Les algues marines : biologie, écologie et utilisation

Bourgougnon Nathalie, Gervois Annette

• Éditeur: Editions Ellipses
• Année: 2021
• ISBN:
  9782340058750
• Sujet: Sciences biologiques
• Sous-sujet: Biologie

Cet ouvrage propose de décrire l'univers des macroalgues qui forment un groupe polyphylétique de végétaux au sein des Eucaryotes.

Il aborde:

• la grande diversité des lignées et les habitats algaux
• les principaux composés biochimiques rencontrés
• les notions de réponses physiologiques en lien avec les différents stress abiotiques et biotiques
• de nombreuses applications des algues dans le monde
• une présentation de quatre macroalgues très utilisées dans les secteurs de l'alimentation humaine et animale, en agriculture ou cosmétique.

Chapitre 1. Diversité des lignées et habitats

Les macroalgues forment des groupes extrêmement diversifiés d’organismes aquatiques, eucaryotes, multicellulaires, photosynthétiques possédant de la chlorophylle a. Elles comprennent des espèces mesurant quelques millimètres à environ 30 m.

Dans les premiers essais de classification, les algues étaient regroupées sous l’appellation de thallophytes, par opposition aux cormophytes, groupe désignant les végétaux organisés avec un système de tige, de racines et de feuilles. Le terme thallophyte, devenu obsolète, n’a pas de réalité phylogénique. En effet, les algues sont disséminées en plusieurs lignées bien distinctes au sein du domaine eucaryote, avec des histoires évolutives bien différentes. Il n’est donc plus question d’un unique « taxon d’algue ».

Certaines macroalgues sont associées aux plantes terrestres ou en sont proches comme les macroalgues vertes et les macroalgues rouges. Les macroalgues brunes se situent parmi les Heteroconta ou Straménopiles sans lien de parenté avec les plantes. Les macroalgues sont donc fortement polyphylétiques. Les figures 1.1 et 1.2 revues et gracieusement cédées par l’Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité du Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) de Paris représentent les arbres consensus des relations phylogénétiques des grandes lignées des Eucaryotes. Dans la figure 1.1, les macroalgues rouges (Rhodophyta) et vertes (Viridiplantae ou Chloroplastidia) sont présentes au sein des Archeoplastidia, les macroalgues brunes (Phaeophyta) au sein des Straménopiles. La figure 1.2 illustre le lien des macroalgues vertes avec les grandes lignées eucaryotes et montre des histoires évolutives contrastées, indépendantes et très différentes.

Figure 1.1. Arbre consensus des relations phylogénétiques des grandes lignées des Eucaryotes

Sources : arbre revu par F. Rousseau (MNHN) d’après Adl et al. (2012), Brown et al. (2013), Burki et al. (2016), Speijer et al. (2015).

Figure 1.2. Consensus des relations phylogénétiques au sein des Chlorobiontes actuelles

Sources : Arbre revu par F. Rousseau (MNHN) d’après Angiosperm Phylogeny Website (2017), www.mobot.org/MOBOT/research/APweb/.

Les algues pluricellulaires rencontrées dans l’océan ou sur l’estran et évoquées dans cet ouvrage appartiennent aux macroalgues brunes (phylum Ochrophyta – Chromobiontes, classe Phaeophyceae), aux macroalgues rouges (phylum Rhodophyta ou Rhodoplantae) et aux macroalgues vertes (phylum Chlorophyta).

Environ 9 000 espèces de macroalgues ont été décrites à travers le monde. De nombreux critères cellulaires permettent de faire la différence entre les différentes lignées : nature des pigments photosynthétiques et des métabolites de stockage d’énergie, constituants de la paroi, construction et orientation d’éventuels flagelles, métabolites secondaires.

1. Endosymbioses et évolution

Les Archaeplastidiées – c’est-à-dire les algues rouges, vertes et les plantes terrestres ont en commun un événement qui leur a permis de réaliser la photosynthèse oxygénique par le phénomène de l’endosymbiose primaire au cours duquel une cyanobactérie proche des Gloeomargarita a été endocytée par une cellule eucaryote non photosynthétique (figure 1.3). À l’issue de cette endosymbiose primaire ont donc émergé les algues rouges, les Glaucophytes et les algues vertes. Les Embryophyta auraient évolué probablement à partir d’un ancêtre commun aux algues vertes entre 400 et 500 Ma. Les Chlorobionta et les Streptobiontes (Embryophytes, Charophyceae, Zygnematophyceae et Coleochaetophyceae) constituent aujourd’hui le groupe des Viridiplantae ou Chlorobionta.

Les algues brunes ont une histoire évolutive différente, car elles ont acquis la capacité à réaliser la photosynthèse par un évènement d’endosymbiose secondaire. Les autres lignées comme les cryptophytes, les haptophytes, les algues brun-dorées et les Dinophytes, sont des eucaryotes mais elles ne présentent pas de liens de parenté directs avec les plantes terrestres. Les lignées issues d’endosymbioses secondaires voire tertiaires proviennent de la rencontre d’un eucaryote primitif non photosynthétique et d’une algue unicellulaire rouge, elles comprennent les lignées Alvéolés, Ochrophytes au sein des Straménopiles, Cryptophytes et Haptophytes. Issues d’une endosymbiose avec une algue unicellulaire verte, les lignées sont regroupées au sein des Euglenophyceae et des Rhizaria (figure 1.3).

Les macroalgues brunes, comme les Oomycètes et les Diatomophyceae appartiennent au phylum des Straménopiles. L’émergence du groupe des Eucaryotes Straménopiles daterait de plus d’un milliard d’années. Les macroalgues brunes se présentent comme la seule lignée du groupe ayant acquis la multicellularité complexe. Elles ont évolué indépendamment des Archaeplastida incluant les plantes terrestres, les algues vertes et rouges.

Figure 1.3. Mécanismes simplifiés des endosymbioses

L’endosymbiose primaire correspond à l’incorporation d’une Cyanobactérie par un organisme eucaryote hétérotrophe. Elle a conduit à l’apparition des algues rouges, des Chlorobiontes correspondant aux algues vertes et aux plantes terrestres, et des Glaucophytes. Les plastes présentent ainsi deux membranes en lien avec les membranes interne et externe de la cyanobactérie. Au cours de cette étape, on peut observer des pertes importantes d’information génomique et le transfert massif de gènes du génome cyanobactérien vers le noyau de l’hôte. L’endosymbiose secondaire correspond à l’incorporation d’une algue rouge ou verte par des eucaryotes hétérotrophes mais différents de ceux impliqués dans l’endosymbiose primaire. L’endosymbiose secondaire d’une algue verte a entraîné l’apparition de trois types d’organismes : les Euglénophyceae, les Chlorarachniophyceae (Rhizaria), et certains dinoflagellés. L’endosymbiose impliquant une algue rouge a conduit à l’apparition des cryptophytes, des haptophytes, de dinoflagellés et des straménopiles. On parle des algues brun-dorées. Ces organismes contiennent des plastes à quatre membranes. Les deux membranes internes correspondent aux deux membranes du plaste primaire (la cyanobactérie de l’endosymbiose primaire), la troisième membrane correspond à celle de l’algue endosymbiotique et enfin la quatrième dérive de la vacuole phagocytaire de l’hôte. Chez les straménopiles comme chez les haptophytes, la membrane la plus externe est continue au réticulum endoplasmique et à l’enveloppe nucléaire. Lors des endosymbioses, le noyau de l’algue incorporée est souvent réduit.

Les Straménopiles représentent un groupe très diversifié en taille, ils sont caractérisés notamment par la présence de deux flagelles, l’un plumeux avec des mastigonèmes tubulaires et l’autre lisse. De plus, ils comportent des organismes hétérotrophes (Oomycètes) et photosynthétiques. Les organismes photosynthétiques correspondent aux Ochrophytes incluant des algues unicellulaires comme les Diatomophyceae, les Eustigmatophyceae, les Chrysophyceae, les Chrysomerophyceae, ou les Xanthophyceae mais également des grandes algues brunes ou Phaeophyceae présentes sur nos estrans.

De nombreux travaux de recherche bousculent régulièrement la taxonomie des algues grâce aux outils moléculaires et aux études génétiques...

Table des matières

• Couverture
• Page de titre
• Page de copyright
• Avant-propos
• Table des matières
• Chapitre 1. Diversité des lignées et habitats
• Chapitre 2. Les caractéristiques biochimiques des macroalgues
• Chapitre 3. Lumière et vie des algues : éléments de photobiologie
• Chapitre 4. La nutrition minérale
• Chapitre 5. La reproduction
• Chapitre 6. Les phytohormones
• Chapitre 7. L’estran : facteurs déterminant la répartition des macroalgues et réponses physiologiques
• Chapitre 8. Valorisation des macroalgues
• Repères bibliographiques
• Les auteurs
• Remerciements