Béatitudes
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Béatitudes

  1. 137 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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À propos de ce livre

Titre évocateur, « Béatitudes » rappelle le Sermon sur la Montagne au cours duquel Jésus décrit les vertus des citoyens du Royaume des Cieux. Dans sa version des temps modernes, Herménégilde Chiasson propose un inventaire des gestes de tous « ceux » et « celles » qui « assurément sont en route pour le ciel ». La liste se déploie doucement, prend de l'ampleur, s'intensifie: ceux qui enlèvent leur manteau, exposant leur corpsen vue d'en faire une marchandise périmée et négociable, ceux qui relèvent leurs manches, celles qui reprennent leur souffle, celles qui fixent un point autrement loin dans le vide, celles qui n'en finissent plus de revenir du même voyageinterminable et décevant, celles qui referment à tout jamais, une autre fois, unedernière fois, pour toujours, des boîtes de souvenirs pénibles, celles qui savent et qui ne diront jamais rien, ceux qui ont su et qui n'ont rien fait, ceux qui règlent leurs comptes et qui n'en peuvent plusde grelotter sous le coup d'un frisson continuel, celles qui chantent à tue-tête dans la tempête, Les « ceux » et « celles » de « Béatitudes » ne vont pas sans rappeler les « Lui » et « Elle » du recueil Conversations, qui a valu à l'auteur le prix du Gouverneur général en 1999. Parlant de cette oeuvre, le critique littéraire David Lonergan la décrivait comme « un véritable livre de chevet qu'il faut lire avec parcimonie, lentement, pour en saisir toutes les nuances. » Exhortation qui s'applique également à « Béatitudes ».

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Informations

Année
2012
ISBN
9782894238172

BÉATITUDES

ceux qui relèvent la tête, se demandant pourquoi les oiseaux sont si bruyants,
ceux qui attendent la fin du crépuscule,
ceux qui ne cessent de consulter les catalogues et qui ne commandent jamais rien à la vie,
ceux qui se couchent sur le côté, attendant que la douleur les quitte le temps d’une gorgée d’eau,
ceux qui croient que le moment est arrivé de prendre leur mal en patience, souriant dans le cortège pénible de la bêtise et offrant réparation pour l’ampleur de leur erreur pourtant si pardonnable,
ceux qui pleurent sans consolation aucune, confondant l’amour et la colère de leur amertume dans le chagrin de leurs vêtements trempés de larmes,
ceux qui avancent, pliant dans le vent qui les aveugle,
ceux-là assurément sont en route pour le ciel,
ceux qui s’écrasent sur des comptoirs, parlant à voix basse de leurs affaires compromises,
ceux qui retrouvent leurs clés égarées au fond de sacs en plastique qu’ils s’apprêtaient à jeter,
ceux qui transportent leur nourriture en taxi,
ceux qui se lèvent au milieu d’assemblées où ils ont cru reconnaître leur vie étalée au grand jour,
ceux qui se disent outragés par ceux qui chantent avec résignation dans une langue d’emprunt,
ceux qui transportent le malaise de leur défaite dans des demi-sourires imbus d’une rage sous-jacente,
ceux qui font les pitres sous des casques de construction trop lourds pour leur tête d’oiseau,
ceux dont la main se soulève péniblement comme pour se séparer du corps, esquissant dans le vide l’écriture de pensées qu’ils voudraient indélébiles,
ceux qui portent leur enfant comme des rivières endormies, des poèmes vivants, des actes de foi dans les couloirs insonores et surchauffés des édifices modernes,
ceux qui s’excusent à profusion avant de sombrer dans l’obscurité soumise d’une solitude sournoise et sans issue,
ceux-là aussi verront le ciel,
ceux qui pleurent dans des lieux publics, faisant étalage sans pudeur de leur indigence et de leur révolte,
ceux qui marchent avec colère et application dans des manteaux sombres sur des plages grises et froides,
ceux qui gardent l’espoir et la ferveur qu’un jour ils finiront bien par retrouver ces objets perdus qu’ils ont crus à jamais enfouis dans la boue des marécages,
ceux qui marmonnent à voix basse, se demandant constamment s’ils ont dit ce qu’il fallait dire et s’ils se sont bien fait comprendre, comme pour, une ultime fois encore, repasser une éponge fatiguée sur le bruit environnant dont le murmure constant ne fait qu’annuler leur voix,
ceux qui jouent,
ceux qui rient,
ceux qui lisent,
ceux-là, à eux aussi, le ciel demeure une promesse,
le ciel leur revient,
ceux qui mettent une énergie débordante à consolider des positions inattaquables dans l’échelle précaire et chancelante de leur pouvoir sans cesse compromis,
ceux qui s’arrêtent pour prendre le temps de contempler les arbres dans leur transformation multicolore,
ceux qui marchent dans la brume, transportant dans leurs bagages des déceptions toujours plus lourdes, des chagrins sans cesse plus vastes,
ceux qui font fi de l’obscurité, étalant en pleine lumière un regard épuisé par toutes ces nuits blanchies de doute et d’une douleur qui ne cesse d’accumuler sur eux les séquelles d’un aveuglement déplorable,
ceux qui s’informent des tendances de la beauté, croulant sous le poids de leur laideur, cherchant tant bien que mal un bricolage ultime de leur vision approximative,
ceux qui entretiennent des êtres tristes, veules et ambiteux vivant à crédit sur le bras indécent de leur dépendance,
ceux qui se rencontrent autour des machines distributrices, sous l’effet abrutissant du sommeil, pour débattre le prix scandaleux de breuvages imbuvables,
ceux qui réparent les circuits, qui construisent des ponts, qui blasphèment en langue étrangère, qui connaissent les fonds rocailleux, qui reconnaissent leur impatience, qui se laissent séduire par les courbes et les caprices de la fortune,
ceux qui composent avec les figures d’autorité,
ceux qui montent au front, incapables de se ressaisir dans leur imperméable délavé et décoloré par le temps,
ceux qui font preuve de patience, mains tendues sous des ventilateurs à air chaud,
ceux qui se croisent les bras sous l’effet d’une timidité implorante ou d’une concentration introuvable,
ceux qui dorment dans des lits surélevés, chassant de leur mémoire les nuits froides de leur enfance,
ceux qui baissent les yeux, regardant s’imprégner dans la terre le crachat de leur colère,
ceux qui referment les fenêtres sous l’effet de la brise refroidie d’un autre automne et qui retrouvent leur passé tel un vieux vêtement dans le parfum vague et velouté d’un courant d’air égaré dans une chambre d’hôtel,
ceux qui parlent pour se faire entendre et ceux qui crient pour se faire oublier,
ceux qui s’interrogent à votre sujet et qui sourient d’indulgence à vos projets, à vos inventions, appréciant à la longue la perpétuelle énigme que vous êtes en voie de devenir,
ceux qui mettent machinalement les chaises sur les tables et qui repassent une eau quotidienne sur la tuile inusable de leur insomnie,
ceux qui retrouvent au fond de boîtes de carton les séquelles de leurs anciennes amours, leur découvrant un charme indéfinissable dans une nostalgie périmée,
ceux qui s’agenouillent momentanément dans les lieux publics, faisant fi des chaises qu’on leur propose,
ceux qui mangent en vitesse, qui attendent au feu rouge, qui comptent leur avoir en anticipant leur avenir,
ceux qui cherchent leur destin dans des mots-mystères, qui s’investissent dans les mots croisés, espérant y trouver la force et la gravité des mots magiques,
ceux qui mâchent leurs mots, ceux qui les pèsent, ceux qui les cherchent,
ceux qui ferment les yeux, s’abandonnant au soleil, lui ouvrant les bras pour l’embrasser avant d’en mourir dans l’embrasement consumant de son étreinte,
ceux qui remettent leur vie à la case départ,
ceux qui tiennent leur manteau à la gorge tandis que leurs mains s’engourdissent sous l’effet du froid,
ceux qui transportent de l’équipement lourd, rêvant de graver à jamais leurs faits et gestes futiles ou inutiles sur de fragiles bandes de plastique enroulées en spirale,
ceux qui déposent leur vie humble et sans prétention dans des sacs de nylon tendus à l’extrême, leurs mains lacérées par le poids de leurs avoirs,
ceux qui accrochent des drapeaux comme des opinions, des affirmations, des comptes rendus, des partis pris, des projets de société solidement ancrés se débattant au vent féroce qui les agite à la rampe de leur balcon,
celles qui travaillent de nuit et dorment de jour,
celles qui dansent pour de l’argent devant ceux qui crient au miracle en s’imaginant avoir retrouvé, le temps d’une bière de plus en plus tiède, la rivière qui coule depuis toujours entre les jambes des femmes,
celles qui raccrochent lentement en apprenant l’écroulement à distance de leur monde immédiat, la lumière et les sons s’estompant dans le vide creusé soudainement autour d’elles, prenant toute la place, lâchant prise dans l’énorme et infortuné glissement qui remplit si brutalement leur vie entière,
celles qui compromettent leur guérison prochaine en ingurgitant des doses massives d’alcool,
celles qui portent leur amour à bout de bras,
celles qui débordent de tendresse et d’illusions,
ceux qui ouvrent les mains, espérant ainsi accélérer leur marche, pour nager et naviguer beaucoup plus vite dans les courants d’air qui les entourent,
ceux qui demandent la charité, espérant recueillir la somme exacte qu’il leur faudrait pour prendre le train,
ceux qui oublient leurs clés et qui verrouillent les portes derrière eux sous l’effet d’une distraction inexplicable dont ils n’arrivent plus à se départir,
ceux qui se tiennent debout dans l’herbe, le crâne rasé, cigarette à la main, attendant patiemment que quelqu’un s’arrête pour écouter le flot sans cesse reconfirmé et réaffirmé de leur confusion autoritaire,
ceux qui se trouvent sous des lumières trop fortes et dont la splendeur rayonne dans une nuit démesurée,
ceux qui appellent à l’aide dans des microphones, croyant retrouver, dans l’amplification de leur détresse, le souvenir exalté d’un passé englouti,
ceux qui parlent vite, qui se bricolent une image, qui se rappellent les défaillances d’une mémoire qu’il fallait sans cesse reconfirmer dans l’écriture, griffonnant leur histoire sur des bouts de carton abandonnés sur leur parcours,
ceux qui mentent ouvertement, compensant leur anonymat par leur rôle prétendu dans des aventures présumées qu’ils auraient supposément contribué à faire échouer,
ceux qui reviennent de loin,
ceux qui ne sont pas sans savoir,
ceux qui sont censés comprendre,
ceux qui font semblant de rien,
ceux qui se faufilent dans l’ombre,
ceux qui font corps avec le vide,
ceux qui se perdent dans les détails,
ceux qui ont vu parce qu’ils ont cru,
ceux qui ne sont prophètes nulle part,
ceux qui regardent à l’œil nu la beauté étrange et aveuglante de ceux qui surgissent par miracle de l’ombre,
ceux qui écoutent le bruit intime des choses, qui se font une gloire de propager les mêmes idées, qui composent avec la réalité, qui sont nés sous une bonne étoile, qui longent le vide allègrement, qui rayonnent d’une confiance exaltante,
celles qui s’accrochent aux mêmes notes de musique, les chantonnant à la journée longue, leur résistant et les ramenant, malgré elles, à leur insu, incapables qu’elles sont de les évacuer de leur mémoire,
celles qui clament leurs confidences maladroites au milieu d’une foule somnambule et anonyme,
ceux qui font des grimaces, qui font les bouffons, qui se ridiculisent dans l’espoir improbable d’entendre une autre fois le rire aigu et cristallin de leurs enfants,
ceux qui saluent des étrangers, espérant saisir le sens anodin de gestes faits au hasard de la route, la reconnaissance d’un même parcours à partager,
ceux qui viennent à votre rencontre pour vous avouer avec candeur l’indigence de leur vie, les déficiences de leur cœur et les actes obligés d’un quotidien épuisant mis en œuvre pour parer à l’imparable, l’enfance qui leur a fait défaut et cette confiance aveugle à quémander leur aide à de simples passants,
ceux qui sourient devant la naïveté de ceux qui ont assujetti leur réalité au registre absolu de leurs rêves,
ceux qui s’imaginent prospères, glorieux et séduisants, grandioses, hautains et irrésistibles,
ceux dont le rire désarme et enchante par sa franchise généreuse et sa santé vibrante de séduction,
ceux qui ont fait vœu de ne plus se pencher pour ramasser la monnaie destinée à leur porter chance,
ceux qui font fi des marchands d’espoir, propagandistes de bonne humeur et autres produits tout aussi toxiques,
ceux qui font la queue aux comptoirs de l’indigence et dont le simple fait de vivre constitue déjà un travail laborieux, continuel et épuisant,
celles qui regardent le paysage tandis que, d’un geste désabusé, elles saupoudrent de sel la fadeur de leurs aliments,
celles qui s’endorment seules dans le lit humide de leur détresse, tirant à boulets rouges dans le cœur offert de ceux qui commettent l’erreur de s’approcher d’un peu trop près,
celles qui finissent immanquablement par se recroqueviller dans une position fœtale quand elles se voient obligées de prendre place sur une chaise,
celles qui descendent de leur piedestal pour se retrouver au ras de l’humilité d’aveux aussi désarmants que déconcert...

Table des matières

  1. Couverture
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  4. Crédits
  5. Béatitudes
  6. Quatrième de couverture