Représentation, évolution et réflexion du choc culturel dans les entreprises à capitaux étrangers en Chine

Xi Jiang

• Éditeur: Éditions Le Manuscrit
• Année: 2021
• ISBN:
  9782304049916
• Sujet: Social Sciences
• Sous-sujet: Sociology

La croissance de l'économie et la progression de l'ouverture et de la réforme chinoise ont développé une hétérogénéité culturelle, notamment dans les entreprises à capitaux étrangers en Chine, selon les nationalités, langues, comportements et mentalités de leurs employés. Cependant, le choc culturel existe non seulement entre les Asiatiques et leurs collègues issus de l'Europe ou de l'Amérique du Nord, mais aussi entre les employés asiatiques eux-mêmes, ce qui est souvent beaucoup moins pris en considération par les chercheurs ainsi que les professionnels. Les peuples asiatiques ne cessent en effet de créer et développer leurs propres valeurs, façons de penser et comportements qui sont tous uniques et différents les uns des autres. À partir d'une méthodologie fondée sur des entretiens semi-directifs en profondeur, cet ouvrage a pour objectif d'interroger cette diversité culturelle particulière et impensée en étudiant ses transformations et représentations au travail, et de finalement apporter des enjeux de l'inspiration et de la résolution des problèmes posés par cette divergence culturelle.

Cultures asiatiques :
différences et interprétation

6.1 Les Japonais : Collectivisme à orientation sociale, forte hiérarchie, manque de la sécurité, ainsi que la « honte »

La présence de la diversité des cultures asiatiques est sans doute une ressource de la créativité et d’innovation qui est essentielle pour le développement des entreprises. En revanche, comme nous l’avons déjà parlé dans le début de ce chapitre, malgré des similitudes importantes, il existe toujours des différences culturelles non négligeables entre les groupes asiatiques. Et ces différences peuvent à tout moment provoquer des problèmes lors de la coopération entre les personnes issues de ces cultures.

Il est ainsi très important de connaître quels sont les traits spéciaux de ces cultures par rapport aux autres, et quelles sont les origines de ces spécialités culturelles. Nous commençons ici par la culture japonaise.

6.1.1 Collectivisme à orientation sociale

Forte identité territoriale

Le Japon est un pays où l’esprit collectiviste domine, mais on constate également une grande différence entre le collectivisme chinois et japonais. Pour le premier, le collectivisme se caractérise par la relation sanguine, à savoir celle entre les membres familiaux (nous en parlerons plus tard), mais dans l’archipel nippon, l’esprit collectiviste est fondé sur la forte identité extrafamiliale qui dépasse la relation sanguine entre les membres familiaux.

Géographiquement, des montagnes, des rivières et des détroits divisent le Japon en de petites parties dans la période où le transport était beaucoup moins développé, ces régions étaient pour la plupart relativement fermées au monde extérieur. Afin de faire face aux calamités naturelles telles que le typhon, le tremblement de terre, ainsi que le tsunami qui y sont souvent fréquents, la solidarité entre les habitants de la même région, que leurs relations soient sanguines ou pas, est donc devenue une nécessité.

La culture du riz renforce cette solidarité non sanguine. À la différence des régions au nord de la Chine où les gens cultivent et consomment principalement du blé, le riz est toujours un élément fondamental de l’alimentation au Japon et se trouve à la base de sa cuisine traditionnelle. En effet, la culture du riz requiert des exigences particulières en matière climatique et humaine. À l’égard du climat, les besoins en chaleur, en humidité et en lumière sont très spécifiques. Il n’existe donc que quelques dizaines de jours qui conviennent à la plantation et la récolte du riz. Quant au facteur humain, toute l’activité de la culture n’est pas ou très peu automatisée à cause des caractéristiques particulières des rizières, ce qui nécessite une main-d’œuvre humaine importante. Étant données ces raisons, une coopération territoriale entre les familles de toute la région est indispensable lors de la plantation et la récole du riz, et toute action qui nuira possiblement à cette coopération n’est jamais admise et tolérée par d’autres membres de la collectivité.

Dans l’histoire japonaise, il est d’usage que les noms de famille soient seulement réservés aux nobles (la famille impériale est exclue178) et samouraïs jusqu’à la Restauration de Meiji au milieu du xixe siècle. Quant au peuple japonais, il dépendait des Hans auxquels il était attaché mais non de leur famille sanguine, et il était appelé généralement comme « appartenant à certain seigneur du Han ». Par conséquent les Japonais n’ont pas, contrairement aux Chinois, la tradition de rendre hommage à leurs propres ancêtres familiaux mais organisent souvent de grands rites parareligieux consacrés aux dieux qui protègent tout le territoire où résident plusieurs familles. « Peu importe que ce soient leurs ancêtres familiaux, les villageois qui se rassemblent ici sont tous les fils du Dieu de cette région, car ils résident sur son sol »179. C’est-à-dire, toutes les personnes qui vivent dans la même région ont la permission de participer au rite sans considérer leurs relations sanguines. Sans aucun doute, l’identité territoriale transfamiliale est renforcée à travers cette sorte d’activité ou d’autres similaires, et les gens cohabitent sur le même territoire, se comprennent, s’aident, et coopèrent de manière étroite.

L’individu, rôle négligeable

Quoique l’identité territoriale soit fondée sur la relation non sanguine, les Japonais considèrent la collectivité dont ils font partie comme leur « grande famille », et ce type d’esprit de « famille » est généralement plus fort au niveau spirituel que celui de la Chine qui est établi sur la relation sanguine entre les membres de la même famille180, tout en négligeant le rôle de l’individu dans le collectivisme.

Dans la période de la pré-évolution industrielle au Japon, le seigneur fut souvent le chef de la « grande famille », mais cela ne lui donna pas un pouvoir absolu : la fortune fut encore relativement commune à tous les membres qui ont vécu les uns pour les autres181. Dans cette « grande famille », la relation entre les membres et le statut de l’individu ne fut pas déterminée tout à fait par la filiation sanguine. Les contributions précédentes et les capacités qui permettaient un meilleur avenir à la collectivité furent impérativement prises en compte lorsque l’on désigna le futur chef de la « grande famille », sans considérer trop son origine.

Au fil du temps, les « Hans » et les « seigneurs » ont disparu, mais l’idée de mettre toujours la collectivité comme supérieure à l’individu est héritée du Japon. Progressivement, cette sorte de solidarité extrafamiliale se transforme en une forte conscience d’appartenance à la collectivité. L’individu, dans la société contemporaine japonaise, se tient à l’ombre du groupe social auquel il est attaché, et la valeur personnelle est souvent représentée par le développement de son groupe. Par conséquent pour la plupart des Japonais, les entreprises et les écoles où ils travaillent, ainsi que leur pays, sont toujours très importants dans la vie quotidienne, et la relation entre les membres et ces collectivités est plus étroite par rapp...

Table des matières

• Introduction
• Le concept de « culture » : genèse, évolution et caractéristiques
• Quand les cultures différentes se croisent au travail
• Choc culturel
• Relation étroite entre l’essor chinois et le développement des entreprises
• à capitaux étrangers en Chine
• Coexistence des cultures asiatiques différentes en Chine et diversités culturelles entre elles
• Cultures asiatiques : différences et interprétation
• Choc culturel entre les employés asiatiques au travail : représentation et évolution
• Conclusion
• Bibliographie
• Annexe