Mai-Juin 1940 : Les causes de la défaite
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Mai-Juin 1940 : Les causes de la défaite

Panorama inédit des responsabilités politiques et militaires

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Mai-Juin 1940 : Les causes de la défaite

Panorama inédit des responsabilités politiques et militaires

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La défaite de 1940 ébranla la France entière ainsi que la communauté internationale. Une des plus grandes puissances du monde, une armée de près de cinq millions d'hommes était vaincue en quelques semaines. Les responsables n'ont jamais été présentés en détail; le sujet est resté tabou en France. La plupart du temps les chefs militaires ont été accusés et ces derniers ont cherché à se couvrir en trouvant des boucs émissaires parmi les cadres subalternes et certaines personnalités politiques... La victoire de 1945 a quasiment clôt le débat. Pour la première fois, cet ouvrage présente les raisons et déchiffre les responsabilités, aussi bien sur le plan militaire, que politique, diplomatique et intellectuel...Dominique Lormier, historien et écrivain, membre de l'Institut Jean Moulin et de la Légion d'honneur, est considéré comme l'un des meilleurs spécialistes de la Seconde Guerre mondiale et de la Résistance. Il est l'auteur d'une centaine d'ouvrages dont La Bataille de France, jour après jour, mai-juin 1940 (Le Cherche-midi, 2010, 7000 ex. vendus), Les 100 000 collabos: le fichier interdit de la collaboration française (Le Cherche-midi, sept. 2017, 4500 ex. vendus), Nouvelles histoires extraordinaires de la Résistance (Alisio, nov. 2018) et Les grandes affaires de la libération (Alisio, avril 2019).

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Informations

Éditeur
ALISIO
Année
2020
ISBN
9782379350856

1.

Les occasions manquées

En octobre 1918, l’armée française, première puissance militaire alliée du moment avec ses 110 divisions, prépare une puissante offensive en Lorraine, devant permettre l’invasion de l’Allemagne. Depuis la mi-juillet 1918, marquée par la seconde victoire française de la Marne, l’armée allemande est désormais réduite à la défensive, avec ses 190 divisions en partie décimées, après les échecs de ses offensives de mars à juillet 1918, où chaque fois l’armée française rétablit la situation, notamment en secourant avec 40 divisions ses alliés britanniques enfoncés en Picardie (mars 1918) et dans les Flandres (avril 1918). De mai à juillet, c’est l’armée française, quasiment seule, qui contient les puissantes offensives allemandes en Champagne et sur la Marne. La 1re armée américaine, forte seulement de 16 divisions dont seulement 8 ayant l’expérience du combat, n’est constituée seulement qu’en août 1918 et n’entre réellement en action qu’en septembre : le mythe du sauveur américain va avoir la vie longue. En réalité, le sort de la guerre a basculé avec les échecs des offensives allemandes de mars à juillet 1918, ainsi que grâce à la seconde victoire française de la Marne à la mi-juillet, remportée par 63 divisions françaises, 2 divisions italiennes, 2 divisions britanniques et 6 divisions américaines. L’apport militaire français a donc été décisif.
Le 26 août 1918, la 1re armée américaine, instruite par des officiers français et entièrement équipée en armement lourd français, se voit attribuer le secteur de Saint-Mihiel, représentant 50 kilomètres de front, alors qu’au même moment 110 divisions françaises tiennent 600 kilomètres de front, 62 divisions britanniques et 14 divisions belges 200 kilomètres.
La bataille du saillant de Saint-Mihiel (12-15 septembre 1918), marquée par l’engagement de 11 divisions américaines et 4 divisions françaises, est saluée durant des décennies de propagande comme un triomphe américain, ayant renversé le cours de la guerre : une véritable imposture. Cette offensive débute en réalité dans le vide, devant 13 divisions allemandes en pleine retraite sur une seconde position fortifiée. La progression se limite à 30 kilomètres et se heurte très vite à la seconde ligne de résistance. Ailleurs, depuis la mi-août et jusqu’au 11 novembre 1918, les troupes françaises, britanniques et belges progressent de 60 à 200 kilomètres dans les lignes allemandes.
L’offensive Meuse-Argonne (26 septembre–11 novembre 1918), avec seulement 16 divisions américaines et surtout 37 divisions françaises, connaît une progression de 70 kilomètres, grâce à l’expérience des troupes françaises sur le terrain, car le commandement américain, totalement inexpérimenté, se montre incapable de ravitailler à temps ses soldats du fait d’une logistique défaillante : ses fantassins piétinent dans les pires conditions et sont souvent stoppés par quelques mitrailleuses allemandes.
En novembre 1918, l’armée allemande se trouve reconduite à sa frontière d’août 1914 avec la France. Le général Pétain, commandant en chef de l’armée française, compte porter le coup de grâce en Lorraine, où deux armées françaises doivent pénétrer en territoire allemand afin de mettre fin au conflit par une victoire décisive en territoire ennemi. Mais le général français Foch (commandant en chef des troupes alliées du front occidental), influencé par les politiques et les chefs militaires britanniques et américains qui veulent en finir au plus vite, sans assister à un triomphe militaire uniquement français, décide d’annuler cette offensive, qui aurait pourtant contribué à une victoire définitive. En effet, le commandement allemand fait croire à son peuple que l’armistice du 11 novembre 1918 n’est en rien une défaite militaire, mais un simple arrêt temporaire des hostilités, puisque le territoire du Reich n’est pas occupé par les troupes alliées. Hitler va se servir de cet argument fallacieux pour dénigrer la victoire des Alliés de 1918, pourtant réelle sur le terrain avec un recul des forces allemandes de 200 kilomètres par endroits. Cependant, pour le commandement allemand – Hitler et ses sbires –, la non-invasion du territoire du Reich souligne « l’imposture » de la victoire des Alliés. Ainsi, par jalousie, les commandements et les politiques britanniques et américains sabotent la victoire française et offrent, sans le savoir, des arguments et des garanties à l’adversaire. Les industriels américains et britanniques comptent investir en Allemagne après la guerre. Il convient donc de limiter la victoire française et de ne pas trop humilier les futurs partenaires allemands.
L’historiographie anglo-américaine présente l’armée française de 1918 comme une force au bord du gouffre, démoralisée et sauvée in extremis par les renforts américains et britanniques : rien n’est plus faux. En réalité, loin d’être affaiblie, l’armée française de 1918 se trouve à son zénith, comme l’écrivent à juste titre le colonel Michel Goya et Pierre Grumberg :
Appuyée par une industrie inventive et productive, commandée par des chefs novateurs, motorisée en masse, l’armée française de 1918 n’a rien de commun avec l’outil statique de 1916. Après avoir soutenu victorieusement – et en infériorité numérique – un ultime choc allemand, les offensives répétées, inventées par Pétain et Foch, écrasent l’appareil militaire allemand en quatre mois. Jamais depuis Austerlitz et Iéna les armées françaises n’avaient atteint un tel niveau […]. Le 11 novembre 1918, la France n’est pas seulement l’une des puissantes alliées victorieuses. Elle peut revendiquer la meilleure armée du monde : la mieux équipée, la plus novatrice, la mieux soignée. Elle possède un commandement et des compétences qui n’ont rien à envier aux Allemands. Et c’est à elle-même qu’elle doit son succès1.
En novembre 1918, avec ses 110 divisions, ses 13 200 pièces d’artillerie, ses 2 300 chars et ses 3 600 avions, l’armée française surpasse en nombre l’armée britannique (62 divisions, 8 700 pièces d’artillerie, 610 chars et 1 700 avions) et l’armée américaine (16 divisions, 3 556 pièces d’artillerie, 90 chars et 740 avions). Nous sommes loin d’une armée française au bord du gouffre.
Par ailleurs, l’allié militaire italien, injustement méprisé par l’historiographie française et surtout anglo-américaine, joue un rôle considérable dans la défaite des puissances allemande et austro-hongroise. Luttant sur un front alpin de plus de 600 kilomètres, dans les pires conditions climatiques et topographiques, avec certains sommets dépassant 3 500 mètres d’altitude, la très courageuse armée italienne, forte d’une cinquantaine de divisions, fixe une soixantaine de divisions austro-hongroises et remporte finalement l’éclatante victoire de Vittorio Veneto en octobre 1918, en capturant 430 000 soldats austro-hongrois. Depuis 1915, l’armée italienne a livré de terribles batailles dans les Dolomites et le Trentin, sur l’Isonzo et le Carso, puis sur le Piave. En parvenant à vaincre quasiment seule le plus puissant allié de l’Allemagne, à savoir l’Autriche-Hongrie, l’Italie contraint l’Allemagne à demander au plus vite un armistice sur le front occidental : en effet, désormais seule, l’armée allemande, en infériorité numérique en octobre 1918, ne peut se permettre d’ouvrir un second front au sud de l’Allemagne contre l’armée italienne, laquelle se trouve en mesure de traverser librement l’Autriche et d’atteindre les Alpes bavaroises. Mais l’apport capital de l’Italie est volontairement oublié par ses alliés lors du traité de Versailles en 1919, lequel lui octroie seulement les territoires déjà conquis du Trentin et de l’Istrie. La promesse du traité de Londres d’avril 1915 de lui offrir également la Dalmatie est oubliée.
Les États-Unis et son président Wilson, bien qu’ayant joué un rôle modeste et non décisif dans la victoire des Alliés en 1918, semblent vouloir déjà régenter les destinées de l’Europe, avec une Grande-Bretagne totalement acquise à leur cause et une France incapable de faire fructifier les acquis indéniables et décisifs de sa victoire. Clemenceau, le chef du gouvernement français, ampute plusieurs parties du territoire allemand au bénéfice de la Pologne et de la Tchécoslovaquie, causes de tensions futures avec l’Allemagne, et fait éclater l’Empire austro-hongrois, afin de créer un État totalement artificiel qu’est la Yougoslavie, qui résistera seulement une semaine à l’invasion de l’Axe en avril 1941 et éclatera en guerre civile séparatiste durant les années 1990.
L’occasion manquée de porter la guerre en territoire allemand en novembre 1918, par une puissante offensive française en Lorraine, l’occasion manquée d’accorder une juste rétribution à l’allié italien, afin de conserver avec ce pays une solide alliance militaire qui a joué un rôle déterminant dans la défaite des puissances centrales (Autriche-Hongrie et Allemagne), l’occasion manquée de limiter les pertes territoriales allemandes, afin de préparer une future réconciliation franco-allemande, l’occasion manquée d’éviter le démembrement injustifié de l’Empire austro-hongrois, facteur d’équilibre en Europe, sont autant de motifs décisifs d’un conflit futur en Europe. Hitler est bien « né en grande partie » à Versailles.
*
Le traité de Versailles, imposé par les Alliés à l’Allemagne, est signé en juin 1919. L’humiliation est totale pour l’Allemagne, qui perd 70 000 km² de son territoire et 7 millions de ses habitants. Plusieurs cantons reviennent à la Belgique. L’Alsace et la Lorraine sont reprises à juste titre par la France. Le Slevig redevient danois, alors que le Danemark n’est pas intervenu dans le conflit. La jeune Pologne s’octroie la Posnanie et une partie de la Prusse-Orientale. Un corridor sépare la Prusse du reste du pays. La Haute-Silésie doit être partagée. La riche région d’Ulcin est attribuée aux Tchèques et le port de Memel à la Lituanie. Toutes les colonies allemandes tombent aux mains des vainqueurs. La Rhénanie est démilitarisée. Les Alliés occupent, sur la rive gauche du Rhin, trois têtes de pont pendant plusieurs années. La Sarre est détachée du Reich pour quinze ans. L’armée allemande est réduite à 100 000 hommes, dépourvus en grande partie d’armement lourd. L’Allemagne doit verser 20 milliards de marks-or aux Alliés. Beaucoup d’officiers et de soldats allemands, qui s’estiment invaincus, parlent de trahison.
En septembre 1919, Adolf Hitler, caporal de 30 ans et ancien combattant désabusé, prend la parole lors d’une réunion politique à Munich, devant un groupuscule d’ex- trémistes nationalistes : il fustige le traité de Versailles et estime que l’Allemagne n’a pas été vaincue militairement, les offensives alliées n’ayant pas pénétré en territoire allemand. On en revient à l’offensive française en Lorraine de novembre 1918, annulée à la demande des Alliés anglo-américains. Malgré les 1 400 000 soldats français et 780 000 soldats italiens tués durant la Première Guerre mondiale, les 776 000 soldats britanniques et 116 000 soldats américains tombés durant ce conflit comptent davantage dans les choix militaires et politiques désastreux des Alliés. Et la descente aux enfers va se poursuivre durant l’entre-deux-guerres, avec de nouvelles occasions manquées.
En mars 1921, devant le refus du gouvernement allemand de régler la dette de guerre, payable pourtant en 42 annuités, les troupes françaises, belges et britanniques occupent le bassin industriel de l’Allemagne, la Ruhr, Düsseldorf et Duisbourg. Puis, finalement, sous la pression des Britanniques, soucieux de s’entendre avec l’Allemagne, la Ruhr est évacuée. Cependant, en janvier 1923, plusieurs régiments français et belges pénètrent de nouveau dans les villes industrielles de la Ruhr, afin de prendre le charbon que Berlin n’a pas livré aux Alliés. En décembre 1923, le chancelier allemand Gustav Stresemann abandonne la campagne de résistance passive dans la Ruhr et reprend le versement des réparations de guerre. Les gouvernements britannique et américain, qui investissent en Allemagne, poussent la France à évacuer la Ruhr. Les industriels allemands, bénéficiant de très nombreux prêts accordés facilement par les États-Unis et la Grande-Bretagne, sabotent les exigences françaises.
En octobre 1925, le traité de Locarno, qui garantit les frontières en Europe, semble en apparence réconcilier l’Allemagne avec ses anciens ennemis. Berlin obtient la promesse de l’évacuation de la zone de Cologne et doit faire son entrée à la SDN (Société des nations) dès 1926. De son côté, le Reich reconnaît la frontière de la France. Mais, en avril 1926, un accord secret signé entre Berlin et Moscou permet un réarmement clandestin de l’Allemagne, totalement contraire au traité de Versailles. Dès août 1928, l’armée allemande s’entraîne secrètement en Russie soviétique. Les soldats allemands testent l’équipement motorisé lors de manœuvres avec l’Armée rouge. Des avions civils peuvent être rapidement transformés en appareils de combat. Des tracteurs sont recouverts de plaques de blindage et vite armés de mitrailleuses ou de canons légers. Le général allemand von Blomberg se rend très souvent à Moscou. Ainsi, avant même l’accession au pouvoir d’Adolf Hitler en 1933, l’armée allemande enfreint à grande échelle les clauses du traité de Versailles, préparant déjà sa revanche. En décembre 1930, un plan secret de transformation de l’armée allemande doit permettre de porter rapidement les effectifs de 7 à 21 divisions, soit de 100 000 à 300 000 hommes. Une armée de frontière, composée d’organisations parallèles à l’armée de terre (police, corps francs, douaniers), peut aussi renforcer les effectifs, évalués à 34 divisions (320 000 hommes). En cas de conflit, l’Allemagne est donc en mesure d’aligner 620 000 hommes, articulés en 55 divisions, l’artillerie passant de 288 à 1 728 canons et de 288 à 1 188 mortiers.
Le général allemand von Schleicher prépare, avec une grande efficacité, le réarmement clandestin du Reich. De nombreuses unités sont équipées de matériel interdit par le traité de Versailles : artillerie lourde, canons antichars et antiaériens, bataillons de chars. Des dépôts sont cachés dans les forêts. Des avions civils sont fabriqués, transformables en une semaine en chasseurs de combat. De son côté, le général allemand von Seeckt fait mettre au point du matériel que l’industrie devra rapidement réaliser en série. Il développe la fabrication de divers prototypes à l’étranger : avions en Russie, en Suède et en Suisse ; blindés en Suède ; sous-marins et mitrailleuses en Espagne et en Hollande. Le général von Seeckt estime que « l’armée allemande ne peut avoir qu’une chose en vue, la guerre et non la paix éternelle2 ».
Pendant ce temps, les politiques français et britanniques, aveuglés par un pacifisme béat et persuadés des bonnes intentions de façade du gouvernement allemand, réduisent leurs efforts militaires. L’armée de terre française, forte de 673 000 hommes en 1924, passe à 400 000 hommes en 1928, avec la réduction du service militaire de dix-huit à douze mois. Durant la même période, les troupes françaises passent de 40 à 30 divisions en temps de paix.
Outre la modernisation de sa marine de guerre, l’effort militaire de la France se concentre sur la ligne Maginot, construite dès 1928, couvrant principalement la frontière franco-allemande, afin de protéger le territoire d’une invasion germanique. Le commandement veut éviter la terrible saignée de 14-18 grâce au béton protecteur, d’autant que la France, avec 40 millions d’habitants, se trouve lourdement défavorisée face à une Allemagne forte de 75 millions d’habitants. En cas d’une nouvelle guerre, il est nécessaire d’économiser le précieux « sang français ». De plus, le nord et l’est de la France ont subi d’importantes destructions de grandes villes, du terroir agricole et du bassin industriel en 14-18 ; pour éviter cela de nouveau, il est nécessaire, en cas de conflit, de repousser immédiatement toute attaque ennemie et de garantir l’intégrité du territoire national.
La guerre de 14-18 amène une modification radicale de la stratégie française : plus question d’offensives à outrance comme en 1914 ou en 1918. Selon le commandement français, le prochain conflit sera une guerre de position. La bataille de Verdun en 1916 a montré qu’un front continu fortifié, où chaque pouce de terrain est battu par de l’artillerie et les mitrailleuses, est quasiment imprenable. Les chars ne doivent servir qu’à contre-attaquer avec de l’infanterie pour colmater les brèches éventuelles, ou couvrir la mise en place des divisions de fantassins.
La ligne Maginot permet d’économiser les troupes et de compenser les classes creuses causées par la saignée de 14-18, d’empêcher une attaque surprise venant d’Allemagne. Elle offre également la possibilité de mobiliser l’armée française en toute sécurité. Elle protège les bassins industriels et les mines d’Alsace et de Lorraine. Elle peut servir de base à une contre-offensive future. Elle force les Allemands à passer par la Belgique, obligeant la Grande-Bretagne (garante de la neutralité belge) à se battre contre l’Allemagne, en déplaçant en outre la zone des combats hors de France, elle entre dans la stratégie du plan Dyle, où les meilleures divisions françaises et britanniques comptent livrer bataille en Belgique, sur ce fleuve. L’immense forêt des Ardennes, réputée infranchissable aux divisions blindées, et le fleuve de la Meuse, avec ses vallées encaissées, sécurisent le flanc droit du dispositif allié en Belgique.
C’est sous l’égide du maréchal Pétain, partisan convaincu des fortifications, que s’établissent les premiers plans de construction de la ligne Maginot. Au total, avec les rallonges ultérieures, la ligne Maginot va coûter plus de 5 milliards de francs de 1929 à 1939, ce qui ne représente pas une dépense particulièrement importante dans le budget de l’État d’une grande puissance comme la France.
La ligne Maginot s’échelonne en profondeur sur différents niveaux depuis la frontière franco-allemande, dont on distingue quatre parties distinctes, avec d’abord une ligne des avant-postes, destinée à détecter une attaque surprise et à la retarder. La ligne principale de résistance se trouve à environ 2 kilomètres des avant-postes. Elle se signale par un double réseau de rails antichars et de barbelés, balayés par les axes de tirs des mitrailleuses des casemates, et couverts par les tirs d’artillerie des ouvrages. Les abris d’intervalles, destinés à assurer le soutien des troupes combatt...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Auteur
  3. Introduction
  4. 1. Les occasions manquées
  5. 2. Mussolini jeté dans les bras d'Hitler
  6. 3. L'armée française commandée par deux généraux affaiblis et malades
  7. 4. Édouard Daladier l'irresponsable
  8. 5. L'impréparation militaire française et plan désastreux
  9. 6. Les défaillances belges, hollandaises, britanniques, et le sacrifice méconnu de l'armée française
  10. 7. Heinz Guderian et Erwin Rommel : deux principaux artisans de la défaite française de 1940
  11. 8. Une résistance militaire française pourtant acharnée
  12. 9. Pétain et les prisonniers français
  13. 10. Mai-juin 1940 n'est pas une défaite honteuse pour la France
  14. Sources principales
  15. Les éditions Alisio