À cache cache avec la mort
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À cache cache avec la mort

Un résistant juif à Varsovie de 1939 à 1945

  1. French
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  3. Disponible sur iOS et Android
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À cache cache avec la mort

Un résistant juif à Varsovie de 1939 à 1945

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À propos de ce livre

Varsovie, 1940, la population juive est contrainte de s'entasser dans le Ghetto mis en place par les nazis. David Klin, qui est l'un des dirigeants du mouvement socialiste juif du Bund, est déjà entré dans la Résistance. Par la suite, il se nommera Pan Bronis aw Marczak pour agir dans l'ombre.Délégué de l'organisation humanitaire American Jewish Joint Distribution Committee, cet homme mûr, aguerri aux rouages administratifs, organise les secours à la population juive dans le Ghetto et au-delà. Et, pour la soutenir moralement, il contribue au bulletin clandestin du Bund en yiddish.Doué d'une intelligence et d'un aplomb sans faille, David Klin accepte les missions les plus périlleuses. Grâce à lui, de nombreuses personnes parviendront à échapper au pire. Condamné à mort par la Gestapo, il rejoint la zone « aryenne » peu avant le soulèvement désespéré du Ghetto. Là, grâce à ses liens avec les partisans socialistes polonais, il apprend le maniement des armes et participe au soulèvement de la capitale à l'été 1944.Document exceptionnel, inédit en français, le récit de David Klin nous plonge au cœur des résistances juives et polonaises dans la Varsovie martyrisée. On y croise les dirigeants historiques du Bund mais aussi des héros méconnus de l'insurrection du Ghetto.

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Informations

Année
2017
ISBN
9782304047073

En zone « aryenne »

Lorsque je fus sorti du Ghetto, je pensai : « Où allons-nous à présent ? » Je ne considérais pas comme valable l’idée de m’installer au Sanatorium Medem, où étaient hébergés ma femme et mon fils. Ce n’était pas un endroit assez sûr pour moi.
Je me rendis à l’un des points de contact de la Résistance. J’espérais y rencontrer mon bon camarade « Włodzimierz ». Son vrai nom était Władysław Wiczliński-Zaremba. Mais en fait il était parti en province. Alors je me rendis chez Mikołaj, au 9 de la rue Szczygla. Il me fallait un endroit rien que pour une nuit, car le lendemain je pourrais bien trouver une solution pour un appartement où séjourner. Mikołaj me donna une adresse à Żoliborz[1], chez le camarade Papier, qui habitait là-bas en tant qu’ « Aryen ». Papier me conduisit au grenier de la maison où il habitait. J’y passai la nuit. Je ne pus fermer l’œil, car je n’avais pas où m’allonger. Je me tins debout toute la nuit sous la lucarne entrouverte à fumer des cigarettes. À travers le mur voisin, j’entendis toute la nuit le bruit d’une petite imprimante manuelle. Dans cette soupente on devait certainement imprimer des feuillets clandestins. Le lendemain, je descendis retrouver Papier, me rasai, me lavai et sortis en ville.
À dater de ce jour commença ma promenade « à cache-cache avec la mort ».
Je me rendis une seconde fois chez Włodzimierz et cette fois je le trouvai. Il fut très heureux de me revoir, d’apprendre que j’avais définitivement quitté le Ghetto et que je voulais m’installer en zone « aryenne ».
Il me demanda si je cherchais un endroit pour me cacher ou bien si je voulais être actif dans le mouvement de la Résistance. Je lui répondis que je ne voulais pas être caché, que je voulais être actif, mais que, pour quelque temps, il fallait que je disparaisse de la surface, ne fût-ce que pour une courte durée.
Il téléphona aussitôt à l’un de ses amis, un Lituanien, qui avait une chambre au n° 1 de la rue Pługa, et nous décidâmes d’aller le trouver le jour même à 16 heures.
Le Lituanien, Jan Lapinski, était sous-locataire d’une femme chrétienne. Son mari, haut-fonctionnaire au ministère de l’Agriculture, était interné en Roumanie. Il avait fui la Pologne dès que la guerre avait éclaté.
Lapinski me présenta à sa logeuse comme un propriétaire terrien, qui avait dû fuir la Posnanie parce qu’il n’avait pas fourni les quotas demandés aux Allemands ; et que je comptais rester à Varsovie un certain temps.
La propriétaire me dit qu’il restait une chambre libre et que, si je voulais, je pouvais l’occuper.
Je me mis d’accord avec elle pour le prix et je m’installai dans la chambre meublée, comme voisin du Lituanien.
J’avais demandé à ma logeuse qu’elle attende un petit peu pour me déclarer. Pour l’instant, je ne pouvais pas remplir cette formalité. Cela ne la dérangeait pas.
J’avais pris avec moi quelques affaires, mes papiers d’iden-tité « aryens » et un peu d’argent. Comme le fait de rester longtemps enfermé dans l’appartement pouvait éveiller les soupçons de ma propriétaire, je me portai « malade » dès le lendemain. J’avais de la fièvre. Cela eut comme heureuse conséquence que la logeuse me proposa de me faire un peu de cuisine et de tout aller acheter pour moi. Je ne demandais pas mieux.
Presque chaque matin je recevais la visite de Włodzimierz et, l’après-midi, le Lituanien venait chez moi.
J’avais aussitôt fait savoir à Orzech et à Mikołaj où je me trouvais. Dès le lendemain, Mikołaj vint me voir. Nous restâmes assis plusieurs heures à nous raconter nos épreuves.
La visite de Mikołaj m’avait fait remonter fortement dans l’estime de la logeuse. Par son allure, il donnait l’impression d’un véritable hobereau, d’un dziedzic[2]. Juste après son départ, la propriétaire me demanda : « Qui est ce pan[3] dziedzic ? » Je lui répondis que nos domaines étaient voisins et que lui aussi avait quitté ses terres…
Orzech vint me voir plusieurs fois et Mikołaj me rendait visite tous les deux jours.
Dans l’appartement, il y avait un téléphone. Au Ghetto, il n’y avait que deux personnes qui connaissaient mon numéro dans cette maison, Abrasza et ma secrétaire du Żytos, Bela Szłosberg. C’était une amie de Gala Leszczyńska (la fille du camarade Chmurner). Elles habitaient ensemble.
Je téléphonais souvent à Fiłozof, qui occupait désormais ma chambre chez Sonia. Mes questions étaient brèves. Je parlais avec lui de manière déguisée, pour ne pas attirer l’attention de ma logeuse. Je demandais à Fiłozof quelles étaient les nouvelles du « dyrektor Kwiatek[4] », cela désignait Abrasza Blum. Il me répondit qu’il avait de la « fièvre », qu’il ne sortait pas de chez lui, que les enfants étaient obéissants et apprenaient à lire. Cela voulait dire que les feuillets continuaient à paraître. Nous nous comprenions très bien réciproquement. Mikołaj et Orzech restaient eux aussi en contact avec le Ghetto et savaient très bien ce qui s’y passait. Pour avoir un tableau plus clair, nous confrontions nos informations.
D’après ce que nous avions appris, la situation était la suivante : de Lublin étaient venues des informations disant que les Juifs de cette ville étaient déportés vers une destination inconnue. Cette opération était réalisée par une brigade spéciale, un Sonderkommando[5]. Des nouvelles inquiétantes du même genre arrivaient aussi en provenance de Cracovie. Les Juifs au ghetto de Varsovie vivaient dans la peur. Les exécutions sommaires du vendredi soir se poursuivaient, quoique à une plus petite échelle. Le Draytsentl avait été liquidé[6].
La Gestapo était à la recherche de Gancwajch. Ils avaient prononcé contre lui une condamnation à mort et envoyé des lettres de recherche. Seule la firme Kohn & Heller fonctionnait encore. L’heure du couvre-feu avait été avancée. Une ordonnance fut publiée concernant la distribution des cartes d’identité. Cette mesure fut accueillie comme un bon présage, d’autant plus que la date avant laquelle il fallait retirer ces cartes avait été repoussée. Il fut également décrété que tous les ressortissants étrangers devaient se présenter au Bureau central de la police du Ghetto.
La Gestapo justifiait cette mesure en annonçant un échan-ge entre ces étrangers et des Allemands détenus dans différents pays. Quelques-uns voyaient cela d’un œil favorable, d’autres étaient pessimistes et rappelaient le sort des citoyens soviétiques dont on ne savait ce qu’ils étaient devenus.
Les rumeurs concernant la déportation des habitants du Ghetto se répandent de plus en plus. Chaque jour on apprend que certains Juifs fortunés s’échappent du Ghetto pour gagner la zone « aryenne ».
Sonia Nowogródzka, qui avait un passeport de citoyenne du Honduras, décida de ne pas se présenter [au Bureau central de la police du Ghetto]. Elle expliqua qu’elle voulait rester au Ghetto. Elle voulait partager le sort de tous les Juifs.
À cette époque furent créés au Ghetto des « szopy[7] », où les Juifs travaillaient pour subvenir aux fournitures de l’armée allemande. Du coup, les gens redevinrent optimistes, les Allemands ayant besoin de main-d’œuvre. Alors ce fut la cohue pour trouver une place dans un tel atelier. Ceux qui travaillaient, se disait-on, ne seraient pas déportés. On paya des sommes importantes pour être engagé dans un atelier, ou simplement pour une attestation, comme quoi on y travaillait. Il était un peu plus facile d’entrer dans l’atelier des Brossiers. Dans celui-ci, deux Polonais, Julian Kudasiewicz (de Cracovie) et Józef Ziemian (de Varsovie), dirigeaient le travail, et Emil Wajc (de Tarnów) était leur associé. Ils facilitaient l’embauche dans cet atelier, et aussi la délivrance de certificats de travail.
Grâce à Emil Wajc, de nombreux membres du Bund et de la Tsukunft y furent admis. Il s’y créa alors une cellule du groupe de résistance bundiste.
Par un camarade du PPS, nous apprîmes que les échos de la déportation des Juifs étaient enfin parvenus aux oreilles des résistants polonais. Je téléphonai à Mikołaj pour le lui annoncer. Lui-même avait eu vent de ces événements.
Il fit des démarches pour faire parvenir au Gouvernement polonais à Londres et, par leur entremise, aux États-Unis, une dépêche alarmante exigeant que soient exercée au plus vite une répression contre les Allemands dans d’autres pays.
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Atelier de cordonnerie de l’entreprise Schultz où travaillent les Juifs du Ghetto, 1940–1943. Photographie de la propagande allemande. © Mémorial de la Shoah, Paris
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Atelier de fabrication de tiges pour les chaussures montantes de l’entreprise Schultz où travaillent les Juifs du Ghetto, 1940–1943. Photographie de la propagande allemande. © Mémorial de la Shoah, Paris
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Atelier de mécanique fine de l’entreprise Schultz où travaillent les Juifs du Ghetto, 1940–1943. Photographie de la propagande allemande. © Mémorial de la Shoah, Paris
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Atelier de mécanique du ghetto de Varsovie, 1940–1943. Photographie de la propagande allemande. © Mémorial de la Shoah, Paris
Ce message d’alarme fut envoyé, mais il ne rencontra que la sourde oreille.
Le monde se taisait, une fois encore. Nous n’entendîmes rien prouvant que les Juifs influents aux États-Unis aient fait quoi que ce soit pour sauver les Juifs de Pologne.
L’après-midi du 21 juillet 1942 (cette date est restée profondément gravée dans ma mémoire), je reçus un appel téléphonique de mon ancienne secrétaire, Bela Szłosberg, m’apprenant que « les boutiques sont fermées, les rideaux sont baissés et le magasin est sous bonne garde ». Je compris par là que l’enceinte du Ghetto était encerclée par l’armée et que ses portes étaient closes.
Je ne pus dormir de la nuit.
Le lendemain matin, Włodzimierz vint chez moi et me raconta que ce jour, le 22 juillet, devait débuter la déportation du ghetto de Varsovie. Combien de Juifs seraient déportés et pour quelle destination, on l’ignorait. Le bureau d’espionnage du PPS avait appris qu’il était arrivé à Varsovie un commando spécial de la police de Sécurité, lequel devait mener cette action. C’était évidemment le même type de Sonderkommando qu’à Lublin. Tout le long des murs du Ghetto étaient disposés des postes d’Ukrainiens, de Lituaniens, de policiers polonais et de gendarmes allemands.
La triste nouvelle devenait réalité.
C’était le début de la fin.
Selon l’ordonnance qui avait été affichée sur les murs du Ghetto, la déportation (que les Allemands avaient surnommée « envoi pour le travail dans les territoires de l’Est ») ne concernait que ceux qui ne travaillaient pas, ceux qui profitaient de l’aide sociale, les habitants des « punktn[8] », à savoir ceux qui avaient été introduits en provenance d’autres villes et aussi des réfugiés, des personnes arrêtées pour divers délits, comme le fait de ne pas porter l’étoile ou d’avoir été en zone « aryenne » sans autorisation. Il n’était pas possible de déterminer leur nombre.
À en juger par l’échantillon qui fut déporté le premier jour, il était clair qu’on ne les envoyait pas au travail. Car ce n’est pas au travail forcé qu’on envoie des malades, des vieillards et des enfants, mais plutôt… à la mort. Mais pourtant, personne ne voulait croire qu’une telle extermination de masse fût possible.
Ce qui n’était pas encore clair, c’était la destination où les déportés étaient envoyés.
Nous nous sommes mis à enquêter, pour savoir quel était le lieu où les déportés étaient conduits. Cette tâche fut accomplie par le camarade Załman Frydrych, [alias] « Zygmunt ». Il sortit du Ghetto, trouva un contact avec un conducteur de locomotive polonais, et il réussit à établir que les convois étaient dirigés sur Treblinka, encore inconnu comme camp d’extermination[9].
Rapidement nous eûmes la preuve qu’à Treblinka les Juifs étaient gazés. Ils y étaient exterminés.
Le second jour de déportation, le président du Judenrat, l’ingénieur Adam Czerniaków, se suicida en absorbant du cyanure. Czerniaków avait compris ce que la déportation signifiait, que l’on conduisait tout bonnement les Juifs à la mort, et il ne voulait pas être coresponsable.
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Le président du Judenrat, Adam Czerniaków, dans un bureau, avec plusieurs hommes lors de la cé...

Table des matières

  1. Crédits
  2. Table des matières
  3. Présentation de la collection « Témoignages de la Shoah » de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah
  4. Préface
  5. Le fils de David Klin raconte…
  6. Introduction à la 1re édition
  7. Les débuts de la guerre à Varsovie
  8. Le Ghetto
  9. En zone « aryenne »
  10. Sur les barricades
  11. À Pruszków
  12. Annexe Guide de prononciation des noms en polonais
  13. Table des illustrations
  14. Titres disponibles dans la collection « Témoignages de la Shoah » par catégorie de témoignage
  15. Couverture