Relever la France
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Relever la France

État d'urgence

  1. 144 pages
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État d'urgence

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« Alors que le pays est écartelé, il faut, plus que jamais, affirmer et démontrer qu'il y a une terre promise et un chemin pour y parvenir. C'est ce chemin, balisé de solutions concrètes, que je trace ici. La France peut redevenir une grande puissance politique, scientifique, économique et militaire pour faire face aux défis qui assaillent les pays européens et reprendre une place de leader dans les transformations en cours. Pour atteindre ces objectifs, il faut d'abord poser le cadre d'une réflexion politique et philosophique et un diagnostic sur l'évolution du monde dans lequel nous vivons. Puis construire un projet stratégique acceptable par toutes les forces de progrès. » C. S.-É. Professeur titulaire de la chaire d'économie Jean-Baptiste Say au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et président de l'Institut France-Stratégie, Christian Saint-Étienne est l'auteur de nombreux ouvrages et essais d'économie politique.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2016
ISBN
9782738159878

CHAPITRE 1

QUELLES VALEURS POUR REFONDER
LA FRANCE ?


La France est affaiblie par des fêlures liées à sa construction historique qu’il faut mettre à jour et par des confusions qu’il faut surmonter avant de reconstruire les bases d’un vivre et d’un agir ensemble.

1. Les fêlures françaises

De nombreuses raisons expliquent que le pays refuse de se transformer pour s’adapter au nouveau monde dans lequel nous vivons, comme un cheval refuse l’obstacle. On peut citer à juste titre les effets délétères de la défaite de mai 1940, ou bien la pénalisation des mots et des idées qui crée une chape de plomb et limite le débat public à une bien-pensance médiocre et sans horizon. Mais plus fondamentalement, comment expliquer ce manque de confiance en soi de notre pays et son défaitisme ?

PREMIÈRE FÊLURE : UNE CRISE CONSTITUTIVE DE DÉFIANCE

La première raison de notre impuissance à affronter la modernité vient de loin. C’est au XVIIe siècle que la France et l’Angleterre ont fait des choix différents. Après la lutte désastreuse entre catholiques et protestants, dont l’enjeu principal est l’autonomie de l’homme dans son accès à Dieu, face au pape et indirectement au roi, et qui laisse une profonde cicatrice mal refermée par l’édit de Nantes en 1598, Louis XIII, aidé de Richelieu, développe l’absolutisme pour soumettre les nobles et lutter contre la menace extérieure. La guerre de Trente Ans (1618-1648) épuise le pays avant de se terminer par l’affirmation de la souveraineté des nations par les traités de Westphalie de 1648, au début du règne de Louis XIV (1643-1715). La France, financièrement exsangue, se renforce sur le plan territorial, notamment en signant un peu plus tard la paix des Pyrénées avec l’Espagne, en 1659. Après la mort de Mazarin en 1661, Louis gouverne en maître absolu, guerroie trop longtemps et commet l’erreur stratégique de révoquer l’édit de Nantes en 16851. L’agrégation des puissants à la cour du roi laisse les provinces sans leaders intellectuels et économiques. Même si Colbert a développé quelques manufactures et encouragé la création de compagnies de commerce, l’agriculture est faiblement productive et les productions artisanales et préindustrielles nouvelles se heurtent au poids des corporations2.
En Angleterre, le protestantisme s’affirme avec Élisabeth Ire (1558-1603) tandis que le pays triomphe de l’Espagne (Invincible Armada, 1588). Pendant la restauration des Stuart en 1660-1688 un équilibre précaire s’instaure entre le roi et le Parlement tandis que la crainte d’une restauration catholique met le pays en transe dans les années 1680. La Glorieuse Révolution de 1688 porte le Néerlandais Guillaume III d’Orange au pouvoir en confirmant la monarchie parlementaire et protestante. La Déclaration des droits (Bill of Rights) fut signée par le nouveau roi en février 1689. Elle définit les droits des citoyens et du Parlement et conduit à la garantie de la liberté de la presse en 1695. Surtout, la puissance financière et maritime passe des Pays-Bas au Royaume-Uni3. La Banque d’Angleterre est fondée en 1694 et gère la politique monétaire pour stabiliser le taux d’intérêt de la dette publique à un niveau faible tout en sécurisant les country banks, créées par des artisans et riches marchands, dont le nombre passe d’une douzaine en 1750 à 120 en 1784 et près de 300 à la fin du XVIIIe siècle. La City de Londres est née et contribue à financer les productions agricoles, artisanales et préindustrielles ainsi que l’activité des marchands pendant le XVIIIe siècle4. La presse, libérée de la censure et animée par un grand nombre de huguenots, couvre les concours d’inventeurs et les débats au Parlement pendant tout le XVIIIe siècle alors que la Royal Society encourage les innovations en science et en ingénierie. Une classe d’artisans sophistiqués développe des outils et productions qui favorisent l’émergence de la première révolution industrielle dans les années 1770 et 1780 en Grande-Bretagne.
Ainsi, à l’issue du XVIIe siècle, La France est absolutiste et économiquement épuisée, tout en s’étant amputée de sa part protestante, tandis que le Royaume-Uni est une monarchie parlementaire qui favorise la liberté scientifique, le financement de l’activité économique et la liberté de la presse. C’est bien au cours de la période 1685-1695 que la France et l’Angleterre vont diverger de façon décisive en termes de régime politique et de système économique : de la révocation de l’édit de Nantes en France à la liberté de la presse en 1695 en passant par la Glorieuse Révolution de 1688 et le Bill of Rights de 1689 en Angleterre. Au cours du XVIIIe siècle, l’économie du Royaume-Uni prend son essor alors que l’économie française stagne relativement par un déficit d’entrepreneurs et de financement. La France rate sa principale chance de modernisation avec le renvoi de Turgot en 17765.
La révolution de 1789 permet un rattrapage temporaire du régime démocratique de l’Angleterre par la proclamation des droits de l’homme et du citoyen, mais la Terreur, de septembre 1793 à juillet 1794, à la suite de l’élimination des girondins par les montagnards, produit non seulement un régime de folie meurtrière mais la destruction de toute hiérarchie de valeurs et l’avènement d’un régime de violence de masse conduit par une dictature se prétendant avant-gardiste, un système d’oppression qui s’épanouira dans le fascisme, le stalinisme et tous les extrémismes au XXe siècle6. Le bonapartisme, qui met fin aux dérèglements engendrés par la Terreur et à l’instabilité du Directoire par le coup d’État de brumaire (novembre 1799), installe un régime autoritaire et centralisateur et guerroie jusqu’à l’effondrement de 1808 à 18157. La France, encore une grande puissance en 1770, est devenue une puissance moyenne sous tutelle dès 1815.
De la folie absolutiste et guerrière du dernier tiers du règne de Louis XIV, qui s’exprime notamment par la guerre de Succession d’Espagne (1701-1714) à l’issue désastreuse, à celle de Napoléon de 1808 à 1815, la France sort épuisée, amoindrie, doutant de la démocratie, avec des élites craignant leur propre peuple. Cette dernière caractéristique perdurera jusqu’à la défaite de 1940, que Marc Bloch8 attribue en partie à cette marque de défiance des élites pour le peuple. Elle perdure encore aujourd’hui.
Charles de Gaulle avait bien rétabli un début de confiance entre le peuple et ses dirigeants en portant l’étendard de la liberté responsable, de l’honneur républicain et de l’amour de la France, mais ses successeurs, notamment à partir des années 1980, ont progressivement abaissé cet étendard avant qu’il ne soit posé à terre depuis que la lucidité s’est faite invocation.

DEUXIÈME FÊLURE NATIONALE : UNE « SEULE » RÉVOLUTION !

Cette crise de défiance se double de la volonté des politiques et des historiens tout au long du XIXe siècle de gommer l’opposition entre la première révolution libératrice de 1789 et la révolution terroriste de 1793-1794, en faisant croire qu’il s’agissait des deux phases nécessaires de la même. La première révolution proclame les droits de l’homme et la souveraineté du peuple. Le roi, indécis, ne contribue pas à l’émergence d’une monarchie constitutionnelle, souhaitée par les Lumières au XVIIIe siècle, et se met hors-jeu par la fuite de juin 1791. Des troubles insurrectionnels éclatent à Paris en août-septembre 1792 et Louis XVI est exécuté en janvier 1793. À partir de juin 1793, les idéologues de la Montagne prennent le pouvoir en voulant faire table rase du passé. Puis c’est la Terreur d’octobre 1793 à juillet 1794, le fanatisme politique s’autorisant à exterminer ses adversaires au nom de la Raison comme d’autres, avant et après, au nom de Dieu. Il ne s’agit plus de la raison des Grecs, instrument de découverte de la vérité, mais d’une Raison pseudo-déiste et fanatisée qui plonge ses racines dans un calvinisme rousseauiste exterminateur9.
Parler d’une seule révolution a pu paraître nécessaire pour stabiliser le pouvoir politique au XIXe siècle. Ce compromis politique a été enseigné comme vérité historique depuis 1880, notamment dans les manuels écrits ou suscités par Ernest Lavisse, populaires jusqu’aux années 1950, et dans les manuels dérivés des programmes officiels depuis. Or ce compromis a interdit la recherche d’une synthèse démocratique, après la thèse de 1789 et l’antithèse de 1793-1794, prônant la responsabilité individuelle comme seul fondement de la liberté d’hommes égaux entre eux.

TROIS CLARIFICATIONS S’IMPOSENT

D’abord, comme nous le verrons au chapitre suivant, le lot commun de l’humanité avant la prémodernité qui commence il y a trente-trois siècles a été abject : vie d’une précarité totale et espérance de vie inférieure à 20 ans. Plus de la moitié des enfants mouraient avant 7 ans, voire dans leur première année d’existence. Il n’y a jamais eu d’Éden pour l’humanité.
C’est entre le XIIIe et le Ve siècle avant notre ère que se forgent les concepts fondamentaux de la prémodernité : l’État, la démocratie et la liberté, le Dieu unique et la philosophie, les rudiments de la science, la monnaie et la politique. Et même au cours des trente-trois derniers siècles, les premiers trente et un siècles ont été pour l’essentiel marqués par la stagnation économique et la faiblesse de l’espérance de vie. Le décollage économique n’intervient qu’avec la première révolution industrielle et l’espérance de vie a triplé au cours des trois derniers siècles.
Or deux courants centraux ont irrigué la philosophie politique depuis trois siècles : appartenant au premier courant, totalement dominant dans le monde anglo-saxon depuis trois siècles et en France jusqu’à la Révolution, il y a ceux qui pensaient et pensent que l’état de nature est d’une violence inouïe et que seul un État fort peut pacifier la société et permettre son accession à la prospérité et éventuellement au bonheur (Hobbes, Locke, Montesquieu) ; du côté du second courant, très minoritaire hors de France mais centralement installé en France depuis Rousseau, on trouve ceux qui s’imaginent que l’état de nature est peuplé de bons sauvages et qu’il suffit d’éradiquer les États, les élites et les bourgeois pour que tout aille mieux. Même si l’état de nature rousseauiste est censé être un modèle théorique qui imagine l’homme au naturel avant qu’il ne soit distordu par un « état social dégénéré », il reste fondamentalement inspiré par la vision du bon sauvage dans l’Éden originel construit par les religions déistes.
Les adeptes du premier courant ont imaginé des systèmes permettant de fonder et d’encadrer l’action d’un État protecteur et modernisateur, soit sur la nécessité d’établir l’ordre entre les hommes pour qu’ils ne passent pas leur temps à s’égorger ou à chercher à établir une domination entre eux (et malheureusement nous vivons à nouveau autour du Bassin méditerranéen une période de violence inouïe associée à l’absence d’État démocratique fort), soit sur la nécessité de pousser l’homme à produire pour être libre et indépendant en instaurant un droit de propriété sur les fruits de son travail, soit sur le besoin d’organiser la société en faisant appel à la raison pour la prise de décision publique et en organisant la séparation des pouvoirs et le bicamérisme, la transparence des décisions et l’évaluation des politiques. Ces différentes propositions se complètent pour faire de l’État moderne démocratique l’instrument d’une action collective donnant aux citoyens l’environnement leur permettant de vivre en paix et d’exprimer leurs talents.
Les adeptes du second courant et singulièrement Rousseau ont imaginé, en proclamant le droit à l’utopie et en s’autorisant du déni de réalité10 selon lequel les idées, même contraires aux réalités, sont des faits, qu’il fallait extraire l’homme de la gangue de corruption et d’inégalités instaurée par la société pour revenir à l’état naturel du bon sauvage. Le moyen était d’établir l’existence d’une volonté générale, garante de la liberté individuelle particulière dite civile sans responsabilité immédiate de ses actes – la liberté civile rousseauiste est une liberté d’autonomie qui consiste à se donner à soi-même ses propres lois (auto, soi et nomos, lois).
Cette liberté d’autonomie du bon sauvage s’oppose à la liberté responsabilisée de la recherche individuelle du bonheur encadrée par l’État de raison afin d’échapper à la violence de l’état de nature. L’homme est un être social qui vit avec d’autres hommes selon des règles communes et seul l’État de droit fondé sur la raison peut éviter le choc de « lois autonomes » entre elles.
Conscient que ce choc des autonomies serait invivable, Rousseau crée donc un système de mise en ordre du chaos qu’il nomme « volonté générale », une volonté qui a un statut philosophique et politique très particulier. Selon Rousseau : « Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale. […]. Cet acte d’association produit un corps moral et collectif, composé d’autant de membres que l’assemblée a de voix, lequel reçoit de ce même acte son unité, son moi commun, sa vie et sa volonté. » Il en résulte que tout pouvoir politique, reposant sur un tel contrat d’abdication totale de sa volonté personnelle dans la volonté générale, est par nature légitime. Il s’ensuit que « quiconque refusera d’obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps : ce qui ne signifie autre chose sinon qu’on le forcera d’être libre » (Du contrat social). Cette approche est déjà contestable sur le plan conceptuel puisque l’état de nature n’est pas un Éden et que l’on passe d’un chaos ingérable d’autonomies sans responsabilités – point qui montre que Rousseau lui-même reconnaît implicitement qu’il n’y a pas de bons sauvages – à un ordre d’essence totalitaire par l’intermédiaire d’une hyperbole conceptuelle que Rousseau sort de son chapeau – la volonté générale. Mais surtout, la « volonté générale » n’est pas connaissable et doit donc être révélée par une Pythie manipulable. La tentation de s’autoproclamer interprète d’une volonté générale que même le peuple ne peut pas connaître sera la base philosophique de la Terreur, du marxisme et de tous les systèmes totalitaires, tous construits sur le contrôle des peuples par une minorité de faux « sachants » manipulateurs. C’est pour cette raison que les caïds de la volonté générale ne supportent pas le vote démocratique secret, intimement...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Introduction
  5. Chapitre 1 - QUELLES VALEURS POUR REFONDER LA FRANCE ?
  6. Chapitre 2 - DANS QUEL MONDE AGISSONS-NOUS ?
  7. Chapitre 3 - AGIR ENSEMBLE SUR DES VALEURS COMMUNES
  8. Conclusion
  9. Annexe 1 - MAQUETTE DE RÉVOLUTION INDUSTRIELLE ET GRAPPES D’INNOVATIONS
  10. Annexe 2 - LA MÉTROPOLE AIX-MARSEILLE-PROVENCE DANS LA TROISIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE
  11. Annexe 3 - DEUX SCÉNARIOS DE FINANCES PUBLIQUES 2017-2022
  12. Table
  13. Du même auteur chez Odile Jacob