Dr House, l'esprit du Shaman
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Dr House, l'esprit du Shaman

  1. 170 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Dr House, l'esprit du Shaman

Détails du livre
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Table des matières
Citations

À propos de ce livre

Médecin, écrivain, spécialiste des séries télévisées, il n'en fallait pas plus pour que Martin Winckler, le romancier de La Maladie de Sachs, se penche sur le cas du Dr House qui, à l'étonnement ou à l'effarement de téléspectateurs scotchés à leurs petits écrans durant huit saisons, a pratiqué au service (selon le jargon du métier) des « moutons à cinq pattes », chez les patients au diagnostic difficile. Mal rasé, boîteux, cynique, inspiré et désemparant, ce personnage est livré à l'examen analytique, éthique et spirituel du Dr Winckler qui, tout écrivain qu'il est, envisage et situe son sujet d'étude dans la lignée des héros (un Sherlock Holmes, par exemple) que la fiction offre à nos passions de lecteurs.

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Informations

Année
2013
ISBN
9782764642016

PREMIÈRE PARTIE
Récit

La forme et le fond

House est une télésérie dramatique de 177 épisodes produite pour le réseau américain FOX, qui la diffusa pendant huit « saisons » (de novembre 2004 à mai 2012) à raison de 22 à 24 épisodes par an ; la quatrième saison, toutefois, n’en eut que 16 en raison de la grève des scénaristes de 2007-2008. Chaque épisode dure quarante-trois minutes. À leur diffusion, ils étaient découpés en quatre segments (six à partir de 2007) séparés par des pauses publicitaires (dix-sept minutes par heure). Aux États-Unis, House a remporté un très grand succès auprès du public — la série a été l’une des dix émissions les plus regardées du pays pendant ses deuxième, troisième et quatrième saisons —, mais aussi auprès de la critique. Diffusée dans plusieurs dizaines de pays, elle est devenue, en 2006, l’une des séries les plus regardées au monde.
La description qui précède pourrait être celle de nombreuses téléséries américaines. Mais House est atypique à plusieurs égards. D’abord, parce que c’est une série médicale, genre qui compte moins d’œuvres à succès que le genre policier. Ensuite, parce qu’elle repose, contrairement à de nombreuses autres, sur un personnage central charismatique : Greg House, spécialiste des maladies infectieuses et de néphrologie au Princeton-Plainsboro Teaching Hospital (PPTH), établissement fictif de la côte est des États-Unis. Enfin, parce que l’excentricité de House réside aussi dans son propos. L’équipe de House n’est pas constituée de soignants, mais d’investigateurs. Leur mission première : élucider une énigme médicale.
* * *
Après que Paul Attanasio lui a proposé de créer une sorte de « série policière médicale », David Shore invente « un personnage qui pose des diagnostics à travers la personnalité des patients, leurs mensonges, leurs secrets1… ». À ce métissage des genres — policier et médical —, Shore ajoute une dimension le plus souvent ignorée par les médias européens, mais qu’il porte en lui depuis longtemps : le créateur de House était avocat à Toronto avant de devenir scénariste. Il a collaboré au scénario de plusieurs téléséries judiciaires et a été sélectionné deux fois pour les Emmy Awards (les Oscars de la télévision américaine) pour des épisodes de la série Law & Order. Celle-ci, dont la production a duré vingt ans (de 1990 à 2010), est le modèle inégalé des fictions réflexives, engagées et critiques de la société américaine. Lorsque David Shore remporte son premier Emmy Award du meilleur scénario pour « Three Stories » (1.21), il déclare au quotidien canadien London Free Press : « L’important n’est pas tant l’histoire médicale que le personnage, d’une grande intelligence philosophique et éthique2. »
Même si House se veut d’abord un divertissement (pour durer, il faut plaire ; pour plaire longtemps, il est souhaitable que les scénaristes se fassent plaisir et s’amusent à écrire), ce qui motive Shore, ce sont les conflits moraux qui agitent les personnages — les médecins comme les patients. En cela, également, House est une anomalie — avant elle, on n’avait jamais vu de série médicale aussi obsédée par les dilemmes éthiques et la place de la technologie dans le soin. Les spectateurs anglophones ne s’y sont pas trompés. La série a donné lieu au lot habituel d’essais descriptifs (House, M.D. : The Official Guide to the Hit Medical Drama, de Ian Jackman; Chasing Zebras : The Unofficial Guide to House, M.D., de Barbara Barnett) ou consacrés à son contenu médical (House, M.D. vs. Reality et The Medical Science of House, M.D., d’Andrew Holtz), mais aussi à deux collectifs, soit House and Philosophy : Everybody Lies (sous la direction de Henry Jacoby et William Irving) et House and Psychology : Humanity Is Overrated (sous la direction de Ted Cascio et Leonard L. Martin3). L’intérêt pédagogique de la série dans l’enseignement de l’éthique biomédicale y est souligné, et j’ai personnellement pu en tester la pertinence auprès d’étudiants en éthique clinique à l’occasion d’un enseignement donné fin 2009.
* * *
La dimension morale que Shore veut donner à la série est manifeste dès le pilote, « Everybody Lies » (1.1), que je vais décrire en détail. Le scénariste-créateur précise ses intentions dans « Three Stories » (1.21), le meilleur épisode de télévision que j’aie vu en vingt ans. Pendant toute la série, Shore entraîne House très loin, à travers une suite d’épreuves, de chutes et de rétablissements successifs, jusqu’à la conclusion admirable que constituent les quatre derniers épisodes. Tout en témoignant jusqu’au bout d’un respect remarquable pour tous les personnages, il assure l’intégrité thématique et la cohérence narrative des huit années de production. Aborder une œuvre pareille n’est pas chose aisée. Ce livre n’est donc pas une analyse exhaustive (qui nécessiterait au moins cinq cents pages). J’y décris ce que j’y ai vu d’essentiel et qui, jusqu’à maintenant, il me semble, n’a pas été souligné : le personnage universel auquel House emprunte ses traits.

VO vs VF

Ce livre est publié au Québec ; je n’ai pas regardé la version française (VF) de Dr House diffusée ici, mais je tiens à avertir le lecteur qui aurait suivi la série en France : on lui a infligé une VF modifiée, caviardée, récrite. Bref, censurée. À plusieurs reprises, TF1 (le diffuseur français) a omis certains épisodes ; il a coupé des scènes jugées « choquantes » (plus pour les Français que pour les Américains ?); il a fait récrire des dialogues de manière inacceptable. L’exemple le plus flagrant (et ce n’en est qu’un parmi bien d’autres) est une réplique dans « Damned if You Do » (1.5). House reçoit un patient souffrant de l’intestin et lui recommande, en soulignant que ce n’est pas « politiquement correct », de fumer deux cigarettes par jour, car la nicotine calme les spasmes du côlon. Le patient s’inquiète : le tabac, c’est toxique et addictif. Avec sa causticité habituelle, House répond que c’est le cas de tous les médicaments qu’il prescrit ; la libre consommation de tabac, au moins, est autorisée par la loi, contrairement aux premiers, pour lesquels une ordonnance médicale est requise. Dans la VF commanditée par TF1, House prescrit… deux bols de riz par jour, et le patient s’inquiète d’une dépendance au riz complet. Ce qui est non seulement stupide, mais incompréhensible, et laisse entendre, en plus, que les scénaristes écrivent n’importe quoi !
Il y a pire. Dans « Don’t Ever Change » (4.12), une femme, juive orthodoxe, a un malaise inexpliqué le jour de son mariage. Dans les dialogues de la VF, House la traite de « youpine », terme férocement antisémite. Le magazine de télévision français Télérama s’émeut : le personnage va vraiment trop loin. Mais dans la VO, House emploie tout simplement le mot jewess (juive). Le terme antisémite vient des doubleurs. Ce n’est pas une erreur, c’est un contresens et une trahison d’autant plus scandaleux que David Shore, créateur de la série, est juif (ses deux frères sont rabbins…) et trois personnages récurrents — Lisa Cuddy, James Wilson et Chris Taub — le sont également. Si le personnage principal était antisémite, ça se saurait… Même si TF1 a présenté officiellement des excuses par la suite, il est légitime de penser que toute sa VF de House est du même acabit. Car depuis longtemps la chaîne censure, coupe et fait récrire les dialogues de toutes les séries qu’elle achète4.
La traduction des titres est également très problématique. Pourquoi rendre « Paternity » par « Test de paternité » ? Pourquoi évacuer l’allusion philosophique du titre « The Socratic Method » en le traduisant par « Une mère à charge » ? Pourquoi transformer — et trahir — « Autopsy » en « Leçon d’espoir » ? Etc. Les titres de House n’ont rien de gratuit : ils sont richement polysémiques (j’y reviendrai plus loin). En inventant de nouveaux titres très éloignés des originaux au lieu de les traduire littéralement, ce qui est souvent possible, les doubleurs en affadissent le sens, quand ils n’induisent pas les spectateurs en erreur.

L’auteur

House, M.D. : The Official Guide, excellent livre de Ian Jackman5, ne couvre que les six premières saisons de la série, mais il apporte sur ses coulisses des informations précieuses, glanées auprès des membres de l’équipe de production et des principaux comédiens. Il répond, d’emblée, à une question cruciale : qui a écrit la série ?
House a été créée par David Shore. Il est personnellement l’auteur d’une quinzaine de scripts, mais a dirigé l’équipe de scénaristes pendant les huit saisons et il a donné le feu vert à l’écriture, annoté les premiers jets et récrit les versions dites définitives de tous les scénarios.
Jackman décrit très précisément les procédures. L’équipe compte de douze à quinze scénaristes à temps plein ; Shore avait trois codirecteurs d’écriture — Thomas L. Moran et le duo Russel Friend et Garrett Lerner —, qui supervisaient les autres scénaristes et l’écriture d’un épisode sur deux. Chaque scénariste proposait une histoire à son superviseur ; une fois l’idée exposée en détail, le superviseur la transmettait à Shore, qui annotait la présentation et la renvoyait au scénariste, pour qu’il écrive un premier jet. Lequel était retravaillé par Moran ou Friend et Lerner, puis annoté par Shore. Au stade final, Shore relisait, complétait et mettait la dernière touche au scénario. L’écriture est collective (les idées viennent de tous), chaque épisode est signé par le ou les scénaristes ayant proposé l’idée, mais la cohérence de l’ensemble est assurée par le créateur et maître d’œuvre de la série, dont le nom apparaît au sommet d’un corps sans tête, à la fin du générique de début6. Entre le pilote et la series finale, Shore a signé ou cosigné dix-sept épisodes significatifs qui redéfinissent le personnage à chaque étape de son itinéraire tourmenté.
Il est intéressant de regarder House en faisant défiler les sous-titres anglais des DVD, afin de saisir toutes les nuances des dialogues, souvent si rapides qu’on en rate la moitié. Cette « double lecture » (je l’ai faite pour l’écriture de ce livre) confirme le sentiment qu’a suscité le visionnement du pilote : les dialogues de House sont des bijoux d’écriture. Ceux du premier épisode établissent le niveau d’exigence du créateur à l’égard de ses coscénaristes et des comédiens. La télévision, comme les films de cinéma d’avant le règne des blockbusters, a besoin d’une bonne histoire et de bons acteurs. Les réalisateurs, même chevronnés, n’y ont pas d’ego : ils tournent ce qui est écrit. Et les scénaristes sont rois : leurs histoires doivent être assez riches et intéressantes pour qu’on ait envie d’écouter la suite chaque semaine ; ils doivent être aussi inventifs que Shéhérazade — faute de quoi le sultan (la chaîne) sera sans merci.
Comme le temps d’antenne est compté, les meilleurs dialogues fusent, sont truffés de doubles sens, et les acteurs, triés sur le volet, doivent mettre à contribution leur voix, leur visage, leur corps pour tout exprimer, parfois en une fraction de seconde. Dans le commentaire vidéo de « House’s Head » (4.15), David Shore dit, en parlant d’une phrase d’apparence anodine : « Cette phrase, il y avait vingt manières de la dire, et Hugh a trouvé exactement la manière qui convenait. » Plus loin, il souligne la finesse d’expression d’Ivana Milicevic, comédienne qui donne la réplique à Laurie dans une scène clé de l’épisode. Dans une séquence fantasmatique, House échange des hypothèses diagnostiques avec Cuddy tandis que celle-ci s’engage dans un strip-tease langoureux, puis s’interrompt parce qu’elle empêche House de raisonner ; Shore raconte le plaisir que ses coscénaristes et lui ont eu à écrire la scène. Plus loin encore, il s’inquiète de la cohérence visuelle d’une scène dans la narration, en reconnaissant, navré, qu’il s’agit d’une réflexion a posteriori, qu’il a bien donné son accord pour qu’elle soit tournée ainsi. On le sent attentif au moindre détail et à sa transposition à l’écran. Si Hugh Laurie est la figure de proue de la série, Shore en est indiscutablement le capitaine.
D’autres éléments, plus indirects, permettent d’affirmer la prééminence de l’écriture dans la production. Les lignes narratives montrent une nette volonté de résistance aux pressions extérieures : le scénario se débarrasse en quelques épisodes du milliardaire Vogler, personnage imposé par FOX à la fin de la première saison ; il écarte également très vite Tritter, le flic qui harcèle House dans la troisième saison, et dont l’apparition découle probablement des critiques laissant entendre que le diagnosticien ne serait qu’un toxicomane acariâtre. À l’opposé, la décision audacieuse de séparer House de son équipe à la fin de la troisième saison pour en embaucher une autre est fièrement revendiquée par Shore ; elle ne visait nullement à élargir l’audience (House remportait déjà un succès colossal) et a souverainement déplu aux fans les plus passionnés. Mais elle correspondait au désir de l’auteur de renouveler la narration. Plus tard, lorsque deux comédiennes centrales (Olivia Wilde, puis Lisa Edelstein) quittent la série pour poursuivre d’autres projets, la narration ne s’en ressent pas : les scénarios expliquent le départ des personnages de manière parfaitement plausible et, à mon sens, la dynamique de la série n’en souffre pas, quoi qu’en disent les fans des personnages disparus.

L’éthique

Dans une vidéo promotionnelle de la FOX, Shore reconnaît que le personnage principal possède beaucoup de ses traits. La forme — une « série policière en milieu médical » dans laquelle les enquêteurs (House et son équipe) tentent d’identifier un criminel (une maladie, un syndrome rare) avant que la victime (le patient) ne succombe — a été suggérée initialement par Paul Attanasio. Mais le fond, le thème central de l’histoire et l’obsession du personnage principal viennent de Shore : c’est la quête de la vérité. Dans de nombreuses interviews, Shore raconte que l’une des inspirations du personnage vient d’une expérience personnelle : il se rend à l’hôpital ; un médecin le reçoit, lui parle avec politesse, le traite de la meilleure manière qui soit, après quoi il sort, et Shore l’entend plaisanter dans le couloir avec ses collègues. Les médecins ont deux visages : polis et respectueux face au patient, ils parlent plus librement, plus crûment en l’absence de celui-ci. Lorsqu’il invente House, Shore décide que ce médecin-là livrera le fond de sa pensée en présence du patient — et donc, de tout le monde. La question qui intéresse le scénariste est la suivante : « Qu’est-ce qui est le plus important ? La bienveillance ou la vérité7 ? »
House se focalise sur l’énigme — le diagnostic de la maladie — par conviction philosophique : la vérité est la seule chose qui compte. Si la vérité compte plus que tout à ses yeux, ce n’est pas en tant que valeur abstraite, mais bien en tant que moyen vers une fin. Il le dit explicitement à Carly, la patiente boulimique de « Control » (1.14), en lui demandant si les souffrances qu’elle s’inflige (et qui risquent de lui coûter la vie) relèvent d’une conduite suicidaire ou si elle veut vivre. Elle ne comprend pas ce qu’il veut. Il s’emporte : « Je veux faire ce qui est juste. » ...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Les Éditions du Boréal
  3. Faux-titre
  4. Du même auteur
  5. Titre
  6. Crédits
  7. Dédicace
  8. Exergue
  9. Préambule
  10. PREMIÈRE PARTIE Récit
  11. DEUXIÈME PARTIE Héros
  12. TROISIÈME PARTIE Esprit
  13. Remerciements
  14. Bibliographie
  15. Collection
  16. Notes
  17. Quatrième de couverture