Psychologie et psychiatrie de la grossesse
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Psychologie et psychiatrie de la grossesse

De la femme à la mère

  1. 272 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Psychologie et psychiatrie de la grossesse

De la femme à la mère

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À propos de ce livre

Devenir parent implique un profond bouleversement de l'identité, semblable à celui du passage de l'enfance à l'adolescence; c'est passer du statut d'enfant de ses propres parents à celui de parent d'un enfant à naître, avec la transformation du corps pour la mère, les modifications de l'identité psychique et la réécriture des liens familiaux pour les deux parents. Dans ce livre, les auteurs exposent tous les aspects, normaux et pathologiques, de cet extraordinaire bouleversement, depuis l'annonce de la grossesse, le vécu de ses trois trimestres, jusqu'à l'accouchement et la prise en charge néonatale de l'enfant. Un livre particulièrement original qui illustre le parcours, unique pour chaque individu, de l'enfance à la parentalité, et qui aborde la situation des femmes, futures mères, mais également celle des hommes, futurs pères, à la fois pendant la grossesse, lors de l'accouchement et à l'occasion de la rencontre avec l'enfant. Luis Alvarez est pédopsychiatre dans le service Guidance infantile de l'Institut de puériculture de Paris. Véronique Cayol est gynécologue-obstétricienne à l'hôpital Delafontaine à Saint-Denis.

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Informations

Éditeur
Odile Jacob
Année
2015
ISBN
9782738167330

DEUXIÈME PARTIE

LA VIE PSYCHIQUE PENDANT LA GROSSESSE



CHAPITRE 6

Pourquoi la grossesse est-elle une crise ?


Selon Erik Erikson, psychanalyste germano-américain, l’identité de la personne se construit par l’accès à des stades de développement qui se succèdent et s’imbriquent de manière telle que le précédent fonde les bases de celui qui suivra. Le passage d’un stade vers un autre est jalonné par des crises évolutives, tout au long du cycle de la vie. Sous la plume d’Erikson, le terme de crise reprend son sens étymologique : celui de transformation et non de cataclysme. Ainsi, la crise peut s’entendre comme un moment d’achoppement de plusieurs voies de maturation et de changement : celles des modifications du corps, celles du remaniement du monde interne et celles de l’évolution des liens. Dans cette logique, les besoins et les exigences contradictoires de ces voies de maturation rendent caduques les équilibres du passé, précipitant la crise par la remise en question des certitudes et des liens. Le résultat en est le conflit, avec soi-même et avec les personnes signifiantes, un vécu d’angoisse et d’incertitude, ainsi qu’une quête de référents. Le plus souvent, l’ambivalence est importante, oscillant entre l’inquiétude et la nostalgie de quitter un monde connu, et l’appel des nouvelles possibilités. À la différence des troubles psychologiques ou psychiatriques, la crise évolutive est limitée dans le temps et peut s’entendre comme la constitution de nouveaux équilibres par le réaménagement de l’identité. Dans la majorité des cas, les crises sont donc maturatives car elles permettent une modification de la place de chacun, un changement générationnel et l’accès à des nouveaux rôles et à des nouvelles virtualités. Enfin, de la manière, complète ou partielle, intégrée ou déséquilibrée, dont la crise pourra se résoudre, dépendra la capacité de la personne à assumer les nouveaux stades et à envisager les crises à venir.
La grossesse, l’accouchement et la rencontre avec l’enfant sont d’intenses moments de transformation et de changement dans le cycle de la vie, précipitant une crise évolutive de grande ampleur, potentiellement désorganisatrice. Devenir parents est donc une crise qui partage quatre points de rapprochement avec celle de l’adolescence.

L’intensité des changements corporels dans un court laps de temps

Habituellement, l’adolescente et la femme enceinte connaissent des changements corporels considérables dans un court laps de temps. Il s’agit d’un véritable bouleversement du corps, intense et surprenant, qui accompagne un accomplissement de la féminité et l’accès à une nouvelle forme de sexualité : devenir femme, puis devenir mère. Ainsi, les perceptions et les sensations sont celles de la transformation du corps, devenu inconnu, étrange et parfois inquiétant. Plus rarement, certaines femmes enceintes sont aux prises avec des sentiments de perte des limites corporelles et de profonde modification de l’image de soi, expériences angoissantes et difficilement partageables. En tout état de cause, ces éprouvés corporels participent à la précipitation de la crise évolutive et imposent à la psyché un travail considérable d’adaptation et d’intégration. Nous aborderons de manière plus ample, lors de chapitres qui vont suivre, le vécu du corps de la femme enceinte, de la parturiente et de la montée laiteuse.

La survenue d’un changement générationnel considérable

L’adolescence et la grossesse comportent des changements générationnels de grande ampleur. La fillette est transformée par l’adolescence en femme et se voit initiée, dans la majorité des cas, aux mystères de la féminité et de la sexualité adulte. Sa mère n’est plus tout à fait la femme en âge de séduire et de procréer, situation qui questionne sa capacité à transmettre progressivement à l’adolescente ce rôle sur le plan de la sexualité et de la féminité. En entrant dans la grossesse, la femme, qui était seulement fille, sœur, amante, compagne, devient progressivement la mère d’un enfant encore inconnu. Ainsi, la transmission de la vie impose au monde une nouvelle génération, celle de l’enfant, transforme les adultes en parents et renvoie les parents d’hier au statut de grands-parents. Nous venons de décrire une véritable révolution générationnelle, au cours de laquelle la présence d’un enfant nouveau amène les adultes à se forger une identité de parents et invite les nouveaux grands-parents à laisser les devants de la scène et à devenir les soutiens de la dyade mère-bébé et de la triade parents-bébé.

LE RÉAMÉNAGEMENT DE LIDENTITÉ

L’identité est construite par l’ensemble des représentations que nous avons de nous-mêmes. Elle se constitue progressivement dans notre monde interne au décours des multiples expériences que nous avons vécues et inscrites dans notre intimité. Ainsi, l’identité est composée de multiples facettes qu’il convient d’énoncer car elles sont grandement mises à l’épreuve par les crises évolutives :
  • L’identité concerne tout d’abord un moi corporel, véritable socle de notre existence, fournissant une représentation des limites et de la cohésion de notre être. Il est question de la manière dont nos besoins de tout-petits ont été pris en compte et nous ont permis de sentir notre corps, d’organiser les perceptions et de l’intégrer dans notre psyché. Il s’agit aussi des traces laissées par nos premières expériences de différenciation et de séparation de nos propres parents qui nous ont fait sentir un corps autonome et en lien avec celui d’autrui. Dans son versant le plus fondamental et inconscient, le moi corporel assure la contenance de notre expérience perceptive, sensorielle, émotionnelle et psychique de tous les instants, nous protégeant du débordement par un sentiment d’enveloppement suffisant. Son versant le plus conscient est l’image de soi, constituée à la fois du regard que nous portons sur nous-même et de celui qu’autrui porte sur nous. Les failles dans la constitution du moi corporel suscitent de profondes angoisses de perte de limites et de la cohésion interne.
  • Sur la base du moi corporel viennent se déposer les images parentales que nous pouvons définir comme des condensés des expériences vécues au cœur de l’enfance et de l’adolescence à propos de ce qu’est une mère, un père, un enfant, un homme, une femme, un couple et une famille. Dans leur versant le plus conscient, les images parentales correspondent à ce que nous croyons être nos liens avec les principaux personnages de notre histoire. Dans leur versant le plus inconscient, il s’agit de la manière dont notre psyché s’est structurée devant les grands mystères de l’humanité : celui de la différence des sexes et des générations, celui de l’amour entre les parents et entre les parents et les enfants, celui de la sexualité et de la transmission de la vie, et celui de la mort (voir supra). Les images parentales fonctionnent ainsi comme des empreintes, donnant un sens déterminé à notre perception de nous-mêmes et à notre manière de construire, restaurer et transformer les liens avec autrui.
  • Enfin, notre monde interne s’élargit par la constitution d’une identité familiale, portant la trace de nos liens de filiation, et d’une identité groupale, voire professionnelle, culturelle ou nationale. Ces versants de l’identité sont une tentative de compromis entre nos besoins individuels et relationnels, notre besoin d’autonomie et la nécessité de nous sentir disposant d’une place dans notre entourage et dans la société.
Narcisse, jeune homme épris d’un amour irréalisable pour lui-même, et Écho, nymphe amoureuse de Narcisse, ne pouvant que lui renvoyer les paroles qu’il lui avait adressées, sont des personnages mythologiques qui ont inspiré S. Freud pour définir la notion de narcissisme. Ainsi, le narcissisme est cette base interne, véritable investissement de soi-même, qui supporte les différentes facettes de l’identité. Solidement assise sur le narcissisme, l’identité nous structure, nous donne un sentiment d’exister suffisamment et continûment, et nous situe en permanence vis-à-vis d’autrui. Aussi une identité équilibrée fournit-elle la capacité de s’adapter et de demeurer soi-même au travers des changements et des vicissitudes. Insistons sur le fait que les crises évolutives imposent un réaménagement identitaire, permettant d’assumer un nouveau statut et de nouvelles possibilités. Ce réaménagement identitaire se fait, invariablement, par la remise en question des moments fondateurs de notre histoire et d’une réactualisation des conflits latents. Ainsi, les crises évolutives de l’adolescence et de la grossesse charrient des fragments de l’histoire individuelle et familiale qui ont marqué la construction de la personne. Il s’agit le plus souvent d’une réactualisation des aspects fondateurs des images parentales, inscrites au plus profond de notre intimité. De cette manière, les fragments d’histoire qui ont été constructifs par le passé fournissent un socle solide sur lequel se forger une nouvelle identité, d’adulte et de parent. En revanche, les fragments d’histoire douloureux, lorsqu’ils sont mis en perspective par la crise évolutive, ont la potentialité de nous désorganiser et d’amorcer un terme de plus dans la répétition de ce qui a déjà fait souffrir. In fine, la traversée de la crise suscite la construction de nouveaux équilibres permettant de porter différemment les moments fondateurs du passé et de redéfinir l’identité pour se sentir différemment fille, sœur, femme, amante, compagne, puis mère.

La quête d’un référent

Les transformations corporelles, les changements générationnels et la réactualisation des moments fondateurs du passé, à la faveur du remaniement identitaire, suscitent un vécu d’angoisse quant à l’avenir, de perte des limites de soi, de questionnement de certitudes, de tristesse et de nostalgie des temps révolus. Les équilibres sur lesquels nous nous étayons semblent caducs bien avant que de nouveaux aménagements viennent réconforter le socle de notre existence. De ce fait, l’adolescence n’est pas seulement ce temps d’éveil aux sens et à la vie des auteurs romantiques, et la grossesse n’est pas toujours l’attente de l’heureux événement que notre société semble avoir idéalisée. La grossesse, crise évolutive qui mobilise de l’angoisse, génère de l’incertitude et suscite des doutes, est falsifiée par des images d’Épinal faisant de la maternité une des composantes de la satisfaction des adultes. Ainsi, nombreuses sont les femmes qui se sentent disqualifiées par ces images idéalisées de la grossesse et de la rencontre avec l’enfant et culpabilisent en raison de leur ambivalence, de leurs doutes et de leurs incertitudes pourtant normaux et même souhaitables.
Adolescence et grossesses sont donc des crises évolutives, jalonnées par les forces et assombries par les fragilités de chaque fillette, de chaque femme enceinte. Ce vécu de vulnérabilité, pouvant infiltrer tous les aspects de la vie, suscite une quête de référents. Ainsi, les mères, les sœurs, les amies, le compagnon sont souvent surpris d’être convoqués à une place inhabituelle, régressive, ambivalente qui fait d’eux des remparts devant l’ampleur de la crise évolutive. La massivité de cet appel s’explique aussi par le besoin de s’identifier à une femme ou à une personne secourable perçue comme davantage avancée dans la féminité et la parentalité, et par un intense et changeant besoin de soutien et d’accueil. Nous pouvons imaginer la position difficile de celles pour qui cette quête de référent demeure vaine. Sur le plan des soins, cette attente d’aide est un formidable levier thérapeutique, permettant à la patiente d’étayer sur le clinicien le poids de la crise évolutive et l’ampleur de la réactualisation des moments fondateurs de son passé.
Ces quelques lignes nous permettent de comprendre l’importance de la prise en compte des similitudes et des différences entre ces deux crises évolutives ; l’adolescence est le prélude de la grossesse. Ce qui a été problématique à l’adolescence risque de l’être pendant la grossesse, ce qui a été passé sous silence retrouvera un nouvel écho, ce qui a été un appui donnera de la continuité à l’expérience de la parentalité.

CHAPITRE 7

« Au secours, je n’arrive pas à être enceinte » : le vécu de l’attente de la grossesse


Depuis les années 1960, notre société aisée postmoderne a généralisé l’usage de la contraception, modifiant considérablement la sexualité et donnant aux femmes davantage de prise sur leur corps. Parallèlement, les places de la femme, de l’homme et de l’enfant ont évolué à leur tour. La femme doit trouver un compromis entre ses exigences professionnelles, sa féminité, sa vie de couple et son monde relationnel, situation qui tend à retarder le moment de la conception du premier enfant. De nos jours, la masculinité est moins reliée à la force et aux valeurs de virilité. Ainsi, les hommes s’autorisent à vivre plus ouvertement leur curiosité, voire leur envie de porter un enfant et de materner, circonstance qui risque de mettre certains en rivalité avec leur compagne pour occuper la place maternelle. Enfin, les progrès de la médecine, garantissant une grande sécurité obstétricale et pédiatrique, et l’âge plus tardif d’accès à la parentalité ont donné aux couples l’illusion de maîtriser la transmission de la vie. Dans ce sens, les avancées scientifiques et techniques majeures dans le domaine de l’aide médicale à la procréation (AMP) ont conforté l’illusion de contrôle de la conception. Quelques exploits technologiques, largement relayés par la presse, laissent entendre que tout est possible, alors que certaines prouesses relèvent de l’exception. La réalité est à la fois plus complexe et plus nuancée, et, en tout état de cause, elle appelle à reconnaître les limites de la médecine : nul ne contrôle la transmission de la vie. Le parcours entrepris par les couples désireux d’une AMP est éprouvant et tortueux. La moitié des couples qui sollicitent l’AMP sortent de ce parcours sans enfant et 20 % de ceux qui ont consulté conçoivent naturellement.
Nos connaissances, insuffisantes encore, suggèrent que la conception est le résultat d’une alchimie délicate et fragile, fluctuant dans le temps, alliant des aspects biologiques, psychologiques et environnementaux, de manière unique pour chaque femme et pour chaque couple. Ainsi, Monique Bydlowski1, psychiatre et psychanalyste pionnière dans le domaine de la psychopathologie périnatale, insiste sur le fait que la conjonction de ces trois facteurs de nature différente assure une fécondabilité optimale. Chacun est nécessaire, aucun n’est suffisant. En conséquence, la fertilité normale d’une femme est de 20 à 25 % par cycle, constat qui permet de comprendr...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Titre
  3. Copyright
  4. Avertissement
  5. Introduction
  6. Première partie - Un parent se construit
  7. Deuxième partie - La vie psychique pendant la grossesse
  8. Troisième partie - La vie psychique autour de la naissance et de la rencontre avec l’enfant
  9. Quatrième partie - La psychiatrie de la grossesse et du post-partum
  10. Conclusion
  11. Bibliographie
  12. Table
  13. Dans la même collection