Cols blancs et Mains sales
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Cols blancs et Mains sales

Économie criminelle, mode d'emploi

  1. 320 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Cols blancs et Mains sales

Économie criminelle, mode d'emploi

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À propos de ce livre

Fraudes, blanchiment, sociétés-écrans, dessous-de-table dans la vente et l'achat de joueurs, détournements de fonds, corruption des arbitres, dopage: le sport est sur le devant de la scène. Notamment le football, dont les grandes « affaires » font la une. Par-delà ces turpitudes, cet ouvrage est une passionnante étude des techniques dont usent les fraudeurs: tours de passe-passe du monde des jeux, escroqueries, depuis les comptes sociaux jusqu'à Internet en passant par la TVA, les régies publicitaires, le trafic de faux papiers et les sociétés-écrans, etc. Ce livre alerte sur l'ampleur que prend une « économie noire » où opèrent désormais des réseaux organisés, voire des mafias. Appuyé sur une foule d'exemples détaillés, ce document unique, fruit d'une expérience de trente ans, non seulement décrit les « trucs » des prédateurs, mais expose aussi les méthodes de lutte contre la criminalisation du monde des affaires. Noël Pons est fonctionnaire, conseiller au Service central de prévention de la corruption (SCPC). De longue date, il s'intéresse à la fraude, à la corruption et au blanchiment, ainsi qu'aux passerelles entre le banditisme et le monde des affaires. Il dispense de nombreuses formations dans ce domaine en France et à l'étranger.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2006
ISBN
9782738188755
Première partie
Pain (frelaté) et jeux (truqués)
Chapitre premier
Le monde secret
des milliardaires en short
Voici deux millénaires, les empereurs de la Rome décadente offraient du pain et des jeux à la plèbe romaine pour entretenir leur popularité. Aujourd’hui, le spectacle a muté, il est devenu planétaire. Internet et les divers médias permettent d’assister virtuellement aux compétitions. Or, au même moment, l’événementiel est devenu à l’inverse un enjeu national. Le « sport-exhibition » et les jeux qui subissent une évolution similaire se sont médiatisés, ils évoluent même vers une marchandisation sans limite. Le spectacle est désormais vécu comme un moyen d’enrichissement personnel financé par les spectateurs.
Ainsi, pour les organisateurs, le cadeau devient fromage et le spectateur un abonné.
Il est vrai qu’il est plus aisé de s’enrichir en prélevant peu chez beaucoup de personnes que beaucoup à peu de cotisants. C’est pour cette raison que le commerce et celui du sport en particulier s’est développé sur la base de « bouquets », d’abonnements divers, d’achats de produits dérivés déclinés à l’échelle du monde et de l’augmentation ponctuelle du prix des services.
Le sport est donc placé, au moins en Europe et aux États-Unis, dans une situation instable et médiane entre le passage vers l’économie classique, donc vers une reprise en main comptable, et la tentation de poursuivre le banquet avant que la fête ne soit terminée.
Le football est devenu le moteur et l’icône de cette évolution, dépassant même le basket professionnel qui fut l’un des premiers à s’organiser commercialement. La fédération internationale et certaines fédérations nationales ont largement poursuivi cette évolution en créant des compétitions adaptées à ce type de commerce. Cette marchandisation se développe, mais le comportement général reste paradoxalement très attaché à certaines caractéristiques actuelles du football. Ainsi ce sport est-il régulièrement confronté, sous toutes les latitudes, à des prurits affairistes.
Les investigations de toute nature ont été engagées par les services de contrôle sur ce secteur présentant un risque fort de dérive. On peut citer entre autres affaires récentes :
• Le procès du club de Bastia : le sponsoring était en fait un racket mis en place par des « nationalistes ».
• Le problème des agents de joueurs : la fédération a déposé une plainte contre certains agents qui ne posséderaient pas de licence officielle.
• Les transferts du club du Paris Saint-Germain : divers intermédiaires auraient perçu des commissions considérables à l’occasion de transferts de joueurs.
• Les comptes de la fédération : là, ce sont les commissaires aux comptes qui auraient dénoncé des irrégularités commises pour réduire le déficit. Ce dernier aurait été minoré de plusieurs millions d’euros.
• Les règles de la concurrence n’auraient pas été respectées au cours de la passation de marchés des contrats audiovisuels par la fédération : le conseil de la concurrence qui s’était saisi d’office a transmis un dossier à la justice. Ce dossier ne concernerait d’ailleurs pas tous les acteurs.
• Les petits porteurs représentés par l’APPAC, actionnaires minoritaires de Vivendi Universal, ont porté plainte contre X : la société VU était en effet propriétaire de Canal + lorsque le financement du « club Europe » a été effectué. Il s’agissait du versement d’une somme de 252 millions d’euros en contrepartie de la diffusion des matchs aux six clubs les plus importants.
• Le procès d’un joueur qui avait présenté au club un faux passeport s’est conclu par une condamnation à six mois de prison avec sursis du joueur mis en cause.
• Le procès de transferts suspects dans le club phocéen.
Un certain nombre d’autres litiges contractuels et personnels sont pendants et ils pourraient donner lieu à des développements non prévus. Nous sommes donc entrés dans une période riche en péripéties et en risques divers. Jusqu’à présent, les « affaires » liées au football éclataient régulièrement, mais le volet judiciaire restait relativement calme. Des condamnations ont sanctionné la caisse noire de Saint-Étienne4, les manipulations par utilisation de régies publicitaires, les « frères ennemis » des années 1980 : Bordeaux et Marseille, et les titulaires de faux passeports.
La France ne constitue pas l’exception dans un monde éthéré. Pour « magouiller », il faut être plusieurs et de nombreux autres pays ne s’en privent pas. On constate simplement la présence de montages dans les pays qui savent les contrôler. En Italie, par exemple, chaque intersaison donne lieu à ce que les spécialistes appellent leur « championnat des tribunaux ». Certaines équipes ont gagné sur le terrain mais perdent devant les tribunaux car ce sont les décisions judiciaires qui fixent finalement le classement définitif. En 2005, le club de Gênes, ancien parmi les anciens, est sanctionné alors qu’il avait obtenu les points susceptibles de permettre sa montée dans le groupe A. En effet, le résultat des deux derniers matchs aurait été acheté : une somme de 250 000 euros aurait été découverte dans la voiture d’un dirigeant de Venise, l’un des deux clubs mis en cause. Les écoutes diligentées ont convaincu les juges du délit de corruption5, les clubs ont immédiatement interjeté appel. Tel autre club avait assorti ses écritures comptables d’une fausse garantie bancaire, un souvenir de Parmalat6 sans doute !
Le sport constitue désormais, ses dérives le démontrent chaque jour, l’un des vecteurs intéressants de l’économie souterraine car nombreux sont les liens qui le raccrochent à cette dernière, en particulier, l’utilisation généralisée d’une caisse noire et le passage dans des paradis fiscaux. Ainsi l’observateur assiste-t-il à un mélange entre flux entrant et sortant, entre fausses justifications et caisses noires, entre délinquance et bonne foi. Les flux de noirciment ou de blanchiment ne peuvent être distingués et finissent par se mélanger dans la caisse noire. De plus, on y relève, de manière évidente, les carences des législations dans les échanges internationaux, les différences de traitement qui peuvent exister suivant les textes et l’application qui en est faite dans chacun des pays dans lesquels transitent les flux.
Le sport et a fortiori le football est devenu dans ses manifestations les plus médiatisées, un support dans lequel tous les ingrédients sont en place pour que de multiples arrangements puissent être organisés par des personnes désireuses de faire fortune rapidement ou d’accéder à la célébrité. En soi, il n’existe pas de dérive purement sportive. Cependant, la forte implantation internationale, l’impact du volet médiatique national et international, les différences entre législations, la cohabitation entre sociétés et milieu associatif, l’importance des flux en entrées comme en sorties, l’importance des espèces manipulées présentent chacun de nombreuses opportunités de fraudes même lorsque le cadre est régulé. Lorsque les réglementations sont balbutiantes voire inexistantes comme cela peut être le cas dans certains pays, les possibilités de manipulation tendent vers l’infini : nous entrons dans l’aubaine, mieux, dans la prédation ! De plus, la tendance des sportifs eux-mêmes à fuir toute taxation en utilisant l’expatriation, ce qui relève de la décision personnelle voire des procédés et montages les plus complexes qui font intervenir des intermédiaires, rend communes les dérives les plus éhontées.
Il ne s’agit pourtant que de dérives simples, dont la conception est presque cinquantenaire7, fondées sur de la fausse documentation et l’utilisation de sociétés-écrans. De plus, le nombre de montages lui-même est limité. Il n’existe pas plus de cinq à six typologies qui s’adaptent au support. Le secteur des entreprises sportives fait apparaître d’ailleurs, au regard de la fraude et du blanchiment, des pratiques similaires à celles rencontrées dans toute autre entreprise. Il n’existe guère de spécificités à cet égard. La seule différence notable tient à la médiatisation : les dérives du sport sont largement exposées alors que celles constatées dans les autres secteurs économiques sont, en général, gérées de manière bien plus discrète. Cette médiatisation est due à la jeunesse de l’existence de structures sportives conçues comme des machines à sous. Dans les activités plus anciennes, l’expérience et les sanctions répétées ont généré une certaine prudence, la pratique de la gestion de crise s’est imposée. Ainsi, lorsque des problèmes se posent, la communication de crise prend le pas sur l’anathème. La médiatisation n’intervenant que lorsque les bornes sont franchies ou lorsqu’une manipulation est en cours.
L’effet miroir des médias ainsi que la compétence, réelle pour le coup, des journalistes sportifs expliquent aussi le fait que les crises dans certains clubs ou dans certains pays sont traitées très professionnellement et en sources ouvertes. En fait, toutes proportions gardées, cela me rappelle certaines querelles de familles génératrices de haines disproportionnées qui, dans certains villages catalans, se résolvaient toutes portes ouvertes sous les commentaires des voisins passionnés.
Le sport professionnel crée une pression intense parce que, si l’enjeu financier existe, le côté humain reste primordial. C’est bien ce qui constitue son attrait.
L’analyse qui suit ne vaut, évidemment, que dans les pays dans lesquels il existe un contrôle pertinent des entreprises et dans lesquels la législation permet d’effectuer les opérations de vérification voire d’expertise nécessaires à l’application de ces contrôles. Dans tous les autres pays les montages sont d’autant plus aisés que les contrôles sont absents.
Nous avons limité le propos aux opérations relevant du capital, aux transferts de joueurs, à quelques montages amusants dont ceux relevant de la billetterie, ainsi qu’au problème récurrent posé par les agents.
Les opérations relevant du capital8
Désormais, dans la plupart des pays, les clubs sont organisés comme des entreprises classiques. Le capital appartient donc à des propriétaires privés : les actionnaires. Une certaine transparence est donc exigée. Ce souci n’est pas généralisé dans tous les grands pays de football. Au Brésil, par exemple, les clubs unipersonnels sont encore autorisés. Le lobby du football, la bancada da bola, a réussi à éliminer, temporairement sans doute, le projet de loi qui prévoyait la transformation des clubs en société. En revanche, elle n’a pu différer malgré ses efforts le vote du texte instituant une mise en cause personnelle des dirigeants des clubs responsables de faillites. Au Brésil donc, les clubs, les ligues, les fédérations ainsi que les confédérations doivent désormais publier un bilan annuel, ce qui est le cas en France depuis fort longtemps.
Le blanchisseur actionnaire acquiert un club
Devenir propriétaire d’un club constitue un attrait constant pour les malfaiteurs. Cela pose un problème à tous les autres. Plusieurs raisons à cela, la passion pour certains, mais surtout le business. Maîtriser les flux d’un club apporte au criminel des opportunités nouvelles : il poursuit ses crimes sous couvert de cette activité (paris, jeux, enlèvements), il récupère des hommes de main performants chez les supporters excités, il met la main sur des opportunités financières nouvelles (achats et ventes de joueurs, sponsoring et financement de la publicité), et enfin il lui est possible de recycler des fonds d’activités criminelles.
Lorsqu’il a la possibilité de mettre une frontière entre le club et sa gestion criminelle et de camoufler son achat derrière une structure confortablement installée à l’abri des contrôles et de toute transparence avec des fonds illégaux, c’est carrément le « jackpot ». En effet les montages dans des structures commerciales sont plus difficiles à identifier que le blanchiment simple au travers des structures bancaires. Les rachats de clubs à l’étranger peuvent, outre les capacités de blanchiment qu’ils offrent, être précieux pour protéger le patrimoine acquis de manière un peu rapide. Il est pratiquement impossible de saisir rapidement les richesses détenues à l’étranger.
Concrètement : la création de structures écrans9.
Il n’est guère complexe pour un investisseur d’occulter les informations lors d’une prise de contrôle d’une entreprise sportive ou pas.
Il suffit de placer comme un chapeau au-dessus de la holding qui a pris le contrôle du club, des structures offshore, en général des sociétés le plus souvent immatriculées dans des paradis fiscaux. De cette manière l’origine des fonds est facilement camouflée. Personne n’est plus en mesure d’identifier la qualité des apporteurs (prête-noms) lorsqu’un tour de table est mis en place.
Dans les pays troublés, l’achat d’un club est une manière de s’assurer une respectabilité, une protection ou une neutralité de la part des autorités. La corruption des fonctionnaires et du politique, l’existence de réseaux semi-criminels rendent la situation des malfaiteurs commode. On peut aisément constater, dans certains pays de l’Est ou d’Amérique du Sud, qu’une multitude de clubs dans tous les sports et à tous les niveaux ont été rachetés par des investisseurs à risque, immédiatement après un courant de privatisations. Pendant cette période, le sport était gangrené par les groupes criminels, près de huit cents sportifs auraient été assassinés en Russie, le champion olympique Popov a failli y perdre la vie. Les chantages, les menaces et les rackets sur des joueurs opérant à l’étranger comme dans le pays y fleurissaient et les agressions étaient courantes. Qui plus est, d’aucuns prétendent que les compétitions étaient manipulées. L’analyse des penalties sifflés pourrait le démontrer. Si l’on y rajoute les paris plus ou moins truqués, on ne peut que constater une cohérence avec les comportements criminels classiques. En Bulgarie les homicides se succèdent, le président du Locomotiv de Plovdiv a été assassiné le 25 août 200510. Ce club est particulièrement affecté par les meurtres : on ne compte pas moins de quatre dirigeants ou anciens dirigeants de ce club qui ont été assassinés depuis 1996. Cinq autres dirigeants de clubs ont fait l’objet de tentatives d’assassinat dont quatre ont réussi depuis. Le foot bulgare, s’il est quelquefois ennuyeux, peut souvent être mortel. On rapporte aussi que quelques ressortissants asiatiques envisagent l’achat en sous-main de clubs de divisions inférieures dans les pays nordiques, certains membres de la Maffya turque seraient devenus propriétaires de clubs dans le championnat allemand.
L’implication des groupes criminels dans ce domaine n’est pas si rare. En Europe et en division supérieure, l’intérêt porte plutôt sur le recyclage des fonds criminels et sur les possibilités de détournements sur les transferts. S’il est relativement aisé de s’enrichir rapidement, il est beaucoup plus difficile de se maintenir au niveau. Dès lors, l’achat d’un club présente l’opportunité de temporiser. La communication et les relations publiques constituent un support de survie. Interrogé sur son passé par Le Monde, le propriétaire d’un club qui compte dans le football européen répond par une boutade : « Savez-vous quelle est la différence entre un rat et un hamster ? Aucune différence, juste une affaire de public relations. »
Et le foot est un excellent support à cet égard car il rapproche un inconnu riche des célébrités. Qui connaîtrait ce milliardaire s’il n’avait pas acheté un grand club ? Quelques initiés sans doute, mais le cercle serait bien restreint.
Techniquement, les outils de gestion permettent à l’investisseur de récupérer rapidement sa mise. Par le jeu des avances remboursables l’investisseur peut aussi très rapidement récupérer les fonds engagés. Un financement nécessaire à l’achat du club peut être réalisé à l’aide d’avances ou de prêts assortis de taux particulièrement élevés consentis par… lui-même11. La discrétion sur le montage est la règle.
Concrètement : le club acheté finance son propre achat.
Le remboursement des dettes mobilisées pour mettre en place12 l’achat d’un club, peut causer un tel déséquilibre dans le budget (ce rembourseme...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Dédicace
  5. Remerciements
  6. Préface
  7. Introduction
  8. Première partie - Pain (frelaté) et jeux (truqués)
  9. Deuxième partie - Faux et fraudes en tous genres
  10. Troisième partie - Comment le crime corrompt l’économie légitime
  11. Conclusion
  12. Notes