5060
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L'hécatombe de la COVID-19 dans nos CHSLD

  1. 258 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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L'hécatombe de la COVID-19 dans nos CHSLD

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Table des matières
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À propos de ce livre

Cinq mille morts. C'est deux fois plus que le bilan du 11 Septembre. Pourtant, personne n'a encore songé à Québec à élever un monument à ces victimes.Pourquoi? Parce que ce furent souvent des morts abjectes? Des morts causées par la soif, par le manque de soins? Des morts qui se sont trop souvent déroulées dans la solitude, sans qu'une main amie vienne apaiser la peur, la souffrance, rappeler l'amour des proches? Et cela, dans un des pays les plus riches de la planète, au cœur d'une province qui se targue de posséder un des meilleurs systèmes de santé au monde?Trois femmes mènent enquête, car tout n'a pas encore été dit. Grâce à une centaine d'entrevues, elles font parler ceux qui étaient aux premières lignes, médecins, infirmières, préposés. Elles tentent de voir clair dans les mécanismes de gestion qui ont permis ce naufrage en interrogeant ministres, sous-ministres, directeurs de grands organes gouvernementaux, gestionnaires et propriétaires de CHSLD privés. Bien sûr, ceux-ci ne cesseront de clamer que la COVID-19 était un phénomène nouveau, comportant de nombreuses inconnues. Mais cela n'explique en rien pourquoi ce furent les aînés, pourtant hébergés dans des établissements de soins spécialisés, qui furent les premiers et les plus touchés.Enfin, les autrices donnent la parole aux survivants. À ceux qui ont perdu un père, une mère, un frère, une sœur. Car chacune de ces morts est unique. Et chacune doit servir à provoquer une révolution dans la façon dont le Québec s'occupe de ses aînés. Ce livre de Gabrielle Duchaine, Katia Gagnon et Ariane Lacoursière permet de mettre des visages sur les statistiques dont on nous a abreuvés au quotidien et qui ont fini par nous désensibiliser. Non, tout n'a pas été dit. Bien au contraire, tous les témoignages illustrent le drame qui a secoué le Québec durant la première vague de la pandémie. 0Ce livre donne aussi un sens au mot indignation. Un sentiment de colère quand la morale et la justice sont bafouées. Nous devrions tous être indignés. Extrait de la préface de Paul Arcand

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Informations

Année
2022
ISBN
9782764647134
Lucille Lecompte
Décédée le 8 avril 2020 au CHSLD Herron de Dorval
Par sa nièce, Francine Giguère
« Le souvenir, c’est la présence invisible », a écrit Victor Hugo.
Combien Lucille est présente, surtout depuis son départ, en avril 2020, à l’âge de quatre-vingt-dix-huit ans !
Vive et allumée, elle adorait le Scrabble et y excellait.
Voici les mots qu’elle nous inspire.
Amour. Lucille aimait. Elle aimait la vie. Elle aimait sa famille, elle aimait son « monde », y compris les préposées qui veillaient sur elle. Entre ses anges et elle, une estime et une reconnaissance mutuelles et maintes fois exprimées.
Bienveillance et générosité. Affectueuse et empathique, Lucille fut d’un soutien indéfectible, en particulier dans les moments importants ou difficiles de nos vies. Elle fut tout aussi présente et bienveillante pendant son bénévolat dans de nombreux organismes.
Modernité. Lucille a fait carrière chez Eaton au centre-ville de Montréal. Une visite à ses bureaux était une fête, décuplée quand elle nous emmenait au restaurant du neuvième étage ! Élégante, elle nous fascinait avec ses beaux vêtements et ses accessoires… Combien de femmes célibataires voyageaient en Europe, à Saint-Pétersbourg, en Égypte, dans les années 1960 ? Autonome et curieuse, Lucille nous a montré le chemin.
Son sourire, ses petites attentions, l’étincelle dans ses yeux, sa sérénité nous manquent. Merci, Lucille, d’avoir mis autant de beauté et d’amour dans nos vies.

CHAPITRE 1

Mourir abandonnés
L’odeur s’engouffre dans l’ascenseur dès l’ouverture des portes. Une odeur d’excréments et d’urine, mêlée à celle de la nourriture qui rancit. Devant Martine Daigneault, le couloir est sombre. Elle avance. Ses chaussures collent au plancher.
Le long d’un mur, Mme Daigneault remarque un chariot rempli de plateaux de déjeuner intouchés. Les rôties sont dures comme du carton. Plus loin, elle découvre des plateaux de dîner dont les couvercles n’ont même pas été retirés.
Il est passé 18 h, mais elle se rend à l’évidence : les aînés qu’elle s’apprête à secourir n’ont pas mangé de la journée.
Nous sommes au CHSLD Herron, le 29 mars 2020. Martine Daigneault, alors directrice adjointe au soutien à l’autonomie des personnes âgées au CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal et infirmière de formation, vient d’y mettre les pieds pour la première fois de sa vie1.
Martine Daigneault est une des toutes premières personnes à être allées en renfort dans cet établissement privé, devenu à la mi-avril 2020 le symbole de la crise des CHSLD pendant la première vague de la pandémie. Depuis des semaines, le gouvernement se prépare à affronter la tempête de la COVID-19. Pour protéger les milieux de vie des aînés, il a interdit les visites. Mais toute l’attention gouvernementale est encore tournée vers les hôpitaux, où on s’emploie à libérer des lits en envoyant des patients âgés… vers les CHSLD. La transmission du virus par des malades asymptomatiques est encore dans l’angle mort : le masque d’intervention, ce fameux masque bleu aussi appelé masque chirurgical, n’est toujours pas obligatoire en tout temps dans les établissements pour aînés.
Personne au Québec n’a encore pris conscience du drame silencieux qui est déjà en train de se nouer dans plusieurs CHSLD. Personne n’a encore pris la mesure de la terrible pénurie de personnel qui s’apprête à s’abattre sur ces milieux.
Mais à Herron, tout cela est déjà très concret.
Martine Daigneault s’attelle à donner le souper à des pensionnaires. Elle s’assoit devant un premier résident. Elle ne trouve aucun plan de soins. Impossible de savoir s’il peut manger de la nourriture en morceaux sans s’étouffer. Dans les plateaux, le pâté chinois est tellement froid qu’il est difficile d’en prendre avec une fourchette. Mais ça ne fait rien : les bénéficiaires n’ont pas faim. Ils ont soif, découvre-t-elle bientôt.
Ils ont la peau, la bouche et les lèvres complètement desséchées.
« J’ai vu des résidents boire deux, trois verres d’eau et nous embrasser les mains par-dessus les gants pour nous remercier, dit-elle. Ils ont soif, et pas juste depuis aujourd’hui. »
Dans une chambre, un homme âgé est assis sur son lit. Il est « tout bien habillé », en chemise et en pantalon de sortie. Sous lui, un cerne d’urine est devenu noir tellement cet homme s’y trouve depuis longtemps. Son pantalon est souillé. Le matelas est fissuré et imbibé d’urine.
L’infirmière déshabille l’homme. Elle le lave. Elle le change.
Pour le matelas, il n’y a rien à faire.
Elle bute sur le même problème dans les chambres suivantes. Elle trouve de la poudre pour assécher les matelas. « La majorité des résidents n’avaient pas de savon. Pour la plupart, ils étaient pleins d’urine et de selles. Il y avait de la pâte d’Ihle en quantité trop épaisse [sur leurs parties génitales]. Quand on essayait d’enlever ça, on risquait d’enlever de la peau. C’était brûlé. »
Des mois après sa visite, Martine Daigneault se souviendra de chaque petit détail de cette soirée-là. « Je n’ai jamais vu de résidents dans un [tel] état. J’étais sous le choc. »
Trois heures plus tôt, sa collègue Nadine Larente, médecin et, à l’époque, directrice des services professionnels au CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal, a reçu un texto sans équivoque. Elle était alors en pleine réunion quotidienne de la cellule des mesures d’urgence du CIUSSS, mise sur pied au début de la pandémie2.
« SOS », disait le message.
Celle qui a tapé ces trois lettres, c’est la Dre Orly Hermon, médecin traitante au CHSLD Herron. « Elle m’explique que la situation est très difficile avec l’éclosion, que le personnel a déserté. »
Nadine Larente alerte ses collègues présents à la réunion. Le directeur des ressources humaines est déjà au courant. On cherche des renforts, dit-il. Voilà plus de deux jours que les dirigeants du CHSLD de Dorval appellent à l’aide. La Dre Larente décide de se rendre sur place. L’heure du souper approche. Elle pourra donner un coup de main, se dit-elle.
Martine Daigneault assiste elle aussi à la réunion. Elle saute dans sa voiture et pianote l’adresse de l’établissement de Dorval dans son GPS. Elle n’a aucune idée de l’ampleur de la crise qu’elle s’apprête à découvrir.
À son arrivée, l’édifice semble désert. Elle est accueillie par une des propriétaires, Samantha Chowieri, et par son mari. Ils sont désemparés. Ils la dirigent au deuxième étage. Là se trouve l’unité prothétique, réservée aux résidents atteints d’Alzheimer ou de démence. Une soixantaine d’aînés y sont complètement laissés à eux-mêmes. Ce soir-là, Mme Daigneault ne croisera qu’une seule préposée aux bénéficiaires à l’étage. Une infirmière dénichée à la dernière minute grâce au site « Je contribue », créé par Québec pour combler le manque de bras, viendra elle aussi en renfort.
Ensemble, les deux femmes font une première tournée pour donner non seulement à manger mais surtout à boire aux résidents. Puis, elles refont le tour pour les remettre au lit. Leurs constats sont accablants. « Je n’ai jamais vu des lits comme ça. » Il n’y a qu’une dizaine de draps pour tout le centre. Il n’y a même pas trente débarbouillettes. « On a utilisé du papier brun. Nettoyer des gens avec du papier brun, je vais vous dire… »
Les gens ont les ongles longs et sales, les cheveux gras. Martine Daigneault découvre des pansements secs sur des plaies qui ont suinté, des croûtes sur les jambes et dans les cheveux des aînés.
Un étage plus bas, le manque de bras est tel que la Dre Larente appelle en renfort son mari et ses trois enfants de treize, quinze et dix-sept ans. Ils arrivent en moins de deux. Elle leur explique comment se protéger, préparer les plateaux de repas et les apporter aux chambres. Puis ils distribuent des repas et hydratent les résidents. Au rez-de-chaussée, la clientèle est moins lourde. Les gens sont plus al...

Table des matières

  1. Page couverture
  2. Les Éditions du Boréal
  3. Faux-titre
  4. Titre
  5. Crédits
  6. Dédicace
  7. Préface
  8. Liste des principaux sigles
  9. Lucille Lecompte
  10. CHAPITRE 1 - Mourir abandonnés
  11. Georgette Laramée-Boulet
  12. CHAPITRE 2 - Les conditions perdantes
  13. Eddy Beauvillier
  14. CHAPITRE 3 - La cage à homards
  15. Gilles Béliveau
  16. CHAPITRE 4 - Les canaris dans la mine
  17. Hilda Zlataroff
  18. CHAPITRE 5 - Crise de confiance
  19. Lydia Gordon
  20. CHAPITRE 6 - Au coeur du pire
  21. Claire Vincent
  22. CHAPITRE 7 - L'armée a la rescousse
  23. Michel Jutras
  24. CHAPITRE 8 - La guerre des masques
  25. Albany Paul
  26. CHAPITRE 9 - Les petits Legault
  27. Doris et Frank Peres
  28. CHAPITRE 10 - Héros de l'ombre
  29. Anna José Maquet
  30. CHAPITRE 11 - La grande révolution
  31. Marguerite Lescop
  32. Chronologie
  33. Crédits et remerciements
  34. Fin
  35. Quatrième de couverture