La saga des filles du Roy - TOME 1
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La saga des filles du Roy - TOME 1

La traversée

  1. 332 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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La saga des filles du Roy - TOME 1

La traversée

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Citations

À propos de ce livre

Les Filles du Roy étaient filles de rien, sans protection ni avenir. Suite à la volonté du Roi et de Colbert, elles ont traversé l'océan, débarqué dans un pays étranger, inconnu et sauvage, pour trouver un mari et aboutir quelque part sur une terre le long du fleuve Saint-Laurent qui n'était même pas défriché. Près de la moitié d'entre elles sont tombées enceintes durant la première année de leur périple et ont dû accoucher dans des conditions inimaginables. Les «indiens» rôdaient et il faudrait survivre à l'hiver. Cette aventure rocambolesque a eu véritablement lieu. Cette histoire, c'est la nôtre.

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Informations

Année
2022
ISBN
9782898312014
Québec
La terre ferme
Le 20 juin 1667, l’après-midi était bien terminé quand les chutes furent passées. Le capitaine Chaillé décida de jeter l’ancre à quelques encablures du port de Québec plutôt que de débuter les manœuvres d’accostage. Il était tard et il ne voulait pas se faire attraper par la noirceur. Le navire était presque arrivé. Les gens de Québec pouvaient le voir depuis les hauteurs de la ville. Les autorités l’avaient identifié et ils seraient fin prêts à l’accueillir le lendemain matin. On fit tirer trois coups de canon à blanc depuis le port pour souhaiter la bienvenue au Saint-Jean. Chaillé rendit la politesse avec autant de tirs. À bord du navire, l’atmosphère était à la fête. On pourrait enfin mettre le pied à terre dès le lendemain matin. Le calvaire de la traversée était terminé et la nouvelle vie allait pouvoir démarrer. Tous les hommes et les femmes à bord rêvaient d’une vie meilleure, d’un travail honnête et d’une belle famille. Ce soir-là, le capitaine consentit à laisser les cuisiniers nourrir tous les passagers à leur guise. On mangea plus et mieux que d’habitude, et surtout, le vin et la bière coulèrent à flots. Partout sur le navire, on chantait et on dansait.
Le jour de l’arrivée correspondait au solstice d’été de l’an 1667. La journée durait longtemps. Les premières lueurs de l’aube parurent dès cinq heures. Tout le monde avait dormi assez peu. On s’était couché tard et on était très agité. Marie et Anne avaient réussi à dormir, mais elles s’étaient toutes deux réveillées tôt, elles étaient prêtes et elles frétillaient d’impatience sur leur couchette en attendant la clarté et les instructions pour la sortie. Leur curiosité était mise à la torture parce que les filles avaient reçu l’ordre de rester sur le deuxième pont tant que le navire ne serait pas immobilisé sur le port de Québec. Elles avaient vu quelques bâtisses de la ville de loin la veille, mais elles auraient bien aimé voir la ville approcher lentement. Elles devaient prendre leur mal en patience. En fait le peu qu’elles avaient aperçu était à peu près tout ce qu’il y avait à voir. Les filles seraient un peu déçues quand elles découvriraient Québec. La ville était sur le point de prendre son essor, mais elle n’était pour le moment qu’une très modeste bourgade mal construite et peu organisée. Elle se composait d’une suite désordonnée de bâtiments de peu d’envergure. La basse ville, que les filles verraient en premier, ne payait vraiment pas de mine.
Heureusement pour elles, qui piaffaient dans la pénombre, le capitaine Chaillé et son équipage étaient aussi impatients d’aller amarrer le Saint-Jean aux quais de Québec. La manœuvre était relativement simple parce que le port donnait directement sur le fleuve et qu’il était en eaux très profondes. La seule difficulté était qu’il fallait avancer vers un endroit où le lit du fleuve était plus étroit et où le courant de face était puissant. Pour un Européen, le débit du Saint-Laurent était stupéfiant. Il faudrait presque réunir tous les cours d’eau du vieux continent pour obtenir un volume comparable à celui du fleuve Saint-Laurent. Les marins les plus aguerris faisaient tous de grands yeux quand ils constataient les masses énormes d’eau qui y couraient à grande vitesse. Approcher doucement des quais dans ces conditions s’avérait assez difficile. Il fallait un peu de vent pour combattre le courant qui repoussait l’embarcation. Le plus difficile était de maintenir le cap pour ne pas se retrouver de travers.
Dès qu’il fut possible de voir clair, les hommes commencèrent les manœuvres. En quelques minutes, les voiles étaient déployées et l’ancre avait été levée. Les écoutilles étaient ouvertes et Anne et Marie étaient attentives aux moindres mouvements et sons qui leur indiquaient que le bateau bougeait. Elles sentirent que l’ancre avait été hissée et que le Saint-Jean avait retrouvé sa liberté de déplacement, mais elles n’avaient aucune idée de sa progression. C’était une attente difficile à supporter, mais en même temps palpitante. On se savait arrivé et c’était un jeu de tenter de deviner ce qui se passait. On ne pouvait se fier qu’au son du vent dans les voiles et de l’eau sur la coque pour estimer le déroulement des opérations. En raison du courant puissant du fleuve et du vent capricieux, le navire progressait très lentement. Le courant aurait été moins puissant si on s’était rapproché plus près de la berge, mais cela aurait été trop dangereux de frapper un récif. Il fallait rester vers le centre et affronter les masses inouïes d’eau qui déferlaient contre la proue. Vers la fin du mois de juin, le fleuve est encore bien gonflé des eaux de la fonte des neiges partout sur son immense bassin versant. L’eau qui partait à des milliers de milles de là mettait des semaines à arriver. Son débit et son courant étaient encore plus forts qu’en d’autres saisons.
Il fallut attendre fébrilement deux longues heures pour entendre des voix venues de la terre ferme s’ajouter à celle des marins du navire. Les hommes sur la terre guidaient maintenant la manœuvre d’accostage. Les filles qui les avaient entendus depuis leur entrepont avaient poussé un hourra de concert en écho aux hommes massés au troisième pont. Ils avaient tous compris qu’il ne restait plus que quelques encablures avant que des amarres puissent être jetées de part et d’autre.
Le Saint-Jean était le plus gros navire qui avait jamais mouillé dans les eaux du port de Québec. Les hommes à quai étaient énervés par la manœuvre. De son côté, le capitaine Chaillé n’avait jamais vu un cours d’eau d’une puissance semblable et c’était la première fois qu’il tentait d’accoster son bâtiment dans des conditions semblables. Il approchait le plus doucement possible et il avait toutes les difficultés du monde à tenir le navire dans la bonne direction. Au moindre écart, le Saint-Jean serait parti en travers du courant et il faudrait tout recommencer. Avec patience et minutie, le capitaine finit par approcher suffisamment pour que des filins relient le navire au sol. Le pire était fait. Avec les cordages, le reste de la manœuvre était un jeu d’enfant. Il ne restait qu’à haler l’embarcation jusqu’à la jetée. On put enfin fixer solidement les amarres. Le Saint-Jean et les Filles du Roy étaient arrivés à destination.
Depuis leur place sur le deuxième pont, les filles entendirent chaque détail de la manœuvre. Elles poussèrent un immense soupir de soulagement quand elles comprirent que des cordages reliaient enfin le bateau au sol et elles poussèrent de grands cris de joie quand elles entendirent la coque cogner sourdement contre le quai. Quand les amarres furent toutes fixées, elles sentirent avec la plus grande satisfaction que le navire, et elles avec, avait enfin retrouvé une station immobile. Pour la première fois depuis maintenant 10 semaines, le sol cessa de bouger sous leurs pieds. À la joie d’être arrivées s’ajoutait l’immense soulagement de ne plus avoir peur de couler. Cette crainte qui les avait accompagnées durant toute la traversée pouvait être écartée pour de bon.
La température était fraîche pour ce temps de l’année, le vent venait du nord. Le ciel était parfaitement bleu. La lumière de juin était éclatante. En ce jour où l’été débutait, la nature était dans la plénitude exubérante des plus longues journées de l’année. Tout semblait frais et vibrant de vie. Depuis leur pont, les filles sentaient l’air pur et chargé du parfum des innombrables fleurs de la saison. Il leur fallait encore patienter avant de monter. Il fallait installer la passerelle et débarquer les huiles logées dans le château arrière du navire. Quand les notables seraient sur la terre ferme, elles pourraient monter vers la lumière.
Pour la petite communauté de Québec, l’arrivée du Saint-Jean était un énorme événement. La population totale de la Nouvelle-France à l’arrivée des filles était d’un peu plus de trois mille personnes, plus les mille soldats du régiment de Carignan-Salières. De ce nombre, quatre cents étaient établis à Montréal, qui portait alors le nom de Ville-Marie, près de trois cents à Trois-Rivières et un millier à Québec et ses environs. La colonie comptait désormais sur quelques centaines de colons installés à l’île d’Orléans et au bord du fleuve. Il y avait aussi plusieurs centaines d’hommes qui couraient à travers le territoire en quête de fourrures, d’aventures et de compagnie féminine. Ces hommes qui avaient goûté à la liberté et aux joies des grands espaces vivaient en marge de la colonie. Les autorités n’avaient presque aucune emprise sur eux.
Grâce, entre autres, à l’arrivée des Filles du Roy, la population de la Nouvelle-France doublerait bientôt et atteindrait même dix mille âmes vers 1677. On peut affirmer sans craindre de se tromper que la colonie de la Nouvelle-France a été fondée vers les années 1550. Mais que le pays est réellement né à compter des années 1660, au moment où de vrais efforts de peuplement ont enfin été accomplis. Surtout à l’époque où les Filles du Roy sont arrivées avec la force de leur jeunesse, leur candeur, leur courage infini et la fertilité miraculeuse de leur ventre. Sans elles, la colonie aurait sans doute fini par être avalée par ses voisins gourmands.
À lui seul, le Saint-Jean qui avait à son bord une centaine d’hommes et soixante-quatorze filles à marier apportait une importante contribution démographique à la ville de Québec et éventuellement à la colonie. À Québec, on attendait ces gens avec impatience. Les autorités avaient pour mandat royal de solidifier les assises de la colonie et de l’organiser de manière pérenne. À cette époque, on ne se doutait pas vraiment que c’était un pays qui était en train de naître. On pensait plutôt établir une colonie tournée vers les objectifs et les besoins de la métropole. L’effervescence n’en était pas moins grande. À Québec, tout était à faire.
On savait maintenant depuis plus d’un mois que le Saint-Jean arriverait à Québec en juin. Le Clerbault, qui était arrivé à la fin du mois de mai, portait des lettres qui détaillaient son arrivée. Les autorités avaient eu le temps de se préparer pour accueillir cet important arrivage.
Il faut dire qu’à cette époque, la colonie était particulièrement choyée par la qualité des personnes en situation d’autorité. On trouvait à Ville-Marie deux femmes hors normes qui marqueraient l’histoire : Jeanne Mance et Marguerite Bourgeois. Les filles qui s’en iraient à Ville-Marie seraient particulièrement bien encadrées. Québec n’était pas en reste. Au moment où le Saint-Jean accostait, on ne trouvait sur le quai, pour accueillir les voyageurs, rien de moins que le gouverneur de la colonie, le fougueux Daniel de Rémy de Courcelles, le remarquable et brillant intendant Jean Talon, de même que l’immense évêque François de Montmorency-Laval. La plus grande était peut-être la plus discrète, Marie de l’Incarnation. Celle-ci avait fait une entorse à sa réclusion habituelle pour l’occasion et elle avait fait le déplacement jusqu’aux quais malgré son âge très respectable.
Ces personnages, où les femmes sont extraordinairement bien représentées pour l’époque, seraient les architectes et les guides du grand bond en avant que connaîtrait la Nouvelle-France dans les prochaines années. Ils imprimeraient leur marque indélébile sur l’histoire, la culture et l’identité de la nation. Les fruits de leur œuvre se multiplieraient à travers les siècles.
La Nouvelle-France était en large partie construite par des femmes. Elle était aussi sous l’influence pressante et très déterminée de la religion catholique romaine. Les luttes de pouvoir et les guerres religieuses faisaient rage depuis plus d’un siècle dans toute l’Europe et il s’en était fallu d’un cheveu pour que le saint royaume de France bascule du côté des religions impies des réformistes. La catastrophe avait été évitée de très peu, pour des raisons qui avaient tout à voir avec la politique et rien avec la théologie.
Les autorités religieuses faisaient face à un danger mortel depuis l’avènement de l’imprimerie, le développement continu de la science et la circulation de plus en plus rapide des connaissances. Les philosophes, les savants et les artistes se liguaient avec de plus en plus d’assurance pour remettre en question les dogmes religieux. La situation était critique. Les autorités religieuses avaient compris que si elles voulaient maintenir leur pouvoir en Nouvelle-France, il fallait très vite installer une structure solide. Il fallait aussi s’empresser de convertir les Sauvages à la seule vraie religion. L’enjeu était à la fois divin et séculier. Il fallait agir rapidement et résolument pour assoir les bases du pouvoir et assurer sa permanence. La chance et le malheur de la colonie étaient que quelques personnes de génie comme François de Montmorency-Laval, Marguerite Bourgeois et Marie de l’Incarnation étaient présentes en Nouvelle-France. Leur détermination et leurs aptitudes exceptionnelles assureraient leur succès. Leur influence offrirait à la fois une structure salutaire à la colonie et une chape morale rigide et aliénante. Leur influence se ferait sentir pendant des siècles. Pour le meilleur et pour le pire, la religion catholique resterait très longtemps enchâssée au cœur de l’identité nationale. Du point de vue de la natalité, cette influence serait une bénédiction. Mais pour la condition humaine, particulièrement féminine, il s’agirait trop souvent d’une catastrophe.
Parmi les mille habitants de Québec, le clergé était extraordinairement surreprésenté. Près d’un adulte sur dix était dans l’industrie religieuse. Il y avait de nombreux prêtres. La ferveur religieuse était telle que le grand vicaire Montmorency-Laval s’apprêtait à ouvrir un Grand Séminaire pour former des prêtres canadiens. En plus des prêtres, la ville comptait une compagnie florissante de missionnaires de la Compagnie de Jésus. Les Jésuites étaient présents en Nouvelle-France presque depuis les débuts et ils œuvraient avec acharnement à l’évangélisation des peuples du territoire. Ils affrontaient les dangers et les tortures avec un héroïsme qui frisait le fanatisme. Québec était leur base d’opérations et leur lieu de ressourcement. Les Récollets étaient plus humbles et discrets que les Jésuites, mais ils étaient eux aussi bien présents dans la communauté. Ils parvenaient à exercer leur influence sur la population et à jouer un rôle dans la petite colonie.
Du côté féminin, on trouvait deux communautés déjà bien organisées. Il y avait les Ursulines qui étaient bien installées à Québec et qui travaillaient à convertir et à éduquer elles aussi les jeunes autochtones. Bien qu’elles vivaient en retrait de la société, elles trouvaient le moyen d’exercer leur influence. L’autre communauté était celle des Hospitalières. C’étaient des sœurs actives et pleinement engagées dans la vie de la colonie. Elles jouaient certes un rôle sur le plan religieux, mais une large part de leurs activités concernait les affaires séculières. Leur mission était d’abord et avant tout d’offrir de l’éducation et du réconfort matériel aux colons et aux peuples autochtones. Elles s’occupaient des corps avec autant d’énergie qu’elles s’occupaient des âmes. Les religieuses ursulines et hospitalières avaient convenu de se partager la responsabilité de l’encadrement et du logement des Filles du Roy. Le groupe serait partagé entre les deux communautés.
Il fallut deux bonnes heures aux nobles et aux dignitaires pour quitter leurs cabines et se retrouver à quai avec leurs bagages les plus essentiels. Quand leurs manœuvres furent ac...

Table des matières

  1. Avant-propos
  2. La Salpêtrière
  3. Dieppe
  4. La traversée de l’Atlantique
  5. Québec