Anticipation et Prédiction
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Du geste au voyage mental

  1. 304 pages
  2. French
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Anticipation et Prédiction

Du geste au voyage mental

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À propos de ce livre

Propriétés fondamentales du vivant, anticipation et prédiction sont au cœur de nos vies et de chacune de nos actions: on calcule les chances d'un homme politique d'être élu, les risques que l'avion dans lequel on monte s'écrase, on évalue les chances de bénéficier d'une météo favorable pendant nos vacances… Mais quels sont les contraintes, les mécanismes psychologiques et neurobiologiques qui jouent sur la capacité humaine d'anticipation? Comment l'humain se projette-t-il dans le futur? Quelles sont les logiques qui président à la mise en œuvre de cette capacité? Quelles contributions la psychopathologie apporte-t-elle à la compréhension de ces mécanismes? Comment l'homme réagit-il face à des situations qui l'obligent à reconfigurer son existence? Telles sont les questions abordées dans cet ouvrage rédigé par un groupe de chercheurs – philosophes, physiologistes, neuropsychologues, mathématiciens, conseillers en entreprise – qui présente les multiples facettes de cette fascinante faculté humaine et ses pathologies, ainsi que son usage dans les processus de décision, que ce soit dans la vie quotidienne ou dans l'entreprise. Alain Berthoz, neurophysiologiste, est professeur émérite au Collège de France et membre de l'Académie des sciences. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Le Sens du mouvement, La Décision et La Simplexité, qui ont été de très grands succès. Claude Debru est philosophe, correspondant à l'Académie des sciences et professeur de philosophie des sciences à l'École normale supérieure de Paris. Il est l'auteur, avec Pierre Buser, de Le Temps, instant et durée. Contributions de Margherita Arcangeli, Daniel Bennequin, Pierre Bessière, Pierre Buser, Jérôme Dokic, Jacques Droulez, Malik Ghallab, Étienne Koechlin, Giuseppe Longo, Nicolas Morgado, Didier Naud, Richard Palluel-Germain, Denis Perrin, Jean-Luc Petit, Pascale Piolino, Armin Schnider.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2015
ISBN
9782738166852

L’anticipation et le voyage mental : des propriétés fondamentales du vivant ?


Alain Berthoz
Pourquoi un livre sur l’anticipation et le voyage mental ? Parce que l’anticipation est une propriété fondamentale du vivant. Peut-être la plus importante. Elle fait partie des principes de fonctionnement que j’ai qualifiés de simplexes1. La vie se caractérise par des propriétés fondamentales, par exemple : 1) l’autonomie, l’auto-organisation (auto-poïèse), l’homéostasie ; 2) la mobilité due au fait que les organismes vivants ont un but lié à la nécessité de trouver l’énergie nécessaire à l’autonomie ; 3) la mise en place de solutions simplificatrices (simplexes) ; 3) la reproduction ; 4) l’adaptation et la créativité, sources de vicariance. Or atteindre un but exige une détermination préalable du but, des actions à accomplir et du chemin à prendre. Pour un neurone visuel, le but sera la cible de la saccade oculaire ; pour un morphogène, le segment du corps auquel il est lié ; pour un animal, tout ce qui favorisera sa survie. Pour l’homme moderne, devient but tout objet susceptible de contribuer à son bien-être, à la sauvegarde de sa santé, ou simplement à sa distraction et à sa curiosité. L’activité pratique, intellectuelle et technologique de l’homme est toujours orientée vers l’avenir. Le cerveau prédit et parie. On invente des scénarios alternativement possibles, on évalue les risques d’avoir un cancer, les chances de bénéficier d’une météorologie favorable ou, au contraire, de subir les catastrophes que le réchauffement de la planète ne manquera pas d’entraîner. On calcule les chances des hommes politiques aux élections, les effets indésirables des OGM sur l’environnement, les courbes de démographie, la probabilité d’un accident d’avion ou de l’explosion d’une centrale nucléaire. Les sportifs pratiquent l’anticipation en s’entraînant en fonction des performances de leurs futurs adversaires, ou en pratiquant la feinte sur le terrain. Le spéculateur anticipe les chutes des cours de Bourse. On prend même en compte le « cygne noir2 », c’est-à-dire l’événement improbable.
Sur ce sujet si vaste, pourquoi réunir une vingtaine d’experts de domaines différents, tels que ceux qui sont représentés dans ce livre ? Est-ce la passion de l’éclectisme, un exercice superficiel destiné à donner l’impression de couvrir un champ entier en juxtaposant des savoirs partiels, une tentative de rassembler ce qui n’est pas forcément compatible ? À mes yeux, le projet que nous avons formé avec Claude Debru3 était à la fois plus modeste et plus ambitieux : plus modeste car il n’était pas question de couvrir tout le champ de ce concept ; plus ambitieux, car le problème de l’anticipation, à mon avis mal posé, mérite un nouvel examen.
Dans le passé, l’anticipation a été au centre des réflexions des penseurs. On ne peut ici s’attarder sur ce point historique, mais, par exemple, elle apparaît dans toute la littérature philosophique sur l’intentionnalité. On songera, bien sûr, à l’« élan vital » de Bergson, cette flèche dirigée vers l’avenir. Mais, déjà, l’a priori kantien, cadre organisateur de la connaissance empirique possible, fonctionne sur le mode de l’anticipation : en l’occurrence, les « anticipations de la perception » sont l’anticipation d’une gradation continue de la matière sensorielle de tous les phénomènes. Et ce qui éveille l’intérêt du chercheur en sciences cognitives pour la description par Husserl de la conscience du temps, c’est qu’il fonde la constitution de l’identité des objets de perception à travers leur présentation successive sur le jeu de la rétention du juste passé et de la protention vers l’avenir imminent. Nous lui avons consacré, avec Jean-Luc Petit, un livre4 dans lequel nous avons fait le rapprochement entre la protention et l’anticipation.
Je pense même que Pierre Bourdieu, empruntant au même Husserl le concept d’habitus, l’entendait, comme lui, en un sens qui fait de l’habitude un état préparatoire à l’agir. Enfin, quand Sartre, dans sa théorie des émotions, attribue à celles-ci un rôle « magique », il veut dire qu’elles prédisposent le sujet à faire face à une situation, difficile ou plaisante. De façon plus générale, la pensée magique (danser afin qu’il pleuve) est une forme anthropologique d’anticipation. Les neuropsychologues l’attribuent au cerveau droit.
Je voudrais faire une place particulière à un travail récent de la philosophe Joëlle Proust5 sur la métacognition, encore un thème pertinent pour la problématique de l’anticipation. Elle en donne la définition suivante : « La métacognition serait l’ensemble des capacités à travers lesquelles un sous-système cognitif opérant est évalué ou représenté par un autre sous-système d’une façon dépendant du contexte. » Dans son ouvrage, les théories sur le rôle de la métacognition dans l’évaluation des actions présentes, passées, ou envisagées pour le futur, sont soumises à une discussion approfondie.
Les débats entre neurosciences et philosophie qu’ont suscités les expériences de Benjamin Libet6 sur les activités cérébrales qui précèdent un mouvement sont également dignes d’intérêt pour notre propos, dans la mesure où ils s’appuient sur des données empiriques. De même, la découverte par Luder Deecke, il y a près de cinquante ans, du Bereitschaftspotential7, ou potentiel de préparation du mouvement dans le cortex frontal, a été suivie de nombreuses preuves de l’existence d’une anticipation de l’action dans la seconde qui précède l’émission de l’ordre moteur vers les muscles. Plus récemment, la découverte8 d’un déplacement des champs récepteurs corticaux avant la saccade oculaire a montré que le fonctionnement cérébral est le siège d’activités anticipatrices à différentes échelles temporelles.
Depuis quelques années, la connaissance a beaucoup progressé sur les aspects cognitifs de l’anticipation en relation avec le vécu autobiographique, l’imagination, la conception de scénarios pour le futur. La neuro-économie est un bon exemple d’association entre neurosciences et économie pour la détermination des bases neurales de l’anticipation dans des jeux de stratégie à enjeux financiers. De nombreux ouvrages et articles se consacrent à cette approche, qui n’a cependant pas été retenue ici. Nous avons pourtant souhaité donner à la présente réflexion la dimension la plus large, en accueillant, notamment, un spécialiste du management industriel. Pouvoir anticiper est fondamental dans toutes les activités humaines, ce qui explique la gravité de la crise actuelle de cette capacité d’anticiper. Plus particulièrement, on observe un contraste saisissant entre, d’un côté, la quantité formidable d’informations disponibles, qui devraient permettre la prévision (par exemple les données relatives aux conséquences prévisibles du réchauffement de la planète dont fait état le dernier rapport du GIEC9) et, d’autre part, la difficulté pour l’humanité d’en tirer les conséquences pour l’action. Cerner le problème de l’anticipation nous aidera peut-être à mieux comprendre les bases neurales de la décision, mais aussi celles de l’imaginaire, des croyances et des désirs. C’est un défi majeur.
Dans cette introduction, nous ne pourrons qu’effleurer ce vaste champ (celui-là même que le psychologue Gibson ouvrait à l’investigation en introduisant le concept d’affordance) qui est approfondi dans les chapitres du livre par les spécialistes. Mon objectif ici est de montrer que dans la variété des manifestations de l’anticipation plusieurs niveaux sont à distinguer : tantôt on a affaire à des mécanismes liés à l’évolution, tantôt à des modes d’anticipation particuliers aux diverses espèces animales, tantôt aux exigences spécifiques à chaque activité cérébrale. Autrement dit, comme pour beaucoup de fonctions cérébrales, il ne faut pas se limiter à l’aspect hiérarchique des processus en jeu, mais il convient de prendre en compte l’éventualité d’une organisation hétérarchique.

L’anticipation,
une propriété fondamentale du vivant

La psychologie et les neurosciences ont révélé que toutes les grandes propriétés du cerveau – la décision, l’attention, la mémoire, l’identité, la simplexité, la vicariance –, auxquelles on fait référence dans la langue par des substantifs au singulier, recèlent en fait des mécanismes multiples. Il semble, par conséquent, bien arrogant de prétendre discuter de l’« anticipation » au singulier, comme s’il s’agissait d’une réalité simple. La notion d’anticipation, au singulier, cache en réalité une multiplicité de mécanismes apparus au cours de l’évolution et qu’on trouve à tous les niveaux d’organisation du système nerveux. Il est donc futile de chercher un mécanisme unique qui sous-tendrait l’anticipation, et il faut plutôt parler des mécanismes anticipateurs. L’objectif de notre entreprise interdisciplinaire est d’en découvrir les facettes, les richesses, les niveaux. La même critique devrait d’ailleurs être adressée à ceux qui cherchent les mécanismes de la « conscience » parce que ce concept recouvre de multiples aspects de notre vie mentale10.
Par ailleurs, le progrès des connaissances en mathématiques, en physique, en biologie a enrichi la notion d’anticipation par hybridation avec les notions de probabilité, de prédiction, d’intention, et même avec l’intentionnalité chère aux philosophes. Il faut aussi la confronter aux théories actuelles du fonctionnement cérébral, ainsi qu’aux nouvelles théories du vivant. Constatant l’écart subsistant entre l’abordage philosophique du concept d’anticipation et les approches empiriques en neurosciences des mécanismes de l’anticipation, nous nous sommes posé la question : est-il possible de les rapprocher ?
La question de l’anticipation figure au premier plan de tous mes ouvrages précédents. Déjà, dans Le Sens du mouvement, j’avais expliqué pourquoi la perception est projet d’action. J’employais l’expression « la perception est une action simulée », anticipant de quelqu...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Hommage à Pierre Buser
  5. L’anticipation et le voyage mental : des propriétés fondamentales du vivant ?
  6. La tradition philosophique : William James, Husserl
  7. Conscience protentionnelle et mécanismes de l’anticipation
  8. Anticipation, protention et inertie biologique
  9. Le temps dans l’inférence probabiliste
  10. Anticipations Figures géométriques du futur
  11. Où et quand le cerveau anticipe-t-il ?
  12. Un espace en action : quand les contraintes physiques et sociales intègrent notre perception visuelle de l’espace
  13. Raisonnement, apprentissage et créativité : l’élaboration des décisions et la fonction du lobe frontal chez l’homme
  14. Asymétries dans le temps subjectif
  15. Le voyage mental dans le temps subjectif est une des caractéristiques de la mémoire épisodique
  16. Voyage mental dans le temps : quand l’imagination nous engage
  17. La pensée hors et en phase avec la réalité : le rôle du cortex
  18. Interchangeabilité et identité professionnelle
  19. L’anticipation en robotique
  20. Les auteurs
  21. Remerciements
  22. Table
  23. Des mêmes auteurs chez Odile Jacob