Mais qui est la mère ?
eBook - ePub

Mais qui est la mère ?

  1. 188 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub

Mais qui est la mère ?

Détails du livre
Aperçu du livre
Table des matières
Citations

À propos de ce livre

Dans les dix ans à venir, il n'y aura quasiment plus d'enfants à adopter. Le nombre des infertilités médicales ou sociales (couples gays) va exploser et ouvrir un champ considérable à la GPA interdite en France depuis 1994.
Partout dans le monde, des femmes sont prêtes à porter, gratuitement ou contre paiement, les bébés de ces couples infertiles. Une pratique universelle aujourd'hui interdite ou limitée, tolérée, laissée dans le flou ou livrée au commerce. Mais un jour, un accord international l'encadrera. Un défi extraordinaire se pose à l'humanité. Qui est la mère de l'enfant ainsi conçu? Celle qui accouche, celle qui l'adopte et va l'élever? L'enfant d'un couple gay peut-il tout ignorer de sa génitrice? La GPA questionne avec acuité la maternité et la famille du troisième millénaire.
En interrogeant des gestatrices, des parents ayant eu recours à une GPA, des enfants ainsi nés, mais aussi des médecins-gynécologues, des juristes et sociologues, aux opinions divergentes, Mais qui est la mère? offre tous les éléments d'une réflexion inéluctable et passionnante.
Aujourd'hui, tout le monde connaît un enfant né par FIV. Demain, tout le monde connaîtra un enfant né par GPA.

Foire aux questions

Il vous suffit de vous rendre dans la section compte dans paramètres et de cliquer sur « Résilier l’abonnement ». C’est aussi simple que cela ! Une fois que vous aurez résilié votre abonnement, il restera actif pour le reste de la période pour laquelle vous avez payé. Découvrez-en plus ici.
Pour le moment, tous nos livres en format ePub adaptés aux mobiles peuvent être téléchargés via l’application. La plupart de nos PDF sont également disponibles en téléchargement et les autres seront téléchargeables très prochainement. Découvrez-en plus ici.
Les deux abonnements vous donnent un accès complet à la bibliothèque et à toutes les fonctionnalités de Perlego. Les seules différences sont les tarifs ainsi que la période d’abonnement : avec l’abonnement annuel, vous économiserez environ 30 % par rapport à 12 mois d’abonnement mensuel.
Nous sommes un service d’abonnement à des ouvrages universitaires en ligne, où vous pouvez accéder à toute une bibliothèque pour un prix inférieur à celui d’un seul livre par mois. Avec plus d’un million de livres sur plus de 1 000 sujets, nous avons ce qu’il vous faut ! Découvrez-en plus ici.
Recherchez le symbole Écouter sur votre prochain livre pour voir si vous pouvez l’écouter. L’outil Écouter lit le texte à haute voix pour vous, en surlignant le passage qui est en cours de lecture. Vous pouvez le mettre sur pause, l’accélérer ou le ralentir. Découvrez-en plus ici.
Oui, vous pouvez accéder à Mais qui est la mère ? par Catherine Mallaval, Mathieu Nocent en format PDF et/ou ePUB ainsi qu’à d’autres livres populaires dans Technologie et ingénierie et Ingénierie civile. Nous disposons de plus d’un million d’ouvrages à découvrir dans notre catalogue.

Informations

Éditeur
Les Arènes
Année
2017
ISBN
9782352047056

PARTIE 1

LES
TÉMOIGNAGES

ILS ONT EU
UN ENFANT
PAR GPA

PAULINE ET JEAN

PAULINE ET JEAN, jeune couple lyonnais, 35 ans chacun, acceptent de témoigner à la veille de Noël 2016. Et ce, même s’ils redoutent plus que tout que la vie de leur enfant, qu’on appellera Victor, soit perturbée, son identité révélée, son histoire accaparée par des anti-GPA, qui « pourraient lui faire du mal ». Victor a 3 ans. Il s’est développé dans le ventre d’une « nounou » canadienne. « Les premiers mois de sa vie se sont déroulés pendant les controverses sur le mariage pour tous. La loi Taubira a ouvert des débats sur la famille complètement irrationnels et la GPA en a fait les frais. Ça nous a rendus dingues, c’était tellement différent de ce que nous vivions à ce moment-là. En ce moment, la candidature de François Fillon à la présidentielle, ses liens avec la Manif pour tous nous inquiètent à nouveau », plaide Pauline pour justifier sa prudence avant de se détendre et de raconter l’histoire de leur famille à trois.
Elle débute à Paris quand Pauline et Jean sont encore étudiants dans une école d’ingénieurs. Ils se sont rencontrés à l’âge de 20 ans, sont amoureux, mais ne rêvent pas encore de devenir parents. À 23 ans, ils vont pourtant se retrouver violemment confrontés à cette question. « J’avais une grosseur dans le ventre, raconte Pauline. Mon médecin croyait que j’étais enceinte. En fait, il s’agissait d’une boule de 8 centimètres de diamètre sur mon utérus. »
Première intervention : la tumeur est retirée, elle n’est pas cancéreuse, mais pas nette. Surveillance à coups d’IRM, d’échographies. En 2005, la boule revient. Il est question de lui retirer l’utérus. Finalement, seule la tumeur est alors retirée. Dernière chance. « Le médecin avait peur que tout cela dégénère. Il me disait : “Je veux vous sauver vous”, raconte Pauline. Mais on nous a laissé deux-trois mois pour tenter d’avoir un enfant. On n’était pas encore à un âge où on se projetait. On ne savait pas si l’on serait encore ensemble dans dix ans. Mais on a tenté le tout pour le tout, ça n’a pas marché. » Soupirs.
Le sort s’acharne, la tumeur revient encore et, à 25 ans, Pauline ne peut plus échapper à une hystérectomie. Plus d’utérus. Ses chances de porter un jour un enfant s’évanouissent à jamais. « Il a fallu gérer tout ça. J’ai été infecte. J’étais pleine de douleur, de colère. Insupportable », se souvient Pauline. « Sans doute », modère Jean. « C’est arrivé au moment où nos copains commençaient à avoir des enfants », lâche Pauline. Jean : « Je n’avais pas pleuré comme ça depuis dix ans. » Silence.
Comment vivre après cela ? se demande Pauline. Dès 2006, avant même son hystérectomie, elle a adhéré à l’association Maia, qui soutient les couples confrontés à l’infertilité et à la stérilité. « J’avais besoin de me trouver des semblables pour me rassurer. Échanger. J’y ai trouvé du réconfort. Dix ans plus tard, je suis toujours copine avec la femme qui a eu le même souci que moi. Elle a une petite quarantaine. Elle n’a pas eu d’enfant. Sa sœur, qui vit au Canada, lui avait proposé de porter l’enfant, mais elle a fait le “vrai” choix de ne pas en avoir. »
Pauline se renseigne sur la GPA. Méthodique, de formation scientifique, elle anticipe que peut-être, un jour, elle aussi fera appel à une femme porteuse. Elle décide, une fois sa thèse terminée, de faire de la recherche non pas dans le public, mais dans le privé. Elle sait qu’elle va avoir besoin d’argent. Une deuxième gifle la met à terre quand, une fois sa thèse achevée, elle découvre que, durant les interventions qu’elle a subies, ses ovaires ont été endommagés.
En pleine réflexion sur la gestation pour autrui, elle décide aussi de se pencher sur l’adoption. Retire un dossier. « Dans l’adoption, il y a le risque de ne pas avoir beaucoup d’informations sur l’histoire de l’enfant. Mais j’étais presque prête. En outre, cela nous aurait mis sur un plan d’égalité. Aucun de nous deux n’aurait transmis son patrimoine génétique… » Jean est plus réticent : « C’est vrai que, pour nous, l’adoption aurait été plus simple. Nous étions les candidats idéaux. Deux jeunes cadres avec des problèmes médicaux. Et puis c’était légal. Je n’avais aucun souci avec l’idée de ne pas avoir de lien biologique avec l’enfant. Mais j’avais un gros problème avec le rapport à l’abandon et à l’absence potentielle d’informations sur l’histoire de l’enfant. Comment expliquer à un enfant qu’on l’a abandonné ? Comment un enfant peut-il surmonter cela ? J’avais l’impression que cela représentait un handicap dès le départ. La GPA, c’est très compliqué au début. Mais quand l’enfant est là, on revient dans la norme. On lui en parle. Et l’enfant ne se demande pas pourquoi on l’a laissé tomber. »
Le couple réfléchit. Beaucoup. « On a lu énormément. On est allé au bout de la question. » Jean : « Mais on n’avait toujours que deux options : l’adoption ou la GPA. » Pauline : « Oui, la GPA était au fond de nos têtes comme une bouée de sauvetage. »
Pas simple. Pauline se souvient de « beaucoup de disputes, de dialogues de sourds. On a fini par aller voir une psychologue pour en parler. On avait besoin d’aide et d’une tierce personne ».
Jean reprend : « On s’est finalement décidés pour une GPA. Et c’était sans doute la décision la plus importante de notre vie. Nous avons alors décidé de nous marier, pour plus de sécurité, et décidé que nos enfants porteraient nos deux noms. Pour être sur un pied d’égalité. Et comme nous l’aurions fait si nous n’avions pas été confrontés à tous ces écueils. » Pauline : « L’histoire du couple Sylvie et Dominique Mennesson, de ses démêlés, de ses déboires avec la justice pour être reconnus en France comme les deux parents à part entière de leurs jumelles nées d’une mère porteuse m’a toujours beaucoup fait réfléchir. »
Petit à petit, ils parlent de leur projet autour d’eux. À en croire Jean, « personne n’a jamais émis la moindre réserve et tout le monde [les] a soutenus ». Pauline, elle, rend hommage à sa grand-mère : « Elle a été la plus grande supportrice. Elle a mis dix ans à avoir ma mère dans les années 1950. Elle me comprenait. Au boulot, j’ai fini par en informer mon supérieur hiérarchique. Un catholique pratiquant. Il a compris. Et, après la naissance de Victor et six mois d’absence, il m’a même promue. »
Le couple acte son projet en 2011. Il a fallu cinq ans de réflexions. S’ensuivent encore neuf mois pour enclencher la procédure. Vers quel pays se tourner ? « On a méticuleusement étudié toutes les législations avant d’opter pour le Canada anglophone, en Ontario. Le cadre légal prévoit que les deux parents sont sur l’acte de naissance, même quand il y a eu un don d’ovocytes. On parle anglais. Ils ne sont pas éloignés de notre culture. Le niveau de vie y est similaire. Et, surtout, on voulait un modèle conforme à nos valeurs. Celui qui est en vigueur au Canada est proche de celui de la Grande-Bretagne, qui est parfaitement éthique. » Pauline reprend : « Par contre, la gratuité est impossible. Il faut un contre-don. Sinon, la dette serait trop importante. Bref, une compensation financière qui contrebalance est indispensable. Mais pas n’importe quoi non plus. On avait décidé d’être intraitables là-dessus. On voulait ne pas avoir de problème de conscience pour mieux fonder une famille bien dans ses baskets. »
En outre, Jean et Pauline entendent avoir une « certaine maîtrise » du processus. Le couple a donc exclu de se rendre aux États-Unis : « On ne voulait pas de l’omniprésence des agences que l’on y trouve, pas plus du côté très commercial qui peut exister autour de la GPA dans ce pays », explique Pauline, avant de détailler la façon dont elle s’est y prise. « Au Canada, les agences commerciales étant interdites, nous avons eu affaire à une ancienne gestatrice qui s’est constitué un réseau par le bouche-à-oreille. Elle sert d’intermédiaire via un site Internet. C’est plus artisanal. D’ailleurs, on ne paie rien tant que l’affaire n’est pas conclue. On a eu beaucoup de contacts, échangé de nombreux e-mails avant de se choisir mutuellement avec notre gestatrice. »
La porteuse, que Pauline considère déjà comme une « nounou anténatale », s’appelle Cathy. Elle a trois ans de moins qu’elle. Elle est alors mariée, femme au foyer. A déjà eu deux enfants. Jean : « Elle est dynamique. » Pauline : « Elle a un regard franc. Du tempérament. Beaucoup de personnalité. » Jean : « Elle nous a donné l’impression d’avoir bien réfléchi, de ne pas être dans le besoin. D’ailleurs, quand on l’a rencontrée plus tard, nous avons constaté que sa maison est grande. » Pauline et Jean, bien sûr, ont cherché à comprendre pourquoi Cathy était prête à se lancer dans une telle aventure : « Elle avait un couple d’amis qui n’arrivait pas à avoir d’enfant et enchaînait les fécondations in vitro et les fausses couches. Elle avait songé à porter leur enfant et en avait même déjà parlé à son fils aîné de 7 ans, qui avait tout à fait compris. Ils ont finalement réussi à devenir parents, mais Cathy a gardé cette envie viscérale. Et puis, d’après sa mère, Cathy voudrait que tout le monde puisse être maman. Victor est le premier qu’elle a porté. Mais ensuite, elle a enchaîné avec deux GPA. Elle a des grossesses faciles. Je crois qu’elle aime ce sentiment de puissance. Ce pouvoir de changer la vie des gens. C’est valorisant. » Jean confirme : « C’est quand même bien de faire le bien ! L’argent vient en plus… »
Le premier contact via Internet a eu lieu en avril 2012. En juillet, le couple décide de partir au Canada, à la rencontre de Cathy. Il a également trouvé une donneuse d’ovocytes : Anna, infirmière dans une maison de retraite. Elle a déjà six enfants, dont des jumeaux. « Nous l’avons aussi rencontrée lors de notre déplacement au Canada en juillet. On n’a pas eu le même niveau de contact avec elle qu’avec Cathy. Mais on l’a vue, son compagnon aussi. Donner ses ovocytes, ce n’est pas le même engagement personnel que porter un enfant pour d’autres », explique Jean. « Il faut quand même être prête dans sa tête à faire ça. Franchement, c’est une sacrée femme, dit Pauline. Quand notre fils est venu au monde, sa mère a demandé à Anna si elle allait continuer à semer comme ça… Lorsqu’elle a dit ça, c’est la fille d’Anna qui a rétorqué à sa grand-mère que les parents de Victor, c’était nous ! »
Les pièces du puzzle s’assemblent. Le budget est évalué. Jean et Pauline vont dépenser 50 000 euros pour cette GPA, dont 12 000 pour Cathy. Très minutieux, le couple a aussi pris soin dans le même temps de se mettre au clair sur tous les problèmes qui pourraient surgir. Pauline et Jean ont pris des rendez-vous à Paris. Ils ont ainsi consulté la psychanalyste Geneviève Delaisi de Parseval, au printemps 2012 : « Nous voulions être sûrs de notre choix, explique Pauline. Confirmer notre option de ne pas recourir à un don d’ovocyte anonyme. Et bien trouver la place de chacun. Celle de la donneuse, celle de la gestatrice, la nôtre. En fait, cet entretien a surtout permis de confirmer que notre projet était mûr. » Ils ont également demandé conseil à une avocate spécialiste du droit de la famille. « On avait des tas de questions à lui poser sur les formalités administratives, sur la Sécu, tous les papiers que nous allions devoir demander. Elle nous a dit : “Ne vous excusez pas de demander quelque chose. L’acte de naissance canadien doit être reconnu en France. Et si on vous pose des questions, vous n’avez pas à répondre” », se souvient Pauline, qui a pris bonne note des conseils de l’avocate : « En fait, pour entamer une GPA, il faut avoir de l’empowerment (autonomisation, responsabilisation), comme on dit maintenant. Ne pas subir. Être maître de ce que l’on fait. On a vu trop de gens embarqués dans des galères. Notamment en Grèce, où la loi est super, mais la réalité souvent compliquée et assez éloignée de la théorie. »
La fécondation in vitro des ovocytes d’Anna et du sperme de Jean a eu lieu à l’automne de la même année.
Jean : « Nous avions alors décidé de n’implanter qu’un seul embryon dans le ventre de Cathy, c’est ce que le médecin de la clinique nous avait recommandé dès notre première prise de contact. Ça nous a rassurés, cela fait moins de risque de prématurité. J’ai beaucoup apprécié l’éthique personnelle forte du médecin, même si n’en implanter qu’un était un gros pari. L’idée était aussi de ne pas perturber la vie quotidienne de Cathy avec une grossesse compliquée. »
Pari gagné. Pauline poursuit ses contacts quotidiens avec Cathy. Elle fait un aller-retour au Canada pour assister à la deuxième échographie. « J’avais besoin de vivre la grossesse par procuration », explique la jeune femme. Au début de l’été, le couple s’autorise enfin à acheter le lit du bébé. Pauline : « Pendant la grossesse, on était en mode “jusqu’ici tout va bien”, sans se projeter trop. Mais Jean me freinait dans mes achats de vêtements de bébé sur Internet. »
L’accouchement doit avoir lieu durant l’été, mais il n’est pas programmé. « Je suis partie au Canada en avance. Mais ça a été rocambolesque. Je suis arrivée un samedi, le bébé est né le jeudi alors que j’accompagnais Cathy à ce qui était censé être une visite de contrôle. Deux semaines avant le terme. Je n’avais rien avec moi. Juste mon sac à dos, une tablette, pas d’appareil photo. J’étais en tong et en short… Sa mère est venue, la personne qui nous a servi d’intermédiaire aussi. Tout s’est passé assez rapidement. On n’a pas eu le temps de stresser. Le bébé est arrivé comme une fusée. L’ambiance était très familiale, Cathy est toujours restée dans sa chambre. Elle ne voulait pas de péridurale. » Pauline, qui n’a pas cherché à connaître le sexe du bébé avant, découvre que c’est un garçon.
Avant la naissance, Cathy a rédigé un « projet de naissance », remis à la clinique, dans lequel elle a stipulé que Pauline devait être la première à prendre l’enfant. « On me l’a donné. J’ai pu faire du peau à peau, lui donner son premier biberon, son premier bain. Il y avait un fauteuil qui se transforme en lit. Je suis restée là et je me suis occupée de lui à 100 %. On y a passé à peine vingt-quatre heures. J’envoyais sans cesse des SMS à Jean. On a explosé le forfait. J’ai proposé à Cathy de prendre le petit, mais elle était trop fatiguée. »
Jean arrive le samedi suivant. « Nous sommes restés trois semaines là-bas, dans une bulle avec notre bébé. Nous avions pris un appartement tout près de chez Cathy. Et nous avons aussi présenté notre fils à Anna, notre donneuse d’ovocytes. Ce qui était bizarre, c’était de ne pas avoir de visites de nos familles. On a fait des Skype. Mais cet éloignement nous a permis de nous construire en tant que famille, d’apprendre à se connaître tous les trois, comme pour rattraper le temps de la grossesse. » Comme le prévoit la loi, le couple obtient de figurer sur l’acte de naissance canadien de l’enfant. Cathy a renoncé à ses droits. Pauline devient officiellement la mère. Pour le Canada, et pour la France aussi. « Notre livret de famille avec nos trois noms est arrivé quelques mois après notre retour en France. C’était la cerise sur le gâteau. »
De retour en France, le couple continue d’entretenir des relations avec Cathy et donne des nouvelles à Anna. « Je pense souvent à Cathy, dit Pauline. Nous ne sommes pas des amies proches. Mais on reste en contact, comme on a gardé des liens avec l’assistante maternelle qui a gardé notre fils à ma reprise du travail, poursuit-elle. Notre objectif est de ne pas perdre ce lien avec Cathy, pour nous, c’est important. Bien sûr, on ne passe pas notre temps à parler de tout ça à Victor. Mais il sait tout, depuis le premier jour de sa vie. On ne veut pas de tabou. Pas de “révélation” sur le tard. Il nous demande de temps en temps les livres pour enfants que nous avons sur la question. » Jean complète le tableau : « Nous sommes aussi en contact avec d’autres parents qui ont eu recours à une GPA, pour qu’il voie d’autres enfants qui ont le même type d’histoire que lui. En tout cas, quand nous avons parlé des débats sur la GPA qu’il y avait en France à Cathy, elle n’a vraiment pas compris. Elle, elle dit : “Je fais ce que je veux de mon corps.” » Pauline : « C’est dingue, dans les sondages, cela fait dix ans que les Français ne sont pas opposés à la GPA, mais cela reste un tabou politique. »
Alors le couple, qui rêvait d’avoir trois enfants, a renoncé. « Nous sommes comblés avec Victor. Mais on ne recommencera pas. Ça ne pourra jamais marcher aussi bien », dit Pauline. « Il est super, notre fils. Un petit garçon de son âge qui adore sa maman, son papa, ses grands-parents, aller à l’école, jouer, découvrir le monde… », enchaîne Jean. « Ma sœur a trois enfants, elle est crevée tout le temps… », conclut Pauline.

EMMANUEL, PIERRE
ET STÉPHANIE

ILS RACONTENT LEUR HISTOIRE tout en retenue, avec simplicité. Celle de deux désirs complémentaires qui se sont rencontrés. Pierre et Emmanuel sont en couple depuis plus de dix ans. Ils commencent à envisager de devenir pères en 2007. Comme eux, Stéphanie vit à Bordeaux, presque dans le même quartier. Hétérosexuelle, en couple, elle a accouché en 2009 de son troisième enfant. Et réfléchit sérieusement à devenir mère porteuse. En 2010, leurs chemins se croisent. Le hasard. Elle a l’air, au premier abord, d’une trentenaire qui n’a pas trop voulu grandir. Les yeux souvent baissés, un grand pull large qu’elle déforme en tirant nerveusement sur le bout de ses manches. Une timidité de façade ? Car c’est bien elle qui va faire le premier pas et, un jour de juin 2010, proposer à Emmanuel de porter son enfant. Un peu plus d’un an plus tard, Stéphanie donne naissance à Marius. Il a maintenant 6 ans.
« J’ai rencontré Emmanuel sur mon lieu de travail, explique Stéphanie. Après ma grossesse, on m’a donné un...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Présentation
  3. Copyright
  4. Titre
  5. Dédicace
  6. INTRODUCTION
  7. PARTIE 1 – Les témoignages
  8. PARTIE 2 – Les débats
  9. PARTIE 3 – L’état des lieux
  10. CONCLUSION
  11. REMERCIEMENTS
  12. BIBLIOGRAPHIE
  13. ACHEVÉ