7-10 juin 1979
Élection du Parlement européen au suffrage universel
Intérêt
La présence du Parlement européen semble être une évidence dans l’édifice communautaire. Pourtant un grand nombre de questions de fond se sont posées et se posent toujours à son sujet, telles que celles concernant sa légitimité, la délimitation exacte de son pouvoir, son efficacité, etc.
L’évolution récente de l’Union européenne a consacré une extension certaine de ses pouvoirs et sa participation réelle au processus décisionnel. Mais le désintérêt croissant des peuples lié aux dérives constatées tant dans l’organisation générale de cette institution communautaire qu’aux pratiques des parlementaires jettent une certaine perplexité sur son influence réelle.
De l’Assemblée parlementaire au Parlement européen
La signature du traité de CECA le 18 avril 1951 donnait naissance à la première Assemblée parlementaire de la Communauté européenne dont les soixante-dix-huit parlementaires siégeront pour la première fois en septembre 1952 à Strasbourg.
Le traité de Rome du 25 mars 1957 institua une assemblée parlementaire composée de cent quarante-deux députés délégués par leurs parlements nationaux puis de cent quatre-vingt-dix-huit membres à la suite de la première vague d’adhésion (Danemark, Irlande, Royaume-Uni) de janvier 1973.
Avec un budget communautaire alimenté en totalité par des ressources propres, allait se poser la question du contrôle parlementaire des dépenses de la Communauté.
En effet, tant que le budget était constitué de contributions nationales, le contrôle des dépenses était exercé par les parlements nationaux des États membres et la légitimité des décisions en procédait. Mais avec l’apparition d’un budget communautaire, quelle allait être la nature du contrôle exercé ?
La question institutionnelle était d’importance car s’il avait été décidé de la compétence de l’Assemblée parlementaire en matière d’initiative budgétaire, c’est un bouleversement des rapports de pouvoir entre institutions communautaires qui se serait produit. L’Assemblée, cantonnée à l’origine dans une fonction consultative, aurait eu d’un coup un pouvoir d’initiative et se serait donc posée en concurrente vis-à-vis du Conseil des ministres.
Comme à l’occasion de chaque débat institutionnel, on en revenait à l’opposition entre conceptions fédéralistes et intergouvernementales. L’extension des pouvoirs de l’Assemblée parlementaire équivalait à un renforcement de la nature supranationale de la construction communautaire, ce que refusaient ceux qu’inquiétaient déjà les décisions d’augmenter un budget communautaire constitué de ses seules ressources propres.
C’est ainsi qu’à la suite de la réunion du Conseil des ministres des 21 et 22 avril 1970, il fut approuvé tout à la fois, le règlement définitif sur le financement de la PAC, la décision du remplacement des contributions financières des États membres par un budget communautaire propre et la signature d’un « traité qui modifie quelques dispositions concernant le budget des traités des communautés » et donne à l’Assemblée parlementaire plus de compétence en matière budgétaire.
Ces décisions entraient partiellement en vigueur dès le 1er janvier 1971 et totalement à partir du 1er janvier 1975. Le partage était ainsi arrêté : la décision concernant les dépenses obligatoires, c’est-à-dire celles relatives aux politiques communautaires, revenait au Conseil des ministres et l’Assemblée parlementaire avait un droit d’amendement sur les dépenses non obligatoires relevant des opérations administratives.
En fait, le déséquilibre était patent puisque, dans ce système, la quasi-totalité des dépenses engagées par la communauté relevaient du Conseil des ministres. De plus, pour pouvoir augmenter le montant des dépenses qu’il contrôlait, l’Assemblée devait se soumettre à un système de calcul basé sur un taux maximum d’augmentation fixé par la Commission en fonction du coût de la vie, des budgets des États membres et de leur PNB.
Les fédéralistes focalisèrent alors leur action sur la question d’une « nécessaire démocratisation » de la Communauté puisque avec la fin des contributions nationales contrôlées par les parlements nationaux et l’apparition d’un budget communautaire propre mais sans contrôle parlementaire au niveau européen, les mécanismes restaient clairement intergouvernementaux par le contrôle quasi exclusif des dépenses exercé par le Conseil des ministres, ce qui convenait relativement bien à la France mais était contesté par les petits pays de la Communauté.
Après avoir obtenu pour l’Assemblée parlementaire le droit de rejeter le budget par le traité du 22 juillet 1975 et la signature à Bruxelles le 20 septembre 1976 des documents relatifs à l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct, les partisans de l’intégration fédérale voulaient voir par l’adoption de l’acte portant élection des représentants au Parlement européen, et notamment son article 14 modifiant les paragraphes 1 et 2 de l’article 138 du traité CEE, une reconnaissance de sa pleine légitimité et le caractère démocratique de la Communauté.
Du 7 au 10 juin 1979 eurent ainsi lieu les premières élections européennes au suffrage universel direct avec un taux mo...