Querelles écologiques et choix politiques
  1. 224 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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À propos de ce livre

Les polémiques sur le réchauffement climatique, la sécurité des centrales nucléaires après Fukushima, l'épuisement des réserves en matières premières non renouvelables entretiennent l'inquiétude de l'opinion sans parvenir à installer des représentations objectives partagées, moins encore un consensus stable sur les mesures qu'il convient de prendre face à ces défis. Comment, alors, sortir de la confusion?Des personnalités particulièrement emblématiques des diverses thèses qui s'affrontent en ces matières précisent leurs arguments, répondent sans détour aux objections de leurs adversaires, expriment leurs points d'accord et de désaccord. L'objectif: dégager les critères humains, économiques et sociaux propres à légitimer une hiérarchisation des priorités d'une politique environnementale efficace et réaliste pour l'avenir.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2011
ISBN
9782738182982
Première partie
Deux questions vitales pour l’humanité :
le réchauffement climatique
et la crise des matières premières
Jean Jouzel
« Le réchauffement
est sans équivoque »
Né en 1947, Jean Jouzel est glaciologue, ingénieur diplômé de l’École supérieure de chimie industrielle de Lyon, docteur en sciences physiques. Il est directeur de recherches au Commissariat à l’énergie atomique (CEA). En 2002, il a obtenu, avec Claude Lorius, la médaille d’or du CNRS. Il est vice-président du groupe scientifique du GIEC, organisme qui reçoit, avec Al Gore, le prix Nobel de la paix en 2007.
Je voudrais dire un mot, d’abord, de mon domaine d’expertise, qui est bien délimité. Je suis un scientifique dans le domaine de l’évolution du climat. Je contribue aux travaux de la communauté scientifique française sur la connaissance des climats passés à partir des données obtenues sur les forages glaciaires de l’Antarctique et du Groenland. Là se situe le cœur de mes travaux : quand je fais de la recherche, c’est essentiellement sur les grands forages du Groenland et de l’Antarctique.
J’ai cependant élargi mon domaine de compétence, dans la mesure où l’évolution du climat implique la mise au jour des processus qui orientent le passage du passé au futur. Je me suis investi durant huit ans dans mes fonctions de directeur de l’Institut Pierre-Simon-Laplace, où l’on fait beaucoup de modélisation. Au niveau international, je suis vice-président du groupe scientifique du GIEC depuis dix ans, et je participe à l’élaboration des rapports depuis 1994. C’est donc à travers ces différentes entrées que s’est constituée mon expertise. Je me suis également impliqué dans la réflexion sur les rapports entre science et société. Je suis actuellement président du Haut Conseil de la science et de la technologie, auquel le Premier ministre a demandé spécifiquement d’examiner le problème des rapports entre science et société.
Le climat, un objet de science : phénomène ancien, avancées récentes
Le climat est d’abord, pour moi, l’objet d’une véritable science. Nombreux sont ceux qui, sur cette planète, travaillent sur l’évolution du climat. L’Institut Pierre-Simon-Laplace, par exemple, comprend plus d’un millier de personnes, dont quelques centaines de scientifiques qui s’intéressent à des domaines directement liés au climat, comme l’observation ou la modélisation. Il s’agit donc d’une vraie science, qui, d’ailleurs, est plus ancienne qu’on ne le croit. L’existence de périodes glaciaires et interglaciaires a été connue bien avant la dérive des continents. Il y a eu, au XIXe siècle, de nombreuses théories sur les causes de ces variations glaciaires et interglaciaires, notamment la possibilité d’une participation de l’effet de serre. Comme de nombreuses disciplines, elle n’a cependant véritablement explosé qu’après la Seconde Guerre mondiale. À cette époque, les scientifiques ont pu disposer d’ordinateurs qui ont permis de développer en parallèle et assez conjointement des modèles météorologiques – nous savons prédire le temps qu’il fera dans quelques jours – et des modèles climatiques.
Les phénomènes climatiques sont en effet des phénomènes complexes qui demandent à être appréhendés par l’observation, la modélisation et la compréhension des processus. L’exploration des climats passés s’est, à ce titre, beaucoup développée depuis un demi-siècle. Si je considère mon domaine, les grands forages glaciaires ont commencé dans les années 1960. Ils continuent actuellement. C’est vrai aussi pour les forages océaniques et continentaux. Par ailleurs, il y a aujourd’hui un grand intérêt pour les échelles de temps courtes, en particulier pour le dernier millénaire.
Trois certitudes
Nous sommes dans un domaine où il y a des questions et des incertitudes, mais aussi des certitudes. Je vais essayer d’en avancer trois qui, selon moi, sont avérées et parfaitement étayées par les rapports du GIEC. Quand je dis « certitude », cela ne veut pas dire que l’on ne peut pas en discuter. Heureusement !
La première : les activités humaines modifient la composition de l’atmosphère depuis au moins deux cents ans, soit depuis le début de l’ère préindustrielle. On observe une hausse de 40 % du gaz carbonique et de 20 % environ du protoxyde d’azote ; il y a environ 1,5 fois plus de méthane. Voilà un phénomène sur lequel nous sommes bien documentés (Figure 1). Cette modification s’est opérée de manière importante et rapide, ce qui a une conséquence sur laquelle l’accord est également assez général : cette augmentation des gaz à effet de serre (gaz carbonique, protoxyde d’azote, méthane et autres composés à effet de serre d’origine anthropique) s’accompagne d’une accumulation de chaleur dans les basses couches de l’atmosphère. Pour chauffer notre environnement proche, nous avions 240 watts par mètre carré voici deux cents ans ; nous en avons 1 % de plus aujourd’hui. On me rétorquera que 1 %, ce n’est pas beaucoup. Cela représente pourtant 2,5 watts supplémentaires par mètre carré liés à l’augmentation des gaz à effet de serre, disponibles dans les basses couches de l’atmosphère. Voilà comment on peut présenter, de manière un peu simplifiée, la première des certitudes.
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Figure 1 – Variations depuis deux mille ans des concentrations du gaz carbonique, du méthane et du protoxyde d’azote dans l’atmosphère (adapté du rapport du GIEC 2007).
Deuxième certitude, sur laquelle je vais revenir : le réchauffement du climat est sans équivoque.
Troisième certitude, qui constitue à mes yeux le vrai problème : le climat va continuer à se réchauffer. Cela, parce que l’on continue à émettre des gaz à effet de serre dans des proportions telles que l’océan et la végétation ne sont pas capables de les absorber. Les quantités de gaz carbonique, le premier contributeur à l’augmentation de l’effet de serre, n’arrêtent pas d’augmenter dans l’atmosphère. Si l’on voulait stabiliser le climat – stabiliser seulement ! –, il faudrait que nous n’émettions pas plus de gaz carbonique ou d’autres gaz à effet de serre que notre planète n’est capable d’en absorber. Nous sommes loin du compte : pour le gaz carbonique, il existe environ un facteur 2 entre ce qui est émis actuellement et ce qui est absorbé. Nous savons donc, non seulement que le climat va continuer à se réchauffer, mais qu’il sera, de plus, très difficile de faire en sorte que ce réchauffement ne dépasse jamais 2 °C en moyenne planétaire. Cela va requérir une diminution de l’émission des gaz à effet de serre par deux, voire par trois, d’ici 2050 (Figure 2). Cet objectif des 2 °C fut le fruit des discussions de Copenhague (2009). Auparavant, la convention climat de Rio (1992) avait simplement dit que tout devait être fait pour stabiliser le climat, c’est-à-dire pour stabiliser les concentrations des gaz à effet de serre. L’apport véritable de Copenhague et de Cancún (2010) – tous les pays ont signé l’accord de Cancún, sauf la Bolivie – tient au fait que nous sommes passés de cette exigence non quantifiée de stabilisation à l’idée que tout doit être mis en œuvre pour que le réchauffement climatique soit limité à 2 °C par rapport au climat préindustriel, c’est-à-dire à peu près 1,5 °C par rapport au climat actuel. Tel est l’objectif qui se trouve au cœur des négociations internationales.
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Figure 2 – Différents scénarios d’émissions analysés par le GIEC, et scénario de stabilisation à 450 ppm (CO2 équivalent) qui pourrait permettre de limiter le réchauffement à 2 °C.
Voilà donc les trois certitudes que j’évoquais. À ce titre, il est important de comprendre, au moment où nous commençons le cinquième rapport du GIEC, que chacun des rapports remet pour ainsi dire les compteurs à zéro : les certitudes sont à chaque fois remises sur le tapis.
Activités humaines et réchauffement climatique : quel lien ?
La grande question, que chacun se pose et qui est au cœur du débat, porte sur le rapport de cause à effet entre l’augmentation des gaz à effet de serre liée à l’activité humaine et le réchauffement climatique déjà observé. Il s’agit là d’un véritable débat scientifique. Il demande que l’on analyse les données du passé, de manière à distinguer ce qui, dans le réchauffement climatique, est le fait de l’homme ou de la nature (Figure 7). Je pense, en accord avec la conclusion actuelle du GIEC, qu’une large part du réchauffement climatique des cinquante dernières années est liée aux activités humaines. Il y a neuf chances sur dix pour que cette conclusion soit juste, ce qui ne veut pas dire – il y a souvent confusion sur ce point – que 90 % du réchauffement climatique soit dû aux activités humaines.
L’incertitude n’est pas l’ignorance
Nous ne cachons jamais le fait que nous avons beaucoup d’incertitudes. En ce qui concerne le niveau de la mer, par exemple, nous estimons entre 20 et 60 centimètres, peut-être beaucoup plus, son élévation à la fin du siècle. Ces estimations et ces zones d’ombre sont exposées clairement. Pour un scénario d’émissions donné, il y a au moins un facteur 2 dans l’amplitude du réchauffement climatique (Figure 3). Le bon sens conduit cependant à penser que plus on émet de gaz à effet de serre, plus on a de risques de réchauffement.
Il existe beaucoup d’incertitudes sur la répartition des précipitations, sur l’élévation du niveau de la mer, sur les caractéristiques régionales du réchauffement climatique, sur le risque de surprises. Nous évoquons et nous étudions tout cela. Mais, comme le dit mon collègue Hervé Le Treut : « incertitude n’est pas ignorance ». Mieux vaut être dans l’incertitude que de ne rien savoir : des décisions peuvent en effet être prises dans ce cadre. Sans vouloir paraître trop péremptoire – et j’ai conscience de sortir là du contexte purement scientifique –, il me paraît certain que nos connaissances sont, à l’heure actuelle, suffisantes pour justifier l’action.
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Figure 3 – Réchauffement moyen projeté pour les différents scénarios d’émissions d’ici la fin du siècle avec, à droite, une indication du réchauffement moyen et de l’incertitude estimés.
Les preuves du réchauffement
Il importe de comprendre pourquoi le GIEC affirme que le réchauffement est sans équivoque. Le premier élément est que le GIEC ne s’appuie pas seulement sur les températures – les températures moyennes globales – mais que son diagnostic est basé sur un ensemble d’éléments dont la température globale fait partie. Nous disposons de nombreuses autres données, telles que, par exemple, l’élévation du niveau de la mer, qui témoigne de deux phénomènes directement liés au réchauffement climatique : la dilatation des océans et la fonte des glaciers sur les continents. Il faut également considérer la diminution de la surface de glace de mer en Arctique, à la fin de l’été, la diminution de l’enneigement dans l’hémisphère Nord, l’hiver. Le retrait des glaciers s’observe pour plus de 90 % d’entre eux actuellement. Ces phénomènes sont clairement avérés.
Enfin, il y a également des phénomènes auxquels nous nous attendons, qui, bien que plus ou moins palpables, sont néanmoins très clairs : dans le scénario du réchauffement climatique, on s’attend à un réchauffement de l’océan, déjà observé, qui doit normalement se traduire par une augmentation de la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère, déjà attestée, et dont nous tenons compte dans tous les modèles climatiques. Pourquoi néanmoins ne mettons-nous pas la vapeur d’eau au rang des gaz à effet de serre dont l’activité humaine modifie directement les quantités dans l’atmosphère ? Parce que la durée de vie de la vapeur d’eau dans l’atmosphère est très faible.
Comment expliquer le plateau actuel ?
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Figure 4 – Température moyenne globale : synthèse établie par le GISS (Nasa-New York) avec les données année par année et une courbe lissée, ainsi que l’estimation de l’erreur associée à chaque valeur annuelle (barres verticales).
Si vous vous attachez aux températures globales, et que vous regardez année après année, il apparaît que toutes les années sont très chaudes depuis 2003, sauf 2008 (Figure 4). La dernière décennie est la plus chaude que nous ayons connue depuis que des données météorologiques fiables sont disponibles (Figure 5). Mais si vous considérez la séquence 2003-2010, elle marque un plateau par rapport à la tendance au réchauffement qui caractérisait les années précédentes.
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Figure 5 – Température décennie après décennie depuis 1880 (données du GISS) avec indication des valeurs annuelles.
L’effet de serre, quant à lui, augmente régulièrement sur la même période. Il n’y a pas une année qui échappe à cette tendance. Mais ce qu’il faut bien comprendre, c’est que, même dans un contexte climatique où le gaz à effet de serre augmente régulièrement, nous ne nous attendons pas du tout à ce que la température augmente régulièrement. La figure 6 montre qu’avec un effet de serre augmentant régulièrement, des modèles peuvent simuler des plateaux dans le réchauffement d’une dizaine à une quinzaine d’années, des moments où le réchauffement s’accélère, des années plus froides que la précédente. J’estime pour ma part que pour que la conclusion du GIEC soit remise en cause, il faudrait que le « plateau » dont nous venons de parler dure une bonne vingtaine d’années, soit au moins encore dix à quinze ans, ce qui selon moi ne se produira pas.
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Figure 6 – Simulation de l’évolution du climat qui met en évidence la variabilité et la possibilité de plateaux pour un scénario dans lequel l’effet de serre augmente régulièrement, année après année.
Nous avons peut-être une raison pour expliquer le plateau actuel. L’activité solaire joue bien entendu un rôle, nous ne l’avons jamais nié, et elle est faible depuis une période relativement longue, depuis sept ou huit ans. Vous savez que le soleil a un cycle de onze ans et qu’il a beaucoup de mal à repartir. Il y a un vrai décalage, ce qui pourrait, à l’intérieur de cette dizaine d’années, expliquer déjà un dixième de degré. Si l’activité solaire avait repris normalement son cours, nous devrions déjà être repartis avec des activités solaires fortes, et il y aurait toutes les raisons pour que les années 2010 ou 2011 soient un dixième de degré plus chaudes qu’elles ne le sont. C’est une possibilité d’explication. Le cinquième rapport du GIEC commence ; nous aurons donc plus de données à l’avenir, mais on peut déjà noter que toutes les autres observations depuis les cinq dernières années vont dans le sens d’un réchauffement. La glace de mer continue à diminuer, les glaciers continuent à perdre de la masse, de façon très nette pour certains, le niveau de la mer continue à augmenter. Je parle bien des cinq dernières années. C’est pour cela que lorsque nous regardons le réchauffement, non pas à l’aune de la seule température, mais en considérant l’ensemble des indices qui marquent notre planète, je ne crois pas que l’on puisse parler de remise en cause du diagnostic du GIEC.
Pour conclure, nous observons sur les cinquante dernières années un réchauffement climatique d’environ 0,7 °C, dont une large part serait due, à neuf chances sur dix, aux activités humaines. Celles-ci sont à l’origine de l’augmentation de l’effet de serre, et le réchauffement déjà observé va se poursuivre. L’objectif, auquel j’adhère, de limiter celui-ci à 2 °C par rapport au climat préindustriel requiert par conséquent une diminution importante de ...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. « Penser la société »
  5. Introduction de Luc FERRY
  6. Première partie - Deux questions vitales pour l’humanité : le réchauffement climatique et la crise des matières premières
  7. Seconde partie - L’heure des choix : décroissance ou croissance verte ?
  8. Dans la même collection