Introduction au siècle des menaces
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Introduction au siècle des menaces

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Introduction au siècle des menaces

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« Si l'affrontement des peuples riches et des peuples pauvres, comme celui de Caïn et d'Abel, remonte à la nuit des temps, il prend de nos jours un caractère plus destructeur avec la création du village global par la technologie. Le progrès stupéfiant des moyens de communication dans les trente dernières années permet la formation de réseaux multiples, nouvelle arme des plus démunis, qui portent leur combat dans la cybersphère et acquièrent ainsi une puissance formidable. À leurs attaques, les pays nantis ne fournissent qu'une riposte militaire, dans le dépérissement universel de la pensée politique et l'obsolescence grandissante des structures de sécurité collective. Trois menaces pèsent sur le XXIe siècle: les conflits armés, dans la perspective inévitable d'un recours aux armes de destruction massive, l'expansion d'épidémies, favorisée par la mondialisation, et l'épuisement des ressources naturelles, consécutif à la surpopulation et au pillage de la Terre. Tout ne conspire-t-il pas pour produire une déflagration comme le monde n'en a jamais connu? » J. B. Jacques Blamont démonte pièce à pièce la machine infernale que, grâce au progrès scientifique auquel nous avons tant cru, nous sommes en train de léguer à nos enfants... Membre de l'Académie des sciences, professeur émérite à l'université Paris-VI, Jacques Blamont est l'un des pères de l'aventure spatiale française. Il a notamment publié Vénus dévoilée, Le Chiffre et le Songe et Le Lion et le Moucheron.

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Informations

Chapitre VIII
La menace
Les devins de Chaldée luy avoient prédict qu’il fallait, après avoir honorablement vescu, qu’il decedast en la fleur de sa prosperite. […]
LXXIII. Ceste vie dissoluë fut cause de luy augmenter sa maladie, dont la cause primitive fut legere du commencement : car il fut long temps sans s’apercevoir qu’il avoit une apostume dedans le corps, laquelle par succession de temps vint à corrompre sa chair, de sorte qu’elle la tourna toute en poulx, tellement que combien qu’il y eust plusieurs personnes après à l’espouiller nuict et jour, ce n’estoit encore rien de ce que lon ostoit au prix de ce qui revenoit, et n’y avoit vestement, linge, baing, lavatoire, ny viande mesme, qui ne fust incontinent remplie du flux de ceste ordure et villanie, tant il en sortoit : il entroit plusieurs fois le jour dedans le baing pour se laver et nettoyer, mais tout cela ne servoit de rien, car la mutation de sa chair en ceste pourriture le gaignoit incontinent de vitesse, et ny avoit moyen de nettoyer qui peust suffire à si grande quantité.
PLUTARQUE
, Vie de Lucius Cornelius Sylla.
L’analyse de la connexion dans le monde nous permet de classer les régions en deux catégories :
• le Moteur fonctionnel de l’humanité, qui, grâce à la globalisation, regorge de réseaux de communication, de transactions financières et commerciales, de flux médiatiques et de structures de sécurité collective. Les populations y jouissent d’un gouvernement stable, en général démocratique, et d’un niveau de vie en hausse permanente ;
• le Trou ignore la globalisation qui y reste superficielle, voire inexistante. Les connexions, disons les systèmes de communication en général, y sont peu développées. Les populations gémissent sous des systèmes répressifs, souffrent de la pauvreté et des maladies, et sont affligées par des conflits chroniques.
En contradiction avec les rêveries à la Victor Hugo, répandues en Europe au XIXe siècle, le progrès scientifique n’a pas apporté le bonheur à l’humanité du XXIe siècle. Mais, fait nouveau, il nivelle les potentiels de nuisance entre les différents acteurs de la scène internationale. Une instabilité latente pèse sur l’ordre international, qui provient essentiellement de la facilité caractérisant le développement des armes nucléaires, chimiques et biologiques, dites armes de destruction massive (ADM). En 1969, un groupe d’experts témoignant devant un comité des Nations unies estimait que « des pertes causées par une opération de grande envergure dirigée contre la population civile reviendraient à environ 2 000 dollars par kilomètre carré avec des armes classiques, à 800 dollars avec des armes nucléaires, à 600 dollars avec des gaz neurotoxiques et à 1 dollar avec des armes biologiques ».
Quelle que soit la solidité du bouclier déployé par l’hyperpuissance, aussi écrasante que soit la domination économique des grands ensembles continentaux, États-Unis, Europe, Russie, Inde, Chine, Japon, un petit État peut aujourd’hui acquérir le moyen de les détruire. Israël, menacé d’extermination par ses ennemis, dissuade grâce à ses bombes nucléaires, une bonne centaine de millions d’Arabes ses voisins, de se liguer contre ses cinq millions de citoyens. Plusieurs autres États désirent disposer d’armes reposant sur la science, qu’elles soient de nature nucléaire, chimique ou biologique. Certains d’entre eux, appelés par les Américains rogue states, font plus peur que les autres, parce qu’ils refusent la loi internationale imposée par les grandes puissances : l’Irak, aujourd’hui dompté, a été le premier, imité par la Syrie, l’Iran, la Libye, le Pakistan et la Corée du Nord. L’avenir en verra naître d’autres. L’Administration Bush II en a donné la définition suivante1 :
« Dans les années 1990, nous avons assisté à l’émergence d’un petit nombre d’États “voyous” qui, bien que très différents les uns des autres, ont en commun plusieurs caractéristiques :
— ils maltraitent leur propre population et dilapident les ressources nationales pour le plus grand profit de leurs dirigeants ;
— ils ne manifestent aucun respect à l’égard des lois internationales, menacent leurs voisins et violent avec cynisme les traités qu’ils ont signés ;
— ils sont déterminés à acquérir des armes de destruction massive, de même que d’autres technologies militaires de pointe, et à s’en servir […] ;
— ils commanditent le terrorisme à travers le monde ;
— ils font bon marché des valeurs humaines fondamentales, haïssent les États-Unis et toutes les causes que ces derniers défendent. »
N’acceptant pas le mot « voyou », nous adoptons cependant le concept tel que défini ci-dessus comme désignant des États qui refusent de se joindre aux démocraties occidentales, pour suivre une voie d’opposition s’écartant d’une « fin de l’Histoire » à la Fukuyama.
Les pays qui possèdent de telles armes essaient en vain d’éviter leur prolifération chez les autres : la prolifération est un fait de nature. Elle s’apparente aux poux de Sylla.
C’est la thèse de ce livre que contrairement à l’opinion courante, les facteurs principaux de l’évolution du XXIe siècle ne sont pas les événements économiques, politiques, culturels ou psychologiques, mais techniques. La technique amplifie et surtout transforme le cours des événements, par son action quantitative qui crée soudain des révolutions qualitatives.
Du Trou surgit une double menace pour le Moteur.
La première menace provient des États du Trou, qui, non sans raison, se considèrent eux-mêmes provoqués par la politique prédatrice des États du Moteur, acharnés à accaparer les richesses naturelles. Dans le domaine de la nuisance, les plus petits profitent relativement plus du progrès technique que les grands : les États-Unis ne sont pas plus forts lorsqu’à leurs dix mille bombes nucléaires ils en ajoutent dix, mais l’acquisition par l’Irak ou la Corée du Nord de ces dix bombes leur permet de se faire craindre de l’univers, alors qu’au XXe siècle ils vivotaient marginalement dans l’ombre de l’Histoire. Les « armes du pauvre » donnent à qui les possède, les moyens de se passer du développement économique qui permettait traditionnellement d’acquérir par étapes les coûteux outils de la puissance. La loi de Moore est un grand égalisateur.
L’autre menace a pris naissance au fond du Trou, dans deux des pays les plus déconnectés, le Soudan et l’Afghanistan, et elle doit sa virulence au fait qu’elle fonctionne sur le réseau de connexion du Moteur ! Le progrès technique porteur de la mondialisation ne profite pas qu’aux États : s’il les renforce, il renforce en même temps les réseaux privés, qui deviennent capables d’acquérir rapidement une capacité destructrice aux effets planétaires.
Premiere partie
La proliferation par les États
Le concept de prolifération concerne les États qui cherchent à se doter d’armes de destruction massive. S’il en avait été question dès le début de la guerre froide, l’événement à partir duquel s’est déclenchée la prise de conscience des risques liés à la prolifération, a été le conflit entre l’Iran et l’Irak (1980-1989), qui a vu l’emploi par l’Irak d’armes chimiques et de missiles balistiques contre les populations civiles, suivi de la découverte du programme nucléaire irakien et du potentiel chimique et biologique de l’ex-Soviétie.
Il faut replacer ces péripéties dans l’évolution générale du dernier quart de siècle. L’année 1979 a vu deux fortes perturbations locales, dont la politique des États-Unis a projeté les conséquences au premier plan de la scène mondiale : en février, l’effondrement du régime du Chah, pilier de la stabilité dans la région du golfe Persique, sous les coups de la révolution islamique ; puis, en décembre, l’invasion de l’Afghanistan par l’Armée rouge pour y maintenir un protectorat soviétique.
À ces deux opérations violentes, qu’elle a considérées à juste titre comme dirigées indirectement contre elle, l’Amérique a riposté, non par l’envoi de ses soldats, impossible après sa défaite au Vietnam, mais par l’armement, le financement et, en général, le soutien d’alliés recrutés localement à qui la sale besogne était sous-traitée :
• L’Irak a été chargé de contenir la poussée iranienne vers l’ouest et Saddam Hussein a attaqué la République islamique en septembre 1980. Les sbires de l’ayatollah Khomeyni ont signé dans l’été 1988 un armistice avec Saddam qui a bloqué leur expansion vers l’ouest.
• Les moujahidines afghans, arabes ou pakistanais, armés de Stinger2 américains, ont contraint Moscou à retirer ses troupes d’Afghanistan en février 1989.
La politique américaine a triomphé sans coup férir. Les supplétifs, désormais inutiles, sont abandonnés dans leur pays exsangue et dévasté ; Saddam ruiné par la guerre ne peut payer ses dettes à ses frères arabes ; les subventions aux jihadistes de Kaboul et des alentours sont supprimées. Désespérés les ex-alliés des États-Unis réagissent dans les deux zones :
• Le 2 août 1990, Saddam Hussein annexe le Koweït et déclenche ainsi la guerre du Golfe, dont l’issue permet à la communauté internationale de le neutraliser par l’embargo et les inspections. Souterrainement cependant, l’occupation impie du territoire sacré de l’Arabie par les Yankees infidèles irrite l’Oumma3 contre eux.
• Les seigneurs de la guerre s’étripent en Afghanistan, jusqu’au moment où pour rétablir un semblant d’ordre les services secrets du Pakistan inventent les talibans, équipés par la CIA.
Le recours américain à des alliés locaux sous-développés a soudain rencontré l’impact formidable de la loi de Moore : la prolifération a engendré dans les années 1980 les armes de destruction massive de l’Irak et dans les années 1990 l’utilisation de l’Internet par Oussama Ben Laden.
On appelle proliférateur un pays qui possède la maîtrise des ADM et alimente la prolifération en vendant sa technologie et ses produits.
Un proliférant est un pays client qui acquiert ou cherche à acquérir des technologies, des équipements, des matières ou du savoir-faire dont il ne dispose pas, afin de fabriquer lui-même des ADM et des missiles vecteurs de ces armes.
À côté des circuits proliférateur-proliférant se nouent des circuits proliférant-proliférant, qui associent les compétences complémentaires des partenaires.
La lutte contre la prolifération s’inscrit pour l’instant dans le contexte du désarmement progressif entamé par les grandes puissances après la chute de la Soviétie, et elle en est complémentaire. La diminution en cours du niveau des forces nucléaires des cinq États « reconnus » ne se poursuivra que si les pays « nucléaires de fait » et les proliférants acceptent de modérer leurs efforts. Or nous assistons non à une modération mais à une progression de la prolifération le long d’un arc géographique allant de la Corée du Nord à la Méditerranée : il existe en effet une corrélation forte entre gradients d’instabilité régionale et acquisition d’ADM. Le proliférant se fixe pour objectif de sanctuariser son pré carré ; mais lorsqu’il a acquis une capacité ADM opérationnelle, il veut la conserver. Les zones actuelles de prolifération subsisteront donc dans le futur, alors que d’autres naîtront avec la croissance de nouveaux gradients.
Si au début la prolifération a été organisée par les structures étatiques, c’est-à-dire par une autorisation explicite et formelle du gouvernement central, elle tend à évoluer vers une quasi-privatisation, soit par tolérance des intérêts d’industriels en mal de clientèle, soit par une véritable détérioration de l’autorité au bénéfice de groupes privés régionaux ou locaux. La politique antiproliférante qui a été suivie jusque vers 1990 reposait sur la négociation avec les gouvernements, consacrée à l’établissement de traités, et elle a connu un certain succès, mais la prolifération a beaucoup augmenté à partir de 1990, avec la soudaine arrivée sur le marché noir du travail international du personnel employé jusque-là par le complexe militaro-industriel soviétique.
On sait maintenant que les pays proliférateurs les plus virulents sortent des empires écroulés qui ont mené de grands programmes secrets d’ADM et qui, après l’arrêt de leur soutien étatique, sont incapables de contrôler les centaines ou milliers de spécialistes naguère impliqués dans ces programmes avec des financements et des moyens illimités. Nostalgiques de leur ancien pouvoir, ou simplement au chômage technique, ils constituent une main-d’œuvre mobile prête à se vendre pour continuer dans un autre pays les travaux qui la faisaient vivre. Ainsi les nazis spécialistes de V2 ont-ils été employés par les Américains et les Soviétiques après la Seconde Guerre mondiale. Une telle « prolifération privée » a profité d’abord aux rogue states, mais Netwar pourrait bien en devenir le bénéficiaire.
Dans les années 1990, les instabilités régionales se sont mondialisées et ont en effet donné naissance à Netwar. À côté des pays proliférants apparaît maintenant l’éventualité de réseaux proliférants.
La législation internationale
Le système international de contre-prolifération appartient au système plus global d’Arms Control fait d’instruments légaux et politiques, traitant à la fois des ADM et des autres types d’armes. Mis au point progressivement pendant la guerre froide, il offre un cadre au dialogue stratégique, qui oscille entre la coopération et la confrontation. Comme toute la vie internationale, il est fondé sur deux piliers, un ensemble d’engagements juridiques pris en toute souveraineté par les États parties, et une volonté politique affichée.
Les armes nucléaires
Rappelons que les bombes nucléaires à fission utilisent au choix deux types de matériaux radioactifs, l’uranium enrichi à 93 % en isotope 235, ou le plutonium produit lui-même dans des réacteurs à uranium. Pour obtenir une bombe il faut disposer d’à peu près 16 kg d’uranium enrichi, ou de 6 kg de plutonium, et mettre au point le délicat système qui permet l’explosion. Un programme nucléaire civil se contente d’uranium faiblement enrichi.
Deux accords internationaux ont été imaginés pour essayer de contrô...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Prologue
  5. Chapitre premier - Le moteur de l’histoire
  6. Chapitre II - Les invariants
  7. Chapitre III - Les racines de l’hyperpuissance
  8. Chapitre IV - Cyberwar I : la théorie
  9. Chapitre V - Cyberwar II : la pratique
  10. Chapitre VI - Le bunker Amérique
  11. Chapitre VII - Puissance et jouissance
  12. Chapitre VIII - La menace
  13. Chapitre IX - Écrit sur le mur
  14. Fuir
  15. Liste des abréviations (ordre alphabétique)
  16. Remerciements
  17. Index
  18. Du même auteur chez Odile Jacob