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La préparation d’une formation
LES BESOINS DE FORMATION : UNE NOTION CONTROVERSÉE
Bien des formateurs se sont lancés dans des enquêtes pour analyser les besoins de formation et ils ont été déçus. On a beau enquêter par des questionnaires, multiplier les interviews, il est bien difficile de découvrir et de décrire cet objet que serait un « besoin de formation ». Parfois, on se console en déclarant que le besoin n’est pas conscient, et l’enquête dégénère en opération de marketing. En fait, c’est le concept de besoin de formation qui n’est pas clair. Nous proposons de distinguer trois cas de figure bien différents.
L’analyse des besoins de l’organisation
La première démarche consiste à étudier les situations professionnelles. On peut commencer par une réflexion sur les fonctions exercées : que doit faire le titulaire de l’emploi étudié ? Que doit-il organiser, exécuter, contrôler ? Quelles méthodes, quels outils doit-il maîtriser ? Quelle connaissance doit-il avoir de son environnement ? À partir de cette analyse et de la connaissance des personnes qui occupent ou vont occuper ces fonctions, on peut identifier les savoirs et les comportements qu’il faudrait acquérir pour que l’organisation fonctionne comme prévu. Vous pouvez ainsi parvenir à formuler des objectifs de formation décrivant ce que l’apprenant saura faire après l’apprentissage.
Arrivé à ce point, il faut être très clairvoyant sur la situation professionnelle examinée. Étant donné un travail à faire dans une fonction et un collaborateur exerçant cette fonction, on se posera deux questions élémentaires : sait-il le faire ? Veut-il le faire ? La formation peut être une bonne réponse dans une situation où il ne sait pas mais veut le faire ; en revanche, c’est une très mauvaise solution si l’on est en présence de quelqu’un qui ne sait pas le faire et ne veut pas le faire ; ou bien encore s’il sait le faire et ne veut pas le faire. La formation ne doit pas être la béquille d’un management déficient ou d’une négociation bâclée. Pas d’acharnement pédagogique pour les cas qui méritent un autre traitement.
Voici plus précisément trois approches pour ces analyses.
L’analyse du travail, très utile pour l’adaptation à un nouvel emploi
Elle vise à spécifier les objectifs du travail en termes de capacités observables et à décrire le système dans lequel une personne est en interaction avec son environnement technique et humain. Différents procédés sont utilisés pour recueillir et analyser l’information : l’entretien avec celui qui organise la formation, l’entretien annuel avec le responsable hiérarchique, l’observation directe (ou filmée) du travail, la construction d’un tableau de compétences avec ceux qui réalisent le travail, l’analyse des résultats et des incidents critiques, l’expérimentation du travail par ceux qui l’analysent. Ces méthodes se complètent, mais l’entretien est la plus courante.
L’analyse des besoins pour un projet
Commencer par avoir une bonne description du projet : la finalité de ce projet, les services et personnes concernés, les résultats attendus, les contraintes à prendre en compte, le jalonnement des opérations… Examiner les conséquences de ce projet sur l’organisation : les activités nouvelles ou modifiées. En déduire les conséquences sur les emplois concernés et sur les compétences requises. Une analyse complémentaire concerne les moyens nécessaires pour mener à bien le projet : nouvelles procédures, moyens matériels, système d’information, compétences nécessaires pour cette mise en œuvre.
L’analyse de la performance
Les questions qui suivent aident à faire cette analyse.
Quels sont les résultats professionnels attendus ? Les normes de production sont-elles connues, acceptées, respectées ?
Quel est l’écart entre la performance actuelle et la performance souhaitée ? La performance souhaitée a-t-elle été obtenue dans le passé et dans quelles conditions ?
Quelles sont toutes les personnes impliquées dans le processus de travail contribuant au résultat ? Quelles sont les causes des faiblesses de performances (modes d’organisation, moyens matériels et financiers, système d’information, moyens humains, manque de motivation, déficit de compétences…) ?
Si c’est un problème de compétence, à quoi verra-t-on que la compétence est acquise ? Quelles sont les autres conditions à remplir pour obtenir les résultats de performance ?
La clarification de la demande
Les attentes des personnes ne correspondent pas nécessairement à une demande de formation. La demande n’est pas nécessairement le besoin. Il s’agit donc de clarifier et d’analyser la demande. Travail délicat car il peut exister des décalages entre les demandes exprimées par des personnes et celles de leur entreprise ou de leur hiérarchie. Les interrogations qui suivent sont proposées comme fil conducteur de cette réflexion.
Qui exprime la demande ? Est-ce pour lui-même ou pour d’autres ? Quelle est sa représentativité ? Qui est le commanditaire ?
La demande est-elle précise ou floue ? Porte-t-elle sur le résultat à atteindre ou sur les moyens à mettre en œuvre ? Est-elle justifiée et fondée sur un diagnostic de la situation ? Est-elle réaliste ?
Quels sont les différents acteurs concernés par cette action ? Quelle concertation et quelles validations prévoir avant de faire des choix ?
La formation est-elle la réponse la plus appropriée ? Doit-on mener des actions complémentaires ? Ce projet est-il cohérent avec les priorités et avec d’autres actions en cours ou envisagées ?
La création d’une dynamique d’apprentissage
Les deux démarches présentées ci-dessus ne permettent pas d’examiner toutes les situations. Prenons le cas d’une entreprise qui se prépare à des mutations importantes : changement de technologie, reconversion industrielle, organisation plus flexible. Les transformations nécessaires ne sont pas toujours prévisibles à moyen terme ; parfois, il est indispensable de se préparer à changer d’activité sans savoir précisément quels vont être les besoins de la future organisation ; dans ce cas, la réflexion sur les fonctions et les compétences indispensables n’est pas possible. Par ailleurs, on ne peut pas réaliser une analyse des demandes et des désirs car les collaborateurs ont une idée très floue de leur avenir ; par conséquent, ils ne construisent pas de projet. Et pourtant, on sent bien la nécessité de préparer les salariés à ces changements, de développer les ressources humaines. Il faut alors adopter une troisième voie ; la démarche que nous préconisons consiste à explorer de quelle façon susciter une dynamique d’apprentissage pour savoir s’adapter.
En fait, il s’agit dans un premier temps d’imaginer une action de formation qui aura surtout pour effet de donner le goût d’apprendre, d’habituer les personnes à se former. Ultérieurement, on pourra concevoir une préparation à tel ou tel métier, mais il est bon de commencer par remettre en marche les mécanismes de l’apprentissage intellectuel.
De quelle façon ? Les moyens utilisés peuvent être variés. Souvent on imagine une formation de base, par exemple une ouverture ...