Violence et métaphysique ». De quoi s’agit-il dans cette défense ? D’une tendance dans la philosophie française « qui ne valide Husserl que contre Lévinas. », comme l’expliquait Salanskis ? D’un exercice philosophique du jeune Derrida enthousiaste ?
Pour répondre à ces questions, nous examinerons, dans un premier temps, le sens de la clôture de la métaphysique, sur les raisons qui ont motivé chez Derrida le choix du mot « clôture » et plutôt que « fin », et le choix du mot « clôture » plutôt que « sortie ». Nous trouverons là peut-être l’explication de cette défense et de la stratégie de la déconstruction. En un mot, Derrida refuse une sortie hors de la tradition philosophique parce que toute autre pensée qui essaie de déterminer une autre conception du temps, plus originaire ou plus authentique, appartiendra nécessairement à cette tradition déterminée en termes de métaphysique de présence, dans la mesure où ces valeurs, qui organisent tous les discours critiques de la philosophie, sont des valeurs métaphysiques. La différence entre « clôture » et « sortie » nous révèlera que, dans la déconstruction, il s’agit, plutôt que de l’annonce d’une « fin » ou d’un « dépassement » de la philosophie, d’une répétition ou d’une validation de celle-ci. Certes, la déconstruction ne se réduit pas à cette répétition ou à cette validation. Mais le travail de la déconstruction ne peut être entrepris qu’au moment où est déclaré infini et absolu le champ déterminant de la philosophie.
Dans un deuxième temps, nous rendrons compte de la proximité de la critique de la métaphysique de la présence entre Derrida et Lévinas. Les deux philosophes critiquent en effet le privilège du présent dans l’histoire de la philosophie. Cette critique les place côte à côte face à la tradition philosophique et renvoie leur champ de recherche à un lieu commun, irréductible, qui a donné lieu à la pensée philosophique, à savoir le pré-originaire ou le passé absolu. Mais cette convergence disparaît aussitôt : Derrida et Lévinas divergent sur la manière dont il faut concevoir la trace de ce passé. Cette divergence a un nom, à savoir Dieu. Lévinas concevra la trace comme trace de Dieu ; Derrida concevra Dieu comme trace de la trace. C’est là que la divergence paraîtra plus définitive que jamais : entre Derrida d’une part, qui détermine la pensée de la trace comme pensée de la finitude infinie, et Lévinas d’autre part, qui détermine la pensée de la trace comme pensée de l’...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Ouverture philosophique
  4. Titre
  5. Copyright
  6. INTRODUCTION
  7. PREMIERE PARTIE – A PRIMAUTÉ DE L’ÉTHIQUE ET LA PLACE DE LA PENSÉE DE L’ÊTRE ENTRE LÉVINAS ET DERRIDA
  8. DEUXIEME PARTIE – LA DÉCONSTRUCTION ET L’ÉTHIQUE FACE À LA QUESTION DU LANGAGE
  9. TROISIEME PARTIE – ALTERITE TOUT AUTRE DERRIDA ET LÉVINAS AUTOUR DE LA QUESTION DE L’ALTERITE
  10. QUATRIEME PARTIE – ETHIQUE, POLITIQUE ET DÉCONSTRUCTION POURQUOI DÉCONSTRUIRE ?
  11. CINQUIEME PARTIE – LA DECONSTRUCTION DEVANT LA LOI. LE BONHEUR DE L’ECHEC DE LA DECISION
  12. CONCLUSION
  13. Bibliographie
  14. Table des matières
  15. Adresse