JOUR 1
La relation sécure ou les vertus de l’attachement
« Une relation est un miroir dans lequel vous pouvez vous découvrir1. »
Jiddu Krishnamurti
Le premier attachement avec la personne qui s’occupe de nous, en général notre mère, nous permet, dès les premiers mois de la vie, d’éprouver en nous un sentiment de sécurité, de confiance en soi et en l’autre. Cette personne nous aide aussi à développer notre capacité à nous apaiser intérieurement. Une fois cette sécurité bien en place, nous pouvons commencer, vers 8 mois, à nous éloigner peu à peu de notre « figure d’attachement » et à explorer en toute confiance notre environnement, ayant forgé une sécurité intérieure.
Ces premiers liens influenceront ceux que nous formerons par la suite, même à l’âge adulte, et en particulier le lien amoureux.
Lien humain et sentiment de sécurité
Naissance à l’amour
Noé est un petit bébé de quelques mois. Sa maman, Aurélie, vient de le nourrir et de le changer. Il est repu et apaisé. Dans les bras d’Aurélie, il gigote, agite ses bras et ses jambes de plaisir et sa maman gazouille avec lui ; il fixe le visage de sa mère et semble répondre à ses sourires. Elle lui chantonne une chanson qu’elle invente pour lui, ils sont seuls au monde.
Adulte, Noé rencontre une femme dont il tombe amoureux. Il se sent heureux, libre d’exister avec elle comme il le souhaite ; il aime sentir sa proximité tout en se sentant en sécurité si elle s’éloigne quelques jours pour son travail. Il garde de son premier lien avec sa mère une sérénité et une sécurité intérieure qui l’accompagnent encore aujourd’hui.
Si nous sommes spectateurs de cette scène, nous sommes les témoins d’une communication subtile mais si intense que notre seule présence semble intrusive. Vous avez déjà ressenti cela, n’est-ce pas ? Nous avons tous une personne qui nous a porté pendant neuf mois ou qui s’est occupée de nous lorsque nous étions bébé. Ce premier lien, nous ne l’oublierons jamais, il est inscrit dans notre chair.
Ce confort émotionnel que Noé ressent est créé par la bulle relationnelle qu’il forme avec sa mère lors de ces précieux instants. Cette bulle, presque palpable, nourrie par ces échanges de sourires, de vocalisations, de regards et de gestes tendres, restera à jamais gravée en lui. Ce sont ces réminiscences de bien-être, déjà mémorisées dans notre cerveau, qui permettent une connexion heureuse à un nouveau lien amoureux. Le bien-être ressenti par le petit bébé Noé est intense, et il recherchera, adulte, à activer les mêmes connexions neuronales. On le voit donc : tout ce qui a été ressenti dans la petite enfance s’imprime dans notre cerveau sous forme de sensations. Elles sont activement recherchées et reconnues lorsqu’elles surviennent.
C’est dans le lien qu’un bébé va se développer, faire l’expérience de ses premières communications (d’abord non verbales), apprendre à s’apaiser, à faire confiance, à être compris, entendu, son image reflétée par celui de sa mère. C’est dans ce lien primordial et essentiel que la personnalité de l’enfant va se construire et évoluer. Noé, dans sa relation avec Aurélie, nourrie de sécurité et d’amour, va pouvoir se tourner vers d’autres expériences, oser d’autres liens, développer des relations stables et sereines.
Le coin des sciences
Notre incroyable cerveau
L’enfant naît avec 100 000 milliards de neurones, qui ne sont alors pas connectés les uns aux autres. C’est grâce à la première relation que tous les circuits se mettent en place petit à petit. On sait maintenant que le contact physique, la voix, le toucher, une bonne écoute des besoins de l’enfant et la présence de la mère vont lui permettre de construire des réseaux qui transmettent l’information du cerveau au reste de l’organisme. Cela lui permet aussi d’apprendre à gérer le stress et les émotions fortes. Le fonctionnement cognitif et affectif de l’enfant va se développer au sein de ce creuset relationnel.
Liens d’attachement et relations sécures
Ces premiers liens sont essentiels pour comprendre la façon dont nous évoluons dans notre vie car ils nous permettent de développer :
• le sentiment d’être en sécurité, de développer une sorte de paix intérieure ;
• la confiance en soi, dans les autres et dans le monde, car la mère va répondre de manière adéquate et consistante aux appels et aux besoins de son enfant ;
• la capacité de nous apaiser et de réguler nos émotions car la mère en calmant son bébé crée des circuits d’apaisement dans son corps et son cerveau ;
• la liberté et le désir d’explorer l’environnement, c’est-à-dire de devenir autonome, car la mère va encourager et faciliter l’exploration tout en étant là si son enfant a besoin d’être rassuré.
Tous ces atouts vont contribuer à créer une bonne résilience aux stress et aux difficultés inévitables qui jalonnent nos vies.
Arrêtons-nous quelques instants sur les qualités sécures. Elles sont importantes car elles vont nous permettre de modéliser une relation saine et autonome. Vous les connaissez tous : le boulanger toujours de bonne humeur, souriant et heureux de faire son pain ; le voisin qui a le cœur sur la main et est toujours prêt à vous aider, sans pour autant être intrusif ; l’amie à l’écoute qui sait entendre et être là : de chaque moment passé avec elle, on ressort grandi, apaisé et compris ; le conjoint patient et décontracté qui initie le mouvement mais sait aussi suivre et s’adapter car, pour lui, les choses ne sont pas compliquées, c’est si rassurant !
Le coin de l’expert
Ces relations d’attachement se maintiennent-elles tout au long de notre vie ?
En général oui, mais certains événements peuvent les transformer. Entre 70 et 75 % des personnes gardent le même style d’attachement ; 20 à 25 % changent.
Qu’est-ce qui nous prédispose à un style plus qu’à un autre ?
Il y a une convergence de facteurs : certaines dispositions génétiques, notre constitution physique, notre tempérament, des expériences intra-utérines, des facteurs émotionnels chez la mère pendant la gestation, des dispositions innées et d’autres acquises au cours du temps.
Pouvons-nous transformer notre style d’attachement ?
La bonne nouvelle c’est que oui ! Un partenaire « sécure » va stabiliser un attachement « insécure ». En revanche, des événements traumatiques exceptionnels peuvent aussi déstabiliser un attachement « sécure ».
Comment reconnaître un partenaire sécure
• Il peut facilement communiquer ses besoins.
• Il perçoit et répond à ceux de son conjoint, son collègue, son ami.
• Il ne cloisonne pas ses sphères d’activités.
• Il gère bien les conflits et est capable de faire des compromis.
• Il pardonne facilement et rapidement.
• Il a une grande souplesse mentale.
• Il a une bonne communication : claire,...