Dante et Beckett
Ă propos de ce livre
Samuel Beckett n'a cessĂ© de lire Dante depuis ses annĂ©es d'Ă©tude Ă Dublin jusqu'Ă sa mort, en 1989. Sa lecture n'est pas critique: elle est une source, une Ă©nergie qui apparaĂźt, dissĂ©minĂ©e dans ses livres, avec une rĂ©gularitĂ© exemplaire. Dans le dessin de Botticelli qui illustre le chant IV du Purgatoire, Virgile, appuyĂ© solidement sur sa jambe droite, Ă©bauche le chemin Ă suivre. Sa main levĂ©e pointe le sommet de la montagne du Purgatoire et, au-delĂ , le Paradis de BĂ©atrice. Dante, dont le corps repose sur le pied gauche, regarde, semble-t-il, Belacqua, le nĂ©gligent de l'Antipurgatoire, que l'on distingue prostrĂ© devant quatre corps nus. Il est assis, les genoux entre les bras, dans cette posture qui retiendra durablement Beckett. BĂ©atrice absente, Virgile qui indique le sens de la montĂ©e, Dante encore indĂ©cis et Belacqua tout Ă soi-mĂȘme â telle est la conjonction qui coordonne la souverainetĂ© de ces deux noms, Dante et Beckett. La lecture de Beckett opĂšre un dĂ©placement de la Divine ComĂ©die. Les coups et les cris que Dante entend derriĂšre la porte de son Enfer ne finissent pas. Ni le Purgatoire ni le Paradis ne peuvent les apaiser. Ă frĂšre, dit Belacqua Ă Dante, monter lĂ -haut, qu'importe? Une question qui traverse ce livre, comme les deux pĂŽles d'un mĂ©ridien, et qui renouvelle notre lecture de Beckett. Bien que de nombreuses Ă©tudes aient dĂ©jĂ traitĂ© du rapport entre Dante et Beckett, aucune encore n'a proposĂ© un inventaire exhaustif des emprunts de l'un Ă l'autre ni abordĂ© dans son ensemble cette seconde grande influence, la premiĂšre Ă©tant celle de James Joyce.