Des baleines, des bactéries et des hommes
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Des baleines, des bactéries et des hommes

  1. 336 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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Des baleines, des bactéries et des hommes

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À propos de ce livre

Déforestation, pollution, édification de digues, autant de violences que l'homme inflige à la nature au risque de briser les écosystèmes les plus précieux. Peut-il raisonnablement penser se développer au détriment du monde vivant? Ne vaut-il pas mieux instaurer un autre rapport à la nature, fait de respect pour le vivant? Ce livre explore cette profusion de vie dont nous sommes l'une des composantes et sans doute l'un des pivots. Robert Barbault dirige le laboratoire d'écologie de l'École normale supérieure et le programme national sur la biodiversité.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
1994
ISBN
9782738158680

QUATRIÈME PARTIE

Dernier défi pour l’espèce élue



En dernière analyse, même si nous apprenons à gérer les divers aspects de l’environnement planétaire, même si la population se stabilise, même si, un jour, les crises de l’environnement devaient devenir de l’histoire ancienne, même si la plupart des déchets devaient disparaître, même si les cycles globaux devaient recouvrer des régimes contrôlables, alors la meilleure évaluation de notre gestion de l’environnement sera donnée par la proportion de la diversité biologique qui aura survécu.
Thomas Lovejoy, 1989.

CHAPITRE 9

Histoire d’une invasion biologique majeure


Dieu bénit Noé et ses fils, et leur dit : fructifiez et multipliez-vous, et remplissez la terre. Vous serez un objet de crainte et d’effroi pour toutes les bêtes sauvages, pour tous les oiseaux du ciel, pour tout ce qui rampe sur le sol, et pour tous les poissons de la mer : entre vos mains, ils sont livrés. Tout ce qui se meut et qui vit vous servira de nourriture : de même que la verdure des plantes, je vous donne tout.
Genèse 9, 1-4.
Les premiers hommes seraient apparus il y a trois millions d’années aux confins de l’Éthiopie, de la Tanzanie et du Kenya. À cette époque, la nature était vierge. Nous aussi... enfin, je veux dire que nous en étions, de cette nature ; une composante négligeable et modeste, certes, mais dedans. Et cela est toujours vrai, sauf pour le négligeable et pour la modestie ! Qu’il en a fait du chemin, ce primate africain ! Qu’il lui en a fallu, de force, de courage, d’ingéniosité, d’intelligence, de chance – mais aussi de sens collectif – pour se faire une place au soleil dans une nature aussi belle qu’implacable ! Et le voilà aujourd’hui, avec ses cinq milliards de descendants, à peu près partout répandus à la surface de la Terre, parcourant les océans, explorant ses profondeurs et sondant les plus lointains mystères de l’univers, à la recherche de son origine, de sa raison d’être. Quelle diversité de cultures, de langues ; quel prodigieux succès ! Mais quels déchirements aussi : que de conflits stupides ; que de gâchis, passés, présents et à venir !
Ainsi peut-on presque dire que l’homme est né dans ce qui est aujourd’hui l’un des symboles de la nature sauvage, cet espace de forêts et de savanes qui constitue le parc du Serengeti, en Tanzanie. L’image « chromo » des hordes de gnous et de buffles, des troupeaux d’antilopes, de zèbres, d’éléphants, des lions tapis ou repus. Et pourtant l’homme y a depuis tout temps exercé ses effets. Quelle leçon ! L’homme est un produit de l’évolution, un être appartenant à ce que l’on appelle la nature, une espèce parmi plusieurs milliards d’autres1. Une espèce exceptionnelle tout de même par l’émergence culturelle et spirituelle qu’elle a surajoutée à la prodigieuse diversité du vivant. C’est une nouvelle composante de la diversité biologique que nous observons avec cette espèce et il appartient aux spécialistes des sciences humaines de nous en compter les facettes et les modalités.
Ici, il nous revient d’insister sur d’autres aspects : par ses nécessités écologiques et son expansion démographique d’abord, par ses succès scientifiques, économiques et techniques ensuite, notre espèce est devenue un des agents majeurs de la dynamique de la biosphère ; par son impact croissant sur les écosystèmes et les autres composants de la biosphère – air, eau, sol, plantes, animaux, climat –, l’homme est devenu pleinement responsable de son propre destin et de la planète tout entière.

L’homme envahisseur

L’évolution des hominidés dans sa phase initiale, la plus décisive pour l’élaboration de notre espèce, est une histoire africaine. Cela semble définitivement acquis. Beaucoup de caractéristiques des hominidés résultent de la dynamique écologique du milieu africain – des savanes. Cette phase de l’évolution des hommes, dans ce contexte écologique, a permis la colonisation par notre espèce de tous les milieux terrestres de la planète, de tous les continents.
Les modalités de cette colonisation planétaire sont encore discutées. Il n’y a aucune trace de créature humaine en dehors des régions orientales et méridionales de l’Afrique sud-saharienne avant 1,5 million d’années. C’est vers 1 million d’années que des êtres de l’espèce Homo erectus auraient commencé d’essaimer à partir de l’Afrique. La chronologie probable des étapes ultérieures de cette conquête du monde et les voies empruntées sont reproduites sur les cartes de la figure 37.
Mais, au-delà des imprécisions sur les dates, finalement secondaires, l’incertitude majeure qui divise les paléoanthropologues porte sur les relations de parenté exactes entre ces diverses populations de primates humains et l’Homo sapiens – vous et moi.
En d’autres termes, les descendants des envahisseurs africains – les néandertaliens en Europe, l’homme de Pékin en Chine, l’homme de Java en Indonésie – étaient-ils nos ancêtres ou de simples cousins représentant des branches aujourd’hui éteintes de notre arbre généalogique ?
L’analyse moléculaire de la biodiversité des populations humaines actuelles a conduit des auteurs comme Allan Wilson et Rebecca Cann ou Luigi Cavalli-Sforza2 à défendre l’idée que les ancêtres des hommes actuels, de tous les hommes actuels, vivaient en Afrique il y a seulement 200 000 ans, et qu’ils ont supplanté les autres espèces d’hommes plus primitives partout ailleurs dans le monde.
Pour déterminer l’histoire des populations humaines à partir de leur arbre généalogique, on admet que la différence génétique entre deux populations est d’autant plus grande que leur divergence est ancienne (en supposant que toutes les autres forces évolutives sont égales par ailleurs).
L’arbre des apparentements entre les populations humaines est analogue à celui des relations entre les langues parlées dans le monde. Tous deux indiquent une série de migrations à partir d’un berceau qui, selon les analyses génétiques, était probablement africain : « Ainsi les gènes, les populations et les langues semblent avoir simultanément divergé au cours de migrations qui, probablement à partir de l’Afrique, auraient gagné l’Asie, puis l’Europe, le Nouveau Monde et le Pacifique », écrit L. Cavalli-Sforza.
 Reconstitution de l’expansion : (a) des premiers hominidés depuis l’Afrique, avec les routes vraisemblablement adoptées et la datation en millions d’années (en haut) ; (b) des premiers hommes « modernes » à partir d’ancêtres africains (aire à gros points noirs) vers l’Europe et le Moyen-Orient (néandertaliens, en pointillé) et l’Extrême-Orient (hachuré), avec des dates en milliers d’années. (D’après R. Foley,  © Longman Group, 1987.)
Figure 37 : Reconstitution de l’expansion :
(a) des premiers hominidés depuis l’Afrique, avec les routes vraisemblablement adoptées et la datation en millions d’années (en haut) ;
(b) des premiers hommes « modernes » à partir d’ancêtres africains (aire à gros points noirs) vers l’Europe et le Moyen-Orient (néandertaliens, en pointillé) et l’Extrême-Orient (hachuré), avec des dates en milliers d’années. (D’après R. Foley, Another Unique Species, © Longman Group, 1987.)
Le premier résultat de l’analyse génétique conduite par cet auteur et ses collègues confirme l’étude des fossiles et des vestiges culturels humains : l’Afrique fut le berceau de l’espèce humaine. En effet, les distances génétiques entre les Africains et les non-Africains sont les plus grandes de toutes, ce qui se comprend si la divergence africaine a été la première et la plus ancienne. La distance génétique entre les Africains et les non-Africains est environ le double de la distance entre les Australiens et les Asiatiques, qui est elle-même plus de deux fois supérieure à la distance entre les Européens et les Asiatiques. Les paléoanthropologues ont déterminé des dates de séparation de ces diverses populations qui sont proportionnelles aux distances génétiques : les Asiatiques se sont séparés des Africains il y a 100 000 ans, les Australiens des Asiatiques il y a 50 000 ans, et les Européens des Asiatiques il y a entre 35 000 et 40 000 ans.
Allan Wilson et ses collègues de l’université de Berkeley avaient étudié la même question à partir de l’ADN mitochondrial – gènes transmis exclusivement par la mère. L’arbre mitochondrial établi à Berkeley présente une plus grande différenciation en Afrique que partout ailleurs : par conséquent, ce serait en Afrique que l’ADN mitochondrial humain aurait évolué le plus longtemps (l’équipe de Allan Wilson suppose que les mutations des gènes mitochondriaux se produisent à des fréquences constantes au cours du temps). En comparant l’ADN mitochondrial humain à celui du chimpanzé, les généticiens ont daté la racine de cet arbre, puis estimé la date de divergence des divers embranchements ; en outre, ils ont estimé que l’ancêtre africain avait vécu il y a 150 000 à 200 000 ans, ce qui confirmerait les résultats de Cavalli-Sforza par une approche très différente.
Certaines de ces conclusions sont controversées. Si les paléoanthropologues s’accordent sur l’origine africaine du genre Homo, il y a 2,5 millions d’années, et si les fossiles découverts montrent que l’Homo sapiens, à l’anatomie semblable à la nôtre, est apparu en Afrique il y a 100 000 ans environ, tous les spécialistes ne sont pas d’accord sur la théorie d’un exode à partir de l’Afrique. Des anthropologues comme Alan Thorne et Milford Wolpoff3 rétorquent que les hommes modernes ont évolué progressivement à partir d’ancêtres archaïques répartis dans tout l’Ancien Monde : c’est l’hypothèse d’une origine multirégionale de l’homme actuel.
Sans prendre parti dans cette polémique, il reste certain que les études de génétique des populations donnent de précieuses informations sur l’histoire des migrations successives et sur l’origine des populations actuelles, en complément des sources paléontologiques et paléoécologiques. Celles-ci permettent en outre de reconstituer les conditions écologiques et font apparaître que les migrations auraient résulté de changements de l’environnement, que ce soit dans le sens d’un accroissement des contraintes ou au contraire dans celui d’un relâchement de ces dernières.
Ainsi que nous l’explique Yves Coppens4, les milieux qu’ont connus les hominidés successifs de l’est de l’Afrique étaient changeants, avec une tendance générale à évoluer de l’humide au moins humide entrecoupée de brusques dégradations : « La savane boisée du sud de l’Éthiopie, par exemple, s’éclaircit de manière sensible vers 3 millions d’années et de manière tout à fait impressionnante vers 2 200 000 ans, au point de ressembler alors à une véritable steppe. Dans cet exemple précis, documenté par l’étude de la faune, de la flore et du sédiment, on constate une évidente corrélation entre l’assèchement, l’apparition d’Australopithecus boisei et le développement d’Homo habilis : tout a l’air de se passer comme si le changement climatique entraînant un changement de paysage jouait un rôle, peut-être le rôle essentiel, dans la sélection de ces deux hominidés en un milieu découvert évidemment dangereux, où ils étaient très vulnérables, Australopithecus boisei protégé par sa taille, Homo habilis aidé par le développement de son système nerveux central, Australopithecus boisei adapté à un régime alimentaire végétarien fibreux et coriace, Homo habilis à un régime omnivore opportuniste. » Puis, en étendant ce raisonnement dans le temps et dans l’espace, Yves Coppens se demande si de tels changements climatiques, couplés à l’effondrement de la Rift Valley, ne pourraient pas être à l’origine de la séparation entre nous et nos cousins, gorilles et chimpanzés, dès le Miocène supérieur : « La conjuration de la grande cassure et du changement climatique aurait peu à peu contraint les =’ orientaux =, (ancêtres des australopithèques et des hommes) à s’adapter à un environnement de plus en plus sec et déboisé, tandis que gorilles et chimpanzés représenteraient les descendants de ceux de nos ancêtres demeurés en milieu forestier humide. » Si cela n’est qu’une hypothèse intéressante, ce qui ne fait pas de doute en revanche, selon Yves Coppens, c’est le rapport entre le développement d’Homo et l’aridification des années - 2 200 000.
Ainsi, au cours de son histoire, l’espèce humaine a connu les aléas de tout être biologique. Il lui a fallu s’adapter aux changements de climat et de paysage, se défendre, se nourrir, migrer et si cela a dû se faire aux dépens de quelques espèces, cela a pu profiter aussi à beaucoup d’autres – et c’est encore de pleine actualité.
Je ne puis que renvoyer le lecteur intéressé par les aventures écologiques et sociales de nos lointains ancêtres, pithécanthropes, Homo faber et autres, au délicieux essai paléoanthropologique de Roy Lewis, Pourquoi j’ai mangé mon père. Je ne résisterai pas, pour mettre l’eau à la bouche du lecteur, au plaisir de reprendre la première page de ce véritable roman policier préhistorique5 :
« À présent nous étions sûrs de nous en tirer. Oui, même si elle descendait encore plus au sud, cette grande calotte de glace, serait-ce jusqu’en Afrique. Et quand la bourrasque soufflait du nord, nous empilions tout ce que nous avions de broussaille et de troncs brisés, et flambe le bûcher ! Il en ronflait et rugissait. La grande affaire, c’était de se fournir en combustible. Une bonne arête de silex vous taillera en travers une branche de cèdre de quatre p...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Du même auteur
  4. Copyright
  5. Avant-propos
  6. PREMIÈRE PARTIE - Un rêve polythéiste
  7. DEUXIÈME PARTIE - Les stratégies du vivant
  8. TROISIÈME PARTIE - Guerre et paix dans la nature
  9. QUATRIÈME PARTIE - Dernier défi pour l’espèce élue
  10. Glossaire
  11. Bibliographie sélective
  12. Table