Lectures bibliques
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À propos de ce livre

« La Bible a Ă©tĂ© mon premier texte. Sa langue est ma langue. Elle m'a nourri et plus tard elle a nourri toute mon Ɠuvre. Je donne ici des exemples de l'usage que j'en ai fait depuis une quarantaine d'annĂ©es. Je tente d'Ă©clairer les acuitĂ©s symboliques de ce livre immense: elles vont au-delĂ  de ce que je pense des religions, elles concernent une façon d'ĂȘtre et de penser. » D. S. De la GenĂšse Ă  la Sortie d'Égypte, en passant par CaĂŻn et Abel, NoĂ©, Abraham, MoĂŻse, Jonas ou Job, les grandes figures, les grands Ă©pisodes de la Bible dĂ©cryptĂ©s par le regard Ă  la fois personnel et Ă©rudit du psychanalyste. Introduction Ă  la pensĂ©e et Ă  la dĂ©marche originales de Daniel Sibony, cet ouvrage est aussi une invitation Ă  une lecture rĂ©flĂ©chie de ce pilier de notre culture qu'est la Bible. Daniel Sibony est psychanalyste. Il a publiĂ© une trentaine de livres, parmi lesquels Don de soi ou partage de soi? Le drame Levinas.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2006
ISBN
9782738188595
1
La passion de Rachi
Disons-le d’emblĂ©e : la passion de Rachi fut de consacrer sa vie Ă  faire du texte un lieu de vie habitable pour son peuple.
Rachi2 consacra sa vie Ă  commenter Bible et Talmud. Il leur a donnĂ© assez de sens pour les rendre accessibles. En fait, il a redonnĂ© la Bible juive et le Talmud au peuple hĂ©breu. Donner aux gens ce qu’ils ont dĂ©jĂ , ou ce qu’ils croient avoir, ou ce qu’ils ne savent pas qu’ils ont, cela peut ĂȘtre d’une grande force symbolique. Rachi, littĂ©ralement, leur a permis de circuler dans le texte, de ne pas y ĂȘtre en arrĂȘt devant un mot ou une tournure. En quoi son acte redonne vie Ă  cette transmission Ă©prouvĂ©e, confinĂ©e, qui fut celle de la Torah.
Il y arrive par un travail d’interprĂšte au niveau simple : l’explication minimaliste. Il veut donner le sens « premier » ou, comme on dit, le sens « obvie » ; obvious, en anglais, le pshat en hĂ©breu ; sorte de mise Ă  plat du sens, par diffĂ©rence avec les autres niveaux de sens qu’en gĂ©nĂ©ral on rassemble sous le sigle PaRDĂšS : pshat, rĂ©mĂ©z (allusion), drash (recherche), sod (secret). Rachi dit clairement qu’il veut le pshat. En commentant le verset3 oĂč Jacob nomme un autel de sacrifice « Dieu [c’est le] Dieu d’IsraĂ«l » – Rachi cite un midrash (commentaire en forme d’histoire Ă©difiante), et ajoute, comme pour s’en dĂ©marquer : « Les paroles de la Torah sont « un marteau qui brise la roche » ; quant Ă  moi, je suis venu asseoir le sens direct [le pshat] du texte » [pshouto shĂ©l miqrah]. Ce mot a la mĂȘme racine que tendu, Ă©tendu ou « dĂ©shabillĂ© » ; la tension immĂ©diate du sens ; le sens nu, sans revĂȘtement ni fioriture, Ă©tendu devant le lecteur.
Mais la quĂȘte par Rachi de ce sens direct, de ces gĂ©odĂ©siques du sens sur la variĂ©tĂ© infinie du texte est singuliĂšre. Cette quĂȘte du passage minimal de sens, le long d’un mot ou d’un verset, subvertit le programme des quatre niveaux du PardĂšs ; car il emprunte beaucoup au drash (au midrash), Ă  l’allusion (rĂ©mĂ©z) et parfois mĂȘme au sens Ă©sotĂ©rique (sod). En fait, l’important pour lui est que ça passe ; il veut un effet de passage, clair et distinct.
En cela il interprĂšte, si interprĂ©ter c’est faire faire un pas de plus au propos qui est lĂ . Et quand ça ne passe pas, Rachi dit : Je ne sais pas ; mais quand ça passe, c’est-Ă -dire presque toujours, sa petite lumiĂšre relĂšve de l’éthique de l’ĂȘtre : ne pas laisser les mots ou les choses se rĂ©duire Ă  eux-mĂȘmes ; ne pas laisser ce-qui-est se rĂ©duire Ă  soi-mĂȘme ; toujours, tenter de l’ouvrir en amont et en aval pour que ça passe, que ça se transmette. C’est l’exigence minimale : transmettre en s’impliquant Ă  des gens qui se sentiront impliquĂ©s ; transmettre (Ă  travers) un certain lien de filiation symbolique. Du coup, cela concerne tout le monde, juif ou pas : car le pouvoir d’interprĂ©ter, c’est le propre de l’homme, bien plus que le langage ou le rire (que l’on trouve chez les animaux).
Pour sentir la force – et les limites – de cette passion du sens direct qu’avait Rachi, je prendrai quelques exemples dans la Torah. (Je n’aborde pas son travail sur le Talmud et dans les Responsa oĂč, comme les grands maĂźtres de l’époque, il rĂ©pondait aux problĂšmes posĂ©s par la vie concrĂšte. Quand on cherche une issue conforme Ă  la loi, cela exigeait de l’interprĂ©ter dans un sens qui permette de passer. LĂ  encore, Rachi Ă©tait plus favorable au passage qu’à l’interdit de passer.)
Son approche, locale et ponctuelle, rĂ©sout des questions de sens au premier degrĂ©. L’important est de pouvoir circuler dans le texte. Quand la difficultĂ© ne tient pas au sens des mots, Rachi ne la relĂšve pas. Par exemple, dans GenĂšse 27 : ÉsaĂŒ revient de la chasse, il voit que son frĂšre Jacob s’est fait passer pour lui et a reçu la bĂ©nĂ©diction d’Isaac ; il s’écrie en larmes : « Ne m’as-tu pas gardĂ© une bĂ©nĂ©diction [aprĂšs celle qu’a prise Jacob]4 ? » Puis : « N’as-tu qu’une seule bĂ©nĂ©diction, mon pĂšre ? BĂ©nis-moi moi aussi, pĂšre5 ! » En apparence, ce thĂšme du partage de la bĂ©nĂ©diction ou de la bĂ©nĂ©diction unique ou singuliĂšre n’intĂ©resse pas Rachi. Ce qui le retient c’est que le mot bĂ©nĂ©diction est prĂ©cĂ©dĂ© de l’h interrogative ; et il donne d’autres exemples de cette tournure. Or pour nous, aujourd’hui, cette dispute des deux frĂšres pour avoir la bĂ©nĂ©diction, comme s’il n’y en avait qu’une, est un thĂšme criant, c’est celui que l’actualitĂ© nous ramĂšne tous les jours dans ce conflit qu’on appelle du Proche-Orient, et qui a voyagĂ© sur prĂšs de trente-cinq siĂšcles.
De mĂȘme dans GenĂšse 12, l’appel de Dieu Ă  Abraham : « Pars-pour-toi de ta terre natale, etc. » Le « pars pour toi », nous l’entendons au sens symbolique : Pars pour quelque chose qui sera toi, car si tu restes lĂ , ce-que-tu-es ne sera pas toi. Et toi, partant vers oĂč tu pars, ce sera le voyage de la transmission. Pour Rachi, « pars pour toi » c’est : « pour ta jouissance et pour ton bien. C’est lĂ -bas que je ferai de toi un grand peuple. Ici tu n’auras pas la faveur d’avoir des enfants ». Mais au fond, cela revient au mĂȘme.
Autre exemple : le rĂȘve Ă  l’échelle de Jacob ; les messagers divins montent et descendent l’échelle. Nous autres interprĂ©tons cette Ă©chelle, cette sorte d’entre-deux entre terre et ciel, comme une circulation des porteurs de messages. Mais ce qui intĂ©resse Rachi, pour qui le rĂȘve a un sens direct clair puisqu’on peut en comprendre l’énoncĂ©, c’est que le Dieu qui parle dans le rĂȘve dit : « Je ne t’abandonnerai pas jusqu’à ce que j’aie accompli ce dont j’ai parlĂ© Ă  ton sujet. » C’est le mot « Ă  ton sujet » [lakh], ou plutĂŽt sa prĂ©position : le « l », le lamed de lakh, c’est cela qu’il commente : « Ma promesse Ă  Abraham, c’est Ă  ton sujet que je l’ai faite, et pas pour ÉsaĂŒ. Car j’ai dit Ă  Abraham non pas « Isaac sera nommĂ© ta postĂ©ritĂ© », mais : dans Isaac6, donc : pas la totalitĂ© d’Isaac (pas ÉsaĂŒ). Et voilĂ  qu’avec ce simple commentaire – littĂ©ral – Rachi retrouve le thĂšme de la guerre entre les deux frĂšres Jacob et ÉsaĂŒ. Par la syntaxe et par la lettre il « rattrape » l’ĂȘtre, l’essentiel.
Quand Jacob se rĂ©veille et dit : « Ainsi il y a YHVH dans ce lieu-ci, et moi je ne le savais pas », pour Rachi cela ne fait pas question. Il ajoute Ă  peine : « si j’avais su je n’aurais pas dormi dans un lieu aussi sacrĂ© ». Pour nous au contraire, la question est vive : que signifie cette localisation du divin ? N’est-il pas partout ? Il nous faut interprĂ©ter, et entrevoir que ce qui compte dans ce verset, c’est moins la toute prĂ©sence divine que l’évĂ©nement oĂč elle surgit, oĂč elle a lieu, oĂč a lieu la rencontre avec le divin comme effet inconscient (« je ne le savais pas » : cela se passe en rĂȘve). Jacob conclut : « Cela ne peut ĂȘtre que la maison de Dieu, et c’est la porte du ciel. » Or c’est « maison de Dieu » que Rachi explique, longuement : il rapporte des midrashs qui pointent ce lieu comme celui du futur Temple de JĂ©rusalem. Il le « prouve » par des midrashs qui eux sont improuvables. Il est en fait sous la pression de plusieurs flux talmudiques, lesquels situent le pied de l’échelle Ă  Beer-Sheva, son sommet Ă  Beit El, au Nord, et son milieu au-dessus de la future Ville sainte. Mais comme cela ne s’ajuste pas, Rachi fait cette hypothĂšse Ă©tonnante : « À mon avis, le Mont Moriah [oĂč sera plus tard le Temple] a Ă©tĂ© dĂ©racinĂ© et est venu se placer Ă  cet endroit. C’est le sanctuaire lui-mĂȘme qui est venu Ă  sa rencontre jusqu’à Beit El. » Étonnant, pour qui cherche le pshat. Mais il semble que, pour rĂ©pliquer Ă  ces lĂ©gendes, il s’en fasse une de son cru. Quant Ă  nous, nous pourrions accepter l’idĂ©e que cette rencontre [de Jacob] est elle-mĂȘme fondatrice d’un lieu d’ĂȘtre du divin ; en cela, elle est une ouverture sur le ciel, au sens symbolique du terme. Nous prendrions mĂȘme ce fragment comme construction de l’idĂ©e de Temple – oĂč s’élaborent l’offrande, le sacrifice et le rituel, puisque : « Cette pierre que j’ai mise en stĂšle sera Maison de Dieu et tout ce que tu me donneras, je t’en offrirai le dixiĂšme7. » C’est le rite de la dĂźme, dont on a ici le sens : s’il reçoit des deux mains le don divin, l’unitĂ© minimale de ces dix doigts – un doigt –, c’est le dixiĂšme. Mais allons plus loin.
Quand Jacob voit Rachel au puits, la premiĂšre fois, « il leva la voix et il pleura ». Rachi commente : « Parce qu’il a vu Ă  ce moment, par un don prophĂ©tique, qu’elle ne serait pas rĂ©unie Ă  lui dans une mĂȘme tombe. » Autre explication, dit-il : « Parce qu’il arrivait les mains vides » [sans cadeaux]. LĂ  encore, nouveau midrash sur ce qui a dĂ©pouillĂ© Jacob dans sa fuite. Midrash oĂč ÉsaĂŒ a envoyĂ© son fils pour tuer Jacob, lequel a sauvĂ© sa vie en donnant tout ce qu’il avait. On repasse par la guerre des frĂšres

Rachi travaille Ă  repriser une texture dĂ©chirĂ©e, comme un tissu : il remet le fil qui manque pour que ça tienne. Il veut qu’on puisse y circuler continĂ»ment, sans heurt et sans arrĂȘt.
Voyons son commentaire sur le combat de Jacob avec l’homme qui finit par lui dire : « Tu ne t’appelleras plus Jacob mais IsraĂ«l8. » Rachi : « Il ne sera plus dit que tu as obtenu ces bĂ©nĂ©dictions en supplantant [eqb, racine de “Jacob”] et par ruse, mais en toute dignitĂ©. Dieu se rĂ©vĂ©lera un jour Ă  toi Ă  Beit El, il y changera ton nom et te bĂ©nira. » Mais Jacob n’a pas voulu attendre, et l’ange a dĂ» malgrĂ© lui donner des bĂ©nĂ©dictions. C’est ce que confirme le v. 29 : « Il le bĂ©nit lĂ -bas ; sur-le-champ. » D’autres pointeraient plutĂŽt que lĂ -bas (sham), c’est Ă  la fois le nom (shĂ©m) et le lieu ; qu’en somme, il le bĂ©nit par le lien du nom et du lieu. Mais Rachi veut souligner la hĂąte et l’obstination de Jacob : bĂ©nis-moi sur-le-champ ; Jacob veut la donnĂ©e immĂ©diate d’une « parole bonne ». Le contenu du symbole ne fait pas problĂšme Ă  Rachi ; pour lui le symbole est dĂ©jĂ  en place.
Autre exemple, la boiterie de Jacob : « C’est pourquoi les fils d’IsraĂ«l ne mangent pas le nerf sciatique9
 » – car Jacob, dans ce combat, fut touchĂ© Ă  la cavitĂ© de la hanche sur le nerf sciatique. On peut y voir l’écart entre l’interprĂ©tation de Rachi, qui explique le mot « sciatique » (nashĂ©), et une autre qui se demanderait pourquoi on ne mange pas le nerf sciatique des animaux : l’ancĂȘtre tient-il la place d’un animal qu’on sacrifie ? Freud a, comme on sait, grattĂ© ce thĂšme jusqu’à la corde. C’est que lui s’interrogerait sur le symbole, comme du dehors. Rachi, lui, est dĂ©jĂ  dedans.
Son interprĂ©tation est rarement symbolique, elle est toujours linguistique ou midrashique – elle prend le midrash comme matĂ©riau pour nourrir sa passion de la langue. (Du reste, sa langue Ă  lui est bonne, savoureuse, il goĂ»te les mots comme on goĂ»te un bon vin.) Pourquoi pas d’interprĂ©tation symbolique ? C’est clair : les communautĂ©s juives mĂ©diĂ©vales Ă©taient dĂ©jĂ  dans le symbole, elles y habitaient. Mais nous, qui sommes un peu dehors, avons besoin d’y revenir ou de le penser dans nos langages actuels. En fait, les Juifs du temps de Rachi Ă©taient plus que dans le symbole, ils Ă©taient le symbole, ils avaient juste besoin de sens pour circuler dans ce sy...

Table des matiĂšres

  1. Couverture
  2. Page de titre
  3. Copyright
  4. Table
  5. Introduction
  6. I. CRÉATION DU MONDE
  7. II. RACINES D'ISRAËL
  8. III. CRÉATION D'UN PEUPLE
  9. IV. L'ÊTRE DIVIN
  10. V. L'ÉPREUVE DU PARTAGE D'ÊTRE
  11. VI. LA RUPTURE DE CAUSALITÉ
  12. VII. ANATOMIE D'UN MIRACLE
  13. VIII. DÉCRYPTER L'OUBLI DU RÊVE
  14. En guise de pause
  15. ANNEXES
  16. 1. La passion de Rachi
  17. 2. L'Ă©tude
  18. 3. L'Autre-lumiĂšre et l'arc-en-ciel
  19. QuatriĂšme de couverture