Le fédéralisme belge
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Le fédéralisme belge

Enjeux institutionnels, acteurs socio-politiques et opinions publiques

  1. 256 pages
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Le fédéralisme belge

Enjeux institutionnels, acteurs socio-politiques et opinions publiques

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Entre 2007 et 2011, la Belgique a connu une longue période de crise politique. Cet ouvrage propose des études consacrées aux enjeux institutionnels, aux acteurs socio-politiques, aux médias et aux opinions publiques au cours de la période précédant le nouveau compromis institutionnel de 2011. Elles sont autant de clés pour comprendre les dynamiques qui ont conduit à cette nouvelle étape du fédéralisme belge et les perspectives d'évolution qui s'ouvrent aujourd'hui.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2013
ISBN
9782336664415

partie 1

ENJEUX INSTITUTIONNELS

CHAPITRE 1

STRUCTURES INSTITUTIONNELLES DU FEDERALISME BELGE
Min REUCHAMPS
En Belgique, les structures institutionnelles du fédéralisme ont été construites, et ensuite modifiées, étape par étape, réforme après réforme au gré des négociations politiques entre des représentants du nord et du sud du pays. Au cours des quatre dernières décennies, les réformes de l’État ont transformé un État unitaire en un État fédéral. Ainsi, conçu comme un modèle de pacification communautaire entre deux grandes communautés linguistiques et culturelles, le fédéralisme belge a engendré des structures institutionnelles spécifiques.
Ce chapitre explore les spécificités et les enjeux politiques de ces structures institutionnelles. Sous cette appellation sont étudiées les institutions au sens strict comme les parlements, les gouvernements, les organes de gestion des conflits, mais également les mécanismes et outils de pacification communautaire tels les lois spéciales, les accords de coopération ou encore l’autonomie constitutive. Afin de comprendre les dynamiques à l’œuvre et les différents usages des structures fédérales par les acteurs, les systèmes électoraux et les relations intergouvernementales seront également analysés. Au cœur de cette analyse se trouve l’interaction entre les concepts de fédéralisme et de fédération, c’est-à-dire entre la nature multidimensionelle du fédéralisme belge et la structure fédérale qui en découle – et qui l’engendre, le façonne, en retour. Ainsi, un fédéralisme dualiste, centrifuge et dynamique renvoie à une fédération bipolaire, asymétrique et évolutive. Suivant cette approche, les structures institutionnelles du fédéralisme belge apparaissent comme étant à la fois des enjeux politiques et des aires de jeux politiques.
Loin d’être le fruit d’une réflexion commune ou d’un accord unanime d’embrasser le fédéralisme, les structures institutionnelles du fédéralisme belge résultent de l’évolution progressive, au coup par coup, d’un État unitaire vers un État fédéral qui continue à évoluer. Ainsi, cette transformation vers le fédéralisme n’a pas suivi un plan de route tout tracé et partagé par l’ensemble des acteurs politiques mais est véritablement le fruit de compromis. D’ailleurs, la compréhension du terme fédéralisme lui-même a varié – et varie encore – selon les époques et les acteurs. Dans ce contexte, exposer les forces qui ont conduit à l’adoption d’un système fédéral en Belgique avant de présenter les structures institutionnelles de la fédération permet de saisir les dynamiques et les enjeux en présence et de comprendre les caractéristiques parfois atypiques de ces structures qui sont continuellement (re)discutées.
Dans ce chapitre, la fédération belge représente l’ensemble du système fédéral belge développé et modifié depuis de 1970, tandis que l’État fédéral (ou parfois Autorité fédérale) renvoie au niveau fédéral et à ses structures institutionnelles. Les Communautés et les Régions, quant à elles, constituent les entités fédérées de la fédération belge. Deux autres distinctions découlent de cette précision. La notion de « communauté » évoque deux réalités en Belgique : la première rappelle la réalité linguistique, culturelle et politique que représentent les deux grandes communautés, aux contours souvent difficiles à dresser, les Néerlandophones/Flamands et les Francophones/Wallons ; la seconde renvoie à la réalité politique et juridique des trois Communautés flamande, française et germanophone14. Le terme « région » recouvre également deux réalités territoriales politiques et juridiques distinctes : d’une part, les Régions (en néerlandais Gewest) entités fédérées et, d’autre part, les régions linguistiques (en néerlandais gebied)15.

1. De la Belgique unitaire à la Belgique fédérale : un fédéralisme dualiste, centrifuge et dynamique

Si, dès l’origine, la Belgique connaît une grande diversité linguistique où la population s’exprime dans des dialectes – d’origine germanique au Nord, romane au Sud – le français est langue d’État, dans un État unilingue et unitaire (voyez notamment Mabille 2011). Cet État est dirigé par un gouvernement central, à la tête d’une structure unitaire décentralisée composée des provinces et des communes.
La prédominance démographique flamande ne se répercute aucunement dans les structures institutionnelles. Les francophones de Flandre, de Wallonie et de Bruxelles tiennent les rênes du pouvoir. Toutefois, dès le lendemain de l’indépendance de la Belgique, suite à une révolution menée par une élite francophone et catholique opposée « aux politiques linguistiques et religieuses du roi Guillaume Ier d’Orange » (Lecours 2005 : 100), un mouvement flamand, emmené par la « petite » bourgeoisie catholique flamande, se constitue et lutte pour la reconnaissance du néerlandais et son égalité avec le français, en Flandre en particulier. L’égalité avec le français ne sera officiellement réalisée qu’en 1898, bien que le français reste la langue dominante. Les revendications flamandes, d’abord linguistiques, mèneront progressivement à des réclamations pour plus d’autonomie culturelle, dès les années 1920, et finalement à des demandes en faveur du fédéralisme, à partir des années 1950. Ainsi, que les premières revendications fédérales émanent du nord du pays n’est guère surprenant vu la monopolisation du pouvoir par les élites francophones et la lente reconnaissance de la langue et du fait flamand (Deschouwer 2005 : 49-50).
Au sud du pays, dès le début du XXe siècle, une certaine tension linguistique est palpable comme l’atteste la lettre restée célèbre de J. Destrée au roi Albert Ier dans laquelle il écrivait en 1912 : « Sire, il n’y a pas de Belges, il n’y a que des Wallons et des Flamands ». Quelques années plus tard, la Première Guerre mondiale provoque indirectement l’augmentation des tensions linguistiques qui atteignent alors un nouveau sommet. Le mythe de la mort de soldats néerlandophones sous les ordres d’officiers ne s’exprimant qu’en français contribue à augmenter le ressentiment d’une partie de la population flamande comme la conséquence de l’unilinguisme francophone de l’État belge. Par ailleurs, certains membres du mouvement flamand collaborent avec l’occupant allemand afin d’obtenir des droits linguistiques, notamment le droit d’enseigner en néerlandais à l’Université de Gand. Au sortir de la guerre, le mouvement flamand revendique ouvertement l’autonomie culturelle pour la Flandre (Deschouwer 2005 : 50).
En 1921, l’introduction du suffrage universel masculin ne modifie guère la domination politique des élites francophones malgré le poids démographique et désormais électoral des locuteurs néerlandais. Toutefois, en réponse aux demandes incessantes du mouvement flamand, les années 1920 voient des avancées législatives importantes en matière linguistique, suivies d’autres en 1932, reconnaissant et assurant, en Flandre, l’usage du néerlandais dans de nombreux domaines de la vie publique (notamment la justice, l’administration et l’enseignement). Au même moment, le bilinguisme généralisé est rejeté par une majorité de francophones et de néerlandophones, chaque groupe souhaitant avant tout protéger le statut de sa langue sur sa partie du territoire. La logique de ces lois linguistiques – et donc de l’emploi des langues en Belgique – est territoriale. Chaque commune est rattachée à une région linguistique unilingue, sauf pour les communes bruxelloises qui constituent la seule région bilingue. Le statut de chaque commune est défini en fonction des résultats des recensements décennaux. Les communes où vivent au moins 30 % de citoyens adultes parlant la langue d’une autre région linguistique acquièrent le statut de commune bilingue et, si la proportion de ces personnes dépasse 50 %, elles changent tout simplement de région linguistique (Swenden, Jans 2006 : 879). Aux yeux des néerlandophones, cette méthode, utilisée jusqu’en 1948, se révèle particulièrement problématique à Bruxelles et dans sa périphérie en raison de la francisation de ces communes (qualifiée de « tache d’huile » par certains responsables flamands) provoquant le recul vers le nord de la frontière linguistique (Rillaerts 2010).
Les tensions politiques suscitées par ce procédé mèneront, en 1963, à la fixation de la frontière linguistique et, corollairement, des limites des quatre régions linguistiques : la région de langue néerlandaise au nord, la région de langue française au sud, la région de langue allemande à l’est et la région bilingue de Bruxelles-Capitale, enclavée dans la région de langue néerlandaise. En termes pratiques pour les citoyens vivant dans les régions linguistiques unilingues, toutes les relations avec l’administration se font dans la langue de la région. Les communes de la région bilingue de Bruxelles-Capitale continuent à utiliser le français et le néerlandais dans les relations avec leurs administrés et plusieurs communes francophones et néerlandophones situées le long de la frontière linguistique (ainsi que certaines communes à l’est du pays) doivent accorder certaines facilités linguistiques (Janssens 2001).
Avant le clichage territorial de l’emploi des langues, les années d’occupation allemande et surtout les années de l’aprèsguerre avec notamment la cristallisation des tensions autour de la Question royale ont contribué au renforcement des conflits communautaires16. Ainsi, au début des années 1960, il semble de plus en plus clair que l’État unitaire est dépassé dans les faits. Politiquement, une structure unitaire ne permet plus de concilier les visions divergentes du vivre ensemble portées par les deux grandes communautés. Porteurs de ces visions opposées, des partis régionalistes apparaissent : la Volksunie (VU) et par la suite le Vlaams Blok – devenu en 2004 le Vlaams Belang (VB) – en Flandre, le Rassemblement wallon (RW) en Wallonie et le Front démocratique des francophones (FDF) à Bruxelles. Ces partis se positionnent clairement sur le clivage communautaire dont la saillance croit rapidement et « exercent de fortes pressions politiques et électorales sur les partis traditionnels (…), où naquirent des ailes linguistiques » (Lecours 2005 : 100-101). Au même moment, l’affaire de Louvain attise le différend communautaire17. Les trois partis traditionnels ne survivront pas à ces tensions et se scinderont en 1968 pour le parti social-chrétien, 1972 pour le parti libéral et 1978 pour le parti socialiste.
À la veille de la première étape de la réforme de l’État, les premières demandes de fédéralisme se font entendre au nord mais également, dans une moindre mesure, au sud du pays. Cependant, les raisons et les solutions institutionnelles proposées diffèrent largement. Côté flamand, les forces nationalistes, menées notamment par la VU, réclament la transformation fédérale du pays afin de s’émanciper du carcan d’un État unitaire dominé par les francophones et d’assurer ainsi une plus grande autonomie linguistique et culturelle de la Flandre. Une structure fédérale reposant sur deux Communautés linguistico-culturelles est donc privilégiée. Dans cette configuration, Bruxelles, qui est enclavée dans la région de langue néerlandaise, serait « incorporée, ou au moins intimement liée, à la communauté flamande (…) » (Deschouwer 2005 : 51, notre traduction). Côté wallon, le déclin économique pousse certains responsables politiques à souhaiter la régionalisation des instruments de politiques économiques pour répondre le plus adéquatement possible aux besoins wallons (Quévit 1978)18. Une structure fédérale basée sur des régions reçoit les faveurs de cette vision wallonne d’inspiration socio-économique. Côté bruxellois – francophone – une configuration à trois Régions dont une Région bruxelloise apparaît comme la meilleure solution pour garantir un statut particulier à Bruxelles et à sa majorité de francophones – et éviter ainsi l’incorporation pure et simple à la Flandre.
À côté de ces forces favorables – mais divergentes – à la fédéralisation, de nombreuses voix, en particulier francophones, s’élèvent contre le fédéralisme qui conduirait inévitablement à la fin de la Belgique (de Stexhe 1972). Si ces voix de Cassandre s’accordent sur le besoin de dépasser la structure unitaire du pays, elles rejettent avec vigueur la solution fédérale réclamée par les forces ethnorégionalistes du nord et du sud du pays. La diversité et l’opposition entre ces forces multiples expliquent l’émergence et le développement d’un mouvement qui va mener, d’abord, à la transformation de la Belgique d’un État unitaire en un État fédéral et, ensuite, à son approfondissement par l’entremise de réformes de l’État : 1968-1971, 1980, 1988-1989, 1993, 2001, 2011 et probablement d’autres encore à venir.
Trois caractéristiques principales définissent le fédéralisme belge et expliquent la configuration de ses structures institutionnelles. Premièrement, le fédéralisme belge est dualiste. L’opposition entre les deux grandes communautés constitue la dynamique principale du fédéralisme (Beaufays 1988). De plus, chacune d’elle jouit d’un veto : sans accord des deux parties, pas de décision. La nécessité de satisfaire les deux communautés constitue le moteur du fédéralisme belge (Reuchamps, Onclin 2009). Néanmoins, cette vision bipolaire est tempérée, d’une part, par une grande diversité des attitudes et des opinions au sein de chacune de ces deux communautés et les ponts qui existent entre celles-ci et, d’autre part, par d’autres dynamiques notamment idéologiques et socio-économiques également à l’œuvre – même si de nombreuses questions prennent finalement un accent communautaire. Corollairement, ce dualisme se double de deux visions antagonistes du vivre ensemble : les représentants du nord du pays préférant un fédéralisme bipartite communautaire, ceux du sud favorisant un fédéralisme tripartite régional – certains d’entre eux optent toutefois pour une vision communautaire. Ce dualisme explique la configuration à doubles entités fédérées de la fédération bipolaire belge (décrite en détail dans la section suivante), et reflète la vie politique et publique en Belgique où deux systèmes de partis, deux sphères médiatiques, ou encore deux sociétés civiles, coexistent. Cependant, il serait réducteur de parler d’un mouvement flamand, d’un mouvement wallon ou encore d’un front francophone : les demandes politiques portées par les acteurs du nord ou du sud du pays ne sont point identiques et peuvent même être contradictoires. Enfin, « un fédéralisme essentiellement dualiste, bipolaire, n’a que très peu de chances de succès. Il souffre en quelque sorte d’un handicap structurel » (Scholsem 2005 : 286, italique dans l’original).
Deuxièmement, le fédéralisme belge est centrifuge. Le moteur de la transformation fédérale de la Belgique sous l’impulsion du fédéralisme dualiste – malgré certaines forces centripètes voire unitaristes évoquées ci-dessus – est la fédéralisation ou, plus correctement, la défédéralisation des compétences du gouvernement national devenu fédéral vers les entités fédérées afin d’augmenter leur autonomie. Par nature, un fédéralisme centrifuge est un fédéralisme de dissociation ou de désagrégation, au contraire d’un fédéralisme centripète qui va de pair avec un fédéralisme d’association. Ce mouvement centrifuge explique l’absence de référence aux objectifs de la fédération dans la Consti...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. COLLECTION « SCIENCE POLITIQUE »
  4. Titre
  5. Copyright
  6. INTRODUCTION
  7. partie 1
  8. partie 2
  9. partie 3
  10. CONCLUSION
  11. NOTICES BIOGRAPHIQUES
  12. Table des matières
  13. Adresse