Pour en finir avec le déclin
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Pour en finir avec le déclin

Les priorités économiques et sociales de la France

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Les priorités économiques et sociales de la France

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À propos de ce livre

Quelles politiques économiques et sociales faut-il mener dans les années qui viennent pour retrouver confiance et foi en l'avenir?? Patrick Artus et Marie-Paule Virard nous proposent dans ce livre six grandes priorités, du pouvoir d'achat des plus modestes à la modernisation de notre appareil industriel en passant par la transition énergétique. Le fil rouge de ce livre est l'éducation et la formation pour ceux qui en ont le plus besoin?: les jeunes, les chômeurs, les seniors. Car la bataille de l'éducation et des compétences conditionne tout le reste. C'est elle qui permettra à la France de redevenir une nation forte et entreprenante. Patrick Artus est professeur associé à l'École d'économie de Paris et conseiller économique de Natixis. Marie-Paule Virard est journaliste économique. Ensemble, ils ont publié chez Odile Jacob La Dernière Chance du capitalisme.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2022
ISBN
9782415001438

CHAPITRE 1

Pouvoir d’achat, bas salaires : une affaire de solidarité publique ou de solidarité privée ?

« Un paquet de gâteaux, une boîte de haricots plats, un paquet de pâtes, une boîte de raviolis, des produits d’hygiène, des produits frais… »
Notre histoire commence à Roubaix, l’une des villes les plus pauvres de France, un beau jour d’octobre 2021. Plus précisément, entre la chambre froide et les réserves des locaux du Secours populaire où la responsable de l’antenne locale distribue, du lundi au vendredi, une série de colis alimentaires à quelque 8 000 familles, de quoi nourrir 23 000 adultes et enfants, un quart de la population de la ville. Le chiffre a tout simplement doublé depuis l’irruption du Covid-19. Avant le confinement, la distribution représentait une dizaine de colis par jour. Cet hiver, elle a atteint 175 unités. Aujourd’hui, elle vient en aide à des personnes qui sont au chômage ou travaillent à temps partiel, des retraités qui ne s’en sortent plus, des étudiants contraints de rogner sur le budget nourriture en raison de l’augmentation des prix et de la cherté du loyer… Tous disent leur souffrance sociale et morale : « On nous oublie trop. Il faut que cette réalité s’impose dans la campagne. »
Dès la rentrée 2021, la question du pouvoir d’achat a fait irruption dans le débat politique, et au sommet de l’État on a vite compris qu’elle allait finir par s’installer au cœur de la campagne présidentielle. D’où une offensive à double détente. D’un côté, Emmanuel Macron et le gouvernement ont pris soin, dès la présentation du projet de loi de finances 2022, de tenter de convaincre les Français que leur pouvoir d’achat avait bel et bien grimpé lors du quinquennat. Chiffres à l’appui1. De l’autre, dès la fin du mois d’août, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a lancé l’offensive en direction du patronat : « La croissance doit profiter à tout le monde sans exception, même aux plus faibles, même aux moins qualifiés, tous ceux qui ont été aux avant-postes de la crise, c’est une question que l’on doit se poser collectivement2. » Manière d’interpeller les entreprises qui, pendant la crise sanitaire, ont reçu quelque 80 milliards d’euros d’aides publiques (hors prêts garantis par l’État) et affichent désormais des comptes en bonne santé. Leur taux de marge a atteint 41,8 % au troisième trimestre 2021, un record depuis… 1949. Quant aux firmes du CAC 40, elles ont réalisé plus de 60 milliards d’euros de profit au premier semestre 2021, soit 41 % de plus qu’au cours de la même période de 2019. Une prospérité dans la crise qui n’est pas toujours comprise par l’opinion.
Pour de nombreux salariés, les deux années de crise sanitaire ont relancé le débat sur le pouvoir d’achat et sur les inégalités de revenu en faisant prendre conscience du fait que certains salariés, essentiels pendant la lutte contre le Covid, n’en étaient pas moins maltraités sur le plan salarial comme, trop souvent, sur celui des conditions de travail. De quoi alimenter bien des frustrations, d’autant que l’augmentation des prix à la consommation, que ce soit celui du gasoil ou de la baguette, donne le sentiment de ne pas faire relâche. La crise des gilets jaunes avait débuté en son temps avec un coup de chaud sur le prix de l’essence. L’histoire semble bégayer en cet hiver 2021-2022 entre l’envolée des prix du gaz domestique et du gasoil à la pompe. Le tout sur fond de retour de l’inflation (+ 2,7 % en 2022 selon l’Insee). De quoi raviver l’exaspération des ménages sur leurs conditions de vie, exaspération encore attisée par les difficultés associées à la crise du Covid. On pressent que la mauvaise surprise de trop sur les prix pourrait rallumer la mèche. Le sentiment de paupérisation croissante d’une partie de la population qui ne parvient plus à vivre décemment de son travail pèse lourd dans le climat social actuel. Un certain nombre d’enquêtes d’opinion confirme régulièrement qu’un Français sur deux estime vivre moins bien aujourd’hui qu’il y a dix ans. Ils sont même deux sur trois parmi les Français les plus modestes.

Le « ressenti » et la réalité des chiffres

Bien sûr, les experts mettent d’emblée en balance le « ressenti » et la réalité des chiffres. Arguant du fait – et ce n’est pas faux – qu’en France le décalage a toujours été grand entre le premier et la seconde. Que nous disent les chiffres, en effet ? Que grâce à la générosité de l’État, le pouvoir d’achat s’est grosso modo maintenu pendant la crise sanitaire et qu’à la différence de ce que l’on a pu observer dans l’ensemble des pays de l’OCDE, il n’y a pas eu en France au cours des vingt dernières années de déformation du partage des revenus au détriment des salariés (voir graphiques 1 et 2).
Mesurées par l’indice de Gini, les inégalités de revenu, avant comme après impôts, sont restées stables dans notre pays quand elles ont fortement progressé ailleurs (voir graphique 3). Tout cela, on le sait, grâce à la générosité de notre modèle social dont la redistribution est l’une des plus fortes au monde. L’édition 2021 de l’Insee sur « Les revenus et le patrimoine des ménages » confirme que les transferts publics continuent de corriger sensiblement les inégalités.
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Graphique 1. France : salaire réel par tête (déflaté par le prix du PIB) et productivité par tête (base 100 en 1998).
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Graphique 2. OCDE* : salaire réel par tête (déflaté par le prix du PIB) et productivité par tête (base 100 en 1998).
Pour les revenus primaires, l’écart entre le premier et le dernier décile passe de 1 à 14 avant redistribution à 1 à 7 après redistribution, et même de 1 à 3 lorsqu’on prend pour référence le niveau de vie dit « élargi », c’est-à-dire celui qui inclut les transferts publics en nature comme l’éducation, la santé et le logement. Une situation plutôt enviable dans le paysage international.
Mais, si on se compare, on ne se console pas pour autant. Les Français sont de plus en plus nombreux, y compris les salariés, y compris les salariés qui travaillent à plein temps, à rencontrer des difficultés à vivre décemment au quotidien. Beaucoup ne sont pas sortis indemnes des deux années qui viennent de s’écouler. Le sentiment de ne pas être rémunérés de leurs efforts est particulièrement présent parmi ceux que l’on a appelés les travailleurs de la seconde ligne, à commencer par tous les personnels de santé, des aides-soignants aux infirmières en passant par les aides à domicile et autres auxiliaires de vie. Mais ils ne sont pas les seuls à se sentir laissés pour compte. C’est le cas aussi de tous les salariés dont le porte-monnaie a été touché de plein fouet par la crise sanitaire, souvent des femmes et des hommes qui avaient déjà le plus grand mal à boucler leurs fins de mois.
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Graphique 3. Indice de Gini des inégalités de revenu après redistribution (échelle de 0 à 1) : France, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Italie.
Une étude du Crédoc3, publiée à la rentrée 2021, recense parmi les Français quelque 4 millions de « nouveaux vulnérables » qui, au cours des deux dernières années, ont basculé dans une situation préoccupante (emploi, finance, santé, logement), situation souvent aggravée par l’isolement. L’enquête du Crédoc montre que l’accès à l’emploi est devenu difficile pour 48 % d’entre eux, avec 34 % en contrat à durée déterminée (contre 16 % pour les « non-vulnérables »), et 14 % au chômage (contre 6 % des autres). Sans surprise, les auteurs précisent qu’il s’agit le plus souvent d’« actifs jeunes, travaillant plutôt dans le privé (74 %), notamment les secteurs du commerce, de l’hébergement-restauration, des activités culturelles et des services aux ménages, peu diplômés puisque un sur deux n’a pas le baccalauréat et, le plus souvent, chargés de famille ». Ils ajoutent que cette précarité concerne en majorité des Franciliens (21 %) et des habitants des villes de plus de 100 000 habitants (34 %).
Une évolution qui renforce la perception d’un approfondissement des inégalités puisque les 20 % des ménages les plus aisés ont alimenté leur bas de laine pendant la crise sanitaire (l’épargne des Français a augmenté de 200 milliards d’euros selon la Banque de France à la fin de 2021), tandis que les plus fragiles devenaient encore plus fragiles et que la classe moyenne voyait son pouvoir d’achat augmenter faiblement (le pouvoir d’achat du salaire médian n’a augmenté en moyenne que de 0,9 % par an depuis 1998). La photographie proposée par le Crédoc dit tout des raisons pour lesquelles, bien que les « moyennes » livrées par les statistiques révèlent une amélioration du pouvoir d’achat au fil des années, y compris si l’on tient compte des fameuses dépenses contraintes (logement, téléphonie, énergie), la situation financière de nombreux Français se dégrade doucement mais sûrement, a fortiori dès lors que les plus précaires (notamment les jeunes) sont confrontés à une crise aussi violente que la crise sanitaire.

La prolifération des « bad jobs », mauvaise nouvelle pour le pouvoir d’achat

D’abord, trop de Français sont encore à côté ou en marge de l’emploi. Et, dans ce domaine, la comparaison n’est pas favorable à l’Hexagone. En France, le taux de chômage pointait encore à 7,6 % et 2 321 000 demandeurs d’emploi à l’automne 2021, soit 1 point de plus que dans l’Union européenne (6,7 %) et sensiblement plus qu’aux Pays-Bas (2,9 %), en Allemagne (3,3 %), au Danemark (5,1 %), aux États-Unis (4,2 %) ou en Belgique (3,2 %). Et il excédait encore les 7 % au début de 2022. Quant au chômage des jeunes (moins de 25 ans), il s’élève à 18,6 % (546 000) contre 7,5 % en Allemagne ! Les chiffres parlent d’eux-mêmes : avec 67 %, le taux d’emploi français (la proportion de la population des 15-64 ans qui occupe un emploi) est bien trop faible – 10 points de moins que le taux d’emploi allemand, par exemple.
Or, on le sait, il existe un lien très direct entre le niveau du taux d’emploi, le niveau de revenu par habitant et les inégalités (plus le taux d’emploi est élevé, plus les inégalités de revenu sont faibles). L’analyse économétrique le confirme sans le moindre doute : un taux d’emploi élevé réduit les inégalités, la pauvreté, la pression fiscale, et accroît le revenu par tête4. Avec 67 %, l’Hexagone se situe dans les profondeurs du classement en la matière, loin derrière la plupart de ses grands compétiteurs, à plus de 13 points des Pays-Bas (80,8 %), 10 points du Japon (77,7 %), 9 de l’Allemagne (75,9 %) et presque autant du Danemark et de la Suède (75,4 %), 8 points du Royaume-Uni (75 %) et 2 points des États-Unis (69 %)5. Au passage, notons aussi que le taux d’emploi constitue un excellent indicateur de l’efficacité des politiques d’éducation, de formation, d’amélioration des connaissances et d’innovation. Nous y reviendrons. En tout cas, il est clair que chômage et inactivité ne sont pas les meilleurs amis du pouvoir d’achat.
Mais il existe une autre raison pour laquelle le pouvoir d’achat des Français n’est pas au mieux : le développement de ce que l’on appelle les bad jobs, autrement dit des emplois peu ou pas qualifiés, parfois précaires, en tout cas mal rémunérés et souvent assortis de conditions de travail pénibles. Les bad jobs ne sont certes pas une spécialité française, mais – dans l’Hexagone comme ailleurs et même un peu plus qu’ailleurs – ils sont de plus en plus nombreux en raison de l’évolution de la structure des emplois.
Depuis les années 1980, l’emploi manufacturier en France a perdu plus de 30 % de ses effectifs quand les emplois de service augmentaient de 55 %. L’essentiel des créations d’emplois se concentre désormais aux deux extrémités du spectre : d’un côté, des emplois qualifiés, voire très qualifiés, dans ce qu’il reste de l’industrie, la finance, les nouvelles technologies, les services complexes aux entreprises, mais en trop petit nombre ; de l’autre, des emplois peu ou pas qualifiés dans l’hôtellerie-restauration, la distribution, les transports, les loisirs, les servic...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Introduction
  5. Chapitre 1 - Pouvoir d'achat, bas salaires : une affaire de solidarité publique ou de solidarité privée ?
  6. Chapitre 2 - Où il est question des prix de l'immobilier, de l'économie de spéculation et de la politique monétaire…
  7. Chapitre 3 - Formation et compétences, la mère des batailles
  8. Chapitre 4 - Pas de transition énergétique réussie sans redistribution vers les plus fragiles
  9. Chapitre 5 - Refaire de la France une grande nation d'innovation grâce à une nouvelle alliance entre l'État et les entreprises
  10. Chapitre 6 - Concentrer la dépense publique là où elle est la plus efficace
  11. Conclusion
  12. Sommaire
  13. Chez Odile Jacob