Le changement est possible
Le TOC reste le plus souvent chronique sans traitement.
Si vous vous êtes largement retrouvé dans les descriptions faites tout au long de ce livre, ou si un ou plusieurs spécialistes vous ont confirmé que vous souffriez bien de TOC, n’espérez pas trop du côté de la guérison spontanée et soignez-vous : c’est la meilleure façon de vous en sortir. Car en vous soignant, vous pouvez guérir. De cela, on est sûr. De plus, même si vous ne guérissez pas totalement, vous avez de grandes chances de voir votre état s’améliorer.
De nombreuses recherches très rigoureuses ont étudié l’efficacité des traitements dans le trouble obsessionnel-compulsif. Ces études réalisées sur des centaines de sujets ont montré que deux types de traitement étaient efficaces :
1. les médicaments inhibiteurs de la recapture de la sérotonine,
2. la psychothérapie comportementale et cognitive.
Question : Qu’est-ce qu’une psychothérapie ?
Réponse : Une psychothérapie est un traitement qui passe par la parole. La parole du patient, d’une part, et la parole du psychothérapeute, d’autre part. Cette parole peut consister en des interventions variées en fonction des différentes techniques de psychothérapie. On compte actuellement environ quatre cents techniques dans le monde. Cependant, une seule technique a reçu la preuve scientifique de son efficacité dans le trouble obsessionnel-compulsif : la psychothérapie comportementale et cognitive.
Comment savoir si une méthode est efficace ?
François est suivi pour ses obsessions-compulsions par un psychothérapeute qui le voit toutes les semaines depuis quatre ans. Il ne lui a proposé aucun des traitements réputés efficaces contre le TOC. François est très attaché à son thérapeute qu’il décrit comme un être fin, subtil, chaleureux, bienveillant et discret. Il ne veut à aucun prix en changer. Au cours des séances hebdomadaires, François parle avec son thérapeute de ses difficultés quotidiennes, de ses rapports avec ses parents, de son enfance et de ses symptômes. François, que j’ai rencontré pour un protocole de recherche sur les obsessions-compulsions, m’a dit un jour : « Le seul traitement qui ait amélioré mes obsessions m’a été prescrit par un médecin que je n’ai vu qu’une fois, car il était très désagréable. Le médicament, c’était de la clomipramine. »
Pour prouver qu’un traitement (médicament ou psychothérapie) est efficace, il faut que :
1. un groupe de sujets traités par le traitement soit amélioré par rapport à un groupe de sujets sans aucun traitement ou sous placebo. Le placebo peut être, par exemple, une gélule contenant du sucre (placebo médicamenteux) ou bien des rencontres avec le patient sans programme particulier (placebo psychothérapeutique). En effet, le placebo est sans efficacité ou d’action très faible dans le TOC, comme cela a été prouvé dans de très nombreuses études48.
2. ce traitement soit testé sur un nombre suffisant de sujets : en général plusieurs centaines.
3. ces études aient été faites dans plusieurs centres géographiques différents (plusieurs hôpitaux, plusieurs villes, plusieurs pays) afin d’être sûr que les données concordent.
4. le traitement soit sans effet indésirable grave, c’est-à-dire qu’il ne soit pas dangereux pour la personne.
Question : Y a-t-il « déplacement de symptômes » après une psychothérapie comportementale et cognitive ou après un traitement médicamenteux ?
Réponse : Le déplacement de symptômes est issu de la théorie psychanalytique. Selon elle, le symptôme obsessionnel est l’expression d’un conflit interne refoulé. Ainsi, si une thérapie se consacre uniquement à la disparition des symptômes, le conflit inconscient devrait conduire à l’émergence de nouveaux symptômes, par un principe de vases communicants. Cette théorie a été contredite dans le TOC par la stabilité des résultats obtenus par la psychothérapie comportementale et cognitive ou par les médicaments.
Question : La psychanalyse est-elle efficace dans le trouble obsessionnel-compulsif ?
Réponse : En 1999, la technique de psychothérapie la plus répandue auprès des psychiatres et psychologues français est la psychanalyse, ou la psychothérapie psychanalytique. C’est ce qui explique pourquoi de nombreux patients suivis par un psychiatre n’ont pas encore bénéficié de psychothérapie comportementale et cognitive ni de traitements médicamenteux appropriés. Cependant, à ce jour, les techniques psychanalytiques n’ont pas fait la preuve de leur efficacité dans le TOC, que ce soit chez l’adulte ou chez l’enfant. Il existe, par ailleurs, de très grandes différences entre la psychanalyse et la psychothérapie comportementale et cognitive, comme le résume le tableau suivant.
COMPARAISON DE LA PSYCHOTHÉRAPIE COMPORTEMENTALE ET COGNITIVE AVEC LA PSYCHANALYSE
| Psychanalyse | Psychothérapie comportementale et cognitive |
Durée du traitement avec le psychiatre | non précisée au départ | environ 20 à 30 heures de thérapie |
De quoi parle-t-on ? | expression libre du patient | situations pénibles où se manifeste le trouble obsessionnel-compulsif |
Attitude du thérapeute | intervient peu | intervient fréquemment |
Technique de base du thérapeute | analyse les conflits psychiques inconscients | 1. remet en question et discute les croyances obsessionnelles 2. met au point des exercices thérapeutiques d’exposition graduée aux rituels |
Efficacité | inconnue | prouvée par de nombreuses études y compris en comparaison avec des médicaments efficaces |
Question : La thérapie comportementale et cognitive ou les médicaments sont-ils des traitements superficiels qui ne soignent que les symptômes ? Ne vaudrait-il pas mieux un traitement profond qui traite la cause et qui évite les rechutes ?
Réponse : Selon cette question, la notion de traitement superficiel des symptômes s’opposerait à un traitement profond qui traiterait les causes et éviterait les rechutes. La réalité est tout autre :
1. Traiter une maladie consiste, par définition, à soigner les symptômes.
2. On ne peut pas soigner la cause de la maladie, puisqu’elle est inconnue. Espérer soigner la cause du trouble obsessionnel-compulsif est donc obscur.
3. Pour la personne qui souffre de trouble obsessionnel-compulsif, l’important n’est pas de savoir si le traitement est superficiel ou s’il est profond, mais de savoir s’il est efficace. À ce titre, les seuls traitements dont l’efficacité est connue à ce jour sont ceux que nous avons cités.
4. Parler de rechute signifie que le trouble a été amélioré, que ce soit par la thérapie comportementale et cognitive ou par les médicaments. Comme pour toute maladie, la rechute du TOC après une amélioration est toujours possible. Elle nécessite de reprendre ou de modifier le traitement.
Question : Que se passe-t-il après les vingt ou trente heures de psychothérapie comportementale et cognitive ? Le psychiatre ou le psychologue me laissent-ils tomber ? Si je n’y arrive pas en trente heures, la technique est-elle abandonnée ?
Réponse : Vingt à trente heures de psychothérapie comportementale et cognitive avec le psychiatre constituent une moyenne de durée de traitement, après laquelle on peut juger de l’efficacité de cette méthode. En effet, celle-ci a été mise au point et a été évaluée scientifiquement avec cette durée de traitement. Vingt à trente heures de traitement avec le psychiatre sont en général suffisantes pour comprendre, mettre en pratique et ressentir les effets de cette méthode. Cependant, la psychothérapie avec le psychiatre ou le psychologue peut être plus longue ou plus brève en fonction des résultats. Vous continuerez naturellement à voir votre thérapeute après cette période si vous en avez besoin.
Quelles sont les chances d’amélioration ?
Si l’on ne se soigne pas, le trouble obsessionnel-compulsif reste le plus souvent chronique. Au contraire, si on se soigne correctement, le trouble obsessionnel-compulsif est le plus souvent très amélioré. C’est ce qui a été montré par de nombreuses études scientifiques qui ont fourni des résultats statistiques. Cependant, selon que l’on étudie les traitements chez des personnes ayant des troubles de gravité différente, les résultats peuvent varier considérablement : par exemple, une consultation de psychiatrie générale recevra des personnes souffrant de troubles moins anciens ou moins résistants qu’une consultation spécialisée dans le TOC, où se dirigeront des patients atteints de tro...