Pourquoi se référer au passé ?
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Pourquoi se référer au passé ?

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Pourquoi se référer au passé ?

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Construction de mythes, évocation d'un âge d'or, interprétation à des fins de propagande... Quand le passé est convoqué, c'est souvent pour légitimer, figer et déformer des moments d'histoire, dont l'usage au présent vise à servir une cause.Cet ouvrage, fruit d'un travail collectif mené depuis plusieurs années, tente de penser une autre relation au passé à l'aide de la notion de « référence »: il s'agit de saisir la façon dont le passé est parfois « réactivé » par des sujets qui se le réapproprient. Moteur d'action et opérateur de pensée, ce passé dynamique, inachevé, subsiste en effet dans les mémoires « souterraines » d'un collectif, où, à la fois rêvé et perdu, il attend son actualisation.Chaque chapitre du livre analyse un moment historique à la lumière de cette notion de référence: la Grande Famine en Irlande entre 1845 et 1851, les destructions d'églises pendant la Commune, le coup d'État du 6 septembre 1930 en Argentine, la notion de « martyr » dans la Tunisie contemporaine, celle de « peuple » en Italie au milieu du XIVe siècle...Élaborer la notion de référence, c'est repenser notre façon de faire de l'histoire: c'est restituer à la connaissance du passé tout son potentiel critique, qu'il s'agisse d'y trouver ces références nécessaires à l'action, ces possibles contenus dans les expériences d'hier, ou d'échapper au tragique re-jeu du passé.

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Informations

ISBN
9782708251212
Sujet
Storia

Contrepoint
La modernité, entre utopie et idéologie

Michèle Riot-Sarcey

À ne considérer que l'usage du passé, l'apparente continuité entre les XIXe et XXe siècles est trompeuse. Car elle voile ce qui se joue dans le soubassement des mouvements de l'histoire, tandis que la référence aux événements discontinus du passé nous en éclaire le sens.
Le XIXe siècle se découvre à l'ère de la science, mais l'horizon des possibles attire le regard des contemporains du côté des rêves et marque durablement le siècle du sceau de l'utopie. En effet, longtemps la promesse d'un bonheur commun d'où personne ne serait exclu mobilise les esprits. Pourtant, insensiblement, la puissance de l'esprit positif semble « libérer » le XXe siècle « des illusions du passé ». Le progrès a fait son œuvre. Les discours scientifiques se multiplient jusqu'à l'avènement de la force des choses qui balaie « les chimères du passé ». Ainsi, le rejet des utopies d'hier, au nom de la rationalité scientifique, favorise le développement des idéologies sur le fond desquelles les certitudes du devenir humain se déploient. Or, paradoxalement, cette forme de clôture de la pensée reste totalement impuissante face aux catastrophes successives dont l'empreinte signe le siècle. Le temps présent en garde, en profondeur, les stigmates.
Afin de comprendre ces modes de penser dont nous sommes les héritiers, il nous faut saisir les conditions dans lesquelles les deux paradigmes – l'utopie comme promesse, et l'idéologie comme programme – agissent au sein de réalités à la fois mouvantes et conflictuelles. L'interaction constante entre passé, présent et futur introduit une confusion entre l'héritage du passé et l'usage des idées dont la formation d'origine se dérobe à la connaissance. De la référence fondatrice à l'usage instrumental du passé, la distinction, pourtant décisive pour la compréhension de l'histoire, est parfois ténue. Factuelle ou symbolique, inattendue, la référence intervient, telle une balise incontournable, pour rappeler les espérances d'autrefois ou les significations traumatiques d'un moment dont l'aujourd'hui aurait perdu le sens. Il en conserve néanmoins une trace indéchiffrable qui, ponctuellement, se révèle à la faveur d'une réminiscence singulière ou collective. L'usage du passé, inversement, toujours conscient, est une pratique de contemporains qui, sous couvert d'interprétation, tend à légitimer une orientation politique. C'est ainsi qu'au cours de l'histoire, les autorités n'ont cessé d'interpréter le passé à la mesure des nécessités du gouvernement des hommes.
Afin de distinguer l'esprit du temps qui traverse les deux derniers siècles, je vais tenter d'appréhender l'utopie à l'œuvre au XIXe siècle à travers la référence au passé dont, en partie, se nourrit le mouvement de l'histoire. Et sous forme d'hypothèse, envisager la prévalence de l'idéologie au XXe siècle, par l'usage d'un passé repensé. Ce qui ne signifie pas, cela s'entend, que l'idéologie soit absente du XIXe siècle – celui-ci en est même le terreau –, ni que l'utopie ait été effacée au XXe siècle – son esprit resurgit ponctuellement. Il s'agit simplement de faire entendre un courant dominant qui marque chacun des siècles.
Si nous acceptons l'hypothèse d'une utopie associée à la référence par sa dimension messianique, il faut admettre que la critique du réel, où l'utopie puise, a contrario, son idéal, est constitutive de son émergence. Présente sous la forme de fable ou de « doctrine », l'utopie n'est pensable que dans l'historicité de sa production textuelle. En écho à Thomas More, son créateur, l'Utopia est une pensée du devenir. Elle ne se présenterait pas « comme une solution parfaite et donc comme un modèle qui signifierait la fin de l'histoire », mais bien plutôt comme « la recherche sans fin de l'ordre politique juste et bon, exposée en tant que telle à une invention et réinvention permanente{677} ».
C'est tout autrement que l'utopie nous a été transmise ! Hantés par le spectre des « théories socialistes » – rendues responsables des insurrections –, les hommes d'ordre sont parvenus à inverser le sens de l'utopie en lui ôtant la part de rêve et d'imagination créatrice qu'elle reçut en héritage. La postérité n'a gardé que son enveloppe chimérique. Le retour sur l'écriture « oblique » d'Utopia de Thomas More permet d'en comprendre le sens, à la fois déstabilisateur et subversif. Ici, je renvoie aux travaux irremplaçables de Miguel Abensour.
Pour notre propos, commençons par donner à lire un écrit rarement associé à ce qu'il est convenu d'appeler une pensée utopique. À distance d'une vision classique d'un libéralisme triomphant en son temps, Edgar Quinet cherche à faire entendre, en 1845, l'irréversibilité de la source référentielle que serait la Révolution française, vue comme moment fondateur des temps modernes.
On a vu de quelles sources éloignées part la Révolution française ; elle ne tombe pas seulement des mains du dix-huitième siècle ; elle descend des hauteurs de tout un passé. Aussi, depuis un demi-siècle, malgré les apparences, ne s'est-elle pas arrêtée une heure. Lorsqu'elle trouve un obstacle, elle creuse la terre, et va surgir un peu plus loin. Sous la Restauration, les écrivains, les philosophes doctrinaires disaient que le péril était passé, qu'avec un peu de prudence, on s'assurerait que la démocratie a vidé sa coupe. Mais, avec l'instinct de sa propre conservation, la royauté absolue entendait bouillonner et trembler le sol sous ses pas [...]. En effet, après 1830, tout le monde a vu sortir de terre le fleuve enseveli ; seulement il était changé. De l'abîme où il avait été contenu, il apportait une question que personne ne connaissait, la guerre des classes, l'inimitié de la bourgeoisie et du peuple [...]. La Révolution,...

Table des matières

  1. Page de titre
  2. Sommaire
  3. Avant-propos
  4. Introduction La référence au passé Claudia Moatti, Michèle Riot-Sarcey
  5. Partie I Les figures de la référence
  6. Partie II La référence en révolution
  7. Partie III La référence en débat
  8. Contrepoint La modernité, entre utopie et idéologie Michèle Riot-Sarcey