Les réseaux criminels
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Les réseaux criminels

  1. 326 pages
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Les réseaux criminels

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À propos de ce livre

Si l'expression « réseau social » fait son apparition dans le langage populaire en même temps que les Facebook, LinkedIn et autres plateformes d'échange, le concept est présent dans les sciences sociales depuis au moins les années 1930. De fait, les premières applications formelles de techniques d'analyse des réseaux sociaux (ARS), notamment dans les travaux sur les prisons et les maisons de réforme, sont apparues à la fin des années 1990. Elles connaissent depuis une croissance exponentielle et très prometteuse.Le but de cet ouvrage n'est pas d'expliquer les grands principes de l'ARS, mais plutôt d'en appliquer les concepts et la méthodologie à l'étude du crime et des délinquants. Dans cette perspective, les textes de spécialistes de diverses disciplines - criminologues, certes, mais aussi politologues, psychologues et mathématiciens - et de membres de corps policiers apportent une contribution importante pour qui doit appréhender la complexité, elle aussi toujours grandissante, de réseaux criminels de plus en plus « branchés ».Les directeursRémi Boivin est professeur adjoint à l'École de criminologie de l'Université de Montréal, chercheur régulier au Centre international de criminologie comparée (CICC) et chercheur au Centre d'études et de recherches internationales de l'Université de Montréal (CÉRIUM).Carlo Morselli est professeur titulaire à l'École de criminologie de l'Université de Montréal, directeur du Centre international de criminologie comparée (CICC) et chercheur au Centre d'études et de recherches internationales de l'Université de Montréal (CÉRIUM).

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Informations

1. La visualisation relationnelle
au service de l’enquête criminelle

Quentin Rossy
L’ampleur de certaines enquêtes criminelles implique de mettre en œuvre des démarches structurées de traitement des informations collectées, afin d’en maîtriser les flux et de conserver une vue d’ensemble du dossier. Des techniques de visualisation relationnelle, qui s’apparentent à des graphes, sont ainsi de plus en plus exploitées dans cette perspective1. Par l’intermédiaire de ces représentations, l’analyste-enquêteur cherche à mieux comprendre la complexité des relations entre les événements et les entités d’intérêt pour l’enquête telles que des personnes, des objets et des traces. Généralement, ces méthodes sont utilisées pour regrouper et explorer les informations collectées en cours d’investigation, pour faciliter la communication au sein d’équipes d’enquêteurs ou pour appuyer une plaidoirie au tribunal (Harper et Harris, 1975; Sparrow, 1991; Xu et Chen, 2005; Schroeder et al., 2007; Heuer et Pherson, 2010).
Des logiciels de visualisation facilitant la conception de ces schémas s’intègrent ainsi dans les pratiques policières. Toutefois, malgré l’apparente simplicité de prise en main des outils, la conception et l’interprétation de ces schémas peuvent être complexes. Ainsi, l’approche sociométrique, fondée sur la combinaison de graphes et de mesures de centralité, a été proposée pour pallier les difficultés d’interprétation des schémas (Sparrow, 1991). Celle-ci s’avère en effet particulièrement efficace avec les grands nombres d’entités et de relations. L’analyse d’un réseau complexe qui contient plusieurs centaines, plusieurs milliers, voire des centaines de milliers de nœuds et de relations est a priori difficile, voire impossible en se fondant uniquement sur la perception du graphe. L’usage de mesures de centralité facilite alors la détection de personnes d’intérêt pour l’enquête. À l’instar des pratiques de dessins à la main, les pratiques d’analyse en réseau se sont ainsi répandues (Klerks, 2001). Pourtant, les schémas relationnels qui se fondent uniquement sur l’usage de variables graphiques (telles que la forme, la taille, la couleur et la position) continuent à être exploités de façon courante dans les polices du monde entier. En effet, c’est un outil auquel on recourt dans des contextes variés et pour répondre à d’autres objectifs qu’identifier les acteurs clés et reconstruire la structure d’un groupe criminel. Mais parallèlement, très peu de recherches et de propositions méthodologiques ont été avancées pour guider la conception de ces visualisations.
La première partie de ce chapitre discute les apports et les limites de la visualisation relationnelle. La section suivante vise à présenter des recommandations générales touchant à la conception. Finalement, quatre formes d’exploitation classiques sont discutées: les schémas de réseaux criminels, les schémas de trafics de marchandises, les schémas d’événements facilitant la reconstruction des chronologies lors d’affaires complexes et les schémas de séries visant à clarifier la nature et les incertitudes des relations établies entre les cas. On y aborde les apports et les limites de leur utilisation et une méthodologie spécifique à chaque type de situation est présentée.

Les analyses relationnelles
et la visualisation

Une terminologie riche existe pour décrire les formes de visualisation relationnelle. Dans la littérature ou les milieux de pratique, il est parfois d’usage de parler d’un schéma relationnel, d’un réseau, d’un arbre, d’un diagramme ou d’un graphique relationnel, ou encore d’une carte sémantique ou conceptuelle. Globalement, la visualisation relationnelle est l’utilisation de représentations s’apparentant à des graphes pour visualiser un ensemble hétérogène d’entités, de relations et d’attributs qui peuvent être de différents types. Cette définition rejoint celles des graphes sémantiques (Barthélemy et al., 2005), conceptuels (Kolda et al., 2004) ou complexes (Newman, 2003). Dans ce chapitre, nous utiliserons principalement les termes de «schéma relationnel» et de «visualisation relationnelle».
Klerks (2001) décompose l’historique d’utilisation judiciaire de ces méthodes en trois générations de techniques: la conception manuelle, l’approche automatisée par des outils informatisés, tels que le logiciel Analyst’s Notebook®, et l’analyse de réseaux sociaux qui intègre des mesures de centralité pour soutenir l’interprétation des réseaux modélisés par des graphes. L’approche manuelle enseignée à la fin des années 1960 aux États-Unis par le programme Anacapa (Harper et Harris, 1975; Anacapa, 2013) et décrite par Morris dans son livre The Crime Analysis Charting (Morris, 1986), se fonde sur la création d’une matrice décrivant les relations entre les personnes qui apparaissent dans l’affaire. Un schéma relationnel est ensuite produit sur la base de cette matrice. L’approche manuelle est encore utilisée de nos jours, mais les graphes sont produits au moyen de logiciels spécialisés qui permettent d’étendre les attributs graphiques exploitables (icônes, couleurs, épaisseur des traits, etc.). Initialement, la méthode reposait sur une représentation simplifiée de cercles (les personnes), de traits (les relations) et de cadres (les groupes: organisations criminelles et entreprises) (Harper et Harris, 1975; Sparrow, 1991). Il faut également souligner que l’utilisation de graphes pour représenter les informations d’une enquête se retrouve déjà dans les travaux de John Henry Wigmore (1863-1943) (Wigmore, 1913). La formalisation proposée à l’époque ne visait pas à reconstruire un réseau, mais à soutenir le processus hypothético-déductif de l’enquête. Les informations étaient modélisées sous la forme d’un graphe dirigé représentant les relations de causalité entre les prémisses et les conclusions formulées en cours d’enquête. Le processus de génération d’hypothèses et l’évaluation des scénarios étaient ainsi facilités. La méthode de Wigmore, appelée «argument diagram», connaît encore des développements (Bex et al., 2007; Van den Braak, 2010).
L’exploitation de représentations relationnelles dans l’enquête peut néanmoins se concevoir de façon plus large. En effet, ces méthodes peuvent soutenir de nombreux autres processus que l’analyse de groupes criminels et la reconstruction de scénarios (Rossy et Ribaux, 2014). Analyser les traces et les informations collectées, comparer diverses sources d’information, faciliter l’évaluation a posteriori d’une investigation, aider à qualifier les infractions, faciliter l’appréhension d’un dossier, voire soutenir une argumentation lors du procès, sont quelques exemples d’autres formes d’exploitation. Ainsi, diverses formes de représentations relationnelles peuvent être conçues pour soutenir la prise de décision en fonction du contexte.

Une approche limitée?

Sur le plan méthodologique, certains auteurs relèvent qu’un simple schéma ne permet pas de résoudre le problème de la surcharge d’informations (Klerks, 2001; Schroeder et al., 2007). En effet, les visualisations relationnelles semblent bien fonctionner, surtout lorsque le nombre d’entités et de relations représentées est limité. De plus, la concep- tion d’un schéma repose sur la compréhension du problème traité par l’analyste-enquêteur et sa capacité à le modéliser sous la forme d’une représentation relationnelle (Peterson et al., 2000). La qualité de la représentation est alors tributaire des capacités de l’analyste à identifier, et à classifier les entités et les relations pertinentes pour l’enquête et à les distinguer de celles pouvant être omises. La conception implique donc à la fois une habileté à produire une structure visuelle expressive et une capacité à modéliser convenablement les situations rencontrées. De plus, le processus implique souvent de nombreux essais avant d’aboutir à une ou à plusieurs représentations utiles. Il est donc naturellement observé à l’usage que la création de représentations efficaces nécessite de l’expérience, des efforts et du temps (Innes et al., 2005). Les schémas produits varient ainsi fortement suivant les objectifs d’analyse et suivant leur concepteur. Les résultats sont d’une utilité variable et peuvent engendrer des ambiguïtés qui influencent l’interprétation des informations (Rossy, 2011; Rossy et Ribaux, 2012).
Sur le plan technique, divers outils existent. Chacun propose des fonctionnalités propres et impose des standards définis certainement plus par des commentaires d’utilisateurs que par une réflexion méthodologique d’ensemble. D’un côté, la standardisation de la présentation est loin d’être atteinte. De l’autre, la création de nouvelles approches de visualisation pourrait changer les pratiques.

Consolidation de la méthode

Pourtant, ces méthodes continuent à être utilisées et semblent répondre à des besoins concrets. Elles permettent de regrouper sur un support commun une grande quantité de données hétérogènes facilitant ainsi l’exploration et l’évaluation des informations d’enquête. Le langage visuel est suffisamment riche et expressif pour intégrer la diversité des concepts rencontrés en cours d’enquête. En tant que mémoire de travail, le schéma donne une vue d’ensemble, permet à l’enquêteur de se remémorer les éléments de l’affaire et facilite les échanges au sein des équipes ou avec les partenaires. En outre, même s’ils ne sont pas complètement indépendants de la langue, les schémas sont généralement bien compris lors d’échanges internationaux. Bien conçus, ils sont effectivement intuitifs et ne requièrent pas la maîtrise de formalisations complexes. Les gestionnaires au sein des organisations policières apprécient généralement ces schémas pour la vue d’ensemble qu’ils offrent. À la phase de collecte de données ou de renseignements, ces schémas leur permettent de faire des démarches pour vérifier si certaines cibles identifiées dans les schémas feraient également l’objet d’enquêtes dans d’autres unités ou organisations policières. De plus, en observant les schémas aux phases initiales de l’enquête, les gestionnaires peuvent estimer le temps et les ressources nécessaires.
Les difficultés révélées dans la littérature et par l’étude empirique des pratiques n’en demeurent pas moins réelles. Elles révèlent en fait principalement la nécessité de consolider la méthodologie de conception des visualisations relationnelles pour soutenir efficacement les enquêtes. Par exemple, il est relevé que les problèmes traités sont par nature évolutifs, alors que la visualisation décrit souvent une situation à un moment précis (Peterson, 1998; Innes et al., 2005). Ce constat met en exergue la nécessité de bien documenter les sources et d’intégrer la dimension temporelle dans la démarche. La visualisation relationnelle permet en effet de combiner les deux perspectives et ainsi de modéliser une gamme de situations beaucoup plus large que la structure d’un groupe criminel en un temps défini. La méthode permet alors de décrire la chronologie et le script d’un événement criminel ou l’ensemble d’une série criminelle. Bien conçus, de tels schémas peuvent même intégrer la dimension spatiale des activités et ainsi couvrir l’ensemble des principales perspectives utiles à la reconstruction des activités criminelles.
Recommandations méthodologiques générales
Entités
  • Les entités importantes...

Table des matières

  1. Table des matières
  2. Liste des sigles employés
  3. Introduction
  4. 1. La visualisation relationnelle au service de l’enquête criminelle
  5. 2. Le potentiel informatif des liens issus du profilage physico-chimique de produits stupéfiants
  6. 3. L’orientation des recherches et les efforts en ARS pour la fonction du renseignement
  7. 4. Du réseau comme structure au réseau comme acteur: comment les réseaux sociauxse constituent en acteurs collectifs
  8. 5. L’ARS pour l’identification des rôles de leadership dans les organisations criminelles
  9. 6. Les chemins de la réussite pour le délinquant affilié
  10. 7. Les courtiers dans le réseau criminel des gangs de rue
  11. 8. Le délinquant innovateur: l’adaptation du milieu de la fraudepar cartes bancaires à Montréal
  12. 9. La détection de communautés dans les réseaux criminels en ligne et la recherche en codélinquance
  13. 10. La codélinquance: une porte d’entrée du crime?
  14. 11. L’impact des réseaux criminels sur les trajectoires de diversification des activités illicites
  15. 12. La (dés)organisation et les dynamiques identitairesdu mouvement skinhead au Québec
  16. 13. Conclusion
  17. Bibliographie
  18. Les auteurs