Sacrées questions…
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Sacrées questions…

Pour un islam d'aujourd'hui

  1. 256 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Sacrées questions…

Pour un islam d'aujourd'hui

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À propos de ce livre

Le Coran – la parole de Dieu révélée au Prophète – échappe-t-il à tout contexte historique? Pourquoi les hadiths – les dits et gestes du Prophète – ont-ils pris le pas sur la Révélation? Et comment justifier qu'avec la charia ils constituent trop souvent l'essentiel du référentiel islamique? Femme de culture musulmane, Faouzia Farida Charfi s'est posé ces difficiles questions alors qu'elle enseignait la physique à l'Université de Tunis. Devant le rejet de ses étudiants face aux contenus scientifiques, elle décide de revenir aux sources et de se plonger dans la lecture des penseurs arabes – juristes, islamologues, historiens. Ce livre est le résultat de cette démarche. Avec force et conviction, s'appuyant sur le modèle qui s'élabore douloureusement en Tunisie et sur son expérience personnelle, Faouzia Farida Charfi y montre qu'un islam en phase avec la modernité est possible sur le droit, sur le statut des femmes et le voile, sur la relation de la religion à la science et à l'art. Faouzia Charfi est physicienne et professeur à l'Université de Tunis. Nommée secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur dans le gouvernement provisoire de janvier 2011, elle en a démissionné peu après pour reprendre sa liberté de parole et d'action. Elle est l'auteur de La Science voilée, également publié chez Odile Jacob.

Foire aux questions

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2017
ISBN
9782738135896

Chapitre 1

L’islam n’est pas la charia

Comment faire la part entre l’idéologie et la tradition religieuse musulmane ? Un retour à l’histoire et une lecture scientifique du message coranique permettent de saisir les différents visages de l’islam de ce début du XXIe siècle, d’avoir des clés pour « penser le Coran1 » et lever « le malentendu historique2 », de comprendre l’islam « entre le message et l’histoire3 », de s’interroger sur le statut de l’État, entre deux mondes, entre deux temporalités, un « État inachevé4 » et de proposer une réponse claire à la question de savoir si l’islam est hostile à la laïcité5. Ces penseurs, qui portent un regard scientifique sur l’islam, en dehors de tout essentialisme, ce sont des islamologues, juristes, historiens du monde arabe, qui se placent dans une optique non religieuse et nous livrent une pensée sécularisée. C’est sur leurs écrits que je m’appuierai pour présenter quelques questions qui troublent aujourd’hui le regard porté sur les « communautés » musulmanes. Ces penseurs autorisent une lecture permettant de « lever le voile sur une face cachée – et bien plus féconde – de l’islam contemporain6 ». Une lecture qui nous sort de schémas réducteurs en nous permettant de distinguer les versets coraniques des hadiths, le message prophétique du corpus de textes élaborés par les hommes de religion et les spécialistes du droit musulman. Cette vision réductrice de l’islam, qui confond les différents corpus de textes, est celle que proposent certains imams* autoproclamés, que l’on a vus apparaître dans nombre de mosquées en Tunisie avec la révolution de janvier 2011. Ces nouveaux venus dans le monde des prédicateurs religieux ont profité de la bienveillance des islamistes et de l’inconscience des responsables politiques en Tunisie et en Europe, où ils profitent d’une ferveur religieuse en rapide expansion. L’Internet a également contribué à cet appauvrissement de la culture religieuse en occultant le message prophétique sous une multitude de textes inspirés des hadiths.

La Révélation

Je propose dans cette partie d’exposer ce que l’on entend par Révélation, wahiy, et d’en rappeler le contexte historique. Le prophète Muhammad reçoit la première révélation en 610 et va transmettre la parole de Dieu pendant vingt-deux années. Était-il « analphabète » comme beaucoup veulent le penser ? A-t-il joué un rôle dans la transmission du message divin ? Enfin, la parole de Dieu est-elle inscrite dans le temps ou est-elle incréée, échappant à toute relation avec les circonstances de la prédication prophétique ? Ce sont des questions délicates dont les réponses sont significatives du conflit entre raison et tradition.

L’Apparition et la Révélation

C’est dans la grotte de Hirâ’, non loin de La Mecque où il se rend régulièrement pour se recueillir et méditer, que le prophète Muhammad reçoit la parole de Dieu. C’était en l’an 610. Le contexte historique de la Révélation et la vie du Prophète sont décrits par la Tradition dans la Sîra*, la vie du Prophète racontée par ses compagnons7. Elle a été transmise d’abord oralement d’une génération à l’autre, puis par écrit un siècle si ce n’est deux après sa mort, par différents chroniqueurs, qui ont proposé différentes variantes de certains événements, y compris le moment fondateur de la Révélation.
Le Prophète est visité par l’ange Gabriel. Il reçoit la parole de Dieu. Muhammad est-il dans son sommeil ou à l’état de veille ? Reçoit-il directement la parole de Dieu ? ou la reçoit-il par l’intermédiaire de Gabriel ? Et, dans ce cas, comment l’ange s’est-il manifesté : de manière visible ou seulement par sa voix ? Ces questions ne sont pas tranchées.
Le chroniqueur Ibn Ishaq (VIIIe siècle) rapporte les circonstances de la Révélation :
Gabriel est venu à moi pendant que je dormais. Il tenait une pièce de brocart contenant un écrit et me dit :
– Lis
Je dis :
– Je ne sais lire. Je n’ai jamais lu et ne sais le faire. Je n’écris ni ne lis.
Il me serra très fort, au point que je crus la mort venue, puis il me lâcha et me dit :
– Lis.
Je dis :
– Quoi lire ? Je ne vois rien à lire et ne lis ni n’écris.
Je ne parlais ainsi que pour éviter qu’il ne m’inflige une deuxième fois ce qu’il venait de m’infliger. Alors il dit :
– Lis, au nom de ton Seigneur qui a créé l’homme d’un caillot. Lis ; Ton Seigneur est le Très-Généreux, qui, avec le calame, a enseigné à l’homme ce qu’il ne savait pas. [Sourate « Al Alaq »/« L’accrochement » (96), versets 1-5.]
Je lus après lui et il finit par me quitter8.
Le Prophète se réveille en sursaut. Il voit une seconde fois l’ange, « sous la forme d’un homme dont les pieds barraient l’horizon », qui lui dit : « Ô Muhammad, tu es le Messager de Dieu et je suis Gabriel. »
Muhammad reste immobile, pendant longtemps. Puis, l’ange le quitte et il redescend vers les siens. La Sîra rapporte que le Prophète est assailli par le doute quand il reçoit l’ordre de proclamer, craignant d’être devenu l’un de ces devins ou d’être possédé par un djinn9. Il aura besoin du soutien de Khadija, son épouse. Le doute revient lorsque l’inspiration est interrompue un moment. Puis la Révélation reprend.
L’historien tunisien Hichem Djaïet nous interpelle sur cet épisode de la Caverne de Hira’ dans son ouvrage La Vie de Muhammad. Révélation et prophétie10. Il ose récuser l’épisode de la Caverne où le Prophète a eu la vision de l’ange Gabriel. Il appuie son hypothèse sur le fait que l’épisode n’est pas mentionné dans le Coran alors que « le moment de la rencontre initiale, celui de l’Apparition et de la Révélation, est rapporté de manière claire et circonstanciée dans les sourates “An-Najm” [“L’étoile”] et “At-Takwir” [“Le reploiement”]11 ». La sourate « An-Najm » décrit le moment de l’Apparition, « Ceci n’est que Révélation à lui révélée » ; « dont l’instruisit un être fort, très fort » ; « et pénétrant. Il planait » ; « à l’horizon suprême » (versets 4-7). Les chroniques telles que celle d’Ibn Ishaq rapportée plus haut relatent cet événement comme deux séquences successives, la première, celle de l’instruction-apprentissage, la deuxième, celle de l’érection de l’ange sur l’horizon. Mais, précise Djaïet, « il existe un lien indissoluble entre l’Apparition [sur l’horizon] et la Révélation elle-même : celle-ci a eu lieu à cet instant-là », ce que les traditionnistes omettent de dire.
L’historien poursuit son analyse des circonstances de la Révélation et propose son interprétation de la réponse donnée par le Prophète à l’injonction de l’ange, « Lis ! » (Iqra). « Je ne suis point lecteur » ne signifie pas à son sens « je ne sais pas lire » comme il est dit dans la Sîra, mais plutôt « je refuse de lire ». Ainsi, Muhammad aurait réagi par une « revendication de libre arbitre » plutôt que par un « aveu d’illettrisme12 ». Enfin, si la tradition parle d’usage de la force à l’encontre du Prophète, il n’en est pas question dans les deux sourates « An-Njam » et « At-Takwir », qui évoquent la disponibilité, la proximité et l’affection. Et plutôt que d’usage de la force de la part du « noble émissaire », il est question d’un être « plein de force ».
En conséquence, pour Djaïet, le « mythe de la Caverne » peut être remis en cause de même que le doute qui aurait assailli Muhammad à propos de sa vocation de Messager et dont il fait part à son épouse Khadija13. « Ces histoires relèvent donc de l’imaginaire islamique postcoranique dans lequel Muhammad se voir assigner un rôle passif et où la volonté souveraine et protectrice de Dieu est mise en avant14. » Le point de vue de Djaïet est intéressant à double titre. En premier lieu, par les conséquences que l’on peut tirer sur la figure du Prophète de son « illettrisme », comme nous verrons par la suite. En deuxième lieu, parce qu’il montre qu’un historien peut avancer une thèse non conforme à la Tradition. Pour Djaïet, l’histoire de la Caverne est « une invention a posteriori, dont la fonction est la théâtralisation de questions sérieuses » et reflète « une épistémè et des représentations postérieures à l’islam primitif qu’il faut élucider et dont il convient de décrypter les symboles15 ». Peut-être que des recherches archéologiques plus approfondies sur les lieux de la Révélation donneront des éléments de réponse sur les circonstances précises dans lesquelles elle s’est déroulée.

Prophète des « gentils » ou prophète « illettré » ?

Le message de Dieu a-t-il été révélé à un prophète qui ne savait ni lire ni écrire ? Le Prophète était-il « illettré » (ummî) ? La Tradition l’affirme. L’« illettrisme » de Muhammad « subsumé par le mythe de la Caverne16 » souligne le caractère miraculeux de la Prophétie et prouve son origine divine. Cette représentation est aujourd’hui largement véhiculée par les nombreux sites Web sur l’islam, dont les auteurs sont plus souvent des prédicateurs que des théologiens et dont l’objectif relève plus de l’endoctrinement que de la connaissance de l’islam. L’image d’un prophète ne sachant ni lire ni écrire, un homme comme tous les autres, conformément à ce que dit la Tradition, fait du texte coranique un miracle littéraire encore plus fort.
Un grand nombre de sites Internet ajoutent à ce miracle littéraire le miracle scientifique dans une vision concordiste du Coran par rapport à la science moderne. Ils soutiennent la thèse que toutes les découvertes scientifiques, y compris les plus récentes, se trouvent annoncées dans le texte coranique17. Les « miracles scientifiques » (i’jaz ilmy) du Coran se déploient à travers tous les domaines de la science, de la biologie à la cosmologie, et appuient la thèse que le Prophète, illettré, ne sachant ni lire ni écrire, a transmis la Parole de Dieu. Cette récupération de l’« histoire de la science » séduit beaucoup les jeunes musulmans. Elle alimente leur rejet de l’Occident qui, dans la vision concordiste, n’est pas l’inventeur de la science actuelle puisque celle-ci est déjà présente dans les 750 versets coraniques à caractère « scientifique18 ». Toutes les grandes découvertes, y compris la théorie du Big Bang proposée au milieu du XXe siècle pour décrire le commencement de l’Univers, il y a des milliards d’années, ont été émises « par un Arabe illettré vivant dans le désert mille quatre cents ans plus tôt ». C’est ce qu’explique le prédicateur Ahmed Deedat19 sur le site islam-France.free.fr, se mettant en scène face à un « homme de science » qui a étudié l’astronomie à l’aide de puissants télescopes – et qui propose d’en fabriquer de plus p...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Page de titre
  3. Copyright
  4. Dédicace
  5. Avertissement de l’auteur
  6. Introduction
  7. Chapitre 1 - L’islam n’est pas la charia
  8. Chapitre 2 - Wahhabisme, islam politique et réformisme
  9. Chapitre 3 - L’exception tunisienne menacée
  10. Chapitre 4 - Les femmes face à leur héritage
  11. Chapitre 5 - La nouvelle lune piégée par un hadith
  12. Chapitre 6 - Les images, entre interdiction et mise en scène
  13. Conclusion « Le Prophète était-il un roi ? »
  14. Glossaire
  15. Du même auteur chez Odile Jacob
  16. Table
  17. Quatrième de couverture