1. Se montrer sympathique
« On nâa pas deux fois lâoccasion de faire une bonne premiĂšre impression »
« TU VEUX CONVAINCRE ? ESSAYE DĂJĂ DâĂTRE ĂCOUTĂ ! »
« Oh ! Je déteste ce type !
â Tu le connais ?
â Non ! »
« Il ne me revient pas celui-là ! »
A priori cela pourrait passer pour un dĂ©lit de sale gueule mais le mĂątin est de belle taille, bien mis, assez Ă©lĂ©gant et de bonne mine. Alors vous vous rendez compte, sâil Ă©tait noir, ou arabe ou mal habillĂ© ouâŠ
« Câest du racisme ça ! » HĂ©las oui ! Câest la subjectivitĂ© des facteurs de sympathie dont parle le sociologue Mehrabian. La preuve : notre type est avec une trĂšs jolie fille qui, apparemment, elle, le trouve trĂšs sympathique.
Sur le plan moral et Ă©thique ce nâest pas dĂ©fendable. Mais dans la rĂ©alitĂ© câest bien ainsi que nous rĂ©agissons tous et toutes sans le dire toujours. Il y a des gens que nous trouvons sympas et dâautres pas !
Vous le savez, vous le vivez tous les jours dâun simple regard, aussi furtif soit-il. Vous vous faites une opinion globale de cet homme, de cette femme que vous ne connaissez pas, Ă qui vous nâavez mĂȘme pas encore adressĂ© la parole. AprĂšs, plus tard, il est possible que vous reveniez sur votre jugement, mais cela va ĂȘtre difficile, trĂšs difficile de se dĂ©juger.
« Jâsais pas pourquoi jâai raison mais je me le prouve ! »
« La premiĂšre impression est toujours la bonne ! » Se dĂ©juger, câest risquer dâĂȘtre incohĂ©rent avec soi-mĂȘme, cela nous dĂ©stabilise, alors nous prĂ©fĂ©rons nous en tenir Ă notre premiĂšre impression. DĂšs lors, nous allons chercher tous les dĂ©tails, tous les comportements qui pourraient apporter de lâeau Ă notre moulin. Une sorte de satisfecit que nous nous octroyons.
On peut toujours chercher ce qui motive notre jugement, mais il est si difficile de retrouver la source de nos prĂ©supposĂ©s. Ils se sont construits avec notre histoire et notre personnalitĂ©. Câest Ă coups de vĂ©cus que nous nous sommes fabriquĂ© des archĂ©types et des stĂ©rĂ©otypes qui construisent nos vĂ©ritĂ©s.
« Je fais un détour pour acheter le journal »
Câest dâabord nos comportements qui dĂ©cident de la relation. Quand je vais acheter mon journal, lâobjectif est clair, et les trois mots que jâĂ©change avec le vendeur ne nĂ©cessitent sans doute pas quâon en fasse une Ă©tude en quatre volumes. Et pourtant ! Pourquoi est-ce que je prends mon journal chez celui-lĂ qui est deux rues Ă cĂŽtĂ©, plutĂŽt que chez cet autre qui est sur mon chemin et chez qui je ne vais plus ? Le journal du jour est le mĂȘme, le prix Ă payer aussi, alors ?
Alors il y en a un que jâaime bien ! Et lâautre que je ne peux pas supporter ! Pourquoi ?
Celui-ci, quand jây vais, me tient la jambe pendant des « cinq minutes » tandis que mon temps mâest comptĂ©. Dâautres jours, au contraire, il nâouvre pas la bouche et me fait une tĂȘte de six pans de long. Ăa dĂ©pend de ses humeurs ! Quâai-je Ă faire de ses humeurs, moi ?
Celui-lĂ , en revanche, est trĂšs poli, trĂšs aimable, me dit deux ou trois banalitĂ©s sur le temps quâil fait, me souhaite une bonne journĂ©e, je nâen demande pas plus Ă mon buraliste. Je ne suis pas en attente dâautre chose. Celui-lĂ mâest sympathique, celui-ci pas du tout. Notre relation, mĂȘme anodine, sâen ressent. La preuve : je me sers chez lâun, je ne vais plus chez lâautre.
« Je tâaime ! » « Moi non plus ! »
Ăa colle ou ça ne colle pas entre nous deux ? Pourtant, le buraliste chez lequel je ne vais plus ne tombe pas en faillite et il a des clients. Ăa ne colle pas avec moi, ça doit coller avec dâautres. Il y a de grandes chances dâailleurs pour que, si lâon interroge le vendeur chez qui je ne vais plus, lui aussi porte sur moi un jugement nĂ©gatif, et pas seulement parce que je ne lui achĂšte plus mon journal.
Ăa tient Ă quoi tout ça ? Aux comportements !
Mais dans ces situations, aussi anodines soient-elles, émerge déjà un rapport de force basé sur une dualité capitale : la relation « domination-soumission ».
Prenez garde
Câest dâabord sur les comportements que nous nous retrouvons, beaucoup plus que sur les mots, les opinions ou les idĂ©es.
La sympathie ou lâantipathie que lâon ressent vis-Ă -vis de quelquâun repose dâabord sur notre comprĂ©hension de sa maniĂšre dâagir.
IL NE FAUT PAS JUGER LES GENS SUR LA MINE ! AH BON ?
« Je sais quâil ne faut pas juger les gens sur la mine⊠Je sais ! Mais celui-lĂ quand mĂȘme ! Quand il se mouche, on dirait le siphon de mon lavabo⊠Il faudrait que je le fasse rĂ©parer dâailleurs, ce siphon, parce quâil fait un bruit pas possible ! »
« Et puis tu as vu sa dĂ©gaine ? MĂȘme pas rasĂ© et la chemise plus que douteuse ! Il doit sentir mauvais, je suis sĂ»r quâil sent mauvais ! Dâailleurs je le sens dâici. Cela me fait penser quâil faut que jâachĂšte de lâeau de toilette, depuis le temps ! Jâoublie toujours ! »
« Et sa maniÚre de se tenir ? Ce ne sont pas des choses à faire ça, les jambes écartées, le ventre en avant. »
« Et puis, tu as vu comment il tient son verre et sa façon de boire ? On dirait quâil va cracher, il gonfle les joues avant dâavaler, câest dĂ©goĂ»tant. Je me demande comment une fille comme elle peut vivre avec un garçon comme lui. »
« Je te raconte pas son air prĂ©tentieux, le menton vers le ciel, le cou raide il se prend pour un nabab. Jâai horreur de ces gens-lĂ , on dirait que tout leur est permis ! Et la paille quâil a dans lâĆil, tu la vois la paille ? »
« Quoi la poutre ? Quelle poutre ? Quoi câest moi ? Ah câest moi ! Dans la glace, lĂ , câest moi ! Je ne mâĂ©tais pas reconnu⊠Eh bien quoi ? Je suis encore pas si mal aprĂšs tout ! »
« PAS SYMPA, VOUS NE CONVAINCREZ PAS ! »
Convaincre, câest faire adhĂ©rer lâautre Ă ses idĂ©es, Ă ses opinions. Ces prĂ©supposĂ©s qui nous entraĂźnent vers la subjectivitĂ© sont si forts que le meilleur des arguments, la meilleure des preuves objectivement acceptables sera frappĂ©e dâun non-recevoir cinglant.
« Je ne vais pas me plier Ă la raison de cet Ă©nergumĂšne qui ne me plaĂźt pas, cela voudrait dire que je lui ressemble ! » Mais il y a pire encore, mon propre comportement va lâinfluencer de la mĂȘme maniĂšre. Si je lui fais la gueule, il me fera la gueule ! Chacun induit lâautre et rĂ©ciproquement.
RĂ©flĂ©chissez Ă votre propre expĂ©rience : « Y a-t-il une seule personne que vous nâaimiez pas du tout, du tout, alors que vous savez quâelle vous aime beaucoup, beaucoup ? »
Vous pouvez ne pas dĂ©lirer dâaffection pour elle, mais force est de reconnaĂźtre quâelle nâest pas totalement sans intĂ©rĂȘt puisquâelle vous trouve intĂ©ressant ! Vous ne pouvez pas dire de quelquâun quâil est « totalement con ! » sâil vous trouve bien ! Convaincre passe donc dâabord par un minimum de reconnaissance et de partage dans le comportement.
Les facteurs comportementaux de sympathie
Dans notre culture française les facteurs comportementaux de sympathie, câest-Ă -dire les comportements connotĂ©s comme positifs par la majoritĂ© dâentre nous, sont simples : le regard, le sourire, lâouverture gestuelle, lâĂ©coute de lâautre.
Naturellement ces facteurs-lĂ ne sont pas universels, selon les pays, les cultures, ils peuvent changer de sens et mĂȘme aller Ă lâencontre du but recherchĂ©. Pour les Japonais le regard trop directif peut devenir une impolitesse ; le sourire dit « vrai », oĂč lâon montre les dents du haut et celles du bas, nâest « vrai » quâaux Ătats-Unis alors que, pour nous, il passe pour ĂȘtre ...