Dix études sur le roman et la loi
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Dix études sur le roman et la loi

Suivies de Hommages à Norman David Thau

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Dix études sur le roman et la loi

Suivies de Hommages à Norman David Thau

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Comment le roman conteste-t-il la Loi? Que devient-il quand disparaît la transcendance? La modernité occidentale semble liée au refus, voire à la disparition de la Loi entendue comme norme divine, acceptée comme telle, régissant les rapports humains et la vision que les individus ont de leur existence. Mais combien de romans peuvent se comprendre en dehors d'un rapport - souvent ambigu ou paradoxal - à la Loi? Critique dissolvante ou tentation restauratrice, évanouissement ou dissémination de l'absolu, recherche d'une norme de substitution, confrontation cauchemardesque aux fantômes ou aux avatars monstrueux de la Loi ancienne: en quoi l'écriture romanesque constitue-t-elle une modalité privilégiée de cette enquête sur la Loi (humaine ou divine, religieuse, morale ou politique)? Ce sont quelques-unes des questions abordées par les études de ce recueil, où se trouvent convoqués, parmi d'autres, Dostoïevski et Hugo, Bernanos et Kafka, Lamed Shapiro, Koestler et Camus, Joyce, Broch, Musil, Dos Passos, sans oublier le roman policier. Le comparatiste Norman David Thau (1959-2005) avait été à l'initiative de cette recherche collective. Il laisse derrière lui un grand livre (Romans de l'impossible identité. Être juif en Europe occidentale [1918-1940], éd. Peter Lang, 2001) et un souvenir impérissable à ses proches, ses amis, ses collègues, ses élèves... Les articles du recueil sont suivis d'une série de témoignages dédiés à sa mémoire.

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Informations

Année
2021
ISBN
9782304028232

« Ce qui de nous doit disparaître … » 210
Le mal et la loi dans la littérature criminelle

Isabelle CASTA
Université de Picardie-Jules Verne
Furieux, Sam Benamou était entré dans la salle d’étude de Reb Asher.
– Vous avez prié, pendant toutes ces années, avec un nazi !
– Rien ne vous prouve, répondit le rabbin, qu’un nazi est venu prier ici211.
Le roman policier, tard venu dans la nomenclature littéraire, s’est vu immédiatement chargé d’un des enjeux essentiels qui interroge l’ethos des sociétés : la Loi suffit-elle à contingenter le Mal ? Les prescriptions religieuses s’effaçant – le roman criminel naît en même temps que la sécularisation progressive des milieux concernés – c’est le juridique qui va peu à peu couvrir tout le champ jadis dévolu à l’examen de conscience. Le transfert du sacré au profane, singulièrement du prêtre au juge, est patent dans Crime et Châtiment, où le fait divers sordide qui génère l’intrigue se mue bientôt en affrontement symbolique autour de l’abjection, de l’aveu et du Salut. L’essayiste Alexandre Lacroix perçoit d’ailleurs Dostoïevski comme le premier penseur du « Mal pour le Mal » : « Il expose une découverte psychologique de première importance : contrairement à ce qu’enseignent, depuis l’Antiquité, la plupart des écoles de pensée, l’homme est capable de commettre le mal volontairement, en parfaite connaissance de cause, et d’y trouver de l’agrément. » 212
C’est précisément sous un régime dogmatique et autoritaire que se déroule ce « thriller métaphysique », en contradiction avec les conditions nécessaires souvent critériées par la critique, au rang desquelles s’imposent le caractère plus ou moins démocratique213 du gouvernement en question, ainsi qu’un arrière plan judéo-chrétien en voie d’effacement et une industrialisation et une urbanisation en plein essor. La Russie de Dostoïevski est loin de correspondre à ces attentes, mais c’est pourtant bien le juge Porphyre, un laïc, et non quelque pope ou quelque staretz qui saura entendre la secrète détresse de Raskolnikov et l’amènera, per aspera, à la rédemption214. La loi vétérotestamentaire est ainsi réinterprétée dans une problématique déjà moderne : l’ordre social doit être restauré, non parce qu’il est bon ou juste, mais parce que le plus grand nombre y trouve son compte et rémunère quelques veilleurs pour que chacun puisse vaquer à ses tâches avec efficacité et sûreté.
Les termes de « sécurité intérieure », « loi de sûreté générale », « sécurité du territoire » attestent bien l’obsession de tout pouvoir : débusquer et punir les infracteurs pour ne pas nuire à la fluidité nécessaire des échanges marchands215. Voilà pourquoi il peut paraître un peu artificiel mais cependant topique de classer Crime et Châtiment dans le compendium de l’œuvre criminelle, même si Jean Tulard le cite216 pour en dire aussitôt qu’il ne saurait l’analyser ! C’est pourtant à l’ombre immense de ce géant que nous allons cheminer en posant à ses successeurs avoués ou implicites (Philip Kerr217 au premier chef) les deux questions suivantes : la fiction criminelle est-elle fondée à exemplifier nos questionnements éthiques ? les topoï inhérents au genre ne risquent-ils pas de réduire les données du problème à de simples anecdotes épiphénoménales ? Enfin, nous conclurons par l’apport de ce « récit impossible »218 à la contemporanéité fictionnelle en matière de dramaturgie du Mal :
L’imperfection de la vie commune des hommes, que la théologie comprend sous le nom de péché originel et pour laquelle la loi fut créée, fait aussi que la vie commune y trouve sa limite […]. Si la loi détermine le milieu juste, elle doit conjurer l’antilégal, comme elle est conjurée elle-même par le supralégal. Mais les puissances supérieures et inférieures à la loi s’allient pour que la voie passe par la loi.219
Un récit « impossible » ?
Je me souviens d’une femme, il y a deux ans de ça. J’étais amoureux, et puis elle a disparu. Il est vrai que ça arrive à des tas de gens dans cette ville220.
Dans Crime et Châtiment, insistons-y une fois encore, les problématiques matricielles du roman policier sont bien là : interrogations sur le crime, sur la responsabilité individuelle, le libre arbitre, la providence… Sans ces données, le cheminement même de l’enquête n’aurait aucun sens, puisque si tout est déjà écrit, c’est que la fatalité règle nos destins, et non notre constante liberté et notre capacité de choix entre obéissance et transgression. Le romancier Philip Kerr a relevé le défi : sans nous arrêter particulièrement à son œuvre, nous nous permettrons cependant de la lire comme exemple d’un romanesque dostoïevskien, qui adopte un cadre « intenable » pour situer des intrigues policières finalement classiques – même si les meurtres en série ou les chantages pour mœurs sont déjà des paradigmes d’extrême violence. Précisément : quel sens a la violence privée au sein de la violence générale, étatique, de l’Allemagne nazie221 ? La nature ontologiquement toxique du National Socialisme peut-elle cependant permettre à ses policiers d’enquêter normalement et de suivre des pistes idéologiquement dangereuses ? Le Mal et la Loi – ou plus exactement le-Mal-ayant-force-de-Loi – dessinent évidemment un formidable background pour les intrigues qui s’y déploient. Après ce coup de maître Philip Kerr a d’ailleurs eu du mal à retrouver un souffle aussi épique, et sa production postérieure s’impersonnalise en voulant emprunter à des genres aussi disparates que la science-fiction futuriste (Le Sang des hommes, Une Enquête philosophique222), la rétrofiction (Le Chiffre de l’alchimiste223, sorte de Da Vinci Code avant la lettre, dont le titre – français principalement – prétend su...

Table des matières

  1. « L’Esprit des lettres »
  2. Dans la même collection :
  3. Faute de préface…
  4. La dérogation morale, une prérogative du roman ? Droit de mentir, droit de désobéir aux ordres, droit de tuer.
  5. Le roman politique : le sujet et/est la Loi (Le Zéro et l’infini, d’A. Koestler et L’Étranger, d’A. Camus)
  6. Lamed Shapiro ou la loi perverse
  7. Quatre fils devant la Loi Histoire d’une rencontre improbable entre un romancier antisémite et un rituel juif.
  8. Annexe : la Haggada de Pâques
  9. Le roman catholique et la « mort de Dieu » Modalités bernanosiennes de l’espérance agnostique
  10. Sens et culpabilité dans Le Procès de Franz Kafka
  11. La loi à l’agonie : Ulysse de Joyce etLes Somnambules de Broch
  12. Vivre dans l’enfance ou être de son temps, selon Dos Passos et Broch Disparition et affirmation des lois dans USA et Die Schlafwandler [Les Somnambules]
  13. « La notion imaginaire de loi » dans L’homme sans qualités de Robert Musil
  14. « Ce qui de nous doit disparaître … » Le mal et la loi dans la littérature criminelle
  15. LIVRE D’OR In memoriam
  16. Discours prononcé par Philippe Zard
  17. Témoignage de Crystel Pinçonnat
  18. Témoignage de Christophe Reffait
  19. Témoignage d’Andréas Pfersmann
  20. Témoignage de Dominique Moncond’huy
  21. Témoignage d’Anne-Pascale Pouey-Mounou
  22. Témoignage de Karen Haddad-Wotling
  23. Témoignage de Carole Ksiazenicer-Matheron
  24. Témoignage de Françoise Lavocat
  25. Témoignage d’Alain Schaffner
  26. Témoignage d’Anne Jouan
  27. Témoignage de Sophie Plicque
  28. Un mot de Françoise Thau