Quels que soient les domaines oĂč lâon porte le regard, trĂšs objectivement, rien ne marche ! Les gens simples sont rongĂ©s par la peur du chĂŽmage, les plus aisĂ©s sont matraquĂ©s dâimpĂŽt, et beaucoup sâexilent. La population dans son ensemble a perdu confiance dans ce quâon lui raconte. Sur quarante ans, les mesures du PIB par tĂȘte montrent une chute effarante de notre pays dans les classements. Nos dirigeants sâingĂ©nient Ă faire des procĂšs dâintention Ă tous ceux qui disent des vĂ©ritĂ©s dĂ©sagrĂ©ables. On passe le temps Ă inventer des boucs Ă©missaires. On joue avec les mots, on tord les statistiques, on rĂ©flĂ©chit Ă court terme et on refuse de regarder les choses en face ! Pour reconstruire, il faut pourtant apprendre Ă ĂȘtre factuel et humble devant les faits.
Quand le CAC vote avec ses pieds
2 JUIN 2016
Ces joyaux qui quittent le territoire, câest le signe dâun malaise qui ne semble pas gĂȘner notre gouvernement, alors que son devoir serait de tirer tout de suite lâaffaire au clair.
Le siĂšge de Technip vient de partir Ă Londres⊠AprĂšs Lafarge, Alcatel-Lucent et Alstom, ça fait quatre groupes qui sâĂ©loignent de leur pays, soit 10 % du CAC 40 en deux ans. On dit : « Pas grave, on ne voit pas les emplois partir ! » ; câest une vision Ă trĂšs court terme. Un siĂšge qui part, câest dâabord un centre de dĂ©cision qui quitte le pays ; ça change fondamentalement lâallocation des investissements futurs et donc la localisation des nouveaux emplois sur le long terme. Câest ensuite un signal solennel lancĂ© au pays, comme Ă une entreprise qui perd coup sur coup de trĂšs gros clients. Elle sait alors quâelle nâest plus compĂ©titive et doit revoir son « business model ». Tout aussi grave, enfin, les discours sur lâattractivitĂ© sont dĂ©truits quand les entreprises qui sont nĂ©es ici votent ainsi avec leurs pieds. Pour saisir lâampleur du sujet, rapprochons quelques chiffres : 2 000 milliards, câest Ă peu prĂšs la capitalisation cumulĂ©e du CAC 40 et du SBF 120, câest aussi le PIB de la France et sa dette. La valeur crĂ©Ă©e par les entreprises depuis quarante ans est annulĂ©e par la dette accumulĂ©e par lâĂtat. Autre angle de rĂ©flexion, la valeur dâune affaire du CAC 40, câest Ă peu prĂšs le PIB de deux dĂ©partements français. Que dirions-nous si huit dĂ©partements avaient quittĂ© le territoire depuis deux ans ? Le mal est profond : on ne le rĂ©glera pas uniquement par une liste de rĂ©formes mais par un changement de paradigme. Le dĂ©sĂ©quilibre financier de la sphĂšre publique est, par sa masse, de nature Ă dĂ©truire lâĂ©conomie du pays tout entier. Il faut impĂ©rativement repenser la construction de la sphĂšre publique ; lâentreprise est devenue beaucoup plus centrale quâon le croyait Ă lâĂ©poque oĂč on nous expliquait que la dĂ©pense publique Ă©tait le secret de la croissance. Il faut remettre lâentreprise au centre de lâĂ©conomie. Les pays qui connaĂźtront la prospĂ©ritĂ© dans le futur seront ceux oĂč les entreprises se sentiront bien, et oĂč lâĂtat reviendra Ă ses prĂ©rogatives essentielles : le positionnement du pays dans le monde et la dĂ©fense de la libertĂ© Ă lâintĂ©rieur.
Lâactionnaire français, espĂšce menacĂ©e
7 MAI 2015
On nâamĂ©liorera pas le chĂŽmage en mettant Ă genoux les Ă©pargnants par une fiscalitĂ© du capital confiscatoire.
Tout le monde se plaint de la complexitĂ© du droit du travail, eh bien, il y a pire en France ! LâAnsa (Association nationale des sociĂ©tĂ©s par actions) vient dâĂ©tudier lâĂ©volution sur vingt-cinq ans des prĂ©lĂšvements fiscaux et sociaux sur le capital mobilier (les actions). La complexitĂ© du calcul des impĂŽts dans ce domaine atteint des proportions inimaginables, au point quâon trouve des cas oĂč les taxes peuvent ĂȘtre, fait unique au monde, plus Ă©levĂ©es que les revenus !
Le diagnostic, lui, est simple et sans appel : la charge globale a doublĂ© sur vingt-cinq ans et se situe 100 % au-dessus de la moyenne de lâOCDE. Pour tout arranger, nous sommes les seuls Ă avoir gardĂ© et augmentĂ© lâISF quand tous les autres pays lâont supprimĂ©. La rĂ©action de cette furie fiscale ne se fait pas attendre ; les recettes dans des domaines oĂč on a le plus tapĂ© ont Ă©tĂ© beaucoup plus basses que prĂ©vu (- 46,8 % en 2013 dans le cas des plus-values). Tout aussi grave, on constate une division par deux du nombre des actionnaires individuels de nos sociĂ©tĂ©s cotĂ©es (on parle de 4 millions de personnes, ce nâest pas une paille). Il nâest pas surprenant de voir des merveilles comme Lafarge et Alcatel se faire cravater tous les six mois. Que va-t-il se passer Ă lâheure des successions de nos fleurons familiaux, Dassault, Bouygues et autres ?
On ne peut dissocier la marche de lâĂ©conomie de la fiscalitĂ© de lâentrepreneur et de lâinvestisseur, qui portent le risque de lâinvestissement ; activitĂ© et capital sont liĂ©s comme la coque et le grĂ©ement dâun voilier ou comme le corps et le mental dâun grand sportif. Quand, par une fiscalitĂ© excessive, on empĂȘche le capital de grandir, câest lâactivitĂ© qui trinque ; on est le seul pays Ă ne pas lâavoir encore compris. Pas la peine dâaller chercher beaucoup plus loin pourquoi lâĂ©conomie ne redĂ©marre pas en France, alors que lâenvironnement mondial sâest amĂ©liorĂ©.
Retenir les entrepreneurs
21 MARS 2013
Les entrepreneurs sont une minoritĂ© prĂ©cieuse pour le pays. Si on ne les protĂšge pas, ils se feront laminer fiscalement, ils partiront ou arrĂȘteront dâentreprendre. On entrera alors dans une spirale infernale.
Deux signaux forts la semaine derniĂšre : les 100 000 emplois dĂ©truits par lâĂ©conomie française en 2012 et le message dĂ©livrĂ© par Bernard CharlĂšs, patron de Dassault SystĂšmes, sur les dangers que fait courir aux entreprises une fiscalitĂ© qui leur est de plus en plus dĂ©favorable⊠Deux articles de la loi de Finances ont en effet suffi pour priver les entrepreneurs des moyens et, pis, de lâenvie dâinvestir : le rĂ©tablissement de lâISF et le quasi-doublement des taux dâimpĂŽt sur les plus-values. Ceux qui par leur travail ont construit leur patrimoine partent ou pensent Ă partir ; les jeunes entrepreneurs cherchent un pays plus favorable Ă lâexercice de leur Ă©nergie et au dĂ©veloppement de leurs talents ; les Ă©trangers, quant Ă eux, ne voient plus lâintĂ©rĂȘt dâinvestir dans un pays oĂč la rĂ©ussite dâun pari Ă©conomique est taxĂ©e Ă ce point. En maltraitant lâinvestissement privĂ© et en crĂ©ant toutes ces incertitudes dans une Ă©conomie entiĂšrement mondialisĂ©e, faut-il sâĂ©tonner que la croissance française dĂ©gringole avec toutes les consĂ©quences que lâon voit sur lâemploi ? Taxation de la plus-value et ISF : deux suggestions pour remettre les Ă©nergies entrepreneuriales en marche. La premiĂšre : rĂ©compenser la fidĂ©litĂ©. On rĂ©duirait fortement la taxation de la plus-value en fonction de la durĂ©e de dĂ©tention du capital, par exemple â 40 % pour quatre ans et â 80 % pour huit ans ou plus. La France deviendrait un des pays au monde qui encouragent le plus lâinvestissement Ă long terme. La deuxiĂšme serait de retirer de lâISF tout investissement mis en risque concurrentiel, quitte Ă le rĂ©tablir sur les Ćuvres dâart ; tout le monde comprendra que lâon lutte mieux contre le chĂŽmage en investissant dans une machine plutĂŽt que dans un tableau, fĂ»t-il moderne. Le coĂ»t direct de ces mesures sera trĂšs infĂ©rieur Ă celui des milliers de ronds-points qui continuent Ă se construire tous les ans dans nos rĂ©gions et, surtout, des centaines de milliers dâentrepreneurs se remettront en marche.
DĂ©shumanisation
26 MARS 2015
Les fonctionnaires doivent se considĂ©rer au service des citoyens et pas de lâĂtat, câest le meilleur moyen de lutter contre le flĂ©au de la dĂ©shumanisation.
« La caisse [âŠ] dont le siĂšge est Ă Paris [âŠ] agissant pour son directeur [âŠ] me transmet une contrainte dĂ©cernĂ©e Ă votre encontre pour avoir paiement de la somme de X et concernant la pĂ©riode du 1er janvier au 12 dĂ©cembre 2010. Ă dĂ©faut de la rĂ©gler, vous mâaurez mis dans lâobligation de poursuivre le recouvrement forcĂ© Ă votre encontre, ce qui aura pour effet dâaugmenter votre dette. Aucune contestation ne sera prise en compte par tĂ©lĂ©phone, chĂšques Ă lâordre de X. Recevez lâassurance de mes salutations distinguĂ©es. »
Tout entrepreneur, petit ou grand, connaĂźt ce genre de courrier. Cette dĂ©shumanisation du travail du fonctionnaire, Jacques Rueff la condamnait dĂ©jĂ dans son rapport de 1958 : « Dans lâorganisation administrative française, lâagent du service public a en gĂ©nĂ©ral une situation anonyme vis-Ă -vis de lâusager. Celui-ci a trop souvent lâimpression de se trouver en face dâun interlocuteur abstrait qui comprend mal ses prĂ©occupations et sur lequel il sera le cas Ă©chĂ©ant sans moyen dâaction. »
Avec la grĂšve contre le RSI et le contenu ubuesque de certains courriers, on a la preuve que la dĂ©shumanisation sâaccĂ©lĂšre sous nos yeux, alors quâau mĂȘme moment on nâentend dans la bouche de notre gouvernement que des discours de justice, de gĂ©nĂ©rositĂ© et de solidaritĂ©. Dans les faits, les 6 millions de personnes concernĂ©es par le RSI ont de quoi ĂȘtre inquiĂštes et indignĂ©es. Les agents publics doivent, comme ils le font partout ailleurs dans le monde, ĂȘtre au contact des citoyens, Ă la maniĂšre des commerciaux des entreprises. Rappelons que lâĂtat et lâadministration sont respectivement au service de la nation et des citoyens, et que ceux qui les financent par lâimpĂŽt mĂ©ritent un minimum de respect.
Comment endiguer la fuite des talents ?
12 DĂCEMBRE 2013
Yvon Gattaz le dit trĂšs justement : « On exporte des bac + 6 et on importe des bac â 6. » Le gouvernement doit sâattaquer aux causes de cette saignĂ©e⊠sauf Ă ce que notre pays devienne une Ă©quipe de foot qui perd tous ses avants.
La fĂ©brilitĂ© des dĂ©putĂ©s pour durcir lâexit tax est le signe que lâexil sâaccĂ©lĂšre. Il y a six semaines, on apprenait quâil y avait eu en 2011 35 000 dĂ©parts, en croissance de 65 % sur 2010. En discutant avec les commerçants, en observant les camions de dĂ©mĂ©nagement belges dans nos rues, on se doute que le mouvement sâamplifie. On sait que le nombre de Français a explosĂ© en Angleterre et Ă Singapour, on dĂ©couvre des hypothĂšses folles sur 2012 et 2013 dans certains journaux ; Bercy doit donner les estimations 2013 pour couper court aux rumeurs et parce que le Parlement ne peut pas travailler sans disposer des bons chiffres. Fait nouveau, le dĂ©part de jeunes diplĂŽmĂ©s Ă la recherche dâun meilleur environnement pour entreprendre ; ils seraient 25 000. On a beau dire que ça a toujours existĂ©, cette perte de capital humain et financier est terrifiante : chaque diplĂŽmĂ© dâĂ©tudes supĂ©rieures ayant reçu du pays (frais de santĂ© compris) une somme tournant autour de 200 000 euros depuis sa naissance, ce sont, Ă ce rythme, 5 milliards dâeuros qui sâenvolent sur une annĂ©e.
Pensons aussi aux vieux qui partent Ă cause de lâISF, qui a trente ans aujourdâhui ; les flux annuels avant 2011 tournaient autour de 750 foyers par an, Ă 12 millions par foyer, ce sont 10 milliards par an dont les propriĂ©taires quittent la France, 300 milliards sur trente ans ! Fourchette basse quand on sait, le journal Le Temps lâa rĂ©vĂ©lĂ©, quâun seul canton suisse abrite plus de 50 milliards de fortune originellement française. Grave responsabilitĂ© dâavoir crĂ©Ă© une situation fiscale poussant ces Français disposant de moyens, formĂ©s et entreprenants, Ă partir Ă un moment oĂč on a tant besoin dâeux. Câest de lâintĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral du pays dâavoir les vrais chiffres sur lâexil. Il faut cerner lâampleur des dĂ©gĂąts et trouver un moyen plus efficace pour les rĂ©parer que de durcir lâexit tax⊠comme remettre notre fiscalitĂ© dans la moyenne europĂ©enne ?
Coup de semonce
20 JUIN 2013
Il faut surveiller comme le lait sur le feu le montant des investissements internationaux en France ; câest le meilleur signe de notre attractivitĂ©. 2012 marque une cassure, une alerte de plus !
7 h 30. Je reçois sur mon mail le refus de financer une start-up montĂ©e par des jeunes : « Messieurs, nous avons cessĂ© dâinvestir en France. Vous pouvez remercier votre gouvernement pour avoir fait de la France un territoire oĂč il est impossible dâinvestir. JâespĂšre que vous nous prouverez que nous avons tort et que vous rencontrerez un grand succĂšs ! »
8 h 30. Nouvel Ă©lectrochoc : lâĂ©tude dâErnst & Young sur les investissements de lâĂ©tranger dans notre pays en 2012. Les rapports sur lâattractivitĂ© nous ont endormis, mettant en avant lâexcellence de nos infrastructures, notre productivitĂ© et notre qualitĂ© de vie. Les chiffres 2012 font mal. La part de lâEurope dans les investissements mondiaux chute : Ă lâintĂ©rieur de lâEurope, celle de la France sâeffondre. Nous rĂ©trogradons Ă la troisiĂšme place, dĂ©passĂ©s par lâAllemagne, qui attirait deux fois moins de projets que nous il y a dix ans et qui en attire aujourdâhui 50 % de plus. Les projets industriels croissent de 50 % dans les pays de lâEst, sont stables en Angleterre, mais ils dĂ©croissent de 30 % dans les autres pays mĂ»rs. Concernant les projets de recherche et dĂ©veloppement, lâAngleterre et lâAllemagne nous distancent largement.
Pourquoi se dĂ©tourne-t-on de nous ? Les raisons sont bien connues : fiscalitĂ© confiscatoire et imprĂ©visible, rigiditĂ© du marchĂ© du travail. Mais il y a du nouveau, le sentiment que cela ne va pas sâamĂ©liorer, que la France est un pays business unfriendly et antimondialisation....