I.A. La Plus Grande Mutation de l'Histoire
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I.A. La Plus Grande Mutation de l'Histoire

  1. 263 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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I.A. La Plus Grande Mutation de l'Histoire

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À propos de ce livre

Hier, la Silicon Valley était l'épicentre du progrès technologique.
Aujourd'hui, la Chine attire tous les regards.
Comment a-t-elle pu rattraper son retard en quelques décennies? Après avoir travaillé chez Apple, Microsoft et Google, Kai-Fu Lee est aujourd'hui l'un des investisseurs chinois N°1 en intelligence artificielle.
Dans cet ouvrage fascinant devenu un best-seller mondial, il raconte comment la Chine utilise ' le pétrole du 21e siècle ', c'est-à-dire les données générées par ses centaines de millions d'utilisateurs.
Grâce à une nouvelle génération d'entrepreneurs et à une course à l'innovation encouragée par les pouvoirs publics, la Chine invente un monde où l'intelligence artificielle se déploie dans toute la société, les restaurants, les hôpitaux, les salles de classe ou les laboratoires.
Kai-Fu Lee démontre à quel point l'IA va changer nos modes de vie et transformer l'économie, en privilégiant les plus agiles et les plus créatifs. Il propose d'utiliser les ressources financières considérables qui seront dégagées afin de soutenir les métiers où l'humain est irremplaçable: l'éducation, l'artisanat, les services à la personne. Un livre qui se lit d'une traite. Vous ne verrez plus jamais l'avenir comme avant. Né à Taiwan, Kai-Fu Lee a démarré sa carrière de chercheur en informatique dans la Silicon Valley en travaillant chez SGI, Apple, et Microsoft. En 2005 il est nommé président de Google China avant de fonder en 2009 la société d'investissement en capital-risque Sinovation Ventures. Il est l'auteur de plusieurs best-sellers en Chine et l'un des experts mondiaux les plus reconnus en intelligence artificielle.

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Informations

Éditeur
Les Arènes
Année
2019
ISBN
9791037500335

1

La Chine
et son « moment Spoutnik »

Avec ses lunettes à monture carrée, le jeune Chinois de 19 ans affalé sur son siège n’avait guère l’allure d’un héros taillé pour livrer l’ultime combat du genre humain. Cravate et costume noirs, chemise blanche, Ke Jie se massait les tempes, confondu par la difficulté du casse-tête qu’il avait sous les yeux. Lui dont l’assurance naturelle confinait parfois à la prétention s’agitait maintenant nerveusement dans son fauteuil en cuir. Transposé dans un autre décor, on aurait pu le prendre pour un de ces gamins de lycée privé qui se torturent les méninges face à un problème de géométrie insurmontable.
Il n’en était rien : en cet après-midi de mai 2017, Ke Jie était engagé dans une lutte acharnée contre l’une des machines les plus douées de la planète. AlphaGo, pure merveille d’intelligence artificielle, était le champion de Google, l’entreprise incarnant l’élite de la high-tech mondiale. Le champ de bataille ? Un plateau quadrillé de dix-neuf lignes horizontales sur dix-neuf lignes verticales et parsemé de petites pierres noires et blanches – le matériel nécessaire au jeu de go, dont l’apparente simplicité est trompeuse. Au cours d’une partie, les deux joueurs placent tour à tour leurs pierres sur le plateau, qu’on appelle goban, en tentant d’encercler celles de l’adversaire. Nul être humain ne surpassait Ke Jie dans cet art, mais le joueur auquel il se mesurait ce jour-là était d’un niveau inégalé.
Le go, dont l’invention remonterait à plus de deux mille cinq cents ans, est le doyen des jeux de société encore pratiqués de nos jours. Dans la Chine antique, il était considéré comme l’un des quatre arts que tout lettré se devait de maîtriser. Il était censé conférer à ses adeptes un raffinement intellectuel et une sagesse comparables à ceux que procure la pratique du zen. Contrairement aux échecs ou à d’autres jeux occidentaux qui reposent sur une tactique sommaire, le jeu de go est fondé sur un lent et patient effort de positionnement et d’encerclement, ce qui en fait une forme d’art, un véritable état d’esprit.
L’ancienneté du go n’a d’égale que sa complexité. Si neuf petites phrases suffisent pour en exposer les règles élémentaires, le nombre de positions qu’il est possible de prendre sur un tablier de go dépasse le nombre d’atomes que contient l’univers connu1. Dans ce jeu, les combinaisons sont si nombreuses que, pour la communauté des chercheurs en IA, concevoir un programme capable de battre le champion du monde a longtemps fait figure d’Everest infranchissable. L’ampleur même du défi décourageait toute tentative. Les poètes dans l’âme estimaient que les machines ne pourraient jamais acquérir cette caractéristique purement humaine : notre don quasi mystique pour le jeu. Les ingénieurs pensaient tout simplement que l’éventail des possibilités offertes par le goban était trop vaste pour les capacités de calcul d’un ordinateur.
Pourtant, ce jour-là, AlphaGo ne s’est pas contenté de battre Ke Jie ; il l’a mis en pièces, méthodiquement. Au cours de trois parties de plus de trois heures chacune, Ke Jie a jeté toutes ses forces dans la bataille. Il a successivement testé différentes approches : la prudence, l’agression, la défense, puis les coups aléatoires. Rien ne semblait fonctionner. AlphaGo ne lui laissait aucune ouverture. Au contraire : il resserrait lentement son étau autour de lui.

Vu de Pékin

Selon l’endroit d’où vous avez regardé ce duel, vous en avez probablement tiré des enseignements différents. Aux États-Unis, certains observateurs ont lu dans la victoire d’AlphaGo non seulement le triomphe de la machine sur l’homme, mais aussi celui de la technologie occidentale sur le reste du monde. Durant les deux décennies précédentes, les entreprises de la Silicon Valley avaient conquis les marchés internationaux. Quiconque voulait rester en contact avec ses amis et faire des recherches sur Internet devait passer par Facebook, Google et leurs semblables. Au passage, ces mastodontes du Web avaient écrasé des start-up locales aux quatre coins de la planète, de la France à l’Indonésie, conférant aux Américains une suprématie numérique à la hauteur de leur puissance militaire et économique dans le monde réel. Avec AlphaGo – création de la start-up d’IA britannique DeepMind, rachetée par Google en 2014 –, l’Occident semblait prêt à perpétuer sa domination à l’ère de l’intelligence artificielle.
Pour ma part, en regardant par la fenêtre de mon bureau tandis que Ke Jie disputait ses parties, j’ai vu un tout autre spectacle. Sinovation Ventures, ma société d’investissement en capital-risque, a son siège à Pékin, dans le quartier de Zhongguancun (prononcer « djong-gouan-soun »), qu’on surnomme souvent la « Silicon Valley chinoise ». Aujourd’hui, c’est là que bat le cœur de la communauté de l’IA en Chine. Pour les gens d’ici, la consécration d’AlphaGo a constitué un défi autant qu’une source d’inspiration. Elle a marqué en Chine le « moment Spoutnik » de l’intelligence artificielle.
Cette expression nous ramène au milieu du siècle dernier. En octobre 1957, l’Union soviétique a lancé et mis sur orbite le premier satellite artificiel. L’événement a eu sur le peuple et le gouvernement des États-Unis un impact psychologique aussi immédiat que profond. Cette preuve de la supériorité technologique soviétique a plongé l’opinion publique dans une véritable angoisse. On a vu certains Américains essayer de suivre la trajectoire du satellite dans le ciel nocturne, quand d’autres se branchaient sur la fréquence du Spoutnik pour recevoir les transmissions radio. De ce choc ont découlé plusieurs événements : la décision de créer la NASA (National Aeronautics and Space Administration), l’augmentation des subventions publiques allouées à l’enseignement des mathématiques et des sciences et, finalement, le vrai démarrage de la course pour la conquête spatiale. Cette mobilisation nationale a porté ses fruits douze ans plus tard, lorsque Neil Armstrong est devenu le premier homme à poser le pied sur la Lune.
AlphaGo pouvait déjà se vanter de quelques coups d’éclat. En mars 2016, lors d’une série de cinq parties face au légendaire joueur coréen Lee Sedol, l’ordinateur en avait remporté quatre. Cette confrontation, passée quasiment inaperçue aux États-Unis, avait rassemblé plus de 280 millions de téléspectateurs en Chine2. Du jour au lendemain, la fièvre de l’intelligence artificielle s’était emparée du pays. Si elle n’avait pas égalé l’ampleur de la réaction américaine au lancement du Spoutnik, elle avait allumé chez les acteurs de la high-tech chinoise une flamme qui ne s’est jamais éteinte depuis lors.
Quand tous les investisseurs, entrepreneurs et décideurs publics de Chine concentrent leurs efforts sur une seule industrie, ils peuvent faire trembler la terre. Les capital-risqueurs, les géants de la technologie et le gouvernement ont brusquement inondé les start-up de capitaux, provoquant une accélération sans précédent de la recherche et des créations d’entreprises. Puis les étudiants ont suivi le mouvement : ils se sont inscrits en masse dans des programmes de troisième cycle, sans perdre une miette des conférences données par les chercheurs à travers le monde, suivies en streaming sur leur smartphone. Soucieux de ne pas laisser passer leur chance, les fondateurs de start-up se sont démenés pour réorganiser leurs activités ou simplement moderniser la façade de leur entreprise – en d’autres termes, prendre le train de l’IA en marche.
Quant au gouvernement central, moins de deux mois après que Ke Jie eut déclaré forfait dans la dernière partie qui l’opposait à AlphaGo, il a présenté un plan ambitieux visant à développer le savoir-faire chinois en intelligence artificielle3. Réclamant des financements plus généreux, un soutien politique plus franc et une meilleure coordination nationale en faveur de l’IA, cette feuille de route fixe des objectifs de progression bien précis pour 2020 et 2025. L’ambition avouée est de faire du pays, d’ici à 2030, le leader mondial de l’innovation en intelligence artificielle sur le plan de la recherche, des technologies et de leurs applications. Les investisseurs n’ont pas hésité : dès 2017, ils ont commencé à engager des sommes record dans les start-up du secteur – un total qui s’est élevé à 48 % de l’ensemble des fonds de capital-risque au niveau mondial, dépassant pour la première fois la part représentée par les États-Unis4.

Un jeu qui change la donne

Ce brusque engouement des autorités chinoises pour l’intelligence artificielle s’explique par un changement de paradigme : la profonde redéfinition des rapports entre l’économie et l’IA. Pendant des décennies, cette science a connu des progrès constants, mais lents. Depuis peu, le rythme des avancées s’est fortement accéléré, offrant la possibilité de traduire toutes ces prouesses théoriques en applications concrètes dans le monde physique – ce que les programmeurs appellent des « cas d’utilisation ».
Les difficultés techniques qui surgissent lorsqu’on tente de fabriquer une machine capable de battre un humain au jeu de go n’ont pas de secrets pour moi. Pendant mon doctorat en intelligence artificielle à l’université Carnegie Mellon, mon directeur de recherches était Raj Reddy, pionnier de la discipline. En 1986, j’ai mis au point le premier logiciel à l’avoir emporté sur un membre de la délégation américaine au championnat du monde d’Othello – une version simplifiée du go qui se joue sur un plateau de huit lignes horizontales sur huit lignes verticales5. Même si c’était un véritable exploit pour l’époque, la technologie utilisée ne permettait encore de s’attaquer qu’à des jeux de société très simples.
Cela s’est vérifié en 1997 quand l’ordinateur Deep Blue d’IBM a vaincu le champion du monde d’échecs Garry Kasparov lors d’une partie qui fut baptisée le « baroud d’honneur du cerveau ». L’angoisse du public était palpable : serions-nous dès demain à la merci de robots despotes ? En réalité, hormis une hausse du cours de l’action IBM, le match n’a eu aucun impact durable sur nos existences. Les applications concrètes de l’intelligence artificielle étaient encore très rares, et les chercheurs n’avaient pas fait de découverte capitale depuis des décennies.
Pour remporter son match, Deep Blue avait eu recours à une méthode baptisée « attaque par force brute » ou « attaque par exhaustivité » : l’ordinateur teste toutes les combinaisons possibles jusqu’à trouver la bonne. Autrement dit, sa victoire reposait largement sur la puissance d’un matériel informatique spécifiquement programmé pour générer et évaluer rapidement les positions découlant de chaque coup. La conception du logiciel avait d’ailleurs requis la contribution de champions d’échecs en chair et en os, dont les instructions avaient permis de mettre au point une heuristique. Bien sûr, c’était une réussite technique impressionnante. Mais, encore une fois, la technologie utilisée, déjà ancienne, ne fonctionnait que pour des catégories de problèmes très limitées. Sorti du cadre géométrique extrêmement simple des soixante-quatre cases d’un échiquier, Deep Blue n’avait plus l’air si malin. Finalement, la seule personne qu’il menaçait de mettre au chômage, c’était le champion du monde d’échecs.
Cette fois-ci, il en va autrement. Bien que la confrontation entre Ke Jie et AlphaGo se soit déroulée sur le terrain exigu d’un plateau de go, elle est directement liée à une série de changements spectaculaires survenus dans le monde réel – à commencer par cette fièvre de l’intelligence artificielle que les parties d’AlphaGo ont provoquée en Chine, alimentant précisément la technologie qui a permis la victoire.
Le moteur d’AlphaGo, c’est le deep learning, l’« apprentissage profond », une approche révolutionnaire de l’intelligence artificielle qui démultiplie la puissance cognitive des ordinateurs. Aujourd’hui, des programmes utilisant le deep learning sont capables de surpasser les capacités humaines en matière de reconnaissance faciale ou vocale, et même de délivrer des prêts bancaires. Pendant des décennies, on a annoncé la révolution de l’intelligence artificielle pour les cinq années suivantes – comme si l’horizon s’éloignait à mesure qu’on s’en approchait. Le développement récent du deep learning a tout changé. La révolution à venir va se traduire par de formidables gains de productivité, mais elle va aussi mettre sens dessus dessous le marché du travail, avec des conséquences sociales et psychologiques profondes sur les individus à mesure que l’IA, dans des secteurs très variés, s’emparera d’emplois jusqu’alors occupés par des humains.
En assistant à la déconfiture de Ke Jie face à AlphaGo, j’ai été saisi d’effroi. Les robots tueurs intelligents qui peuplaient les prédictions de certains technologues célèbres ne m’inquiétaient pas. Je craignais les démons bien réels que le chômage de masse et son cortège de troubles sociaux feraient naître. Car nos emplois vont être menacés à brève échéance, bien plus tôt que ne l’avaient prévu la plupart des experts. Ce cataclysme va frapper les cadres comme les ouvriers, les salariés hautement qualifiés comme les travailleurs faiblement instruits. Le jour où AlphaGo a livré son combat magistral contre Ke Jie, le deep learning a détrôné le meilleur joueur humain de go de tous les temps. Bientôt, la même technologie dévoreuse d’emplois va faire son entrée dans une usine ou un immeuble de bureaux tout près de chez vous.

Une lueur derrière l’ordinateur

Cette mémorable partie de go m’a pourtant laissé entrevoir un espoir. Au bout de deux heures et cinquante et une minutes de jeu, Ke Jie s’est retrouvé dans une impasse. Il avait fait tout ce qu’il pouvait, mais il savait que cela ne suffirait pas. Tandis qu’il se tenait recroquevillé, la tête à quelques centimètres au-dessus du plateau, son visage s’est crispé et l’un de ses sourcils s’est mis à tressaillir. Il a rapidement compris qu’il lui serait impossible de contenir plus longtemps son émotion. D’un geste furtif, il a retiré ses lunettes et, du dos de la main, a essuyé ses larmes. L’instant fugace où sa détresse a affleuré la surface n’a échappé à personne.
Les larmes de Ke Jie ont déclenché une immense vague de sympathie et de soutien. Durant ces trois parties, le jeune homme était passé par toute la gamme des émotions humaines : à l’aplomb avaient succédé l’angoisse, la frayeur, l’espoir et, finalement, la douleur...

Table des matières

  1. Couverture
  2. Présentation
  3. Copyright
  4. Titre
  5. Dédicace
  6. Préface à l’édition française
  7. Introduction
  8. 1. La Chine et son « moment Spoutnik »
  9. 2. Dans l’arène des copieurs
  10. 3. L’Internet chinois : bienvenue dans une autre dimension
  11. 4. Le conte de deux pays
  12. 5. Les quatre vagues de l’intelligence artificielle
  13. 6. Les utopies, les dystopies – et la crise bien réelle
  14. 7. Les leçons du cancer
  15. 8. L’IA et les hommes : imaginer une coexistence réussie
  16. 9. L’histoire universelle de l’IA
  17. Remerciements
  18. L’auteur
  19. Notes
  20. Achevé